Quand un empereur devient chrétien. La conversion de Constantin, 1700 ans après Par Charles Vaugirard, 11 décembre 2013[size][url][/url]2013 est l’année du 1700ème anniversaires de l’Edit de Milan, par l’empereur Constantin, qui mit fin aux persécutions des chrétiens sous l’Empire Romain.[/size]
313 marque un grand retournement de l’histoire. Auparavant, le christianisme était une religion pourchassée. Un proche prédécesseur de Constantin, Dioclétien, a été l’auteur d’une des pires persécutions de l’Empire, encore plus meurtrière que celle de Néron. Un très grand nombre de martyrs que l’Eglise fête ont été suppliciés sous son règne.
L’édit de Milan est intimement lié à la conversion de Constantin. Evénement qui peut paraître surprenant et qui serait dû à un phénomène mystique : Constantin, alors qu’il était en guerre contre un rival, a vu dans le ciel une croix, puis il a reçu une vision lui disant qu’il gagnerait s’il apposait un signal chrétien sur les étendards de sa légion. [size][url][/url]
In hoc signo vinces lui aurait dit la vision :
« Par ce signe tu vaincras » et le signe était le monogramme grec du Christ, le chrisme. Les historiens sont partagés sur les causes réelles de sa conversion. Certains défendent l’idée d’un choix politique devant le succès du christianisme dans l’Empire. Cette thèse n’est pas récente et elle était souvent évoquée au XIXéme siècle, y compris par des historiens catholiques comme Frédéric Ozanam.[/size]
Actuellement, cette thèse reste très discutée car les découvertes du XXéme siècle ont démontrées que le christianisme était encore très minoritaire en 313. La conversion de Constantin peut donc difficilement être un acte d’opportunisme politique. Mais surtout, le fait est que le récit de la vision figure dans la “Vie de Constantin” d’Eusèbe de Césarée. L’auteur a connu personnellement cet empereur et il affirmait tenir cette information de sa bouche.
L’événement a une portée exceptionnelle : sa conversion va conditionner le fondement de la future Europe chrétienne. La romanité constantinienne est la matrice de la civilisation européenne. Mais cela ne s’arrête pas à la politique : Constantin a été l’organisateur du Concile de Nicée qui réorganise l’Eglise et qui, surtout, devait trancher la question de l’arianisme. Autrement dit, ce Concile devait répondre à cette question essentielle : Jésus est-il Dieu ? Les ariens considéraient en effet Jésus comme un homme sans divinité.
Le concile de Nicée a permis à l’Eglise de consolider sa théologie. C’est un des plus importants concile de l’histoire de l’Eglise car il a reconnu la divinité du Christ et invalidé l’hérésie arienne. Mais à court terme il a peu été suivi. Il n’a pas empêché l’hérésie arienne de se répandre et même de supplanter le christianisme orthodoxe pendant quelques décennies. Constantin lui-même aurait fini sa vie arien. La crise de l’arianisme s’est terminée plusieurs décennies plus tard.
Mais cet événement nous interpelle sur deux points : il démontre la puissance de la conversion d’un responsable politique, et il interroge sur la question de l’Etat et de ses liens avec l’Eglise.
Quand le Prince devient chrétien
Les conséquences de la conversion d’un souverain sont toujours très importantes. La conversion de Constantin a permis la fin des persécutions. Nous pouvons la comparer à beaucoup d’autres conversions de princes païens : la plus célèbre est celle de Clovis qui est à l’origine de ce qui deviendra la France chrétienne. Il y a beaucoup d’autres exemples dans le reste de l’Europe et du monde. Quand un souverain devient chrétien, tous ses officiers suivent, tous les cadres de la société deviennent chrétiens, les lois sont validées par l’Eglise et ainsi la société est officiellement christianisée.
Cela interroge : nous pourrions trouver cela positif. Après tout, la civilisation européenne doit beaucoup à ces princes chrétiens qui ont protégé l’Eglise et permis à l’Evangile de prospérer. Il y a même eu, des siècles après, quelques saints souverains : Saint Louis, mais aussi Saint Wenceslas, Saint Edouard le confesseur, Saint Henri, Saint Erik, Sainte Elizabeth de Hongrie et, plus proche de nous, le bienheureux Charles 1er d’Autriche. Un cadre politique favorable à l’Eglise peut porter de nombreux fruits… Mais pas seulement, car on ne peut nier qu’il existe certains effets pervers.