voila philippe.
*** w85 15/7 p. 31-32 Questions des lecteurs ***
Le passage de II Jean 10, où il est dit de ne pas recevoir chez soi ni même de saluer certaines personnes, ne concerne-t-il que les individus qui ont défendu de fausses doctrines?
Dans le contexte, il est question de “beaucoup de trompeurs” qui sont sortis de la congrégation chrétienne, de “gens qui ne confessent pas Jésus Christ comme venant dans la chair”. (II Jean 7.) L’apôtre Jean donnait des instructions sur la façon dont les chrétiens de l’époque devaient traiter tout individu qui niait que Jésus ait jamais existé ou qu’il fût le Christ et le Rédempteur. L’apôtre écrivit: “Si quelqu’un vient à vous sans apporter cet enseignement, ne le recevez pas chez vous et ne lui dites pas de salut. Car celui qui lui dit un salut s’associe à ses œuvres méchantes.” (II Jean 10, 11). Cependant, d’autres textes de la Bible montrent que cette instruction a une application plus étendue.
À une certaine époque, il y avait parmi les chrétiens de Corinthe un homme qui pratiquait l’immoralité. Aussi l’apôtre Paul leur écrivit-il “de cesser de fréquenter quelqu’un qui porte le nom de frère et qui est fornicateur, ou avide, ou idolâtre, ou insulteur, ou ivrogne, ou extorqueur, et de ne pas même manger avec un tel homme”. (I Corinthiens 5:11.) Cette directive ne concernait-elle que ceux qui avaient été exclus parce qu’ils avaient commis les transgressions très graves mentionnées ici?
Non, car Révélation 21:8 montre que les meurtriers, les menteurs et ceux qui pratiquent le spiritisme méritent eux aussi la seconde mort s’ils ne se repentent pas. Le conseil donné en I Corinthiens 5:11 se serait certainement appliqué avec autant de force à d’anciens chrétiens qui auraient commis ces transgressions-là. Jean écrivit également que certains “sont sortis de chez nous, mais ils n’étaient pas des nôtres; car, s’ils avaient été des nôtres, ils seraient demeurés avec nous. Mais ils sont sortis pour que soit manifesté que tous ne sont pas des nôtres”. (I Jean 2:18, 19.) Jean ne dit pas que les individus dont il parle ici avaient été exclus pour avoir commis de graves péchés. Il est possible que quelques-uns d’entre eux se soient tout simplement retirés, affirmant qu’ils ne voulaient plus faire partie de la congrégation parce qu’ils étaient en désaccord avec certaines de ses doctrines. D’autres s’étaient peut-être lassés et avaient renoncé à poursuivre la course chrétienne. — I Corinthiens 15:12; II Thessaloniciens 2:1-3; Hébreux 12:3, 5.
Évidemment, si un frère avait commencé à s’égarer dans la voie du péché, des chrétiens mûrs s’étaient efforcés de l’aider (Galates 6:1; I Jean 5:16). S’il avait des doutes, ils avaient tenté de ‘l’arracher du feu’. (Jude 23.) Même s’il était devenu inactif ou s’il avait cessé de fréquenter les réunions et de participer au ministère public, des chrétiens spirituellement forts avaient fait des efforts pour l’aider à se rétablir. Peut-être leur avait-il dit qu’il ne voulait pas être ennuyé par la nécessité d’être présent dans la congrégation, montrant ainsi une foi et une spiritualité bien faibles. Les frères ne l’avaient pas importuné sans cesse, mais ils lui avaient probablement rendu une visite amicale de temps à autre. De tels efforts patients, miséricordieux et pleins d’amour reflétaient le souci de Jéhovah qui souhaite qu’aucun de ses adorateurs ne se perde. — Luc 15:4-7.
En revanche, les propos de Jean indiquent que certains ne sont pas seulement faibles spirituellement et inactifs, mais qu’ils vont plus loin. En réalité, ils renient la congrégation de Dieu. Par exemple, quelqu’un a pu s’opposer ouvertement au peuple de Dieu en affirmant ne plus vouloir faire partie de la congrégation. Il a peut-être même renoncé formellement à sa foi et l’a fait savoir dans une lettre. Évidemment, la congrégation a accepté sa décision de se retirer volontairement. Mais alors, comment allait-elle ensuite traiter avec cette personne?
Jean écrit: “Quiconque va de l’avant et ne demeure pas dans l’enseignement du Christ n’a pas Dieu. Celui qui demeure dans cet enseignement, c’est lui qui a et le Père et le Fils. Si quelqu’un vient à vous sans apporter cet enseignement, ne le recevez pas chez vous et ne lui dites pas de salut.” (II Jean 9, 10). De telles paroles s’appliquaient sans aucun doute à un individu qui était devenu apostat en s’associant à une fausse religion ou en répandant une fausse doctrine (II Timothée 2:17-19). Mais qu’en est-il de ceux à propos de qui Jean dit qu’ils “sont sortis de chez nous”? Les chrétiens du premier siècle savaient qu’ils ne devaient pas fréquenter un pécheur exclu ou un apostat actif. Toutefois, adoptaient-ils la même attitude envers quelqu’un qui n’avait pas été exclu, mais qui avait renoncé volontairement à suivre la voie chrétienne?
L’Auxiliaire pour une meilleure intelligence de la Bible montre que le terme “apostasie” vient d’un mot grec qui signifie littéralement “‘se tenir éloigné de’, et [qui] a le sens de ‘désertion, défection ou rébellion’”. Cet ouvrage ajoute: “Dans leurs avertissements, les apôtres citent quelques-unes des causes de l’apostasie: l’absence de foi (Héb. 3:12), le manque d’endurance dans les persécutions (Héb. 10:32-39), l’abandon des justes principes moraux (II Pierre 2:15-22), l’attention accordée aux ‘paroles artificieuses’ de faux enseignants et aux ‘déclarations inspirées trompeuses’ ([...] I Tim. 4:1-3) (...). Ceux qui abandonnent ainsi volontairement la congrégation chrétienne font désormais partie de ‘l’antichrist’. (I Jean 2:18, 19.)”
L’individu qui s’était volontairement et formellement retiré de la congrégation correspondait tout à fait à cette description. En reniant la congrégation de Dieu et en abandonnant la voie chrétienne, il se faisait apostat. Un chrétien fidèle n’aurait certainement pas voulu fraterniser avec un apostat. Même s’il était l’ami de ce chrétien, lorsqu’il a renié la congrégation, agissant ainsi en apostat, il a en fait rejeté le fondement même de cette amitié qui l’unissait à ce frère. Jean montra clairement que lui-même n’aurait pas voulu accueillir chez lui quelqu’un qui ‘n’avait pas Dieu’ et qui n’était “pas des nôtres”.
Du point de vue des Écritures, une personne qui avait rejeté la congrégation de Dieu était plus répréhensible que les gens du monde. Pourquoi? Eh bien, Paul expliqua que les chrétiens du monde romain côtoyaient jour après jour des fornicateurs, des extorqueurs et des idolâtres. Cependant, il ajouta que les chrétiens devaient ‘cesser de fréquenter quelqu’un qui portait le nom de frère’ alors qu’il était retourné dans l’impiété (I Corinthiens 5:9-11). Pareillement, Pierre écrivit que “si, après avoir échappé aux souillures du monde”, quelqu’un revenait à son ancien mode de vie, il ressemblait alors à la truie qui est retournée se vautrer dans le bourbier (II Pierre 2:20-22). Jean offrait donc des conseils allant dans le même sens quand il recommandait aux chrétiens de ‘ne pas recevoir’ quiconque ‘était sorti de chez eux’ volontairement. — II Jean 10.
Jean ajouta: “Car celui qui lui dit un salut s’associe à ses œuvres méchantes.” (II Jean 11). Là, Jean emploie pour “salut” le mot grec khaïrô plutôt que le terme aspazomaï que l’on trouve au verset 13.
Khaïrô signifie ‘se réjouir’. (Luc 10:20; Philippiens 3:1; 4:4.) On utilisait aussi ce vocable en guise de salutation, orale ou écrite (Matthieu 28:9; Actes 15:23; 23:26). Quant à aspazomaï, il signifie “étreindre dans ses bras, et par suite saluer, faire bon accueil”. (Luc 11:43; Actes 20:1, 37; 21:7, 19.) L’un et l’autre pouvaient être utilisés en guise de salutation, mais aspazomaï signifiait peut-être plus qu’un simple “bonjour” poli. Jésus recommanda aux 70 disciples de n’aspasêsthé personne. Il montrait par là que l’œuvre urgente que ceux-ci devaient accomplir ne leur laissait pas le temps de saluer les gens à la manière orientale, c’est-à-dire en les embrassant, en les étreignant et en leur tenant une longue conversation préliminaire (Luc 10:4). Pierre et Paul, en revanche, donnèrent cette exhortation: ‘Saluez-vous [aspasasthé] les uns les autres d’un baiser d’amour, ou d’un saint baiser.’ — I Pierre 5:14; II Corinthiens 13:12, 13; I Thessaloniciens 5:26.
Ainsi, c’est peut-être volontairement qu’en II Jean 10, 11 l’apôtre a utilisé khaïrô, plutôt qu’aspazomaï (verset 13). Dans ce cas, il ne recommandait pas simplement aux chrétiens de ne pas saluer chaleureusement (en l’étreignant, en l’embrassant ou en engageant avec elle une conversation) une personne qui enseignait l’erreur ou qui avait abandonné la congrégation (donc qui avait apostasié). Il leur disait plutôt de ne pas saluer du tout une telle personne, pas même d’un simple khaïrô, un simple “bonjour”.
Les paroles suivantes de Jean soulignent clairement l’importance de son conseil: “Celui qui lui dit un salut s’associe à ses œuvres méchantes.” Aucun chrétien véritable ne souhaitait que Dieu le considère comme quelqu’un qui participait à des œuvres méchantes en fréquentant un pécheur exclu ou une personne ayant rejeté Sa congrégation. Il est de beaucoup préférable de fréquenter la grande famille chrétienne qui reflète l’amour, ainsi que l’écrivait Jean: “Ce que nous avons vu et entendu, nous vous l’annonçons, à vous aussi, afin que vous aussi vous ayez part avec nous. Et notre participation à nous est participation avec le Père et avec son Fils Jésus Christ.” — I Jean 1:3.
[Notes]
Le Dictionnaire Hachette définit ainsi le mot “apostasie”: “1. Abandon public d’une religion au profit d’une autre. 2. Reniement.”
Au sujet de l’emploi du mot khaïrô en II Jean 11, R. Lenski fait ce commentaire: “[C’]était le salut courant lorsqu’on rencontrait ou quittait quelqu’un (...). Le sens de ces paroles est: N’adressez même pas ce salut à celui qui cherche à faire des prosélytes. Cela fait déjà de vous un participant aux œuvres méchantes pour lesquelles il vient. Jean [pense] (...) à une salutation quelconque.”