Bonjour Philippe. Heureux de te revoir, après une longue absence.
M'est-il permis de mettre mon grain de sel, même si je suis un peu long...?
Il est écrit, dans Matthieu 4: 10 :
Tu adoreras le Seigneur, ton Dieu, et tu le serviras lui seul.
Or nous voyons un grand nombre d'Israëlites, et en particulier les apôtres, adorer Jésus, dans les Evangiles:
Ceux qui étaient dans la barque vinrent se prosterner devant Jésus, et dirent: Tu es véritablement le Fils de Dieu. Matt 14: 33
De même, les mages qui avaient reconnu l'étoile du Roi des Juifs, vinrent l'adorer également:
Ils entrèrent dans la maison, virent le petit enfant avec Marie, sa mère, se prosternèrent et l'adorèrent; ils ouvrirent ensuite leurs trésors, et lui offrirent en présent de l'or, de l'encens et de la myrrhe. Matt 2: 11
Enfin, Dieu ordonne à tous les anges de l'adorer:
Et lorsqu'il introduit de nouveau dans le monde le premier-né, il dit: Que tous les anges de Dieu l'adorent! Hébreux 1: 6
Se sont là des faits que nous, qui ne confessons qu'un seul Dieu, le Père, et qu'un seul Seigneur Jésus-Christ, connaissons bien et reconnaissons, et citons volontiers. Bien plus encore, reconnaissant que Jésus-Christ est le seul Seigneur légitime devant Dieu, nous professons que toute créature fléchira le genou devant l'Oint du Dieu Très-Haut.
C'est pourquoi aussi Dieu l'a souverainement élevé, et lui a donné le nom qui est au-dessus de tout nom, afin qu'au nom de Jésus tout genou fléchisse dans les cieux, sur la terre et sous la terre, et que toute langue confesse que Jésus Christ est Seigneur, à la gloire de Dieu le Père. Philippiens 2: 9-11
Dans cet argument de l'adoration du Fils, "adorer" est pris au sens exclusif de "reconnaître comme Dieu suprême".
Mais est-ce légitime de restreindre ainsi le sens de ce mot ? Plutôt que de se fier à l'emploi traditionnel de ce terme, mieux vaut sonder la Parole de Dieu elle-même pour savoir ce qu'elle entend par là et comment il nous faut la comprendre.
Le mot "adorer" est composé des éléments "ad-" (= vers) et "or-" (= bouche) et signifiait, à l'origine, "porter la main devant la bouche". C'est cet acte "d'adoration" qui est décrit par Job lorsqu'il dit:
Si j'ai regardé le soleil quand il brillait, La lune quand elle s'avançait majestueuse,
Et si mon coeur s'est laissé séduire en secret, Si ma main s'est portée sur ma bouche;
C'est encore un crime que doivent punir les juges, Et j'aurais renié le Dieu d'en haut! Job 31: 26-28
Cependant, les verbes hébreu et grec que nos Bibles françaises usuelles rendent par "adorer" ne signifient nullement "porter la main à la bouche". C'est la raison pour laquelle, en toute rigueur, le verbe "adorer" est à éliminer de la plupart des textes dans lesquels on le rencontre généralement. Il ne convient, à vrai dire, que dans un petit nombre de textes.
Le verbe hébreu est "hishtaphel", et le verbe grec est "proskyneîn". L'un et l'autre veulent dire "se prosterner".
On trouve encore, parfois traduits par "adorer" le verbe hébreu "cabad" et son correspondant grec "latreuein" qui signifient, tous deux, "servir".
Voici quel est, précisément, le commandement de Dieu:
Tu ne te feras point d'image taillée, ni de représentation quelconque des choses qui sont en haut dans les cieux, qui sont en bas sur la terre, et qui sont dans les eaux plus bas que la terre. Tu ne te prosterneras point devant elles, et tu ne les serviras point;
car moi, l'Éternel, ton Dieu, je suis un Dieu jaloux, qui punis l'iniquité des pères sur les enfants jusqu'à la troisième et la quatrième génération de ceux qui me haïssent, Exode 20: 4-5
Et ailleurs (Deutéronome 6: 13) :
Tu craindras l'Éternel, ton Dieu, tu le serviras, et tu jureras par son nom.
Ainsi donc, quand Satan demande à Jésus de s'incliner et de se prosterner devant lui (grec: proskynein), Jésus lui rétorque le commandement de Dieu en substance, en esprit, et non à la lettre.
Ce que Dieu interdit formellement dans la Loi, c'est de se prosterner devant des faux dieux, devant des images et des statues, devant les astres, et de les servir. Faire cela, en effet, mérite bien le nom d'idolâtrie.
Mais Abraham, Moïse, David, et bien d'autres fidèles serviteurs de Dieu, étaient-ils d'abominables idolâtres quand ils se sont proternés devant des hommes ?
Abraham se leva, et se prosterna devant le peuple du pays, devant les fils de Heth. Genèse 23: 7
Moïse sortit au-devant de son beau-père, il se prosterna, et il le baisa. Exode 18: 7
Après cela, David se leva et sortit de la caverne. Il se mit alors à crier après Saül: O roi, mon seigneur! Saül regarda derrière lui, et David s'inclina le visage contre terre et se prosterna. I Samuël 24: 9
On le voit à la lecture de ces versets, "se prosterner" est un signe de soumission pur et simple. En ce cas, on ne doit pas se soumettre à Satan ni à de vaines idôles. Mais il est tout à fait normal qu'Abraham, étranger chez les Hittites, manifeste sa soumission aux possesseurs du pays où il séjourne. David lui-même, bien qu'il fût poursuivi par Saül l'infidèle qui voulait lui ôter la vie, a soin de se prosterner devant Saül afin de montrer que, malgré les circonstances, il respectait l'onction que celui-ci avait reçue autrefois de Dieu.
C'est pourquoi aussi, les mages ayant connu que le Roi des Juifs promis, le futur dominateur de toutes les nations, venait de naître, ils se sont empressés de venir lui manifester leur soumission. C'est pourquoi il est naturel que toutes les créatures marquent leur soumission au Fils et, s'étant inclinées, se prosternent devant lui, parce que Yahweh Dieu a tout mis sous ses pieds et lui a tout soumis.
En lisant le texte de I Chroniques 29: 20, à propos des Israëlites réunis à Jérusalem:
Ils s'inclinèrent et se prosternèrent devant l'Éternel et devant le roi.
on constate qu'ils se prosternaient non seulement devant Dieu, mais encore devant l'oint de Dieu.
Rappelons le titre que porte Jésus: "Christ" d'après le grec, "Messie" d'après l'hébreu, "Oint" dans notre langue. Celui Qui Est l'a oint pour l'établir grand maître de toute la création afin qu'il puisse mener à bien la tache qu'il lui a confiée:
Ensuite viendra la fin, quand il remettra le royaume à celui qui est Dieu et Père, après avoir détruit toute domination, toute autorité et toute puissance.
Car il faut qu'il règne jusqu'à ce qu'il ait mis tous les ennemis sous ses pieds. Le dernier ennemi qui sera détruit, c'est la mort. Dieu, en effet, a tout mis sous ses pieds.
Mais lorsqu'il dit que tout lui a été soumis, il est évident que celui qui lui a soumis toutes choses est excepté.
Et lorsque toutes choses lui auront été soumises, alors le Fils lui-même sera soumis à celui qui lui a soumis toutes choses, afin que Dieu soit tout en tous. I Corinthiens 15: 24-28
Puisque Dieu a établi Jésus seigneur et maître de la création et lui a tout soumis, si quelqu'un refuse de se soumettre au Christ, il brave, en fait, l'autorité de Dieu qui l'a établi; et c'est bien ce que Jésus souligne:
Le Père ne juge personne, mais il a remis tout jugement au Fils, afin que tous honorent le Fils comme ils honorent le Père.
Celui qui n'honore pas le Fils n'honore pas le Père qui l'a envoyé. Jean 5: 22-23
C'est la raison pour laquelle quiconque ne fait pas acte de fidélité, de foi, envers le Fils se trouve ipso-facto exposé à la colère divine:
Celui qui croit au Fils a la vie éternelle; celui qui ne croit pas au Fils ne verra point la vie, mais la colère de Dieu demeure sur lui. Jean 3:36
On doit se soumettre au Fils, non point parce qu'il serait Dieu suprême - ce qu'il n'est pas - mais uniquement parce que Dieu " lui a donné le nom qui est au dessus de tout nom" (Philippiens 2: 9) et l'a établi seigneur de toute la création, unique médiateur entre le Créateur et la créature, selon qui est écrit:
Il est la tête du corps de l'Église; il est le commencement, le premier-né d'entre les morts, afin d'être en tout le premier. Car Dieu a voulu que toute plénitude habitât en lui; il a voulu par lui réconcilier tout avec lui-même, tant ce qui est sur la terre que ce qui est dans les cieux, en faisant la paix par lui, par le sang de sa croix. Colossiens 1: 18-20
Et ailleurs:
pour le mettre à exécution lorsque les temps seraient accomplis, de réunir toutes choses en Christ, celles qui sont dans les cieux et celles qui sont sur la terre. Ephésiens 1: 10
Il est ainsi évident que l'on doit s'incliner devant le Fils comme devant le chef que Dieu a donné à l'Assemblée et à toute la création.