Psaumes Dictionnaire Biblique Bost
(hébreu Sépher Thehiilim, livre des hymnes, ou des louanges)
Cet admirable ouvrage, dont l’éloge épuiserait toutes les épithètes, si celle d’ouvrage inspiré de Dieu ne faisait pas sa plus grande beauté, et ne résumait pas tout ce que l’on peut dire et sentir de plus profond, a été dans tous les siècles l’objet d’un amour et d’un respect tout particulier dans l’Église. C’est une bibliothèque spirituelle, dit Cassiodore, où l’on rencontre tout ce qui est nécessaire pour le salut. Il contient un abrégé de tout ce que l’on trouve dans les autres livres, dit saint Augustin. Et Ambroise : L’histoire sacrée nous instruit, la prophétie annonce l’avenir, les corrections répriment les méchants, la morale persuade ; mais les Psaumes produisent tous ces effets à la fois : l’utile et l’agréable y sont partout si sagement mêlés qu’il est difficile de décider lequel des deux l’emporte sur l’autre.
Saint Athanase écrivant à Marcellin, et lui recommandant la lecture des Psaumes, dit que telle partie des Écritures nous porte à imiter le bien dont telle autre nous donne l’exemple ou le précepte, mais qu’en lisant les Psaumes, il semble que ce soient nos propres prières et nos propres désirs que nous exprimions ; ce volume, ajoute-t-il, est comme un paradis dans lequel on trouve toutes les espèces d’arbres et de plantes. Saint Basile : Le livre des Psaumes contient tout ; il annonce les choses futures par des oracles non équivoques ; il rappelle l’histoire des temps passés ; il sanctionne les lois d’une vie sainte ; il renferme les préceptes et les exhortations les plus admirables, et pour tout dire en un mot, il abonde en toute bonne doctrine, rappelant et développant avec un soin plein de grâce et d’intelligence tout ce qui peut le plus nous conduire au salut. Luther, dans son langage si simple et si plein, appelle les Psaumes une petite Bible, un manuel, un abrégé de tout ce qu’il y a de plus beau ; et Calvin dit qu’ils sont comme une anatomie de toutes les parties de l’âme, tellement qu’il n’est aucun de nos besoins auquel ils ne répondent, aucune de nos dispositions intérieures qu’ils ne reflètent ; de sorte que ce livre peut servir à l’étude de la plus belle et la plus difficile de toutes les sciences, celle que Socrate résumait en ces mots : Connais-toi toi-même.
Les Psaumes ne sont pas tous du même auteur, quelque grande que soit à cet égard l’autorité de saint Augustin, d’Aben Esra, d’Euthymius, qui les attribuent tous à David. David, l’homme qui composait les doux cantiques d’Israël (2 Samuel 23.1), en est, il est vrai, le principal auteur ; c’est lui, dit Athanase, qui reçut le premier le don de psalmodier à l’Esprit, d’écrire et de composer des psaumes ; c’est encore lui qui a composé le plus grand nombre de ceux qui se trouvent dans le recueil qui porte son nom (2 Chroniques 7.6 ; 29.30 ; Amos 6.5), mais il ressort des inscriptions mêmes de plusieurs de ces psaumes, qu’ils ont été écrits par d’autres que lui. Cinq auteurs sont nommés outre David. Le psaume 90 est de Moïse ; le 127 de Salomon ; le 88 de Héman, Ezrakhite, peut-être un petit-fils de Samuel (1 Chroniques 6.33 ; 2 Chroniques 5.12) ; le 89 est d’Ethan, Ezrakhite, et Asaph, un prophète (1 Chroniques 25.2), a composé le psaume 50, et les psaumes 73 à 83.On a discuté beaucoup sur le sens de la préposition hébraïque qui sert à désigner l’auteur (le Lamed auctoris).
On peut traduire en effet : psaume d’Asaph, ou psaume pour Asaph ; mais comme c’est la même formule ordinairement employée pour les psaumes de David, et que d’ailleurs on se sert d’une autre tournure pour indiquer les cantiques destinés à Asaph, comme fait la tradition qui donne les psaumes 96, 103 et 106 comme devant être chantés par Asaph, sans que les titres indiquent qu’ils soient d’Asaph, on peut ne pas attacher une grande importance à cette controverse philologique. Les noms de Jeduthun, et des trois fils de Coré (Assir, Elkana, et Abiasaph, Exode 6.24) sont encore en tête de quelques psaumes, non qu’ils en soient les auteurs, mais parce qu’ils devaient en être les chantres ; c’est pour eux que ces psaumes avaient été composés, comme d’autres le furent aussi pour le maître chantre, c’est-à-dire pour celui qui dirigeait dans le temple les chœurs des chantres lévites. Vingt-cinq psaumes environ sont sans aucune inscription ; on peut croire qu’ils sont de David, quoique saint Jérôme pense qu’ils appartiennent plutôt au même auteur que celui ou ceux qui précèdent ; d’autres, et spécialement les commentateurs anglais, attribuent le psaume 44 à Ézéchias, le 102 à Daniel, le 1 et le 119 à Esdras, le 129 à Néhémie, le 137 à Aggée ou à Zacharie, etc. ; mais, non seulement ce n’est pas prouvé, c’est encore peu probable.
Les Psaumes n’ont tous été, ni composés dans les mêmes circonstances, ni destinés au culte public. Souvent le roi-prophète ne chante que ses propres impressions, celles du moment, l’effet que produit sur lui la pensée de Dieu contemplé dans ses ouvrages, ou celle des dispensations de Dieu à l’égard de ses enfants, et de ses ennemis ; ailleurs il se réjouit dans l’attente d’un Sauveur, et dans la perspective du règne messianique. Il a composé plusieurs de ses psaumes pendant son séjour à la cour de Saül, d’autres pendant qu’il fuyait devant ce roi qu’il avait déjà remplacé, d’autres à Hébron, d’autres à Jérusalem, plusieurs pendant qu’il fuyait devant les troupes de son fils Absalom ; quelques-uns de ses cantiques appartiennent à la partie la plus agitée de sa carrière, d’autres ont été composés dans le calme et la tranquillité d’un règne heureux ; toute la vie de David est rappelée dans ses hymnes, et souvent cet homme élu de Dieu, ce type de Jésus-Christ, parle de lui-même en termes qui annoncent un autre roi d’Israël, un autre règne, un autre temps, et que le Saint-Esprit rapporte à celui qui devait venir de la tribu de Juda et de la famille de Jessé (Isaï) ; l’image et la réalité se confondent dans la perspective prophétique ; les douleurs et le triomphe de David disent les douleurs et le triomphe de Jésus.
On a fait différentes tables des psaumes par ordre de matières, mais la nature même du psaume qui embrasse souvent plusieurs sujets et passe de l’un à l’autre, ne permet pas toujours d’insister beaucoup sur une division de ce genre. Quelques psaumes s’y prêtent, d’autres s’y refusent. Une division générale en prières, actions de grâces, cantiques d’adoration, psaumes sentencieux, psaumes prophétiques, psaumes historiques, est naturelle ; c’est à peu près la division d’Athanase ; Bickersteth subdivise encore chacune de ces parties en plusieurs autres, et alors sa table n’est plus un guide très sûr.
On a fait également quelques essais de classification des psaumes par ordre chronologique, mais comme la date d’un assez grand nombre est inconnue et fort douteuse, il est inutile de s’y arrêter ; il faut se contenter d’un à peu près. Nous ne reproduirons donc pas des listes de ce genre ; on les trouvera dans l’Introduction de Home, dans l’ouvrage anglais, Companion to the Bible (trad. par Mmc Rilliet-Constant), et dans plusieurs commentaires français sur les Psaumes. La Polyglotte française de Bagster, et la Concordance de Mackenzie, indiquent aussi l’ordre chronologique.
Les Juifs divisaient les Psaumes comme la loi de Moïse, en cinq livres qui finissaient aux psaumes 41, 72, 86, 106, et 150.Les quatre premiers se terminent par les mots Amen, Amen, le cinquième par Alléluia ! Epiphanes, en conséquence de cette division, appelait les Psaumes un second Pentateuque. À ce propos encore, on a voulu parler de tables des matières, et l’on a dit que le premier de ces cinq livres chantait des sujets tristes, le second des sujets de joie, le troisième des sujets tristes, le quatrième des sujets de joie, et le cinquième la tristesse et la joie tout ensemble ; mais il y a une futilité qui saute aux yeux de tout lecteur attentif dans cette manière de parquer les psaumes. On admettrait plus volontiers le sentiment d’Augustin qui, divisant les Psaumes en trois cinquantaines, voit dans la première la vocation, dans la seconde la justification, dans la troisième la sanctification et la glorification des saints. Au reste la division du Psautier en cinq livres n’est pas même prouvée ; Eusèbe et Ambroise l’admettaient comme fort ancienne, mais Hilaire, Jérôme et Augustin la repoussaient comme contraire à l’Écriture qui ne cite jamais les Psaumes que comme formant un seul livre. Quoi qu’il en soit de cette division, qu’elle remonte aux auteurs de la collection, ou qu’elle soit d’une date plus moderne, le recueil des Psaumes n’a jamais compté que comme un seul livre dans l’énumération des livres canoniques de l’Écriture.
Les versions grecque et romaine ont réuni en un seul les psaumes 9 et 10, séparés dans le texte hébreu, de sorte qu’à partir de ce psaume, il y a entre ces versions et les nôtres traduites sur l’original, une différence dans la manière de noter les psaumes. Pour retrouver les 150, ceux qui ont réuni deux psaumes en un, ont dû en dédoubler un en deux, et ils ont choisi le 147 (leur 146) qu’ils partagent au verset 12.Les catholiques réunissent encore les Psaumes 114 et 115 en un seul, et partagent le 110 en deux au verset 10.