Allemagne, pourquoi les catholiques quittent l’Eglise ?
Delphine Nerbollier (en Allemagne), le 24/07/2017 à 11h29
Mis à jour le 24/07/2017 à 12h30 Envoyer par email
En 2016, 162 000 Allemands ont cessé d’acquitter leur impôt ecclésiastique et ainsi « quitté » les rangs de l’Église catholique.
Ils étaient un peu plus de 4 000 dans le diocèse d’Essen (Ouest de l’Allemagne), qui a lancé une vaste étude pour comprendre les motivations de ses anciens fidèles.
En quoi consiste cette étude ?
Elle cherche à comprendre les raisons qui poussent certains à quitter les rangs de l’Église. Elle a été menée en avril et mai via un formulaire très complet mis en ligne sur le site Internet du diocèse. 3 000 personnes y ont participé, de manière volontaire, dont 305 ayant déjà quitté l’Église catholique. 41 ont ensuite pris part à un entretien qualitatif, par téléphone, d’une durée de 40 à 70 minutes.
Que ressort-il de cette enquête ?
« L’éloignement » et « le manque de lien » avec l’Église sont les deux raisons principales motivant les sorties. C’est ce que constate Ulrich Riegel, professeur à l’université de Siegen et l’un des deux théologiens ayant dirigé l’étude.
« Derrière ces deux notions se cache le fait que l’Église est perçue comme une institution basée sur des intérêts de pouvoir et des manigances », explique-t-il dans les pages du magazine diocésain Bene. « Elle est jugée peu crédible alors que les messages et les comportements de certains représentants religieux divergents ».
A LIRE : L’Eglise allemande aide les femmes à accéder aux postes à responsabilité
À cela s’ajoutent des « raisons plus concrètes », comme le montant de l’impôt religieux, mais aussi de « mauvaises expériences personnelles ». Par ailleurs, le célibat des prêtres, l’image de la femme, la position de l’Église sur l’homosexualité, ou encore les scandales de pédophilie reviennent aussi en force dans les réponses des participants, sans toutefois « mener directement à un départ », ajoute Ulrich Riegel.
Pour le théologien, une chose est sûre : « Les sorties d’Église sont le résultat d’un processus de long terme ». Son collègue, Tobias Faix, de l’institut de recherche Empirica à Kassel, a lui aussi codirigé cette étude et rappelle « qu’il n’y a jamais une seule raison » motivant le départ d’un paroissien. « Plusieurs facteurs se combinent jusqu’au jour où on se dit : ça suffit ». Pour Tobias Faix, ces processus sont « longs et émotionnellement difficiles surtout pour les personnes âgées ». La question de l'impôt n’est donc souvent qu’un déclencheur. « Personne ne quitte l'église pour faire des économies », assure Tobias Faix, sur le site www.katholisch.de.
Lors de cette enquête qualitative, Ulrich Riegel a constaté un autre phénomène. « Certains, même s’ils sont peu nombreux, jugent l’Église insuffisamment pieuse et incapable de s'acquitter de sa mission, à savoir célébrer l’Eucharistie et sauver les âmes. »
Quelles suites ?
Compte tenu de la variété des motivations mises en évidence par cette enquête, les mesures à prendre ne sont pas évidentes. Comme le résume le théologien Ulrich Riegel, il est difficile de se contenter de plaider « pour un abandon de l’impôt religieux et pour des prêches plus modernes ».
D’ici l'automne, les chercheurs vont aussi se pencher sur les raisons qui poussent des dizaines de milliers de paroissiens à rester au sein de l’Église, sans toutefois participer activement à la vie de la communauté. Le diocèse souhaite ensuite développer des stratégies pour mieux répondre aux attentes de ses paroissiens et organisera une conférence sur le sujet en 2018.
Certaines idées circulent déjà comme la possibilité de créer une permanence destinée aux personnes qui s’interrogent. « Les gens disent souvent ne pas trouver de partenaires pour parler », explique Tobias Faix. « Ils ne se sentent ni écoutés ni pris au sérieux. Quitter l'Église est alors un dernier cri de protestation. »
Delphine Nerbollier (en Allemagne)
http://www.la-croix.com/Religion/Catholicisme/Monde/A-Essen-lEglise-cherche-comprendre-pourquoi-catholiques-quittent-2017-07-24-1200865053?from_univers=lacroix
Delphine Nerbollier (en Allemagne), le 24/07/2017 à 11h29
Mis à jour le 24/07/2017 à 12h30 Envoyer par email
En 2016, 162 000 Allemands ont cessé d’acquitter leur impôt ecclésiastique et ainsi « quitté » les rangs de l’Église catholique.
Ils étaient un peu plus de 4 000 dans le diocèse d’Essen (Ouest de l’Allemagne), qui a lancé une vaste étude pour comprendre les motivations de ses anciens fidèles.
En quoi consiste cette étude ?
Elle cherche à comprendre les raisons qui poussent certains à quitter les rangs de l’Église. Elle a été menée en avril et mai via un formulaire très complet mis en ligne sur le site Internet du diocèse. 3 000 personnes y ont participé, de manière volontaire, dont 305 ayant déjà quitté l’Église catholique. 41 ont ensuite pris part à un entretien qualitatif, par téléphone, d’une durée de 40 à 70 minutes.
Que ressort-il de cette enquête ?
« L’éloignement » et « le manque de lien » avec l’Église sont les deux raisons principales motivant les sorties. C’est ce que constate Ulrich Riegel, professeur à l’université de Siegen et l’un des deux théologiens ayant dirigé l’étude.
« Derrière ces deux notions se cache le fait que l’Église est perçue comme une institution basée sur des intérêts de pouvoir et des manigances », explique-t-il dans les pages du magazine diocésain Bene. « Elle est jugée peu crédible alors que les messages et les comportements de certains représentants religieux divergents ».
A LIRE : L’Eglise allemande aide les femmes à accéder aux postes à responsabilité
À cela s’ajoutent des « raisons plus concrètes », comme le montant de l’impôt religieux, mais aussi de « mauvaises expériences personnelles ». Par ailleurs, le célibat des prêtres, l’image de la femme, la position de l’Église sur l’homosexualité, ou encore les scandales de pédophilie reviennent aussi en force dans les réponses des participants, sans toutefois « mener directement à un départ », ajoute Ulrich Riegel.
Pour le théologien, une chose est sûre : « Les sorties d’Église sont le résultat d’un processus de long terme ». Son collègue, Tobias Faix, de l’institut de recherche Empirica à Kassel, a lui aussi codirigé cette étude et rappelle « qu’il n’y a jamais une seule raison » motivant le départ d’un paroissien. « Plusieurs facteurs se combinent jusqu’au jour où on se dit : ça suffit ». Pour Tobias Faix, ces processus sont « longs et émotionnellement difficiles surtout pour les personnes âgées ». La question de l'impôt n’est donc souvent qu’un déclencheur. « Personne ne quitte l'église pour faire des économies », assure Tobias Faix, sur le site www.katholisch.de.
Lors de cette enquête qualitative, Ulrich Riegel a constaté un autre phénomène. « Certains, même s’ils sont peu nombreux, jugent l’Église insuffisamment pieuse et incapable de s'acquitter de sa mission, à savoir célébrer l’Eucharistie et sauver les âmes. »
Quelles suites ?
Compte tenu de la variété des motivations mises en évidence par cette enquête, les mesures à prendre ne sont pas évidentes. Comme le résume le théologien Ulrich Riegel, il est difficile de se contenter de plaider « pour un abandon de l’impôt religieux et pour des prêches plus modernes ».
D’ici l'automne, les chercheurs vont aussi se pencher sur les raisons qui poussent des dizaines de milliers de paroissiens à rester au sein de l’Église, sans toutefois participer activement à la vie de la communauté. Le diocèse souhaite ensuite développer des stratégies pour mieux répondre aux attentes de ses paroissiens et organisera une conférence sur le sujet en 2018.
Certaines idées circulent déjà comme la possibilité de créer une permanence destinée aux personnes qui s’interrogent. « Les gens disent souvent ne pas trouver de partenaires pour parler », explique Tobias Faix. « Ils ne se sentent ni écoutés ni pris au sérieux. Quitter l'Église est alors un dernier cri de protestation. »
Delphine Nerbollier (en Allemagne)
http://www.la-croix.com/Religion/Catholicisme/Monde/A-Essen-lEglise-cherche-comprendre-pourquoi-catholiques-quittent-2017-07-24-1200865053?from_univers=lacroix