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comment la bible fut défendue?

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1comment la bible fut défendue? Empty comment la bible fut défendue? Sam 30 Mar - 16:09

Josué

Josué
Administrateur

Par les colporteurs bibliques et les libraires


«Le peuple des Albigeois et des Vaudois qui brava le martyre pour l'amour de la Bible, dit M. Petavel dans La Bible en France, ne devait pas périr entièrement. Le sang qu'ils répandent appelle et prépare la réaction victorieuse du seizième siècle, et ceux d'entre eux qui survivent se réfugient dans les hautes Alpes de la France et du Piémont, qui deviennent le boulevard de la liberté religieuse. Descendaient-ils de leurs vallées dans la plaine, ils distribuaient la Bible sous le manteau; les poursuivait-on à main armée dans leurs retraites, ils emportaient leurs précieux manuscrits dans des cavernes connues d'eux seuls (*). La mission de ces peuples fut de donner asile à la Bible jusqu'au jour où elle descendrait de ces remparts neigeux pour conquérir le monde».

(*) Voici l'Oraison dominicale empruntée au Nouveau Testament vaudois (Manuscrit de Zurich, du quinzième siècle, qui, d'après M. Reuss, «a incontestablement servi aux Vaudois des vallées du Piémont»)
«O tu lo nostre payre loqual sies en li cel lo teo nom sia santifica lo teo regne uegna la tua volonta sia faita enayma ilh es fayta et cel sia fayta en terra donna nos encoy lo nostre pan cottidiem. E nos perdonna li nostre pecca enayma nos perdonen a aquilh que an pecca de nos. E non nos menar en temptacion mas deyliora nos de mal. Amen».
Texte curieux à comparer avec celui de l'Oraison dominicale dans le Nouveau Testament cathare (Voir point 5 chapitre 2).

«Dès le 5 février 1526, écrit M. Matthieu Lelièvre (*), un arrêté du Parlement de Paris, publié à son de trompe par les carrefours, interdisait la possession ou la vente du Nouveau Testament traduit en français. Dès lors la Bible ne put s'imprimer qu'à l'étranger et ne pénétra en France que comme un article de contrebande. Ceux qui l'y introduisaient risquaient leur tête, mais cette considération ne les arrêta jamais. «Par leur entremise, dit un historien catholique, Florimond de Roemond, en peu de temps la France fut peuplée de Nouveaux Testaments à la française». Ces colporteurs, ou porte-balles, furent la vaillante avant-garde de l'armée évangélique, exposée aux premiers coups et décimée par le feu».

(*) Portraits et Récits huguenots, p. 274.

«À côté des prédicateurs, écrit M. Lenient, s'organisa l'invincible armée du colportage. Missionnaire d'un nouveau genre, le colporteur descend le cours du Rhin, en traversant Bâle, Strasbourg. Mayence... Du côté de la France, il s'arrête d'abord à Lyon, première étape de la Réforme; de là il rayonne sur le Charolais, la Bourgogne, la Champagne, et jusqu'aux portes de Paris. Par la longue vallée où fument encore les cendres de Cabrières et de Mérindol, il s'enfonce au coeur du midi, dans les gorges des Cévennes, dans les murs de Nimes et de Montpellier. Infatigable à la marche, cheminant la balle au dos ou trottant sur les pas de son mulet, il s'introduit dans les châteaux, les hôtelleries et les chaumières, apôtre et marchand tout à la fois, vendant et expliquant la Parole de Dieu, séduisant les ignorants comme les habiles par l'appât des gravures et des livres défendus. Cette propagande clandestine eut un effet immense. Ce fut par elle surtout que la satire protestante s'insinua dans les masses et ruina l'antique respect que l'on portait à l'Église romaine» (*).

(*) La Satire en France, p. 161, 162. Pour nous, le colporteur fut plus puissant par la Bible que par la «satire protestante». Mais cet hommage impartial rendu au colportage biblique méritait d'être relevé.

À peine le Nouveau Testament de Lefèvre d'Étaples, le premier Nouveau Testament traduit en français, est-il imprimé (1523), que les porte-balles font leur apparition. Parmi eux, les Vaudois furent au premier rang, mais ils eurent beaucoup d'imitateurs parmi les réfugiés de Genève, de Lausanne et de Neuchâtel.
Même des grands seigneurs et des hommes de culture se firent colporteurs pour répandre la Bible. «Ils ne pensaient pas déroger, dit M. Matthieu Lelièvre, en chargeant la balle sur leurs épaules. S'il y avait des cordonniers parmi eux, il y avait aussi des gentilshommes. La foi et le zèle égalisaient les conditions sociales». «Étudiants et gentilshommes, dit Calvin, se travestissent en colporteurs, et, sous l'ombre de vendre leurs marchandises, ils vont offrir à tous fidèles les armes pour le saint combat de la foi. Ils parcourent le royaume, vendant et expliquant les Évangiles».
Les colporteurs formaient des associations nommées «les amateurs de la très sainte Évangile». On les trouve en France et hors de France. En 1526, l'évêque de Lausanne faisait rapport au duc de Savoie que «dans le pays de Vaud, bourgeois et manants déclarent tenir pour la Bible de Luther, malgré les menaces de brûler comme faux frères et traîtres hérétiques les Évangélistes prétendus» (*).

(*) Les grands jours de l'Église rélormée, par J. Gaberel.

En 1528, l'évêque de Chambéry écrivait au pape : «Votre Sainteté saura que cette détestable hérésie nous arrive de tous côtés par le moyen des porte-livres. Notre diocèse en aurait été, entièrement perverti si le duc n'eût pas fait décapiter douze seigneurs qui semaient ces Évangiles. Malgré cela, il ne manque pas de babillards qui lisent ces livres et ne veulent les céder à aucun prix d'argent» (*1).

(*) Ibid.

S'il y eut des seigneurs pour faire du colportage biblique, il y eut une princesse pour employer des colporteurs: nous avons nommé Marguerite de Navarre. «Ayant fui, dit Merle d'Aubigné, loin des palais et des cités où soufflait l'esprit persécuteur de Rome et du Parlement, elle s'appliquait surtout à donner un élan nouveau au mouvement évangélique dans ces contrées du Midi. Son activité était inépuisable. Elle envoyait des colporteurs qui s'insinuaient dans les maisons, et, sous prétexte de vendre des bijoux aux damoiselles, leur présentaient des Nouveaux Testaments imprimés en beaux caractères, réglés en rouge, reliés en vélin et dorés sur tranches. «La seule vue de ces livres, dit un historien, inspirait le désir de les lire» (*).

(*) Histoire de la Réforme au temps de Calvin, t. III, p. 27.

Laissons Crespin, résumé par M. Matthieu Lelièvre, nous parler (*) de ces pionniers de l'oeuvre biblique : «Leurs livres ne formaient souvent qu'une partie de leur pacotille, et, comme le pasteur vaudois dont Guillaume de Félice a mis en vers la touchante histoire, ils commençaient à offrir à leurs clients de belles étoffes et des bijoux d'or, avant de leur présenter la «perle de grand prix». Il faut se souvenir qu'au seizième siècle, comme au moyen âge, le commerce de détail, en dehors des villes, se faisait à peu près exclusivement par le moyen de colporteurs ambulants, qui débitaient toutes sortes de marchandises, y compris les livres. Les autorités ne songeaient donc pas à gêner ces modestes commerçants et durent être assez lentes à découvrir que l'hérésie se dissimulait parfois entre les pièces d'étoffe.

(*) Dans les livres III, IV, V, VII, de l'Histoire des Martyrs.

«Le colportage des Livres saints ne se faisait pas seulement sous forme indirecte. Il y eut des colporteurs bibliques, analogues aux nôtres, pour qui la grande affaire c'était l'évangélisation. Réfugiés à Genève, à Lausanne et à Neuchâtel, pour fuir la persécution qui faisait rage en France, ils étaient troublés en pensant que, de l'autre côté du Jura, les moissons blanchissantes réclamaient des ouvriers. Alors ils partaient, emportant avec eux un ballot de livres, qu'ils dissimulaient de leur mieux, souvent dans une barrique, que les passants supposaient contenir du vin ou du cidre. Ce fut de cette manière que Denis Le Vair, qui avait évangélisé les îles de la Manche, essaya de faire pénétrer en Normandie une charge de livres de l'Écriture. Comme il faisait marché avec un charretier pour le transport de son tonneau, deux officiers de police, flairant une marchandise suspecte, lui demandèrent si ce n'étaient point par hasard des «livres d'hérésie» qu'il transportait ainsi. — Non, répondit Le Vair, ce sont des livres de la Sainte Écriture, contenant toute «vérité». Il ne cacha pas qu'ils lui appartenaient et l'usage qu'il voulait en faire. Traîné de prison en prison, il fut finalement condamné, par le parlement de Rouen, à être brûlé vif, et il souffrit le martyre avec une admirable constance.
«Comme beaucoup des premiers missionnaires de la Réforme française, Philibert Hamelin avait été prêtre. Converti à l'Évangile à Saintes, il fut jeté en prison en 1546, mais il réussit à s'enfuir à Genève. Il y établit une imprimerie, d'où sortirent plusieurs ouvrages religieux. Mais cet imprimeur avait une âme d'apôtre. Il se reprochait d'avoir déserté son devoir en quittant son pays, et, non content d'y envoyer des colporteurs chargés de répandre la Bible et des livres de controverse, il prit lui-même la balle sur son dos et s'en alla de lieu en lieu répandre la bonne semence. Pourchassé par les autorités qui confisquaient ses livres, il rentrait à Genève pour s'y approvisionner et repartait pour la France. Bernard Palissy, qui fut son ami, nous le montre «s'en allant, un simple bâton à la main, tout seul, sans aucune crainte, et s'efforçant, partout où il passait, d'inciter les hommes à avoir des ministres....».

Allant par le pays, dit Crespin, il épiait souvent l'heure où les gens des champs prenaient leur réfection au pied d'un arbre ou à l'ombre d'une haie. Et là, feignant de se reposer auprès d'eux, il prenait occasion, par petits moyens et faciles, de les instruire à craindre Dieu, à le prier avant et après leur réfection, d'autant que c'était lui qui leur donnait toutes choses pour l'amour de son Fils Jésus-Christ. Et sur cela, il demandait aux pauvres paysans s'ils ne voulaient pas bien qu'il priât Dieu pour eux. Les uns y prenaient grand plaisir et en étaient édifiés; les autres étonnés, oyant choses non accoutumées; quelques-uns lui couraient sus, parce qu'il leur montrait qu'ils étaient en voie de damnation, s'ils ne croyaient à l'Évangile. En recevant leurs malédictions et outrages, il avait souvent cette remontrance en la bouche : «Mes amis, vous ne savez maintenant ce que vous faites, mais un jour vous le saurez, et je prie Dieu de vous en faire la grâce».

«Le colporteur devint le pasteur des petites communautés évangéliques fondées à Saintes et dans la presqu’île d'Arvert, et dont faisait partie Palissy, le potier de génie. Il y déploya un zèle admirable et fut, selon l'expression de celui-ci, «un prophète, un ange de Dieu, envoyé pour annoncer sa parole et le jugement de condamnation, et dont la vie était si sainte que les autres hommes étaient diables au regard de lui».
«En rentrant en France, Philibert Hamelin avait fait le sacrifice de sa vie. Arrêté au milieu de ses travaux apostoliques, il fut conduit à Bordeaux, où, après avoir souffert toutes sortes de mauvais traitements, il fut condamné à mort (*). Avant d'aller au supplice, il mangea avec les autres prisonniers, qu'il édifia par sa joie et par ses paroles pleines de foi et d'espérance. En sa qualité d'ancien prêtre, il fut conduit à l'église de Saint-André, où on le dégrada. On le ramena ensuite devant le palais, où devait avoir lieu son supplice. Afin d'empêcher qu'il ne fût entendu de la foule, les trompettes sonnèrent sans cesser; toutefois, on put voir, à sa contenance, qu'il priait. Après l'avoir étranglé, le bourreau jeta son corps sur un bûcher où il fut réduit en cendres.

(*) Le futur martyr était déjà en prison. Un ami arrive et offre au geôlier une forte somme d'argent pour le laisser échapper. Le geôlier est tenté. Il a l'idée de consulter... Hamelin! et Hamelin, justifiant cette prodigieuse confiance, unique probablement dans toutes les chroniques de toutes les prisons, lui conseille de refuser et lui dit «qu'il valait mieux qu'il mourût par la main de l'exécuteur que de le mettre en peine pour lui». Doumergue, Calvin, I, p, 604.
Admirable application du précepte : Faites aux autres ce que vous voulez que les autres vous fassent!

«Au mois de juillet 1551, deux jeunes gens quittaient Genève pour se rendre dans l'Albigeois, d'où ils étaient originaires. L'un, âgé de vingt-deux ans, se nommait Jean Joëry et l'autre était un tout jeune garçon qui lui servait de domestique. Ils portaient un ballot de livres protestants. Arrêtés à Mende, en Languedoc, ils furent traduits devant la justice du lieu et condamnés à être brûlés. Ils en appelèrent au parlement de Toulouse, devant lequel Joëry confessa sa foi avec courage, «rendant bonne raison de tout par l'autorité de l'Écriture». Son jeune compagnon, encore peu instruit, était parfois embarrassé par les arguties des docteurs; mais il les renvoyait alors à son maître, et il répondit à ceux qui voulaient ébranler sa confiance en lui : «Je l'ai toujours connu de si bonne et sainte vie que je me tiens pour assuré qu'il m'a enseigné la vérité contenue en la Parole de Dieu».
«On les conduisit à la place Saint-Georges, où devait périr sur la roue Jean Calas, deux cent onze ans plus tard. Le serviteur fut attaché le premier sur le bûcher, où des moines cherchèrent encore à obtenir de lui une abjuration. Joëry s'empressa de le rejoindre sur les fagots, et, le voyant en larmes, lui dit: «Hé quoi! mon frère, tu pleures ! Ne sais-tu pas que nous allons voir notre bon Maître et que nous serons bientôt hors des misères de ce monde?» Le serviteur lui répondit : «Je pleurais parce que vous n'étiez pas avec moi. — Il n'est pas temps de pleurer, reprit Joëry, mais de chanter au Seigneur!» Et pendant que la flamme commençait à lécher leurs membres, ils entonnèrent un psaume. Joëry, «comme s'il se fût oublié soi-même», se levait contre le poteau tant qu'il pouvait, et se retournait pour lui donner courage. Et ayant aperçu qu'il était passé, il ouvrit la bouche comme pour humer la flamme et la fumée, et baissant le cou, rendit l'esprit» (*).

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