Chrétiens et homosexuels : un sentiment de défiance ?
Tristan Dennone - publié le 12/06/2012
Une enquête sociologique éclaire la manière dont la foi et l’homosexualité se concilient.
© flickr
96,4 % des chrétiens homosexuels distinguent la spiritualité et la religion. C’est l’un des chiffres éloquents qui ressort d’une enquête nationale sur leurs convictions, croyances et pratiques religieuses. Réalisée dans le cadre d’un séminaire à l’École des Hautes études en science sociales, cette étude met en évidence une défiance vis-à-vis de l’Église.
À la question "Que signifie pour vous être chrétien ?", moins d’un tiers se réfère à des aspects institutionnels comme le baptême (14 %), la participation régulière à un culte (8 %) ou l’allégeance à une église (1,8%). En revanche, plus de la moitié mentionne les grands principes du christianisme : les valeurs de justice, d’amour ou encore de responsabilité (18,6 %), la croyance que Jésus Christ est le fils de Dieu (18,1%) et l’idée qu’une force spirituelle peut être cultivée en chaque homme (13,7 %). En outre, une écrasante majorité (83,5 %) pense qu’on est chrétien lorsqu’on adhère au message du Christ, tandis que seuls 38 % font du baptême une condition sine qua non.
L’Église ne reconnaissant pas l’homosexualité, ces croyants sont-ils conduits à définir eux-mêmes leur religion ? Tout porte à le croire : les valeurs autoritaires sont généralement rejetées, comme l’idée que Dieu soit tout puissant ou qu’il faille prendre la Bible au pied de la lettre. Surtout, la majorité des sondés définissent la spiritualité comme une "démarche personnelle", le plus souvent associée à la "recherche du sens de la vie" ; si la Bible figure en bonne place parmi les sources de la foi, l’amour, la raison humaine et les expériences personnelles restent prépondérantes. Plus d’un tiers des personnes interrogées estiment que les églises ont "perdu cette dimension de la religion" pour se concentrer sur des questions rituelles et communautaires. Moins de la moitié ne s’y rend plus, souvent parce qu’ils jugent le discours des représentants intolérant voire homophobe, et qu’il n’en ressentent pas le besoin pour communier avec Dieu.
Le constat pourrait cependant valoir pour l’ensemble des chrétiens ou des catholiques. Dès 2006, une enquête CSA / Le Monde des Religions montre que l'écrasante majorité des fidèles prend ses distances vis-à-vis du dogme : plus de la moitié ne met jamais les pieds à l’église ; un tiers estime même que leurs enfants n’ont pas besoin de recevoir une formation religieuse. Trois ans plus tard, une étude Ifop / Le journal du Dimanche confirme une érosion du rituel et l’individualisation de la foi : sur la plupart des grands sujets de société — l’avortement, la contraception la remariage… —, une large majorité de catholiques pratiquants appelle de ses vœux un aggiornamento de l’Église.
Concernant l’homosexualité en revanche, ils passent un point sous la barre des 50 %. Si le sujet peut être abordé dans certaines églises il reste généralement tabou : près de la moitié des chrétiens homosexuels (46 %) ne savent pas comment qualifier leur paroisse sur ce thème et plus de 20 % la jugent hostile ; environ un tiers l’estime bienveillante.
Tristan Dennone - publié le 12/06/2012
Une enquête sociologique éclaire la manière dont la foi et l’homosexualité se concilient.
© flickr
96,4 % des chrétiens homosexuels distinguent la spiritualité et la religion. C’est l’un des chiffres éloquents qui ressort d’une enquête nationale sur leurs convictions, croyances et pratiques religieuses. Réalisée dans le cadre d’un séminaire à l’École des Hautes études en science sociales, cette étude met en évidence une défiance vis-à-vis de l’Église.
À la question "Que signifie pour vous être chrétien ?", moins d’un tiers se réfère à des aspects institutionnels comme le baptême (14 %), la participation régulière à un culte (8 %) ou l’allégeance à une église (1,8%). En revanche, plus de la moitié mentionne les grands principes du christianisme : les valeurs de justice, d’amour ou encore de responsabilité (18,6 %), la croyance que Jésus Christ est le fils de Dieu (18,1%) et l’idée qu’une force spirituelle peut être cultivée en chaque homme (13,7 %). En outre, une écrasante majorité (83,5 %) pense qu’on est chrétien lorsqu’on adhère au message du Christ, tandis que seuls 38 % font du baptême une condition sine qua non.
L’Église ne reconnaissant pas l’homosexualité, ces croyants sont-ils conduits à définir eux-mêmes leur religion ? Tout porte à le croire : les valeurs autoritaires sont généralement rejetées, comme l’idée que Dieu soit tout puissant ou qu’il faille prendre la Bible au pied de la lettre. Surtout, la majorité des sondés définissent la spiritualité comme une "démarche personnelle", le plus souvent associée à la "recherche du sens de la vie" ; si la Bible figure en bonne place parmi les sources de la foi, l’amour, la raison humaine et les expériences personnelles restent prépondérantes. Plus d’un tiers des personnes interrogées estiment que les églises ont "perdu cette dimension de la religion" pour se concentrer sur des questions rituelles et communautaires. Moins de la moitié ne s’y rend plus, souvent parce qu’ils jugent le discours des représentants intolérant voire homophobe, et qu’il n’en ressentent pas le besoin pour communier avec Dieu.
Le constat pourrait cependant valoir pour l’ensemble des chrétiens ou des catholiques. Dès 2006, une enquête CSA / Le Monde des Religions montre que l'écrasante majorité des fidèles prend ses distances vis-à-vis du dogme : plus de la moitié ne met jamais les pieds à l’église ; un tiers estime même que leurs enfants n’ont pas besoin de recevoir une formation religieuse. Trois ans plus tard, une étude Ifop / Le journal du Dimanche confirme une érosion du rituel et l’individualisation de la foi : sur la plupart des grands sujets de société — l’avortement, la contraception la remariage… —, une large majorité de catholiques pratiquants appelle de ses vœux un aggiornamento de l’Église.
Concernant l’homosexualité en revanche, ils passent un point sous la barre des 50 %. Si le sujet peut être abordé dans certaines églises il reste généralement tabou : près de la moitié des chrétiens homosexuels (46 %) ne savent pas comment qualifier leur paroisse sur ce thème et plus de 20 % la jugent hostile ; environ un tiers l’estime bienveillante.