[size=38]Bébés bloqués : les évêques ukrainiens réclament l’abolition de la GPA[/size]
Des couples, dont certains sont français, ayant eu recours à la GPA en Ukraine se voient bloquer l’accès au pays, dont les frontières sont fermées en raison du confinement. Une centaine de bébés, nés de mères porteuses ukrainiennes, sont actuellement confiés à des nourrices. Pour les évêques du pays, cette situation illustre le caractère « marchand » et « indigne » de la GPA.
- Héloïse de Neuville,
- le 18/05/2020 à 17:52
L’hôtel « Venice » de Kiev, le 15 mai, où les nouveaux-nés ukrainiens attendent leurs parents.[size=12]SERGEI SUPINSKY/AFP[/size]
Les évêques d’Ukraine ont dénoncé avec force, « le piétinement de la dignité humaine », que constitue, selon eux, la pratique de la gestation pour autrui (GPA) dans leur pays et réclament son abolition. Ils en veulent pour preuve l’actuelle situation d’une centaine de bébés, nés de mères porteuses dans le pays depuis le début du confinement.
Face à la pandémie de Covid-19, l’Ukraine a adopté mi-mars des procédures très strictes d’entrée sur son territoire et a fortement encadré les entorses à la fermeture de ses frontières. Si bien que, pour des couples ayant initié une procédure de GPA avec une mère porteuse ukrainienne, il est impossible de se rendre dans le pays. Pour obtenir un visa, les Français doivent se procurer « une note verbale » que le ministère des affaires étrangères leur refuse, au motif que la GPA est illégale en France. Selon Lioudmyla Denysova, chargée des droits humains auprès du Parlement ukrainien, « plus de 100 bébés attendent actuellement leurs parents dans plusieurs centres médicaux ». Si le confinement est prolongé, « leur nombre pourrait atteindre presque un millier », a-t-elle ajouté.
« Mépris de la personne humaine »
Dans un communiqué commun publié jeudi 12 mai, sa Béatitude Sviatoslav Shevchuk, chef de l’Église gréco-catholique ukrainienne, et Mgr Mechyslav Mokshytskyi, président par intérim de la Conférence des évêques de l’Église catholique romaine, se sont émus de la situation « inacceptable » de ces nouveau-nés.
C’est une vidéo publiée publiée fin avril par la clinique BioTexCom (qui revendique la moitié du marché ukrainien) montrant les bébés et appelant les capitales étrangères à aider leurs ressortissants souhaitant venir chercher leurs enfants, qui a attiré l’attention des évêques. Sous un lustre de cristal, des nourrissons sont allongés dans des berceaux en verre : nés de mères porteuses, ils attendent dans un hôtel ukrainien leurs parents étrangers. Propriété de la clinique de reproduction BioTexCom, l’hôtel « Venice » sert en temps normal de premier lieu de rencontre entre les nouveau-nés et les clients de l’entreprise ayant eu recours à la gestation pour autrui
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« Ces derniers jours, nous avons pu voir une vidéo publiée sur le site de la clinique BioTexCom de l’hôtel de Venise à Kiev, qui montre une chambre pour enfants improvisée et 46 bébés allongés dans leur lit et pleurant. Les nouveau-nés (parmi eux, une vingtaine sont chinois, douze allemands, six espagnols, quatre italiens et quatre français, NDLR) se trouvent dans des incubateurs modernes, privés de contact maternel, de chaleur parentale, de soins désintéressés, d’amour indispensable, mais sont considérés comme un produit acheté, pour lequel l’acheteur ne s’est pas présenté », alertent les évêques. Une telle démonstration de mépris pour la personne humaine, sa dignité - ne peut être envisagée. Et tout cela est rendu possible par la maternité de substitution légalisée », plaident-ils.
« Pas de GPA altruiste »
Pour cette raison, les responsables chrétiens lancent un nouvel appel aux autorités ukrainiennes pour
« condamner et interdire ce phénomène honteux », incluant dans leur condamnation la
« soi-disant maternité de substitution altruiste, qui ne peut avoir aucune autre valeur morale, car même si l’intention de la mère porteuse est bonne, les moyens et le sujet lui-même sont mauvais », indiquent-ils
, arguant que
« la base commerciale de la maternité de substitution implique le mal moral d’acheter et de vendre les fonctions du corps de la femme et de la personne du nouveau-né. Aucune circonstance ne peut justifier la pratique de la maternité de substitution ». Les évêques ukrainiens demandent enfin aux autorités de prêter davantage attention
« aux politiques familiales en Ukraine et à veiller à ce que les mères n’aient pas à échanger leur corps et leurs enfants pour leur survie et celle de leurs proches ».En absence de chiffres officiels, on estime qu’il se déroule entre 500 et 2 000 procédures de GPA par an en Ukraine, dont 94 % initiés par des couples étrangers. Cadre légal favorable et coût faible expliquent en partie l’attrait pour le pays : alors qu’une procédure de GPA peut coûter plus de 133 000 € aux États-Unis, le coût en Ukraine, pays le plus pauvre d’Europe, est plus proche des 26 600 €. Selon la loi ukrainienne, seuls les couples hétérosexuels mariés et reconnus comme infertiles peuvent en bénéficier.