[size=62]La part d'ombre de Joe Jackson, personnage ambigu et violent[/size]
Connu pour être un père violent envers ses enfants, Joe Jackson est décédé à l'âge de 89 ans. (TARA ZIEMBA / AFP)PERSONNALITÉS
Manager exigeant, père violent. Cet homme à la personnalité ambivalente était cité à chaque rebondissement dans la vie de Michael Jackson.
Par Maïlys Khider
Publié le 28 juin 2018 à 13h23
Il est le sixième Jackson. Celui qui n’est jamais monté sur scène. Joseph Jackson, père et bien connu manager des Jackson Five et un temps de Michael Jackson, personnage sombre et violent envers ses enfants, est mort mercredi 27 juin à Las Vegas (Nevada) à l’âge de 89 ans des suites d’un cancer du pancréas.
En 1949, Joseph, Joe, épouse Katherine Scruse en secondes noces, mère de ses dix enfants, dont l’un mourra peu après sa naissance. La nombreuse famille s’installe dans l’Indiana, avant de lancer l’épopée des Jackson.
Joe, né en 1928 à Fountain Hill en Arkansas travaille en tant que grutier, soudeur, et pratique un temps la boxe. Il arrête tout pour se consacrer à la musique afin de poursuivre son rêve de devenir musicien professionnel et devient guitariste au sein d’une formation de Rythm’n’blues avec son frère Luther. The Falcons ne rencontre pas le succès escompté et ses membres se séparent en 1952. Pour poursuivre sa carrière musicale, Joe devient alors le mentor de ses enfants.
"J'ai essayé de l'appeler papa une fois. Il a dit non. Pour toi, je suis Joseph."
Quelques années après l’échec de son groupe, au début des 60’s, Joe fédère trois de ses très jeunes fils : Jackie (né en 1951), Tito (né en 1953) et Jermaine (né en 1954). Ils forment les Jackson Brothers au terme d’heures de répétitions le matin avant l’école et en rentrant de cours. Chaque minute creuse est consacrée à la musique, rien qu’à la musique. Deux autres fils de Joe rejoignent leurs frères : Marlon (né en 1957) et un certain Michael né un an plus tard. Ainsi naissent à leur tour les Jackson Five, menés d’une main de fer par leur père qui refuse que ses enfants l’appellent "papa". Janet Jackson confiait en 2013 : "J'ai essayé de l'appeler papa une fois. Il a dit non. Pour toi, je suis Joseph."
Les concours de jeunes talents s’enchaînent, où les cinq reprennent les plus grands titres de Motown. Regal Theatre, Chicago, Apollo Theatre. Et les prix pleuvent. En 1969, Diana Ross glisse un mot à Motown records - studio qui a vu passer Marvin Gaye, The Temptations, The Supremes, ou encore Stevie Wonder devant ses micros –. Les Jackson Five décollent. Résultats : I want you back, ABC…
"Si vous manquiez un pas, vous vous attendiez à être fouetté."
Pour mener ses troupes, Joe Jackson ne tolère aucune erreur. Aucun pas de travers. Aucune fausse note. Dans son autobiographie, "Growing up in the Jackson family" ("grandir dans la famille Jackson") La Toya, de deux ans l’aînée de Michael, dénonce les frasques d’un père extrêmement violent. Mais la fratrie est loin d’accorder ses violons. Jermaine, Tito, Marlon et Jackie prétendent l'exact contraire.
Joe Jackson, lui, assume pleinement ses actes. En 2003, interviewé par le journaliste Louis Theroux, il raconte sa relation avec Michael. "Je ne l’ai jamais frappé. Je le fouettais avec un martinet et une ceinture. Je ne l’ai jamais frappé. On frappe quelqu’un avec un bâton." Le documentariste relance : "J’essaie de comprendre la famille Jackson. Michael dit qu’il est si nerveux quand il vous voit ou quand il est sur le point de vous voir qu’il vomit." Il se heurte à un interlocuteur stoïque. "Je n’en ai vraiment rien à faire."
Michael a toujours confié, non sans laisser couler quelques larmes, que son père l’utilisait "comme exemple. Il disait : 'faites comme Michael.' Si vous manquiez un pas, vous vous attendiez à être fouetté. Il avait toujours une ceinture à la main. Et j’y ai eu droit beaucoup de fois."
Le 10 février 1993, le "King of pop" est interviewé par Oprah Winfrey dans sa gigantesque résidence de Neverland, à Santa Barbara (Californie). "C’était comme être dans le magicien d’Oz" confiera Oprah Winfrey des années plus tard. Devant 90 millions de spectateurs, et après 14 ans sans accorder une seule interview, Michael aborde une nouvelle fois sa vie privée. "J’aime mon père mais je ne le connais pas. Parfois, je suis très en colère […] Un simple regard de lui vous effraye."
Peu à peu, Michael s’éloigne. Son père lui laisse le contrôle de sa carrière artistique après les succès fulgurants des albums "Off the wall" en 1979 et "Thriller" en 1982. Le patriarche continue à prendre en charge les affaires de ses filles Rebbie, la Toya et Janet. Il supervise la conception du premier album de Janet, intitulé "Janet Jackson", sorti en 1984. Celle-ci change par la suite de manager et débute une collaboration avec les producteurs Jimmy Jam et Terry Lewis. "Je voulais juste sortir de la maison, arrêter de me sentir inférieure à mon père, ce qui a été l’une des choses les plus difficiles que j’aie eu à faire", déclarait-elle auprès de Piers Morgan en 2013.
Joe Jackson, en réponse aux dires de ses enfants : "Je suis très heureux d’avoir été dur avec eux. Regardez ce que ça a donné. Ça a donné des enfants aimés dans le monde entier", affirmait-il sur CNN.
Maïlys Khider