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Comment la France accueille-t-elle ses minorités spirituelles ?

2 participants

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Josué

Josué
Administrateur

Comment la France accueille-t-elle ses minorités spirituelles ?
religion Cette série de 22 articles vous propose une approche originale de la question des minorités spirituelles en France, loin des clichés véhiculés par le pouvoir, les médias et quelques lobbies intolérants.

Lobbies peu nombreux mais puissants car infiltrés au cœur même de notre système institutionnel.

De même, un survol historique apporte des éclaircissements sur les raisons de la méfiance et de la peur qui caractérisent l'appréhension française de la diversité spirituelle.

Sommaire de l'enquête "Liberté de pensée" :

1 - Sectes, religions et liberté de pensée : Une question éminemment politique

2 - Les « sectes », symptômes des maux et lacunes de notre société

3 - Christianisme et protestantisme, deux ex-sectes aujourd'hui "fréquentables"

4 - Ce que tout Français et les catholiques doivent aux protestants

5 – Les mauvais comportements des croyants éloignent les « gentils » de Dieu

6 - La liberté de penser ? Un droit « chimérique et monstrueux » !

7 – L’Eglise : « Que chaque individu soit soumis aux puissances ! »

8 - Liberté de la presse, « liberté exécrable, la plus funeste » !

9 - « Ils osent refuser à l’Eglise le droit d’exercer la censure ! »

10 - La foi contre la raison versus la foi en la raison

11 - Hegel : « Ce droit inaliénable de l’homme de se donner ses lois du fond de son cœur »

12 – Désormais, après l’avoir combattue, l’Eglise profite de la liberté de conscience

13 - L'Eglise catholique : des principes que la Miviludes pourrait classer "dérives sectaires"

14 - Les "sectes : des religions qui  n'ont pas réussi ?

15 – L’imposant arsenal français contre les « sectes » est unique au monde

16 – Du positif dans la chasse aux sorcières «antisecte» à la française

17 – Pour un « marché » libre des cultes et des convictions

18 – Déviance aujourd’hui, mœurs tolérées demain. Comment savoir ?

19 – Paradoxalement, être membre d’une «secte» permet de résister à la pensée unique

20 – La pression du « religieusement correct » conforte le risque de sectarisme

21 - Penser par soi-même, un idéal encore lointain

22 - L’humanisme a besoin de la transcendance, union entre l'unique et l'universel

http://debredinoire.fr/comment-la-france-accueille-t-elle-ses-minorites-spirituelles/

Mikael

Mikael
MODERATEUR
MODERATEUR

La question 3 et pertinente à mes yeux .

Josué

Josué
Administrateur

Christianisme et protestantisme, deux ex-sectes aujourd’hui « fréquentables »

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1
Les « sectes » ont toujours existé. Leur répression aussi, d’ailleurs ! Et toujours pour de « bons » motifs. Le catholicisme, dont le fondateur Jésus était issu de la « secte » des Esséniens, fut longtemps considéré comme une « secte ». Tout comme le protestantisme.

Jésus, chef de "secte" ?
Jésus fut exécuté comme chef de "secte".

Elles avaient historiquement des causes simples : réaction face à l’écart entre le dire et le faire des religions en place, face à l’immobilisme ou aux excès de ces religions, et aux abus de leur position dominante.

La plupart de ces nouveaux mouvements étaient motivés, du moins au départ, par un désir d’intégrité plus intense, par le besoin de répondre plus nettement aux principes supposés de la Divinité et aux aspirations de bonheur des individus .

Jésus de Nazareth, déjà, était vraisemblablement issu de la « secte » des Esséniens de Qumrân. Cette communauté initiatique pointait le manque de rigueur dans l’observation de la loi juive comme la source du mal. Contestant les prêtres du temple de Jérusalem, elle attendait l’apocalypse.
Déjà !

Anthropophagie

Ensuite, l’histoire est connue : le christianisme, a-t-on souvent dit, est une secte qui a réussi. Ce qui n’était pas évident au départ. Bien plus violentes qu’aujourd’hui, les persécutions subies par la petite communauté du départ faillirent l’exterminer. Les chrétiens étaient accusés de détourner les gens de la vie sociale, en refusant par exemple de se mêler aux jeux du cirque. On leur reprochait de se mettre à l’écart, de refuser certaines professions, de ne pas sacrifier au culte des idoles. On les accusait de “superstitions” “exécrables” ou “maléfiques”. La rumeur publique leur imputa meurtres, incestes, brigandage, adultères, magie, adoration de tête d’âne et même anthropophagie...

Tous ces soi-disant crimes alimentaient la haine des païens à leur égard. Ils étaient autant de prétextes aux autorités pour les réprimer, au titre de la défense de l’ordre public et de la moralité. Des émeutes populaires et des dénonciations anonymes conduisirent à des procès. Stigmatisés pour leur changement radical de mode de vie, pour leur refus des idoles traditionnelles, les premiers chrétiens furent victimes tant des violences populaires que des officielles. Beaucoup le payèrent de leur vie.

Tout au long des deux mille ans de christianisme, de nombreuses disputes donnèrent naissance à des multitudes de « sectes », dont certaines purent finalement bénéficier du statut de religion. Autrement dit, de « secte » qui dure et qui finit par obtenir une reconnaissance sociale.

Parmi elles, le protestantisme fut lui aussi violemment stigmatisé à ses débuts, comme « secte luthérienne », hérétique et schismatique. À une époque où l’Eglise catholique régnait en maîtresse des représentations communes, où elle régentait la pensée, le protestantisme naissant constituait une « erreur doctrinale ». Ses affidés étaient également vus comme une menace pour le corps social et l’organisation politique du royaume. Ils pouvaient, craignait-on, conduire à la séparation, à la « sédition ». Pour l’Eglise catholique, pas question de tolérer une autre Église : ce serait trahir sa mission universelle et sa prétention au monopole de la vérité.

Un petit détour par l’Histoire, en France, se révèle instructif et permet d’éclairer la situation actuelle de notre pays. Il y a effectivement encore beaucoup de ressemblances malgré d’incontestables évolutions.

Logique du martyr

"Hérétique" protestant signant sa conversion après la révocation de l'édit de Nantes par Louis XIV. Comme leur roi, les Français acceptent mal que deux religions puissent cohabiter dans leur pays.
"Hérétique" protestant signant sa conversion après la révocation de l'édit de Nantes par Louis XIV. Comme leur roi, les Français acceptaient mal que deux religions pussent cohabiter dans leur pays.

La révocation de l'Edit de Nantes (1685) par Louis XIV, qui supprime le culte et toute existence institutionnelle des Églises réformées de France, oblige les contestataires soit à quitter le pays (le “Refuge”), soit à constituer des groupuscules en rupture avec l’ordre social (les Églises clandestines “du Désert”).

« Dans la première phase de recomposition clandestine des Églises du “Désert”, note Hubert Bost (dans "De la secte à l'église", in Rives nord-méditerranéennes, Religion, secte et pouvoir, 2005), aucun compromis n’est envisageable et la logique du martyre prévaut. Progressivement, cette intransigeance laisse place à un discours plus modéré, à des tentatives de négociation avec le pouvoir, à des offres de service et à des protestations de citoyenneté. L’objectif est de recouvrer une visibilité et une légitimité en adhérant au type Église dont le modèle est le catholicisme. Il s’agit de retrouver un statut dans l’espace public et de peser sur les débats du temps. »

Antoine Court, par exemple, principal artisan de la “restauration” du protestantisme français, manifeste son loyalisme à l’égard de la couronne. Il écrit beaucoup, pour expliquer à l’opinion publique la situation des protestants et pour solliciter le droit à la liberté de conscience et un état civil : Le Patriote français et impartial (1752) ; Lettre d’un patriote pour la tolérance civile (1756).

La Beaumelle et Rabaut publient en 1762 un plaidoyer intitulé La Calomnie confondue ou mémoire dans lequel on réfute une nouvelle accusation intentée aux protestans de la province de Languedoc, à l’occasion de l'affaire du sieur Calas détenu dans les prisons de Toulouse.

Puis paraît, après les “affaires” de la décennie 1760 (Rochette, Sirven, Calas) le Traité sur la tolérance de Voltaire.

Hubert Bost : « D’hérétiques et de séditieux qu’ils étaient, les protestants apparaissent maintenant comme victimes de mesures excessives et d’iniquités répétées. Si les sectaires d’hier sont encore loin de se voir reconnaître le droit de constituer une Église, du moins commence-t-on, dans les milieux parlementaires et à la cour, à considérer d’intérêt public de ne plus en faire des citoyens de second rang. »

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