[size=45]La centrale nucléaire de Fukushima reste une menace[/size]
Dorian Malovic , le 11/03/2019 à 10h57
Mis à jour le 11/03/2019 à 12h18
[size=20]Huit ans après le tsunami de mars 2011 qui a dévasté la côte nord-est du Japon et mis en péril la centrale nucléaire Fukushima Daiichi, le site de Fukushima reste un énorme chantier où le risque immédiat semble écarté, mais où les tâches ardues et les imprévus perdurent.
ZOOM Un employé de la compagnie d’électricité de Tokyo sur le site nucléaire de Fukushima. / Kimimasa Mayama/EPACombustible nucléaire, eau contaminée, déchets et main-d’œuvre sur le terrain, voici les principaux enjeux à résoudre pour la société japonaise Tepco qui gère la centrale nucléaire de Fukushima fortement endommagée il y a huit ans lors du tsunami du 10 mars 2011 sur la côte nord-est du Japon.
Après le tremblement de terre qui a provoqué un terrible tsunami en 2011, quatre des six réacteurs de la centrale ont été endommagés. Les cœurs des tranches 1 à 3 ont fondu au moment de l’accident et l’on sait désormais que le combustible est en quasi-totalité tombé au fond de l’enceinte de confinement primaire de chaque unité, enceinte qu’il a même en partie entamée.
Des manipulations récentes avec un robot dans l’enceinte du réacteur 2 ont permis de constater que ce combustible pouvait en partie être soulevé par petits morceaux à plusieurs endroits. Ce n’est qu’un tout début pour étudier des moyens concrets de l’extraire, une opération extrêmement délicate qui ne débutera pas avant 2021 au mieux, a récemment confirmé la compagnie exploitante Tepco et le ministère de l’Industrie.
À lire aussiAu Japon les acteurs du nucléaire veulent partager les risquesPar ailleurs, dans ces mêmes réacteurs 1 à 3, des centaines d’assemblages de combustible usé sont toujours dans les piscines de refroidissement situées en haut des bâtiments.
« En raison de différents problèmes, les opérations de retrait ont pris du retard dans le réacteur 3, elles ne commenceront pas ce mois-ci comme prévu. Et s’agissant de la piscine du réacteur 1, elle est couverte de détritus qu’il va falloir enlever, une opération que nous ferons avec une extrême prudence », expliquait à la presse fin février Akira Ono, directeur de la filiale de Tepco chargée du démantèlement. Tepco ne prévoit pas de retrait de ce combustible des piscines des réacteurs 1 et 2 avant 2023.
L’eau contaminée reste un des défis majeurs
L’autre défi de taille pour la compagnie nucléaire reste l’eau contaminée. Le site en regorge,
« même si les différentes dispositions prises ont permis d’atténuer » le problème, selon Akira Ono. L’eau, c’est au départ celle du tsunami qui a ravagé les installations, eau qu’il a fallu pomper, assainir et stocker. C’est ensuite celle qui sert à refroidir les réacteurs et enfin celle qui tombe du ciel et descend de la montagne en amont et se contamine au passage.
Un mur de glace souterrain faisant barrière et des pompes permettent cependant de limiter la quantité d’eau contaminée par les installations. Les graphiques montrent cependant qu’en périodes de violents typhons (septembre, octobre), des pics à des niveaux bien plus élevés sont inévitables.
À lire aussiLes victimes de Fukushima gagnent en justice contre l’ÉtatAu total, environ 1,12 million de mètres cubes d’eau sont conservés dans des citernes sur le site, mais la capacité maximum (1,37 million) sera atteinte fin 2020. Cette eau est traitée par un système de décontamination qui élimine les éléments radioactifs à l’exception du tritium. Problème : Tepco a reconnu en fin d’année dernière que 85 % de l’eau était en fait toujours porteuse d’une teneur trop élevée concernant les 62 radionucléides censés être supprimés. La société a donc décidé de la filtrer une deuxième fois.
Que faire ensuite de cette eau encore pleine de tritium ?
« Plusieurs solutions potentielles (injection dans les couches profondes de la Terre, rejet en mer, évaporation dans l’air, etc.) sont examinées par un groupe d’études constitué d’experts, mais nous n’avons encore rien décidé », explique Yumiko Hata, directrice de la gestion des déchets de Fukushima, au ministère de l’industrie.
« Sans résolution de cette situation critique de l’eau, le plan, déjà irréaliste de Tepco d’en finir avec l’accident, est encore plus compromis », insiste auprès de l’Agence France-Presse, Shaun Burbie, spécialiste du secteur nucléaire au sein de l’organisme Greenpeace.
Les ouvriers sont exposés sans vraiment de contrôle du gouvernement
Enfin, entre 4 000 et 5 000 personnes travaillent chaque jour sur le site, un nombre presque deux fois moins important qu’il y a quatre ans,
« car de gros chantiers ont été achevés (mur de glace, pose d’un revêtement sur le sol, construction de bâtiments divers) », précise Akira Ono. En moyenne, l’exposition des travailleurs aux radiations est désormais inférieure à 5 mSV par an, mais ce seul chiffre masque les fortes disparités entre individus, en fonction de leurs tâches.
« Nous avons tous un carnet de suivi des radiations, mais cela n’est regardé que par notre employeur (dans mon cas, un sous-traitant de sous-traitant de sous-traitant d’une filiale de Tepco), mais nous ne sommes pas suivis spécialement par le gouvernement, ce n’est pas normal », se plaint Minoru Ikeda, un ancien travailleur du site.
Dorian Malovic[/size]