Accueil
Publications
Les évêques allemands face à Pegida
ANNA LATRON
S'ils critiquent le mouvement anti-islamique qui organise des manifestations de masse à Dresde, les évêques invitent à une meilleure compréhension des craintes de ceux qu'il a séduit.
« Les évêques allemands ne peuvent pas se contenter de rejeter les partisans des marches “anti-islamisation” en les qualifiant d'extrémistes », explique un porte-parole du diocèse de Dresde (en anglais) au Catholic News Service au sujet des rassemblements organisés, depuis plusieurs semaines à Dresde par le mouvement islamophobe des « patriotes européens contre l’islamisation de l’occident » (Pegida).
« Ce mouvement est appelé à se développer et l'Eglise catholique elle-même s'en détache totalement, précise Michael Baudisch à CNS ce mercredi 14 janvier. Mais nous devons également parler aux personnes impliquées, pour soigner les frustrations sur le processus politique et leur sentiment de ne pas avoir de chances dans la vie. Plutôt que de simplement les qualifier extrémistes, nos évêques pensent que nous devons tenir compte de leurs opinions et de leurs objectifs. »
« Nous sommes dans une situation vraiment difficile »
Lundi 12 janvier, le rassemblement organisé par Pegida a réuni 25.000 personnes à Dresde et des milliers d'autres dans d'autres villes. « Le même soir, des contre-manifestations ont attiré des dizaines de milliers de personnes à travers le pays », relate CNS. Mgr Heiner Koch, l'évêque de Dresde, a participé à une autre marche anti-Pegida, qui a attiré 35.000 personnes deux jours plus tôt, le samedi 10 janvier. Il a d'ailleurs expliqué à Dom Radio (en allemand) qu'il s'agissait de donner un signe d'« ouverture » et de « fraternité ».
Mais selon lui, ce genre de manifestation ne peut à lui seul « résoudre le problème Pegida ». Et de poursuire : « Nous sommes dans une situation vraiment difficile. D'une part, il est tout à fait clair que les immigrés font bien partie de notre société. En tant que chrétiens, nous ne pouvons nous démarquer de cette affirmation ne serait-ce que d'un pouce. D'après les experts, 80% des manifestants ne sont pas des “extrêmistes de droite”, mais des gens qui se sentent marginalisés, incompris par la société. Ils pensent qu'ils ne peuvent plus exprimer leur opinion dans notre société, alors qu'ils veulent que celle-ci soit prise en compte. Ils se sentent exclus. »
Pegida ne peut être considéré « comme exprimant la foi chrétienne »
« Nous essayons de faire en sorte que l'échange reste possible, insiste l'évêque, en guise de main tendue. Nous devons tous nous demander comment nous comporter dans une société où il y des opinions extrêmes de tous les côtés et comment nous comporter avec ceux qui se sentent comme les perdants de la société. » Et de conclure : « Le dilemme est infiniment grand ».
Une analyse partagée par l'évêque de Magdebourg, Mgr Gehrard Feige. Dans une interview accordée mardi 13 janvier (en allemand) à l'agence KNA, il précise que le mouvement Pegida ne peut être considéré « comme exprimant la foi chrétienne » ou reflétant une volonté de « sauver l'Occident chrétien ». Et de rappeler que « les valeurs chrétiennes comprennent la compassion, la générosité et la volonté d'aider, pas d'attiser les préjugés et les craintes ».
Le symbole de la croix détourné par les manifestants
C'est la raison pour laquelle l'Eglise catholique se bat actuellement pour que le mouvement Pegida n'utilise plus la croix comme symbole lors des manifestations organisées chaque lundi soir à Dresde depuis octobre dernier. Un article du Bild explique (en allemand) que « de nombreuses croix, peintes en noir-rouge-jaune » sont brandies par les manifestants. Pour Mgr Feige, cité par le quotidien allemand, « la croix Pegida doit être, pour chaque chrétien, considéré comme une agression ».
Bild reprend également les propos de l'évêque de Dresde, particulièrement clairs : « La croix est le symbole central de la foi chrétienne. (…) C'est pourquoi personne ne devrait brandir ce symbole pour un quelconque combat politique, ni se l'approprier pour soi-même et encore moins le mettre aux couleurs nationales ». Un point qui vaut encore plus « pour des manifestations dans lesquelles les valeurs chrétiennes ne sont pas reconnaissables ». Côté protestant, Christian Krause, l'ancien président de l'alliance luthérienne mondiale, qualifie le détournement du symbole chrétien par les manifestants de « pervers ».
ANNA LATRON
S'ils critiquent le mouvement anti-islamique qui organise des manifestations de masse à Dresde, les évêques invitent à une meilleure compréhension des craintes de ceux qu'il a séduit.
« Les évêques allemands ne peuvent pas se contenter de rejeter les partisans des marches “anti-islamisation” en les qualifiant d'extrémistes », explique un porte-parole du diocèse de Dresde (en anglais) au Catholic News Service au sujet des rassemblements organisés, depuis plusieurs semaines à Dresde par le mouvement islamophobe des « patriotes européens contre l’islamisation de l’occident » (Pegida).
« Ce mouvement est appelé à se développer et l'Eglise catholique elle-même s'en détache totalement, précise Michael Baudisch à CNS ce mercredi 14 janvier. Mais nous devons également parler aux personnes impliquées, pour soigner les frustrations sur le processus politique et leur sentiment de ne pas avoir de chances dans la vie. Plutôt que de simplement les qualifier extrémistes, nos évêques pensent que nous devons tenir compte de leurs opinions et de leurs objectifs. »
« Nous sommes dans une situation vraiment difficile »
Lundi 12 janvier, le rassemblement organisé par Pegida a réuni 25.000 personnes à Dresde et des milliers d'autres dans d'autres villes. « Le même soir, des contre-manifestations ont attiré des dizaines de milliers de personnes à travers le pays », relate CNS. Mgr Heiner Koch, l'évêque de Dresde, a participé à une autre marche anti-Pegida, qui a attiré 35.000 personnes deux jours plus tôt, le samedi 10 janvier. Il a d'ailleurs expliqué à Dom Radio (en allemand) qu'il s'agissait de donner un signe d'« ouverture » et de « fraternité ».
Mais selon lui, ce genre de manifestation ne peut à lui seul « résoudre le problème Pegida ». Et de poursuire : « Nous sommes dans une situation vraiment difficile. D'une part, il est tout à fait clair que les immigrés font bien partie de notre société. En tant que chrétiens, nous ne pouvons nous démarquer de cette affirmation ne serait-ce que d'un pouce. D'après les experts, 80% des manifestants ne sont pas des “extrêmistes de droite”, mais des gens qui se sentent marginalisés, incompris par la société. Ils pensent qu'ils ne peuvent plus exprimer leur opinion dans notre société, alors qu'ils veulent que celle-ci soit prise en compte. Ils se sentent exclus. »
Pegida ne peut être considéré « comme exprimant la foi chrétienne »
« Nous essayons de faire en sorte que l'échange reste possible, insiste l'évêque, en guise de main tendue. Nous devons tous nous demander comment nous comporter dans une société où il y des opinions extrêmes de tous les côtés et comment nous comporter avec ceux qui se sentent comme les perdants de la société. » Et de conclure : « Le dilemme est infiniment grand ».
Une analyse partagée par l'évêque de Magdebourg, Mgr Gehrard Feige. Dans une interview accordée mardi 13 janvier (en allemand) à l'agence KNA, il précise que le mouvement Pegida ne peut être considéré « comme exprimant la foi chrétienne » ou reflétant une volonté de « sauver l'Occident chrétien ». Et de rappeler que « les valeurs chrétiennes comprennent la compassion, la générosité et la volonté d'aider, pas d'attiser les préjugés et les craintes ».
Le symbole de la croix détourné par les manifestants
C'est la raison pour laquelle l'Eglise catholique se bat actuellement pour que le mouvement Pegida n'utilise plus la croix comme symbole lors des manifestations organisées chaque lundi soir à Dresde depuis octobre dernier. Un article du Bild explique (en allemand) que « de nombreuses croix, peintes en noir-rouge-jaune » sont brandies par les manifestants. Pour Mgr Feige, cité par le quotidien allemand, « la croix Pegida doit être, pour chaque chrétien, considéré comme une agression ».
Bild reprend également les propos de l'évêque de Dresde, particulièrement clairs : « La croix est le symbole central de la foi chrétienne. (…) C'est pourquoi personne ne devrait brandir ce symbole pour un quelconque combat politique, ni se l'approprier pour soi-même et encore moins le mettre aux couleurs nationales ». Un point qui vaut encore plus « pour des manifestations dans lesquelles les valeurs chrétiennes ne sont pas reconnaissables ». Côté protestant, Christian Krause, l'ancien président de l'alliance luthérienne mondiale, qualifie le détournement du symbole chrétien par les manifestants de « pervers ».