Pour éviter le cancer, changer notre mode de vie
PROPOS RECUEILLIS PAR SOPHIE BARTCZAK
Richard Béliveau livre sa méthode dans une interview à La Vie. La bonne nouvelle ? Changer notre mode de vie peut réduire les risques et les récidives. D’après les études qu’il a rassemblées, bon nombre de cancers pourraient être évités en changeant « simplement notre mode de vie ». Un formidable message d’espoir face aux courbes de mortalité exponentielles de ce fléau qui touchera bientôt 50 % de la population.
Quelle est la première habitude à adopter pour rester en bonne santé ?
Arrêter de fumer. Je suis estomaqué par le nombre de fumeurs en France. Le cancer du poumon est pourtant de loin le plus meurtrier : il tue autant que les cancers colorectaux, du sein et de la prostate réunis, les trois autres grandes causes de mortalité par cancer. Cette maladie était extrêmement rare autrefois. De plus, neuf autres types de cancers sont associés au tabagisme (œsophage, pancréas, bouche, vessie, rein, estomac…) et les femmes qui continuent de fumer après un cancer du sein ont un risque 400 % plus élevé de mortalité ! S’il est difficile d’arrêter le tabac, des millions de personnes y sont toutefois parvenues. Il n’est jamais trop tard pour se faire aider et décider de s’en passer. Dès les premières semaines qui suivent, les fonctions respiratoires s’améliorent. Après 10 à 14 ans, on retrouve le même niveau de risque que si l’on n’avait jamais fumé. Si vous arrêtez de fumer, vous réduisez considérablement votre risque de cancer du poumon.
Après le tabac, vous montrez que le surpoids est la deuxième grande cause de ce fléau…
L’épidémie mondiale d’obésité est telle qu’elle sera bientôt la première cause de mortalité. Les gens connaissent les risques cardiovasculaires et de diabète liés au surpoids, mais ignorent combien c’est un facteur important dans le développement des tumeurs, plus particulièrement les cancers de l’utérus, de l’œsophage, de la thyroïde, du côlon, de la prostate et du rein. Ainsi, un homme qui a pris 20 kg durant sa vie adulte a trois fois plus de risques de cancer du côlon que celui qui a limité son gain de poids à 5 kg. Les cellules du tissu adipeux créent un climat d’inflammation chronique, dénominateur commun à tous les cancers. Pour limiter ce risque, il faut non seulement éviter l’obésité, mais en plus viser un IMC (indice de masse corporelle, voir encadré page 63) situé entre 21 et 23, un chiffre dépassé par les trois quarts des Américains. Le grand responsable ? L’omniprésence du sucre dans les aliments industriels et surtout les sodas. Être très légèrement diabétique double les risques de cancer.
Vous avez mené beaucoup de recherches sur l’alimentation anticancer. Quel serait l’essentiel à retenir ?
Tout d’abord, il faut réduire la consommation d’aliments industriels et retrouver le plaisir de cuisiner des aliments frais, vrais et simples. Tous les organismes de santé recommandent un minimum de cinq portions de fruits et légumes par jour, soit 400 g. Nous sommes loin du compte. Il faut impérativement supprimer tous les sodas et limiter le sucre, le sel, la viande rouge et l’alcool en laissant la place aux fruits et légumes en quantité et en variété. La carence en produits végétaux contribue largement au développement du cancer et le manque de diversités nous prive de tous leurs bienfaits. Les végétaux les plus bénéfiques – légumes crucifères, grains entiers, petits fruits, légumineuses… – sont souvent absents de nos menus. Les végétaux sont pourtant les seuls aliments capables de freiner la progression des tumeurs microscopiques qui se forment durant notre vie. Certains aliments comme l’ail ou les choux accélèrent l’élimination des substances cancérigènes, d’autres composés comme les polyphénols du thé vert ou des myrtilles neutralisent les cellules cancéreuses et empêchent leur croissance. Dans leur ensemble, l’ingestion de ces composés phytochimiques crée un environnement inhospitalier pour les tumeurs. Chaque classe de végétaux est active contre quelques cancers spécifiques.
Aujourd’hui, on nous alerte aussi sur la pollution, les perturbateurs endocriniens, les nanotechnologies ou le stress…
On perd de vue l’essentiel ! Oui, certains facteurs jouent un rôle dans l’apparition du cancer, mais c’est marginal par rapport à notre mode de vie. Les études sur lesquelles je m’appuie sont réalisées sur des centaines de milliers de personnes. La pollution de l’air, souvent citée, serait responsable de 10 % des décès liés au cancer du poumon, pour les milieux très pollués, mais demeure un facteur huit fois moins important que le tabac ! Les perturbateurs endocriniens ou les nanotechnologies sont également à surveiller, surtout chez les travailleurs fortement exposés, même si les données actuelles mettent davantage en cause nos habitudes de vie. Enfin, si le stress agit sans doute indirectement sur la progression du cancer (manque de sommeil, tabagisme, excès d’alcool, mauvaise alimentation, sédentarité…), le lien de causalité avec la maladie n’a pas été prouvé.
En quoi l’exercice physique quotidien influe-t-il sur les risques ?
L’homme a été actif durant 200 000 ans et est devenu sédentaire en à peine 50 ans. Ce brusque changement perturbe notre corps. Les gens commencent à avoir conscience des problèmes de la sédentarité pour le cœur, et son impact sur les risques de cancer est méconnu. Pourtant l’activité physique régulière réduit le risque de cancer du sein, du côlon, de l’utérus, du poumon et de l’ovaire d’environ un quart. Être suffisamment actif, c’est 2 heures 30 d’activité physique modérée à vigoureuse par semaine (marche rapide, bricolage, rangement, ménage, randonnée, vélo, tennis, foot, jogging, transport de charges lourdes…). Mais pas seulement : il faut aussi être le moins assis possible au quotidien, prendre l’escalier, parler au téléphone debout, prendre une pause de quelques minutes toutes les heures, marcher durant le temps du déjeuner, porter des poids légers en lisant, etc.
PROPOS RECUEILLIS PAR SOPHIE BARTCZAK
Richard Béliveau livre sa méthode dans une interview à La Vie. La bonne nouvelle ? Changer notre mode de vie peut réduire les risques et les récidives. D’après les études qu’il a rassemblées, bon nombre de cancers pourraient être évités en changeant « simplement notre mode de vie ». Un formidable message d’espoir face aux courbes de mortalité exponentielles de ce fléau qui touchera bientôt 50 % de la population.
> A lire aussi : 10 conseils pour prévenir le cancer
[...]Quelle est la première habitude à adopter pour rester en bonne santé ?
Arrêter de fumer. Je suis estomaqué par le nombre de fumeurs en France. Le cancer du poumon est pourtant de loin le plus meurtrier : il tue autant que les cancers colorectaux, du sein et de la prostate réunis, les trois autres grandes causes de mortalité par cancer. Cette maladie était extrêmement rare autrefois. De plus, neuf autres types de cancers sont associés au tabagisme (œsophage, pancréas, bouche, vessie, rein, estomac…) et les femmes qui continuent de fumer après un cancer du sein ont un risque 400 % plus élevé de mortalité ! S’il est difficile d’arrêter le tabac, des millions de personnes y sont toutefois parvenues. Il n’est jamais trop tard pour se faire aider et décider de s’en passer. Dès les premières semaines qui suivent, les fonctions respiratoires s’améliorent. Après 10 à 14 ans, on retrouve le même niveau de risque que si l’on n’avait jamais fumé. Si vous arrêtez de fumer, vous réduisez considérablement votre risque de cancer du poumon.
Après le tabac, vous montrez que le surpoids est la deuxième grande cause de ce fléau…
L’épidémie mondiale d’obésité est telle qu’elle sera bientôt la première cause de mortalité. Les gens connaissent les risques cardiovasculaires et de diabète liés au surpoids, mais ignorent combien c’est un facteur important dans le développement des tumeurs, plus particulièrement les cancers de l’utérus, de l’œsophage, de la thyroïde, du côlon, de la prostate et du rein. Ainsi, un homme qui a pris 20 kg durant sa vie adulte a trois fois plus de risques de cancer du côlon que celui qui a limité son gain de poids à 5 kg. Les cellules du tissu adipeux créent un climat d’inflammation chronique, dénominateur commun à tous les cancers. Pour limiter ce risque, il faut non seulement éviter l’obésité, mais en plus viser un IMC (indice de masse corporelle, voir encadré page 63) situé entre 21 et 23, un chiffre dépassé par les trois quarts des Américains. Le grand responsable ? L’omniprésence du sucre dans les aliments industriels et surtout les sodas. Être très légèrement diabétique double les risques de cancer.
Vous avez mené beaucoup de recherches sur l’alimentation anticancer. Quel serait l’essentiel à retenir ?
Tout d’abord, il faut réduire la consommation d’aliments industriels et retrouver le plaisir de cuisiner des aliments frais, vrais et simples. Tous les organismes de santé recommandent un minimum de cinq portions de fruits et légumes par jour, soit 400 g. Nous sommes loin du compte. Il faut impérativement supprimer tous les sodas et limiter le sucre, le sel, la viande rouge et l’alcool en laissant la place aux fruits et légumes en quantité et en variété. La carence en produits végétaux contribue largement au développement du cancer et le manque de diversités nous prive de tous leurs bienfaits. Les végétaux les plus bénéfiques – légumes crucifères, grains entiers, petits fruits, légumineuses… – sont souvent absents de nos menus. Les végétaux sont pourtant les seuls aliments capables de freiner la progression des tumeurs microscopiques qui se forment durant notre vie. Certains aliments comme l’ail ou les choux accélèrent l’élimination des substances cancérigènes, d’autres composés comme les polyphénols du thé vert ou des myrtilles neutralisent les cellules cancéreuses et empêchent leur croissance. Dans leur ensemble, l’ingestion de ces composés phytochimiques crée un environnement inhospitalier pour les tumeurs. Chaque classe de végétaux est active contre quelques cancers spécifiques.
Aujourd’hui, on nous alerte aussi sur la pollution, les perturbateurs endocriniens, les nanotechnologies ou le stress…
On perd de vue l’essentiel ! Oui, certains facteurs jouent un rôle dans l’apparition du cancer, mais c’est marginal par rapport à notre mode de vie. Les études sur lesquelles je m’appuie sont réalisées sur des centaines de milliers de personnes. La pollution de l’air, souvent citée, serait responsable de 10 % des décès liés au cancer du poumon, pour les milieux très pollués, mais demeure un facteur huit fois moins important que le tabac ! Les perturbateurs endocriniens ou les nanotechnologies sont également à surveiller, surtout chez les travailleurs fortement exposés, même si les données actuelles mettent davantage en cause nos habitudes de vie. Enfin, si le stress agit sans doute indirectement sur la progression du cancer (manque de sommeil, tabagisme, excès d’alcool, mauvaise alimentation, sédentarité…), le lien de causalité avec la maladie n’a pas été prouvé.
En quoi l’exercice physique quotidien influe-t-il sur les risques ?
L’homme a été actif durant 200 000 ans et est devenu sédentaire en à peine 50 ans. Ce brusque changement perturbe notre corps. Les gens commencent à avoir conscience des problèmes de la sédentarité pour le cœur, et son impact sur les risques de cancer est méconnu. Pourtant l’activité physique régulière réduit le risque de cancer du sein, du côlon, de l’utérus, du poumon et de l’ovaire d’environ un quart. Être suffisamment actif, c’est 2 heures 30 d’activité physique modérée à vigoureuse par semaine (marche rapide, bricolage, rangement, ménage, randonnée, vélo, tennis, foot, jogging, transport de charges lourdes…). Mais pas seulement : il faut aussi être le moins assis possible au quotidien, prendre l’escalier, parler au téléphone debout, prendre une pause de quelques minutes toutes les heures, marcher durant le temps du déjeuner, porter des poids légers en lisant, etc.