RELIGION
Cour Européenne des Droits de l'homme : pas de discrimination antichrétienne
Jean Mercier - publié le 15/01/2013
La Cour Européenne des droits de l'homme, à Strasbourg, s'est prononcée contre trois des quatre chrétiens britanniques sanctionnés par leurs employeurs pour avoir manifesté leur croyances dans le cadre du travail. Parmi eux, deux objecteurs de conscience au couple homosexuel.
© SAUTIER PHILIPPE/SIPA
Cet article a été actualisé le 15/01 à 16H30
Est-on discriminé en tant que chrétien, ou limité dans l’exercice de sa liberté, si son employeur ne reconnaît pas le droit d’afficher sa foi ou de s’abstenir de certains actes allant contre sa conscience ? Non, a décidé la Cour Européenne des Droits de l’homme à Strasbourg, le 15 janvier. Le 4 septembre dernier, quatre britanniques l’avaient saisie, après avoir épuisé les solutions de recours des tribunaux de leur pays, accusant la Grande-Bretagne de ne pas respecter leur liberté de religion et leur droit à ne pas souffrir de discrimination.
La Cour a tranché dans le conflit qui oppose la liberté de conscience des chrétiens et les droits reconnus aux personnes homosexuelles outre-Manche. Elle a donc désavoué Gary Mac Farlane et Lilian Ladele. Le premier avait été licencié de son job de thérapeute conjugal après avoir avoué à son employeur que sa conscience, inspirée par les repères éthiques chrétiens, l’empêchait d’exercer une partie de son métier avec des couples homosexuels. La seconde avait été sanctionnée par la municipalité d’Islington (nord de Londres) pour s’être refusée à célébrer, en tant qu’officier d’état civil, des pacs de gays ou de lesbiennes. La Cour a estimé qu’il n’y avait pas eu d’infraction à la liberté de religion. Et pas plus de discrimination anti-religieuse à leur égard.
Strasbourg légitime son arrêt au nom de sa défense des droits de l’homme : “Dans un cas comme dans l’autre, l’employeur mis en cause poursuivait une politique de non-discrimination à l’égard des usagers. Et le droit de ne pas subir de discrimination fondée sur l’orientation sexuelle est également protégé par la Convention.”
Deux autres cas touchaient à la possibilité d’afficher sa foi dans l’espace public à travers le port d’un crucifix. La Cour a statué de deux façons différentes. Sur la liberté de religion, elle a donné raison à Nadia Eweida, hôtesse de British Airways, qui avait été inquiétée en 2006, parce qu’elle a considéré que la compagnie avait donné trop d’importance à son image et qu’elle permettait à d’autres croyants de porter des signes religieux dans le cadre de leur travail. Le Royaume Uni devra lui verser un dédommagement de 2000 euros au titre du dommage moral et 30.000 euros pour ses frais de justice. Mais la Cour a donné tort à une autre plaignante, Shirley Chaplin, infirmière, qui avait refusé d’enlever son crucifix pour des raisons de sécurité avancées par l’hôpital où elle travaillait.
Discrimination des chrétiens contre discrimination des homosexuels ? Strasbourg a jugé en faveur des gays et lesbiennes, rappelant que “toute différence de traitement fondée sur l’orientation sexuelle ne peut se justifier que par des raisons particulièrement solides et que la situation des couples homosexuels est comparable à celle des couples hétérosexuels en ce qui concerne le besoin d’une reconnaissance juridique et la protection de leurs relations”. Elle a ajouté : “Lorsque la pratique religieuse d’un individu empiète sur les droits d’autrui, elle peut faire l’objet de restrictions.”
Pourtant, Gary McFarlane n’a jamais eu l’impression de léser quiconque, du temps où il travaillait à l’antenne de Bristol de l’association “Relate”, spécialisée dans la réparation des couples. “J’avais annoncé mon souhait de faire de la thérapie sexuelle, soit des exercices concrets pour aider les couples à se débloquer. Lorsque mon employeur m’a posé la question de savoir si je le ferais pour les gays et lesbiennes, je n’ai pas dit non. Je lui ai dit que cela me mettait en conflit avec ma foi et les valeurs chrétiennes”.
En octobre 2007, Gary est sommé de se plier, sans restriction, au règlement intérieur qui interdit la discrimination homophobe. Il temporise. Il est suspendu quelques semaines, puis réintégré. Avant d’être définitivement licencié en mars 2008, pour faute grave. Trois instances de recours plus tard, le juge anglais tranchera ainsi : “Les préceptes d’une religion, quelle qu’elle soit, ne peuvent pas s’imposer plus qu’une autre au regard du Droit.”
Cour Européenne des Droits de l'homme : pas de discrimination antichrétienne
Jean Mercier - publié le 15/01/2013
La Cour Européenne des droits de l'homme, à Strasbourg, s'est prononcée contre trois des quatre chrétiens britanniques sanctionnés par leurs employeurs pour avoir manifesté leur croyances dans le cadre du travail. Parmi eux, deux objecteurs de conscience au couple homosexuel.
© SAUTIER PHILIPPE/SIPA
Cet article a été actualisé le 15/01 à 16H30
Est-on discriminé en tant que chrétien, ou limité dans l’exercice de sa liberté, si son employeur ne reconnaît pas le droit d’afficher sa foi ou de s’abstenir de certains actes allant contre sa conscience ? Non, a décidé la Cour Européenne des Droits de l’homme à Strasbourg, le 15 janvier. Le 4 septembre dernier, quatre britanniques l’avaient saisie, après avoir épuisé les solutions de recours des tribunaux de leur pays, accusant la Grande-Bretagne de ne pas respecter leur liberté de religion et leur droit à ne pas souffrir de discrimination.
La Cour a tranché dans le conflit qui oppose la liberté de conscience des chrétiens et les droits reconnus aux personnes homosexuelles outre-Manche. Elle a donc désavoué Gary Mac Farlane et Lilian Ladele. Le premier avait été licencié de son job de thérapeute conjugal après avoir avoué à son employeur que sa conscience, inspirée par les repères éthiques chrétiens, l’empêchait d’exercer une partie de son métier avec des couples homosexuels. La seconde avait été sanctionnée par la municipalité d’Islington (nord de Londres) pour s’être refusée à célébrer, en tant qu’officier d’état civil, des pacs de gays ou de lesbiennes. La Cour a estimé qu’il n’y avait pas eu d’infraction à la liberté de religion. Et pas plus de discrimination anti-religieuse à leur égard.
Strasbourg légitime son arrêt au nom de sa défense des droits de l’homme : “Dans un cas comme dans l’autre, l’employeur mis en cause poursuivait une politique de non-discrimination à l’égard des usagers. Et le droit de ne pas subir de discrimination fondée sur l’orientation sexuelle est également protégé par la Convention.”
Deux autres cas touchaient à la possibilité d’afficher sa foi dans l’espace public à travers le port d’un crucifix. La Cour a statué de deux façons différentes. Sur la liberté de religion, elle a donné raison à Nadia Eweida, hôtesse de British Airways, qui avait été inquiétée en 2006, parce qu’elle a considéré que la compagnie avait donné trop d’importance à son image et qu’elle permettait à d’autres croyants de porter des signes religieux dans le cadre de leur travail. Le Royaume Uni devra lui verser un dédommagement de 2000 euros au titre du dommage moral et 30.000 euros pour ses frais de justice. Mais la Cour a donné tort à une autre plaignante, Shirley Chaplin, infirmière, qui avait refusé d’enlever son crucifix pour des raisons de sécurité avancées par l’hôpital où elle travaillait.
Discrimination des chrétiens contre discrimination des homosexuels ? Strasbourg a jugé en faveur des gays et lesbiennes, rappelant que “toute différence de traitement fondée sur l’orientation sexuelle ne peut se justifier que par des raisons particulièrement solides et que la situation des couples homosexuels est comparable à celle des couples hétérosexuels en ce qui concerne le besoin d’une reconnaissance juridique et la protection de leurs relations”. Elle a ajouté : “Lorsque la pratique religieuse d’un individu empiète sur les droits d’autrui, elle peut faire l’objet de restrictions.”
Pourtant, Gary McFarlane n’a jamais eu l’impression de léser quiconque, du temps où il travaillait à l’antenne de Bristol de l’association “Relate”, spécialisée dans la réparation des couples. “J’avais annoncé mon souhait de faire de la thérapie sexuelle, soit des exercices concrets pour aider les couples à se débloquer. Lorsque mon employeur m’a posé la question de savoir si je le ferais pour les gays et lesbiennes, je n’ai pas dit non. Je lui ai dit que cela me mettait en conflit avec ma foi et les valeurs chrétiennes”.
En octobre 2007, Gary est sommé de se plier, sans restriction, au règlement intérieur qui interdit la discrimination homophobe. Il temporise. Il est suspendu quelques semaines, puis réintégré. Avant d’être définitivement licencié en mars 2008, pour faute grave. Trois instances de recours plus tard, le juge anglais tranchera ainsi : “Les préceptes d’une religion, quelle qu’elle soit, ne peuvent pas s’imposer plus qu’une autre au regard du Droit.”