Les évangéliques appellent à manifester contre le mariage pour tous
Henrik Lindell - publié le 11/01/2013
Contrairement à l'Eglise catholique et à la Fédération protestante, le Conseil national des évangéliques de France appelle à manifester dimanche contre le mariage pour tous. Une mobilisation qui s’explique par la forte unité de vue des évangéliques autour des questions de société et de famille.
Parmi les chrétiens présents à la "Manif pour tous" du 13 janvier, il n’y aura pas que des catholiques. Un nombre non négligeable viendra des Eglises évangéliques. Leur principale organisation – le Conseil national des évangéliques de France, regroupant 70% des quelque 600 000 évangéliques en France – appelle à la mobilisation. Dans un communiqué du 9 janvier, cette organisation explique que ses dirigeants seront « dans la rue au côté des manifestants ». Parmi les motifs, il est surtout question de défendre « l'intérêt supérieur des enfants » et la famille traditionnelle. Selon le CNEF, l'instauration d'un nouveau cadre juridique et symbolique en matière de mariage « créerait une filiation fictive, source de confusion et de menace pour la cellule familiale, alors que celle-ci structure pourtant toute la société ».
Cet appel à manifester est exceptionnel dans son genre : le CNEF est la seule organisation chrétienne représentative à le proposer. La raison tient à l'unité des évangéliques sur les questions sociétales. « Chez nous, il y a une très grande unité religieuse, culturelle et même ecclésiale malgré la diversité de nos Eglises, explique Daniel Liechti, vice-président du CNEF, pasteur et un des rédacteurs de l’appel à la manif. On valorise très fortement les repères de la société et la famille. Cette unité est plus grande qu'au sein de la Fédération protestante ou chez les catholiques ou chez les musulmans. »
Auparavant, le CNEF a essayé de se faire entendre auprès de plusieurs ministres et de parlementaires, notamment le rapporteur du projet de loi Erwann Binet. « Nous en avons longuement discuté avec lui dans le cadre de ses consultations », rappelle Daniel Liechti. « Erwann Binet nous a répondu poliment que notre point de vue était respectable, mais très minoritaire et complètement dépassé dans la société d'aujourd'hui. » Selon Daniel Liechti, le gouvernement défend l'idée que « le législateur ne doit pas chercher à trop orienter la société, mais plutôt l'accompagner dans l'évolution de ses mœurs en créant un cadre législatif pour un état de fait. D'où ce projet de loi qui permettrait de trouver une solution pour les familles homoparentales déjà existantes. Mais on aurait pu faire autrement. Améliorer le PACS, par exemple. »
Chez les évangéliques, on exige surtout des « repères clairs », notamment dans le domaine familial. Leur vision du mariage ressemble fortement à celle défendue par l'Eglise catholique, le sacrement en moins. « Puisque nos arguments sont tenus pour peu de chose, notre réaction citoyenne est de manifester, explique Daniel Liechti. Nous aimerions faire comprendre que nous ne sommes pas une si petite minorité que ça et que notre point de vue n’a rien de dépassé. »
Paradoxes apparents
Dépassés les évangéliques ? Disons qu'ils cultivent des paradoxes apparents. Ultra-minoritaires et globalement assez méconnus en France, ils constituent le seul courant chrétien en forte croissance. Conservateurs en théologie et sur le plan des mœurs, pour beaucoup issus de l'Eglise catholique, ces protestants, souvent charismatiques, attirent néanmoins un public remarquablement jeune, surtout dans les classes populaires urbaines et dans des milieux marqués par des ruptures familiales.
Très pratiquants et actifs dans l'évangélisation, les évangéliques sont également investis dans des actions sociales. Militants dans la foi, ils défendent aussi la laïcité et le principe de séparation entre Eglise et Etat. Des caractéristiques qui, au total, pourraient expliquer un engagement « pro-famille » très contemporain, qui ne se veut pas religieux, mais citoyen. « On ne cache pas que le mariage homosexuel nous semble contraire à l'enseignement de la Bible (à ce titre, on peut lire cet article du président du CNEF Etienne Lhermenault, ndlr). Mais ici, pour cette manifestation, on met en avant l'argument anthropologique et le bon sens, dit Daniel Liechti. Le CNEF invite les chrétiens à prendre leur responsabilité de citoyen. C'est un combat républicain, pas religieux. Chez nous, on ne mélange pas religion et politique. »
Les évangéliques manifestent contre le mariage homosexuel au nom de leurs valeurs de citoyens. Mais manifesteraient-ils aussi contre le système économique ou l'exclusion sociale, des phénomènes qui pourraient les choquer autant et au nom des mêmes valeurs ? Pour Daniel Liechti, aucun projet de loi ne suscite la même urgence d'investir la rue que celui sur le mariage pour tous. « Je n'ai jamais vu un appel à la mobilisation susciter autant de réactions positives, spontanées, chez nous. Je m'attends à une forte mobilisation de nos troupes. »
Henrik Lindell - publié le 11/01/2013
Contrairement à l'Eglise catholique et à la Fédération protestante, le Conseil national des évangéliques de France appelle à manifester dimanche contre le mariage pour tous. Une mobilisation qui s’explique par la forte unité de vue des évangéliques autour des questions de société et de famille.
Parmi les chrétiens présents à la "Manif pour tous" du 13 janvier, il n’y aura pas que des catholiques. Un nombre non négligeable viendra des Eglises évangéliques. Leur principale organisation – le Conseil national des évangéliques de France, regroupant 70% des quelque 600 000 évangéliques en France – appelle à la mobilisation. Dans un communiqué du 9 janvier, cette organisation explique que ses dirigeants seront « dans la rue au côté des manifestants ». Parmi les motifs, il est surtout question de défendre « l'intérêt supérieur des enfants » et la famille traditionnelle. Selon le CNEF, l'instauration d'un nouveau cadre juridique et symbolique en matière de mariage « créerait une filiation fictive, source de confusion et de menace pour la cellule familiale, alors que celle-ci structure pourtant toute la société ».
Cet appel à manifester est exceptionnel dans son genre : le CNEF est la seule organisation chrétienne représentative à le proposer. La raison tient à l'unité des évangéliques sur les questions sociétales. « Chez nous, il y a une très grande unité religieuse, culturelle et même ecclésiale malgré la diversité de nos Eglises, explique Daniel Liechti, vice-président du CNEF, pasteur et un des rédacteurs de l’appel à la manif. On valorise très fortement les repères de la société et la famille. Cette unité est plus grande qu'au sein de la Fédération protestante ou chez les catholiques ou chez les musulmans. »
Auparavant, le CNEF a essayé de se faire entendre auprès de plusieurs ministres et de parlementaires, notamment le rapporteur du projet de loi Erwann Binet. « Nous en avons longuement discuté avec lui dans le cadre de ses consultations », rappelle Daniel Liechti. « Erwann Binet nous a répondu poliment que notre point de vue était respectable, mais très minoritaire et complètement dépassé dans la société d'aujourd'hui. » Selon Daniel Liechti, le gouvernement défend l'idée que « le législateur ne doit pas chercher à trop orienter la société, mais plutôt l'accompagner dans l'évolution de ses mœurs en créant un cadre législatif pour un état de fait. D'où ce projet de loi qui permettrait de trouver une solution pour les familles homoparentales déjà existantes. Mais on aurait pu faire autrement. Améliorer le PACS, par exemple. »
Chez les évangéliques, on exige surtout des « repères clairs », notamment dans le domaine familial. Leur vision du mariage ressemble fortement à celle défendue par l'Eglise catholique, le sacrement en moins. « Puisque nos arguments sont tenus pour peu de chose, notre réaction citoyenne est de manifester, explique Daniel Liechti. Nous aimerions faire comprendre que nous ne sommes pas une si petite minorité que ça et que notre point de vue n’a rien de dépassé. »
Paradoxes apparents
Dépassés les évangéliques ? Disons qu'ils cultivent des paradoxes apparents. Ultra-minoritaires et globalement assez méconnus en France, ils constituent le seul courant chrétien en forte croissance. Conservateurs en théologie et sur le plan des mœurs, pour beaucoup issus de l'Eglise catholique, ces protestants, souvent charismatiques, attirent néanmoins un public remarquablement jeune, surtout dans les classes populaires urbaines et dans des milieux marqués par des ruptures familiales.
Très pratiquants et actifs dans l'évangélisation, les évangéliques sont également investis dans des actions sociales. Militants dans la foi, ils défendent aussi la laïcité et le principe de séparation entre Eglise et Etat. Des caractéristiques qui, au total, pourraient expliquer un engagement « pro-famille » très contemporain, qui ne se veut pas religieux, mais citoyen. « On ne cache pas que le mariage homosexuel nous semble contraire à l'enseignement de la Bible (à ce titre, on peut lire cet article du président du CNEF Etienne Lhermenault, ndlr). Mais ici, pour cette manifestation, on met en avant l'argument anthropologique et le bon sens, dit Daniel Liechti. Le CNEF invite les chrétiens à prendre leur responsabilité de citoyen. C'est un combat républicain, pas religieux. Chez nous, on ne mélange pas religion et politique. »
Les évangéliques manifestent contre le mariage homosexuel au nom de leurs valeurs de citoyens. Mais manifesteraient-ils aussi contre le système économique ou l'exclusion sociale, des phénomènes qui pourraient les choquer autant et au nom des mêmes valeurs ? Pour Daniel Liechti, aucun projet de loi ne suscite la même urgence d'investir la rue que celui sur le mariage pour tous. « Je n'ai jamais vu un appel à la mobilisation susciter autant de réactions positives, spontanées, chez nous. Je m'attends à une forte mobilisation de nos troupes. »