Imaginez-vous un instant ne plus entendre le chant des oiseaux, n’avoir sous les yeux qu’un ciel vide et silencieux ? Pourriez-vous vivre dans un tel monde ? Serait-il seulement vivable ? Nombreux sont ceux à s’être réjouis, durant le confinement, de pouvoir de nouveau écouter le chant des oiseaux, rendu plus audible par la réduction de l’activité humaine, et du bruit qu’elle génère.
Mais les chiffres sont dramatiques : 60% des oiseaux des champs ont disparu en quarante ans. Dit autrement, depuis 1980, un quart des oiseaux d’Europe ont tout bonnement disparu, et le chiffre monte à 60% en milieu agricole. Les principaux coupables ? Selon une étude du CNRS tout récemment parue dans PNAS (Proceedings of the National Academy of Sciences), ils sont au nombre de deux : l’usage de pesticides et l’agriculture intensive. Plus largement, cette vaste étude s’est intéressée à tout ce qui pouvait avoir des conséquences sur la biodiversité en général et les oiseaux en particulier : changement climatique, pression agricole entre engrais et pesticides, urbanisation, couvert forestier… La base de données inédite utilisée concerne 30 pays, 170 espèces, plus de 20 000 sites de suivi écologique, et aura supposé qu’une cinquantaine de chercheurs standardisent leurs données pour les rendre comparables dans le temps et l’espace.
Notre continent a donc bel et bien perdu près d’un quart de ses volatiles en un peu moins de quatre décennies. Le constat de la vaste collaboration scientifique européenne menée sous l'égide du CNRS est sans appel : s’il manque 800 millions d’oiseaux dans le ciel d’Europe, l’impact des activités humaines est indéniable. Bien plus que celui de l’appétit des félins, pourtant tout sauf négligeable. C’est avant tout parce que les engrais et les pesticides affectent l’écologie des insectes. « Les pratiques agricoles entraînent le déclin des populations d'oiseaux dans toute l'Europe, soulignent ainsi les chercheurs. En utilisant l'ensemble de données empiriques le plus récent et le plus vaste jamais rassemblé pour l'Europe pour étudier l'effet des pressions anthropiques, nous avons mis en évidence l'impact prédominant de l'intensification de l'agriculture sur la biodiversité aviaire à l'échelle continentale sur le changement climatique, l'urbanisation et les changements du couvert forestier. » Les oiseaux étant justement insectivores pour nourrir les plus jeunes, le manque de nourriture ne saurait être sans conséquence. Quant aux granivores, s’ils ingèrent à la fois semences et pesticides, le résultat est le même. « Engrais et pesticides peuvent perturber l’équilibre de toute la chaîne alimentaire d’un écosystème », souligne l’étude. Ajoutez à cela les remembrements, la suppression des haies et donc des habitats des oiseaux pour vivre et se nourrir, et la disparition de ce maillon clé de notre écosystème sonne comme une triste évidence. S’ajoute à ces facteurs l’augmentation globale des températures. On a ainsi constaté un déclin de 40% des espèces préférant le froid, et de 18% de celles préférant le chaud.
Cette étude aura également permis de constater des disparités dans l'étendue de la disparition des oiseaux, selon les espèces. Ainsi, le nombre d’oiseaux forestiers a diminué de 18%, celui des oiseaux urbains de 28%. Mais celui des oiseaux des milieux agricoles est en chute de 57%. Certaines espèces ont même perdu les trois quart de leur population, telles le moineau friquet ou le tarier des prés.
Demain, pourrons-nous seulement vivre dans un monde sans oiseaux ? Lorsqu’une espèce disparaît, d’autres la suivent. Une disparition de masse ne saurait être sans conséquence. Mais en soi, un quotidien dans lequel ne résonnerait plus leurs chants que l’on aimerait tant comprendre serait a minima bien triste.
Judikael Hirel
Mais les chiffres sont dramatiques : 60% des oiseaux des champs ont disparu en quarante ans. Dit autrement, depuis 1980, un quart des oiseaux d’Europe ont tout bonnement disparu, et le chiffre monte à 60% en milieu agricole. Les principaux coupables ? Selon une étude du CNRS tout récemment parue dans PNAS (Proceedings of the National Academy of Sciences), ils sont au nombre de deux : l’usage de pesticides et l’agriculture intensive. Plus largement, cette vaste étude s’est intéressée à tout ce qui pouvait avoir des conséquences sur la biodiversité en général et les oiseaux en particulier : changement climatique, pression agricole entre engrais et pesticides, urbanisation, couvert forestier… La base de données inédite utilisée concerne 30 pays, 170 espèces, plus de 20 000 sites de suivi écologique, et aura supposé qu’une cinquantaine de chercheurs standardisent leurs données pour les rendre comparables dans le temps et l’espace.
Notre continent a donc bel et bien perdu près d’un quart de ses volatiles en un peu moins de quatre décennies. Le constat de la vaste collaboration scientifique européenne menée sous l'égide du CNRS est sans appel : s’il manque 800 millions d’oiseaux dans le ciel d’Europe, l’impact des activités humaines est indéniable. Bien plus que celui de l’appétit des félins, pourtant tout sauf négligeable. C’est avant tout parce que les engrais et les pesticides affectent l’écologie des insectes. « Les pratiques agricoles entraînent le déclin des populations d'oiseaux dans toute l'Europe, soulignent ainsi les chercheurs. En utilisant l'ensemble de données empiriques le plus récent et le plus vaste jamais rassemblé pour l'Europe pour étudier l'effet des pressions anthropiques, nous avons mis en évidence l'impact prédominant de l'intensification de l'agriculture sur la biodiversité aviaire à l'échelle continentale sur le changement climatique, l'urbanisation et les changements du couvert forestier. » Les oiseaux étant justement insectivores pour nourrir les plus jeunes, le manque de nourriture ne saurait être sans conséquence. Quant aux granivores, s’ils ingèrent à la fois semences et pesticides, le résultat est le même. « Engrais et pesticides peuvent perturber l’équilibre de toute la chaîne alimentaire d’un écosystème », souligne l’étude. Ajoutez à cela les remembrements, la suppression des haies et donc des habitats des oiseaux pour vivre et se nourrir, et la disparition de ce maillon clé de notre écosystème sonne comme une triste évidence. S’ajoute à ces facteurs l’augmentation globale des températures. On a ainsi constaté un déclin de 40% des espèces préférant le froid, et de 18% de celles préférant le chaud.
Cette étude aura également permis de constater des disparités dans l'étendue de la disparition des oiseaux, selon les espèces. Ainsi, le nombre d’oiseaux forestiers a diminué de 18%, celui des oiseaux urbains de 28%. Mais celui des oiseaux des milieux agricoles est en chute de 57%. Certaines espèces ont même perdu les trois quart de leur population, telles le moineau friquet ou le tarier des prés.
Demain, pourrons-nous seulement vivre dans un monde sans oiseaux ? Lorsqu’une espèce disparaît, d’autres la suivent. Une disparition de masse ne saurait être sans conséquence. Mais en soi, un quotidien dans lequel ne résonnerait plus leurs chants que l’on aimerait tant comprendre serait a minima bien triste.
Judikael Hirel