[size=44]Pourquoi Jésus se soumet au rite du baptême dont il n’a pas besoin ?[/size]
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Fresque représentant le baptême du Christ par S.G Rudl, église Svatého Václava à Prague.
Fr. Jean-Thomas de Beauregard, op - Publié le 09/01/21
Le baptême de Jésus est une cristallisation de tout le mystère chrétien : la révélation de l’humilité du fils de Dieu, dans l’intimité de la Trinité, le signe de notre association à la mort et la résurrection du Christ.
Le baptême de Jésus est relaté presque dans les mêmes termes par les quatre évangélistes. Cette unanimité confère au récit une crédibilité d’autant plus grande qu’a priori les évangélistes auraient dû être mal à l’aise avec l’idée que Jésus, fils de Dieu et Dieu lui-même, Jésus qui est le Saint par excellence, Jésus qui n’a pas connu le péché, ait pu vouloir recevoir le baptême. En effet, le baptême a pour objectif premier de racheter du péché originel celui qui le reçoit et de lui conférer l’adoption filiale par Dieu le Père dans l’Esprit-Saint. Or Jésus n’est pas pécheur, et il est déjà fils de Dieu par nature, il n’a donc aucun besoin du baptême, encore moins des mains de son cousin Jean-Baptiste.
Un baptême pour rien ?
Tout aurait dû embarrasser les évangélistes dans cette histoire, et pourtant, ils la rapportent tous, sans fausse note (cf. Mc 1, 7-11). Comme pour la trahison de Pierre ou tout autre récit qui montre les apôtres en médiocre posture, le fait même que les Évangiles rapportent le baptême de Jésus alors qu’il eût été si facile de jeter dessus un voile pudique donne à ce récit un cachet de crédibilité incontestable. Il est donc absolument certain que Jésus s’est soumis au baptême de Jean-Baptiste.
Rien ne pouvait faire de Jésus plus et mieux que ce qu’il était déjà, depuis toujours en son éternité, sans que son Incarnation ait rien diminué de cette perfection toute divine.
Pour autant qu’on le sache, le baptême conféré par Jean-Baptiste était un rite de purification, avec une exigence de conversion, en vue du Royaume à venir. Très inférieur, donc, au baptême chrétien de rémission des péchés et d’entrée dans la vie divine par la grâce d’adoption. Mais même ainsi, Jésus n’avait en lui rien à purifier ni à convertir. L’important n’est donc pas tellement dans l’effet du baptême de Jean-Baptiste sur Jésus. Rien ne pouvait faire de Jésus plus et mieux que ce qu’il était déjà, depuis toujours en son éternité, sans que son Incarnation ait rien diminué de cette perfection toute divine. Alors pourquoi Jésus a-t-il voulu recevoir ce baptême qui ne lui apportait rien ?
Pour les hommes
Faut-il penser alors que Jésus a été le premier bénéficiaire de la Révélation apportée par la voix céleste lorsque les cieux se sont déchirés et que la colombe de l’Esprit-Saint a reposé sur lui tandis qu’on entendait : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j’ai mis toute ma joie » ? Certains hérétiques ont cru cela : Jésus n’aurait été qu’un homme, adopté par Dieu lors de son baptême. Jésus serait devenu Dieu, ou aurait pris conscience qu’il était Dieu, à la faveur de cet événement spectaculaire. Mais Jésus était Dieu de toute éternité et il n’a pas eu à apprendre qu’il l’était. Il suffit d’ailleurs d’imaginer la scène pour en voir tout le ridicule : « Ça alors, je suis Dieu ! Incroyable ! » Si vraiment les choses s’étaient passées ainsi, à n’en pas douter Jésus serait sérieusement parti en vrille, avant de se faire interner en hôpital psychiatrique…
S’il faut résumer, rien dans cette affaire n’est arrivé pour le bénéfice de Jésus. Il n’en a rien retiré pour lui-même. Ce constat vaut d’ailleurs pour la plupart des récits de l’Évangile : Jésus expérimente vraiment cette vie humaine qu’il a voulue assumer, il ne fait pas semblant, mais tout ce qu’il expérimente, tout ce qu’il vit, c’est pour nous qu’il l’expérimente et le vit. Durant son pèlerinage terrestre, Jésus est tout entier et toujours pour nous. Toute l’existence humaine de Jésus n’a qu’un seul but : nous enseigner, nous sauver, nous montrer son amour. C’est donc pour nous qu’il reçoit ce baptême et qu’il est désigné comme le Fils de Dieu.
La révélation de son humilité
D’ailleurs, si chez Marc (1, 7-11) ou Luc (3, 16) on pourrait très bien imaginer que toute la scène est une expérience intérieure à Jésus, du type du songe prophétique ou de la vision, la manière dont Matthieu (3, 11) rapporte la scène exclut cette hypothèse : il semble bien que la voix céleste s’adresse au spectateur de l’événement plutôt qu’à Jésus lui-même. Chez Jean (1, 32), le cousin Jean-Baptiste témoigne d’ailleurs solennellement qu’il n’a pas seulement baptisé Jésus, mais qu’il a vu la colombe de l’Esprit-Saint et entendu la voix du Père. C’est donc que, dans le plan de Dieu, toute la scène était destinée, au minimum, à Jean-Baptiste. Il fallait que Jean-Baptiste voie et entende tout cela, pour qu’il puisse reconnaître Jésus comme le Messie, le Fils de Dieu. Il fallait que Jean-Baptiste voie et entende tout cela pour qu’il puisse en témoigner à la face du monde. Et par lui, c’est nous qui voyons les cieux s’ouvrir et la colombe descendre, c’est nous qui entendons la voix du Père proclamer : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé. » Par Jean-Baptiste, nous assistons à l’intronisation de Jésus. Au baptême, Jésus est manifesté comme Dieu, comme Messie, comme Roi.
J'au trouvé cette article intéressant et nous pouvons en débattre.