Rappel du premier message :
Régis Dericquebourg
L’IMPLANTATION DES ÉDIFICES
CULTUELS DES TÉMOINS DE JÉHOVAH
EN FRANCE
Le jéhovisme, issu du Mouvement des Étudiants de
la Bible fondé aux États-Unis par Charles Taze Russell
(1852-1916) fait aujourd’hui partie du paysage religieux
de la France (Introvigne, 1990 ; Blandre, 1991 ;
Barbey, 2003). Chaque jour des Témoins de Jéhovah
en prédication sonnent aux portes. Ils laissent à ceux
qui leur prêtent attention deux revues : La tour de garde
et Réveillez-vous ; ils leur proposent l’étude gratuite de
leur enseignement et ils les invitent à écouter le « discours
biblique » du dimanche après-midi dans leurs
lieux de culte.
Le premier proclamateur du russellisme en Suisse,
en France et en Belgique a été Adolf Erwin Weber, né
le 19 juin 1863 à Brüttelen et mort le 4 février 1948 à
la Chaux-de-Fond. Dans sa jeunesse, il s’était rendu
aux États-Unis où, par hasard, il était devenu le jardinier
de C. T. Russell. Fidèle des conférences de son
patron, il avait été convaincu par son interprétation
des Écritures, et s’était fait baptiser en 1890. Après
son retour en Suisse vers 1895, Weber travaille comme
jardinier et comme forestier tout en faisant du prosélytisme.
Il prospecte dans le canton de Vaud en utilisant
sa propre traduction du premier volume des
Études dans les écritures de Russell et du premier
numéro du périodique des Étudiants de la Bible : Le
phare de Sion (octobre 1903). Sa stratégie consiste à
passer des petites annonces dans les journaux et dans
les périodiques locaux pour proposer les Écrits de Russell.
Chaque hiver, il se rend en France, en Belgique et
en Italie pour faire de la prédication. En 1904, il vient
en France dans la région du Doubs. Il se rend ensuite
à Charleroi et à Ampsin (Belgique) où il fonde les premiers
groupes d’Étudiants de la Bible. Avec quelques
proclamateurs belges1, il prospecte dans le bassin
minier du nord de la France, distribuant des tracts à la
sortie des temples baptistes. Sa prédication porte ses
fruits puisqu’en 1906 quelques baptistes quittent leur
congrégation pour former à Denain (Nord) un petit
groupe d’Étudiants de la Bible qui se réunit chez les
uns et les autres pour étudier les Écrits de Russell. De
1906 à 1909, le mouvement se propage dans le Bassin
minier : un groupe important (ecclesia) se constitue à
Lens puis d’autres à Hénin-Liétard, Auchel, Flinesles-
Râches, Sin-le-Noble. Un autre est fondé à Roubaix.
Le mouvement recrute essentiellement des
mineurs et des ouvriers. Entre 1914 et 1918, d’autres
groupes se forment à Paris, Le Havre, Sainte-Suzanne
(Mayenne), Oyonnax, Rodez, Montceau-les-Mines,
Bruay-en-Artois (Pas-de-Calais). Le mouvement des
Étudiants de la Bible démarre cependant lentement
en France par comparaison avec les pays anglophones
et scandinaves. Russell attribuait ce fait à l’influence
« néfaste » des catholiques et il n’investissait pas beaucoup
dans le prosélytisme en France. Mais le russellisme
s’est tout de même développé dans le Nord-Pasde-
Calais au point que sur les cinq périples que
Russell effectua en France, deux le firent passer par
cette région, dans des petites villes comme Denain et
Lens. La commémoration de la Cène de 1914 réunit 48
personnes. À partir de 1920, le recrutement s’intensifie
dans la région minière grâce à l’apport d’émigrés
polonais. Certains de ces émigrants venus d’Allemagne
(les Polono-Westphaliens) avaient déjà été
contactés par des Étudiants de la Bible en Westphalie.
On a qualifié l’activité des Étudiants de la Bible de
« religion des Polonais ». Les Zloty Wiek, titre leur
revue (l’Âge d’or) en langue polonaise (Dericquebourg,
1977).
En 1917, un an après la mort de C. T. Russel (1916),
le mouvement des Étudiants de la Bible s’est scindé en
deux branches à l’issue d’un conflit entre les prétendants
à la succession du prophète fondateur. L’une,
plus active, a pris en 1931, le nom de « Témoins de
Jéhovah ». Son véritable démarrage en France s’effectue
dans les années 1950. Depuis cette date, le nombre
de fidèles est passé de 4 600 à 133 000 en 2001.
En 1922, la plus ancienne Salle du Royaume de
France fut construite à Denain. On comptait alors 300
Les Annales de la recherche urbaine n° 96, 0180-930-X-04/96/pp. 83-89 © METATTM
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Régis Dericquebourg
L’IMPLANTATION DES ÉDIFICES
CULTUELS DES TÉMOINS DE JÉHOVAH
EN FRANCE
Le jéhovisme, issu du Mouvement des Étudiants de
la Bible fondé aux États-Unis par Charles Taze Russell
(1852-1916) fait aujourd’hui partie du paysage religieux
de la France (Introvigne, 1990 ; Blandre, 1991 ;
Barbey, 2003). Chaque jour des Témoins de Jéhovah
en prédication sonnent aux portes. Ils laissent à ceux
qui leur prêtent attention deux revues : La tour de garde
et Réveillez-vous ; ils leur proposent l’étude gratuite de
leur enseignement et ils les invitent à écouter le « discours
biblique » du dimanche après-midi dans leurs
lieux de culte.
Le premier proclamateur du russellisme en Suisse,
en France et en Belgique a été Adolf Erwin Weber, né
le 19 juin 1863 à Brüttelen et mort le 4 février 1948 à
la Chaux-de-Fond. Dans sa jeunesse, il s’était rendu
aux États-Unis où, par hasard, il était devenu le jardinier
de C. T. Russell. Fidèle des conférences de son
patron, il avait été convaincu par son interprétation
des Écritures, et s’était fait baptiser en 1890. Après
son retour en Suisse vers 1895, Weber travaille comme
jardinier et comme forestier tout en faisant du prosélytisme.
Il prospecte dans le canton de Vaud en utilisant
sa propre traduction du premier volume des
Études dans les écritures de Russell et du premier
numéro du périodique des Étudiants de la Bible : Le
phare de Sion (octobre 1903). Sa stratégie consiste à
passer des petites annonces dans les journaux et dans
les périodiques locaux pour proposer les Écrits de Russell.
Chaque hiver, il se rend en France, en Belgique et
en Italie pour faire de la prédication. En 1904, il vient
en France dans la région du Doubs. Il se rend ensuite
à Charleroi et à Ampsin (Belgique) où il fonde les premiers
groupes d’Étudiants de la Bible. Avec quelques
proclamateurs belges1, il prospecte dans le bassin
minier du nord de la France, distribuant des tracts à la
sortie des temples baptistes. Sa prédication porte ses
fruits puisqu’en 1906 quelques baptistes quittent leur
congrégation pour former à Denain (Nord) un petit
groupe d’Étudiants de la Bible qui se réunit chez les
uns et les autres pour étudier les Écrits de Russell. De
1906 à 1909, le mouvement se propage dans le Bassin
minier : un groupe important (ecclesia) se constitue à
Lens puis d’autres à Hénin-Liétard, Auchel, Flinesles-
Râches, Sin-le-Noble. Un autre est fondé à Roubaix.
Le mouvement recrute essentiellement des
mineurs et des ouvriers. Entre 1914 et 1918, d’autres
groupes se forment à Paris, Le Havre, Sainte-Suzanne
(Mayenne), Oyonnax, Rodez, Montceau-les-Mines,
Bruay-en-Artois (Pas-de-Calais). Le mouvement des
Étudiants de la Bible démarre cependant lentement
en France par comparaison avec les pays anglophones
et scandinaves. Russell attribuait ce fait à l’influence
« néfaste » des catholiques et il n’investissait pas beaucoup
dans le prosélytisme en France. Mais le russellisme
s’est tout de même développé dans le Nord-Pasde-
Calais au point que sur les cinq périples que
Russell effectua en France, deux le firent passer par
cette région, dans des petites villes comme Denain et
Lens. La commémoration de la Cène de 1914 réunit 48
personnes. À partir de 1920, le recrutement s’intensifie
dans la région minière grâce à l’apport d’émigrés
polonais. Certains de ces émigrants venus d’Allemagne
(les Polono-Westphaliens) avaient déjà été
contactés par des Étudiants de la Bible en Westphalie.
On a qualifié l’activité des Étudiants de la Bible de
« religion des Polonais ». Les Zloty Wiek, titre leur
revue (l’Âge d’or) en langue polonaise (Dericquebourg,
1977).
En 1917, un an après la mort de C. T. Russel (1916),
le mouvement des Étudiants de la Bible s’est scindé en
deux branches à l’issue d’un conflit entre les prétendants
à la succession du prophète fondateur. L’une,
plus active, a pris en 1931, le nom de « Témoins de
Jéhovah ». Son véritable démarrage en France s’effectue
dans les années 1950. Depuis cette date, le nombre
de fidèles est passé de 4 600 à 133 000 en 2001.
En 1922, la plus ancienne Salle du Royaume de
France fut construite à Denain. On comptait alors 300
Les Annales de la recherche urbaine n° 96, 0180-930-X-04/96/pp. 83-89 © METATTM
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