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Sicile, un solstice païen de bijoux, de tissus et de fleurs.

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Josué

Josué
Administrateur

[size=78]En Sicile, un solstice païen de bijoux, de tissus et de fleurs[/size]
Par Diane Lisarelli

Publié aujourd’hui à 07h15

EN IMAGESChaque 24 juin, les maisons, les balcons et les trottoirs du village d’Alcara Li Fusi s’ornent de cruches magnifiquement ornées. La photographe Bea De Giacomo s’est invitée dans ce rite qui célèbre la féminité.

C’est le rite le plus ancien d’Italie. En Sicile, à Alcara Li Fusi, petit village de la province de Messine, le solstice d’été est célébré depuis des siècles avec d’étranges totems : les « muzzuni », des cruches coupées ou « décapitées » recouvertes de riches tissus et ornées de bijoux en or. A l’intérieur de celles-ci : de l’orge, qui a poussé dans l’obscurité les jours précédents, à laquelle s’ajoutent des épis de blé déjà mûrs, de la lavande et des œillets. La photographe Bea De Giacomo, fascinée par cette tradition, s’est rendue en 2018 jusqu’à ce petit village niché sur les monts Nébrodes et y a réalisé une série baptisée Cantica d’amore.

Accueillie chaleureusement, elle y a photographié ces hommes et surtout ces femmes qui répètent un rituel datant du temps où cette partie de la Sicile était grecque. Un rite païen, où est célébrée la fertilité de la terre, mais aussi le féminin. Une tradition que l’Eglise catholique a bien essayé de neutraliser, en le décalant de quelques jours et en y accolant une procession de la Saint-Jean-Baptiste. Sans grand succès.

Chaque année, le 24 juin, sur les trottoirs, les balcons ou même les rebords des fenêtres sont apprêtés de petits autels, recouverts des tapis typiques sur lesquels sont disposés les « laureddi » (les pousses d’orge) ainsi que différents objets liés au monde paysan. Un aspect auquel s’intéresse particulièrement Bea De Giacomo qui vit et travaille à Milan où elle développe un univers singulier, oscillant entre nature morte, travail de studio et photographie plus intimiste.

[size=34]Le lointain écho des fêtes dionysiaques[/size]


On sait au moins depuis l’ouvrage de référence de ­l’ethnologue Ernesto De Martino, Italie du Sud et magie (Gallimard, 1963), que les terres du sud de la Péninsule regorgent de vestiges magico-­religieux. Des « explosions véritablement païennes », selon Leonardo Sciascia (auteur de Fêtes religieuses en Sicile, dans Le Cliquet de la folie, Denoël, 1975), qui sont bien plus qu’un simple élément pittoresque en ce qu’ils témoignent de conditions historiques, économiques et sociales très particulières.

La tradition des muzzuni trouverait ses racines dans la communauté grecque venue en Sicile après la chute de Troie. Elle est en ce sens liée à la mythologie. Les pousses émergeant de la cruche représentent en effet les jardins d’Adonis plantés pendant les fêtes athéniennes. La cruche, elle, est un symbole phallique dont les femmes prennent soin et sur lequel l’or appelle abondance et prospérité.

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