[size=62]C’est quoi, un bot, et ça sert à quoi ?[/size]
Publié le 21 novembre 2016 à 20h15
L’avenir, ce sera de parler à des robots plutôt qu’à des vendeurs ou des téléopérateurs de centres d’appels ? Peut-être. C’est en tout cas la vision portée par plusieurs géants de la tech, notamment Facebook.
Le plus grand réseau social au monde propose en effet à tout type d’entreprise de créer des « bots », des systèmes interactifs robotisés, dans son application Messenger pour tchatter – de la pluie et du beau temps mais pas seulement – avec les utilisateurs de la messagerie.
Cela faisait un an que Facebook expérimentait cette intégration de services dans Messenger avec des boîtes comme Uber ou Voyages-Sncf. D’autres messageries, de Telegram à Kik, très prisée des ados américains, s’étaient mises aux « bots » bien avant Facebook, dans une optique pas forcément aussi commerciale :
Tchatter avec un robot - Kik
Les « bots », contraction par aphérèse de « robots », ne datent pas d’hier : à l’origine, ce sont des logiciels informatiques réalisant des tâches automatisées. Par exemple parcourir le Web pour indexer les pages pour un moteur de recherche (les Google bots). Ou bien tchatter en direct – sur les sites de rencontre, les bots existent depuis un bail. Ou encore jouer un personnage dans un jeu vidéo.
Quel est l’intérêt pour nous, utilisateurs ? Et pourquoi toutes les entreprises regardent-elles avec une telle attention ce nouveau canal de communication avec les clients ? On a demandé à un expert des services sur mobile, Thomas Husson du cabinet Forrester, de nous décrypter tout ça.
Rue89 : C’est quoi, un bot, et ça sert à quoi ?
Thomas Husson : C’est une sorte de petit robot, ou plus exactement une nouvelle interface pour faciliter le dialogue et diverses formes de conversation entre un service et un consommateur.
Thomas Husson - Forrester
Cela peut être, par exemple des abonnements automatisés, comme la météo du jour, ou des messages personnalisés comme des confirmations de commande ou des notifications d’envoi d’un colis.
Les fonctionnalités sont assez basiques pour l’instant, mais comme les bots s’appuient sur l’intelligence artificielle, ils seront amenés à s’améliorer au fur et à mesure.
L’objectif d’un bot est-il de nous faire consommer ?
Pas forcément. C’est surtout pour le service client, le service après-vente. Il peut s’agir d’une question sur un horaire, où trouver un service, etc. Ce n’est pas forcément commercial, dans l’optique d’aboutir à un acte d’achat, et je ne crois pas trop à l’efficacité de cette approche-là. C’est plutôt de la fidélisation, de la rétention de clients.
Est-ce un paravent, un moyen de se prémunir d’un bad buzz sur les réseaux sociaux ?
C’est vrai que ça va permettre de déplacer beaucoup de conversations qui avaient lieu sur les flux Facebook et Twitter vers des messageries privées. D’où l’intérêt assez fort des marques pour leur service client. Des entreprises comme KLM, Axa ou Voyages-Sncf font partie des premières à se lancer. Pour une compagnie aérienne, ça permet de réagir en temps réel, en cas de grève ou de retard par exemple, de répondre à une question sur un transit, et d’éviter les effets viraux négatifs.
Est-ce finalement la nouvelle génération des assistants virtuels que l’on trouve sur les sites d’e-commerce ?
Cela part de la même idée, mais on ne peut pas vraiment dire que c’est la génération d’après, parce qu’il y a dans les bots une dimension transversale. Facebook a son propre assistant virtuel, « M », qui doit connecter tous ces bots entre eux. Les concurrents, Cortana de Microsoft, Siri d’Apple et Google Now ne sont pas vraiment ouverts aux autres développeurs pour l’instant, ils vont le devenir.
Exemple d’assistant virtuel intelligent pour site web - Nuance
Vont-ils remplacer les centres d’appels ?
Le patron de la start-up Conversocial [qui a conçu des logiciels de gestion de la relation client, ndlr] a effectivement déclaré qu’il allait tuer les call centers ! Le coût de mise en relation va être drastiquement réduit. Je pense qu’on aura cependant toujours besoin d’interaction humaine.
Ceci dit, 70% du script d’un centre d’appel peut être automatisé. Il faut ensuite que le client puisse accéder à un deuxième niveau. Cela permet aussi de rendre le service client disponible même à 3 heures du matin. Cela va bousculer le service client classique.
Est-ce qu’ils vont finir par remplacer aussi les community managers, en moins cher ?
C’est vrai qu’il y a une logique de réduction des coûts à long terme. Mais les entreprises devront conserver une présence directe sur les réseaux sociaux traditionnels.
Pour les banques, les assurances, les télécoms, tous les services qui ont des millions de clients, ce serait une erreur de ne pas regarder ce qu’il y a à faire avec les bots. Cependant, il ne faut surtout pas répliquer ce qui a été fait sur les app stores [en gros, avoir une appli pour avoir une appli, ndlr] : il faut vraiment que cela apporte de la valeur ajoutée.
Aller directement à la case bot c’est foncer droit dans le mur. Il faut savoir d’abord gérer la communication de crise, par exemple avec un community manager.
Le client peut déjà être baladé dans un call center ou perdu sur un forum remplaçant le service client classique. Ne risque-t-on pas de le rendre dingue ?
Quand on voit la dérive de l’intelligence artificielle avec le robot Tay de Microsoft [devenu raciste, ndlr], on peut effectivement se poser la question !
Mais si c’est bien pensé, cela peut simplifier l’expérience client. C’est comme une application bancaire : avant il fallait passer en agence ou envoyer un fax, c’est plus simple de passer par une app aujourd’hui.
On verra peut-être apparaître d’un côté de la conciergerie, et de l’autre un bot qui va vous renvoyer en boucle la même information. Il vaut mieux que les bots restent très ciblés, très spécifiques.
C’est le nouveau mot à la mode. Ces logiciels automatisés de conversation seraient les nouvelles applis et même l’avenir du Web. On a demandé à un expert de nous décrypter le phénomène.
Par Delphine CunyPublié le 21 novembre 2016 à 20h15
L’avenir, ce sera de parler à des robots plutôt qu’à des vendeurs ou des téléopérateurs de centres d’appels ? Peut-être. C’est en tout cas la vision portée par plusieurs géants de la tech, notamment Facebook.
Le plus grand réseau social au monde propose en effet à tout type d’entreprise de créer des « bots », des systèmes interactifs robotisés, dans son application Messenger pour tchatter – de la pluie et du beau temps mais pas seulement – avec les utilisateurs de la messagerie.
Cela faisait un an que Facebook expérimentait cette intégration de services dans Messenger avec des boîtes comme Uber ou Voyages-Sncf. D’autres messageries, de Telegram à Kik, très prisée des ados américains, s’étaient mises aux « bots » bien avant Facebook, dans une optique pas forcément aussi commerciale :
- Recevoir des blagues ou trouver des GIFs sur Kik.
- Créer un sondage, calculer une opération ou recevoir des actus de grands médias sur Telegram.
Tchatter avec un robot - Kik
Les « bots », contraction par aphérèse de « robots », ne datent pas d’hier : à l’origine, ce sont des logiciels informatiques réalisant des tâches automatisées. Par exemple parcourir le Web pour indexer les pages pour un moteur de recherche (les Google bots). Ou bien tchatter en direct – sur les sites de rencontre, les bots existent depuis un bail. Ou encore jouer un personnage dans un jeu vidéo.
Quel est l’intérêt pour nous, utilisateurs ? Et pourquoi toutes les entreprises regardent-elles avec une telle attention ce nouveau canal de communication avec les clients ? On a demandé à un expert des services sur mobile, Thomas Husson du cabinet Forrester, de nous décrypter tout ça.
Rue89 : C’est quoi, un bot, et ça sert à quoi ?
Thomas Husson : C’est une sorte de petit robot, ou plus exactement une nouvelle interface pour faciliter le dialogue et diverses formes de conversation entre un service et un consommateur.
Thomas Husson - Forrester
Cela peut être, par exemple des abonnements automatisés, comme la météo du jour, ou des messages personnalisés comme des confirmations de commande ou des notifications d’envoi d’un colis.
Les fonctionnalités sont assez basiques pour l’instant, mais comme les bots s’appuient sur l’intelligence artificielle, ils seront amenés à s’améliorer au fur et à mesure.
L’objectif d’un bot est-il de nous faire consommer ?
Pas forcément. C’est surtout pour le service client, le service après-vente. Il peut s’agir d’une question sur un horaire, où trouver un service, etc. Ce n’est pas forcément commercial, dans l’optique d’aboutir à un acte d’achat, et je ne crois pas trop à l’efficacité de cette approche-là. C’est plutôt de la fidélisation, de la rétention de clients.
Est-ce un paravent, un moyen de se prémunir d’un bad buzz sur les réseaux sociaux ?
C’est vrai que ça va permettre de déplacer beaucoup de conversations qui avaient lieu sur les flux Facebook et Twitter vers des messageries privées. D’où l’intérêt assez fort des marques pour leur service client. Des entreprises comme KLM, Axa ou Voyages-Sncf font partie des premières à se lancer. Pour une compagnie aérienne, ça permet de réagir en temps réel, en cas de grève ou de retard par exemple, de répondre à une question sur un transit, et d’éviter les effets viraux négatifs.
Est-ce finalement la nouvelle génération des assistants virtuels que l’on trouve sur les sites d’e-commerce ?
Cela part de la même idée, mais on ne peut pas vraiment dire que c’est la génération d’après, parce qu’il y a dans les bots une dimension transversale. Facebook a son propre assistant virtuel, « M », qui doit connecter tous ces bots entre eux. Les concurrents, Cortana de Microsoft, Siri d’Apple et Google Now ne sont pas vraiment ouverts aux autres développeurs pour l’instant, ils vont le devenir.
Exemple d’assistant virtuel intelligent pour site web - Nuance
Vont-ils remplacer les centres d’appels ?
Le patron de la start-up Conversocial [qui a conçu des logiciels de gestion de la relation client, ndlr] a effectivement déclaré qu’il allait tuer les call centers ! Le coût de mise en relation va être drastiquement réduit. Je pense qu’on aura cependant toujours besoin d’interaction humaine.
Ceci dit, 70% du script d’un centre d’appel peut être automatisé. Il faut ensuite que le client puisse accéder à un deuxième niveau. Cela permet aussi de rendre le service client disponible même à 3 heures du matin. Cela va bousculer le service client classique.
Est-ce qu’ils vont finir par remplacer aussi les community managers, en moins cher ?
C’est vrai qu’il y a une logique de réduction des coûts à long terme. Mais les entreprises devront conserver une présence directe sur les réseaux sociaux traditionnels.
Pour les banques, les assurances, les télécoms, tous les services qui ont des millions de clients, ce serait une erreur de ne pas regarder ce qu’il y a à faire avec les bots. Cependant, il ne faut surtout pas répliquer ce qui a été fait sur les app stores [en gros, avoir une appli pour avoir une appli, ndlr] : il faut vraiment que cela apporte de la valeur ajoutée.
Aller directement à la case bot c’est foncer droit dans le mur. Il faut savoir d’abord gérer la communication de crise, par exemple avec un community manager.
Le client peut déjà être baladé dans un call center ou perdu sur un forum remplaçant le service client classique. Ne risque-t-on pas de le rendre dingue ?
Quand on voit la dérive de l’intelligence artificielle avec le robot Tay de Microsoft [devenu raciste, ndlr], on peut effectivement se poser la question !
Mais si c’est bien pensé, cela peut simplifier l’expérience client. C’est comme une application bancaire : avant il fallait passer en agence ou envoyer un fax, c’est plus simple de passer par une app aujourd’hui.
On verra peut-être apparaître d’un côté de la conciergerie, et de l’autre un bot qui va vous renvoyer en boucle la même information. Il vaut mieux que les bots restent très ciblés, très spécifiques.