[size=38]Occupation de la voie publique : un amendement contre l’amende polémique[/size]
Explication
Un texte en discussion au Sénat permet aux maires de donner des amendes dans certains cas d’occupation illicite de la voie publique.
L’article 15 du projet de loi « Engagement et Proximité » prévoit « une amende administrative d’un montant maximum de 500 € »
L’affaire a provoqué une vive émotion dans les milieux qui gravitent autour des sans-abri. Le 30 septembre, Droit au logement (DAL) a donné l’alerte sur une « mesure bien planquée » dans un texte en discussion au Sénat à partir du 8 octobre, qui permettra aux maires, selon l’association, « d’infliger une amende de 500 € aux sans-abri qui s’installent sur la voie publique ou le domaine public ».
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En cause, une disposition de l’article 15 du projet de loi « Engagement et Proximité », censée redonner du pouvoir aux maires, qui prévoit « une amende administrative d’un montant maximum de 500 € », en cas de « matériel ou objet » entravant la voie publique, ou d’une occupation de cette voie publique au moyen d’un « bien mobilier » à usage privatif. « On donne aux maires des outils pour s’en prendre aux sans-abri qui déposent leurs affaires dans un recoin ou qui installent une tente ou une cabane sur un trottoir ou dans un square », estime Jean-Baptiste Eyraud, porte-parole du DAL.
Au gouvernement, le cabinet de Sébastien Lecornu, ministre chargé des Collectivités territoriales qui a reçu le DAL, assure que « l’article ne vise pas les sans-abri ». L’étude d’impact précise d’ailleurs qu’il concerne « le dépôt ou le déversement de toute substance ou objet qui aurait pour effet d’encombrer ou d’entraver la voie publique (détritus, gravats, encombrants, déversement d’eau suite à l’ouverture de bouches incendie, etc.) » ou « les terrasses de cafés, étals de commerçants » qui débordent.
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« En réalité, réplique un communiqué du Collectif des associations unies, « les sans-abri s’installant dans le domaine public avec un « mobilier » minime (sous une tente ou un abri de fortune, en utilisant un matelas ou encore un caddie pour transporter ses affaires personnelles) entrent dans le champ de la sanction. Cette disposition pourrait aussi toucher toutes les personnes habitant des campements ou des bidonvilles et les habitants en résidence mobile. »
À la veille de l’examen au Sénat, le gouvernement fait alors savoir qu’il soutiendra un amendement pour « lever toute ambiguïté ». En fait, plusieurs amendements ont été déposés. L’un, émanant du gouvernement, mentionne que l’entrave à la voie publique passible d’amende doit avoir « un caractère répétitif ou continu ». Un autre, déposé par la sénatrice LREM Patricia Schillinger, se propose de préciser que seule une occupation « à des fins commerciales » est punissable.
Mais ces modifications ne satisfont pas encore tout à fait les associations. « Ça va dans le bon sens mais nous ne sommes pas encore complètement rassurés, explique Noria Derdek, juriste à la Fondation Abbé Pierre. Certes l’occupation à des fins commerciales exclut les sans-abri mais le paragraphe qui prévoit une amende pour le dépôt d'objets bloquant ou entravant la voie ou le domaine public reste problématique. » « On note l’intention des pouvoirs publics de mieux encadrer le texte mais ça reste possible à des maires mal intentionnés de s’en saisir contre les SDF donc je pense qu’il faut encore mouliner le texte », reprend Jean-Baptiste Eyraud.
Le DAL espère par ailleurs voir défendus dans ce texte « d’autres amendements qui donnent plus de pouvoirs aux maires pour aider les SDF », par exemple en leur donnant le droit de réquisitionner des logements vacants.
Explication
Un texte en discussion au Sénat permet aux maires de donner des amendes dans certains cas d’occupation illicite de la voie publique.
Les associations craignent qu’il ne soit utilisé contre les SDF. Un amendement doit corriger cette ambiguïté, mais il ne les rassure qu’à moitié.
- Nathalie Birchem,
- le 09/10/2019 à 07:00
L’article 15 du projet de loi « Engagement et Proximité » prévoit « une amende administrative d’un montant maximum de 500 € »
L’affaire a provoqué une vive émotion dans les milieux qui gravitent autour des sans-abri. Le 30 septembre, Droit au logement (DAL) a donné l’alerte sur une « mesure bien planquée » dans un texte en discussion au Sénat à partir du 8 octobre, qui permettra aux maires, selon l’association, « d’infliger une amende de 500 € aux sans-abri qui s’installent sur la voie publique ou le domaine public ».
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En cause, une disposition de l’article 15 du projet de loi « Engagement et Proximité », censée redonner du pouvoir aux maires, qui prévoit « une amende administrative d’un montant maximum de 500 € », en cas de « matériel ou objet » entravant la voie publique, ou d’une occupation de cette voie publique au moyen d’un « bien mobilier » à usage privatif. « On donne aux maires des outils pour s’en prendre aux sans-abri qui déposent leurs affaires dans un recoin ou qui installent une tente ou une cabane sur un trottoir ou dans un square », estime Jean-Baptiste Eyraud, porte-parole du DAL.
« L’article ne vise pas les sans-abri »
Au gouvernement, le cabinet de Sébastien Lecornu, ministre chargé des Collectivités territoriales qui a reçu le DAL, assure que « l’article ne vise pas les sans-abri ». L’étude d’impact précise d’ailleurs qu’il concerne « le dépôt ou le déversement de toute substance ou objet qui aurait pour effet d’encombrer ou d’entraver la voie publique (détritus, gravats, encombrants, déversement d’eau suite à l’ouverture de bouches incendie, etc.) » ou « les terrasses de cafés, étals de commerçants » qui débordent.
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« En réalité, réplique un communiqué du Collectif des associations unies, « les sans-abri s’installant dans le domaine public avec un « mobilier » minime (sous une tente ou un abri de fortune, en utilisant un matelas ou encore un caddie pour transporter ses affaires personnelles) entrent dans le champ de la sanction. Cette disposition pourrait aussi toucher toutes les personnes habitant des campements ou des bidonvilles et les habitants en résidence mobile. »
« Il faut encore mouliner le texte »
À la veille de l’examen au Sénat, le gouvernement fait alors savoir qu’il soutiendra un amendement pour « lever toute ambiguïté ». En fait, plusieurs amendements ont été déposés. L’un, émanant du gouvernement, mentionne que l’entrave à la voie publique passible d’amende doit avoir « un caractère répétitif ou continu ». Un autre, déposé par la sénatrice LREM Patricia Schillinger, se propose de préciser que seule une occupation « à des fins commerciales » est punissable.
Mais ces modifications ne satisfont pas encore tout à fait les associations. « Ça va dans le bon sens mais nous ne sommes pas encore complètement rassurés, explique Noria Derdek, juriste à la Fondation Abbé Pierre. Certes l’occupation à des fins commerciales exclut les sans-abri mais le paragraphe qui prévoit une amende pour le dépôt d'objets bloquant ou entravant la voie ou le domaine public reste problématique. » « On note l’intention des pouvoirs publics de mieux encadrer le texte mais ça reste possible à des maires mal intentionnés de s’en saisir contre les SDF donc je pense qu’il faut encore mouliner le texte », reprend Jean-Baptiste Eyraud.
Le DAL espère par ailleurs voir défendus dans ce texte « d’autres amendements qui donnent plus de pouvoirs aux maires pour aider les SDF », par exemple en leur donnant le droit de réquisitionner des logements vacants.