Le numéro 228 (mars-avril-mai 2019) Jésus a-t-il fondé une nouvelle religion ? est disponible en kiosques et en librairies
Le Monde de la Bible a beaucoup écrit sur le Nazaréen depuis sa fondation en 1977. Le précédent dossier « Jésus face aux historiens, aux juifs, aux chrétiens et aux musulmans » (n° 219) remonte seulement à l’hiver 2016-2017. Il s’agissait alors de faire le point sur le Jésus de l’Histoire et sa perception dans les différents monothéismes.Jusqu’où consentir à l’incarnation de Jésus ?
La question, telle que posée en couverture de notre numéro, n’a cependant jamais fait l’objet d’un dossier depuis plus de 40 ans. On pourrait s’en étonner. Elle a pourtant longtemps hanté nos comités éditoriaux et scientifiques. Lors des séances de travail, elle fut relevée par l’un ou l’autre de nos membres, interpellée par un lecteur ou un auditeur lors d’une conférence donnée sur Jésus. Il était donc nécessaire, et sans doute un peu urgent, d’y répondre le plus clairement possible.Quand nous posons la question « Jésus a-t-il fondé une nouvelle religion ? » à Daniel Marguerat, l’exégète répond d’abord : « Depuis 50 ans les historiens sont unanimes, la réponse est non. » La réponse est donc catégorique et partagée depuis longtemps par les exégètes et historiens. Mais force est de reconnaître que si la question est posée encore aujourd’hui, c’est sans doute parce que la réponse n’est pas encore bien comprise et entendue par le grand public. De nombreux enseignants et biblistes peuvent en témoigner depuis leurs salles de cours ou de conférences.
Si la réponse est claire, elle n’en mérite pas moins d’être éclairée, discutée, explicitée. D’autant plus que notre connaissance de Jésus s’est accrue au fil des décennies et que le nouvel ouvrage de Daniel Marguerat, Vie et destin de Jésus de Nazareth (éd. du Seuil, 2019) nous montre que les recherches sont toujours actives sur ce Galiléen qui révolutionna le monde méditerranéen et notre civilisation occidentale.
« Non, mais… »
Au-delà de la première réponse qui ne semble pas avoir varié depuis 50 ans, il semble qu’il n’en soit pas de même pour l’explication donnée. Dans l’entretien accordé, le théologien historien fait précisément état de plusieurs interprétations. Les lecteurs jugeront si son développement les convainc ou pas. De mon point de vue, le travail de cet exégète, de réputation internationale, mérite d’être entendu, lu et d’être ensuite travaillé. Les lecteurs du Monde de la Bible, qui, en juin 2018, ont eu la chance de visiter la Terre sainte dans « les pas du Jésus de l’Histoire au Christ des évangiles » avec le bibliste et suivi ses enseignements et bénéficié de ses commentaires sur les sites, appuieraient sans aucun doute mon propos.Ses hypothèses et ses interprétations ne sont jamais avancées à la légère. Même si elles dérangent parfois des interprétations traditionnellement établies, elles reposent, me semble-t-il, sur une question préalable et fondamentale posée aux croyants : Consentons-nous vraiment à l’incarnation de Jésus ? Autrement dit, que penser d’un Jésus qui serait aussi pleinement homme ? Explorer l’humanité du Nazaréen est autant utile à ceux qui se revendiquent du Christ qu’à ceux qui ne voient en lui qu’un « maître de sagesses ». En marge de notre entretien, Daniel Marguerat m’a confié à quel point Jésus le fascinait et à quel point aussi il constatait combien cette figure des évangiles a exercé au fil des siècles et continue d’exercer auprès de nos contemporains une force d’attraction inégalée dans notre histoire humaine.
Immersion dans le Ier siècle
Avant de répondre à la question « Jésus a-t-il fondé une nouvelle religion ? », il nous a semblé devoir d’abord la comprendre. Pour cela nous avons demandé en premier lieu à Dan Jaffé, de l’université Bar-Ilan de Tel Aviv, de nous renseigner sur les connaissances acquises récemment sur le Jésus juif au sein du judaïsme de la Galilée du Ier siècle. Ensuite, alors qu’il donnait une dernière touche à son essai, Daniel Marguerat explique pourquoi le sort de Jésus fut celui d’une condamnation à mort. L’ayant d’abord entendue à Jérusalem, cette explication est sans doute l’une des plus limpides qu’il m’ait jamais été donné de comprendre ! Puis, nous avons demandé à Simon Butticaz, de l’université de Lausanne, d’interroger ses apôtres sur ce qu’ils disent (vraiment) de lui : Leur christologie est-elle immédiate après les événements de Pâques ou est-ce le fruit d’une construction plus lointaine ? Cela nous permet ensuite de porter notre attention sur la postérité de ces disciples et le développement du mouvement de Jésus. Marie-Françoise Baslez nous livre à ce sujet son analyse détaillée. Enfin, avant d’entendre la réponse conclusive de l’exégète à la question initialement posée, nous avons donné à Paul Mattei, de l’université Lumière-Lyon 2, la difficile mission de peindre, autant que possible, le paysage chrétien tel qu’il pouvait apparaître à la fin du Ier siècle. Autrement dit au moment où une seconde génération de chrétiens apparaît, n’ayant pas vécu les événements fondateurs… En vous souhaitant une belle et enrichissante lecture.par Benoît de Sagazan, rédacteur en chef
Sommaire du dossier «Jésus a-t-il fondé une nouvelle religion ?»
Jésus le Galiléen un juif de son temps, par Dan JafféUne condamnation à mort inéluctable ?, par Daniel Marguerat
Ce que disent de Lui ses apôtres, par Simon Butticaz
Une postérité plurielle chez les disciples du Christ, par Marie-Françoise Baslez
Quel destin chrétien à la fin du Ier siècle ?, par Paul Mattei
« Jésus n’a pas voulu fonder de nouvelle religion mais… », entretien avec Daniel Marguerat
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