[size=45]En Indonésie, un pasteur accusé de blasphème risque l’emprisonnement[/size]
Malo Tresca , le 19/12/2017 à 17h20
[size=20]Soupçonné d’avoir tenté de convertir un chauffeur de taxi, le pasteur Abraham Ben Moses a été arrêté début décembre et encourt cinq ans de prison en Indonésie.
C’est une vidéo, très vite devenue virale sur les réseaux sociaux, qui a mis le feu aux poudres. Dans ce court enregistrement, pris en caméra cachée par un passager à l’arrière du véhicule, on voit le pasteur Abraham Ben Moses parler de sa foi à un chauffeur de taxi, à Djakarta, la capitale indonésienne. Soupçonné d’avoir tenté de convertir ce dernier en pointant certaines contradictions du Coran dans ce pays à très large majorité musulmane, le responsable religieux a été arrêté début décembre et encourt jusqu’à cinq ans de prison.
En attendant les premières conclusions de l’enquête lancée par les forces de l’ordre pour éclaircir les circonstances de cette conversation, le pasteur est détenu, depuis vendredi 8 décembre, dans un poste de police de Djakarta. D’après les autres responsables religieux, il serait le premier leader chrétien à être incarcéré pour blasphème dans le pays.
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A Djakarta, la minorité chrétienne sous pression
Dès le lendemain de la diffusion de cette vidéo, dans laquelle on entend le pasteur déplorer une « incohérence » des enseignements du prophète Mahomet sur le mariage dans la religion musulmane, des membres de l’association Muhammadiyah, la deuxième organisation islamique du pays, ont décidé de porter plainte contre le responsable protestant.
« En blessant les musulmans », ses propos pourraient « ruiner l’harmonie religieuse du pays », a condamné Pedri Kasman, l’un des membres de l’organisation. « Il encourt plus de cinq ans de prison », a expliqué de son côté à l’agence d’information asiatique catholique Ucanews Ariwibawa Anggakusuma, le porte-parole de l’unité de police spécialisée dans la cybercriminalité, chargé de l’enquête.
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Son nom vient allonger la longue liste de personnalités indonésiennes poursuivies pour blasphème ces dix dernières années, dans un pays d’Asie du Sud-Est où toute référence à l’islam est très sensible. Parmi les plus notables figures notamment celle de Basuki Purnama, l’ancien gouverneur chrétien de Djakarta – surnommé « Ahok » – et condamné en mai dernier pour blasphème à deux ans de prison.
Connu pour son franc-parler, celui-ci avait déclaré quelques mois plus tôt, en septembre 2016, que l’interprétation par certains oulémas d’un verset du Coran – en vertu duquel un musulman ne peut élire de gouverneur « chrétien ou juif » – était erronée, alors que lui-même était candidat à sa propre succession.
En révélant au grand jour les violentes tensions qui resurgissent entre les tenants d’une société ouverte et multiconfessionnelle et les milieux nationalistes, islamo-conservateurs ou intégristes indonésiens, la sévérité de son verdict avait profondément renforcé l’inquiétude des défenseurs des libertés face à la montée de l’extrémisme dans le pays. L’hiver dernier, des centaines de milliers de personnes, répondant à l’appel d’organisations partisanes d’une ligne dure de l’islam, avaient défilé dans les rues de la capitale, en allant jusqu’à exiger le lynchage du gouverneur chrétien.
Depuis, les critiques des articles 156 et 156 (A) du Code pénal indonésien, qui définissent notamment la loi sur le blasphème, ne cessent d’appeler à une révision de la législation en vigueur, en condamnant une instrumentalisation de celle-ci « par la majorité pour intimider la minorité ».
« Nous comptons sur le rôle de l’État, représenté par le gouvernement et le Parlement pour avoir le courage de reconnaître que ce texte, supposé protéger les croyants, est devenu aujourd’hui un instrument de dissension », réagissait début janvier l’hebdomadaire indonésien Tempo.co, en condamnant « une loi contre la diffamation et l’insulte qui pousse de fait les divers groupes religieux à épingler les moindres provocations des croyants des autres religions en usant du bras de l’État ».
Malo Tresca , le 19/12/2017 à 17h20
[size=20]Soupçonné d’avoir tenté de convertir un chauffeur de taxi, le pasteur Abraham Ben Moses a été arrêté début décembre et encourt cinq ans de prison en Indonésie.
Dans ce pays à très large majorité musulmane, il est le premier responsable religieux chrétien à être impliqué dans une affaire de blasphème.[/size]
C’est une vidéo, très vite devenue virale sur les réseaux sociaux, qui a mis le feu aux poudres. Dans ce court enregistrement, pris en caméra cachée par un passager à l’arrière du véhicule, on voit le pasteur Abraham Ben Moses parler de sa foi à un chauffeur de taxi, à Djakarta, la capitale indonésienne. Soupçonné d’avoir tenté de convertir ce dernier en pointant certaines contradictions du Coran dans ce pays à très large majorité musulmane, le responsable religieux a été arrêté début décembre et encourt jusqu’à cinq ans de prison.
En attendant les premières conclusions de l’enquête lancée par les forces de l’ordre pour éclaircir les circonstances de cette conversation, le pasteur est détenu, depuis vendredi 8 décembre, dans un poste de police de Djakarta. D’après les autres responsables religieux, il serait le premier leader chrétien à être incarcéré pour blasphème dans le pays.
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Une « incohérence » sur le mariage musulman
Dès le lendemain de la diffusion de cette vidéo, dans laquelle on entend le pasteur déplorer une « incohérence » des enseignements du prophète Mahomet sur le mariage dans la religion musulmane, des membres de l’association Muhammadiyah, la deuxième organisation islamique du pays, ont décidé de porter plainte contre le responsable protestant.
« En blessant les musulmans », ses propos pourraient « ruiner l’harmonie religieuse du pays », a condamné Pedri Kasman, l’un des membres de l’organisation. « Il encourt plus de cinq ans de prison », a expliqué de son côté à l’agence d’information asiatique catholique Ucanews Ariwibawa Anggakusuma, le porte-parole de l’unité de police spécialisée dans la cybercriminalité, chargé de l’enquête.
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Une longue liste de condamnations
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Connu pour son franc-parler, celui-ci avait déclaré quelques mois plus tôt, en septembre 2016, que l’interprétation par certains oulémas d’un verset du Coran – en vertu duquel un musulman ne peut élire de gouverneur « chrétien ou juif » – était erronée, alors que lui-même était candidat à sa propre succession.
Une loi utilisée pour « intimider la minorité »
En révélant au grand jour les violentes tensions qui resurgissent entre les tenants d’une société ouverte et multiconfessionnelle et les milieux nationalistes, islamo-conservateurs ou intégristes indonésiens, la sévérité de son verdict avait profondément renforcé l’inquiétude des défenseurs des libertés face à la montée de l’extrémisme dans le pays. L’hiver dernier, des centaines de milliers de personnes, répondant à l’appel d’organisations partisanes d’une ligne dure de l’islam, avaient défilé dans les rues de la capitale, en allant jusqu’à exiger le lynchage du gouverneur chrétien.
Depuis, les critiques des articles 156 et 156 (A) du Code pénal indonésien, qui définissent notamment la loi sur le blasphème, ne cessent d’appeler à une révision de la législation en vigueur, en condamnant une instrumentalisation de celle-ci « par la majorité pour intimider la minorité ».
« Nous comptons sur le rôle de l’État, représenté par le gouvernement et le Parlement pour avoir le courage de reconnaître que ce texte, supposé protéger les croyants, est devenu aujourd’hui un instrument de dissension », réagissait début janvier l’hebdomadaire indonésien Tempo.co, en condamnant « une loi contre la diffamation et l’insulte qui pousse de fait les divers groupes religieux à épingler les moindres provocations des croyants des autres religions en usant du bras de l’État ».