[size=45]La laïcité et la neutralité s’appliquent-elles au sport ?[/size]
La laïcité est un principe juridique qui découle de différents textes de valeur constitutionnelle ou législative et dont l’application a été précisée par une large jurisprudence, en particulier du Conseil d’État. Elle s’applique au sport sous certaines conditions, et il faut éviter les confusions entre la loi française sur la laïcité et les règles de la Charte olympique.
Rappelons-le, la laïcité garantit : la liberté de conscience (et celle d’exprimer ses convictions ou croyances, dans la limite du respect de l’ordre public), la séparation entre l’État et les religions (de laquelle découle la neutralité de l’administration) et l’égalité de tous les citoyens, quelles que soient leurs convictions, devant la loi et les services publics. La laïcité ne suppose donc la neutralité que de l’administration et de ceux qui la représentent, non celle des usagers comme cela est souvent cru.
Qu’en est-il du secteur sportif ? Les règles s’y appliquant peuvent sembler complexes parce que le sport est bien souvent à la jonction entre espaces administratif, public et privé, tout en rassemblant des professionnels et amateurs aux statuts différents.
Cela est peu connu, mais les fédérations sportives agréées sont délégataires d’une mission de service public. À ce titre, elles sont considérées comme des organismes privés en charge d’une mission de service public. Leurs personnels (au niveau national comme au niveau de leurs déclinaisons régionales), qui exercent une mission de service public, représentent donc l’administration et ainsi doivent respecter un strict devoir de neutralité (qui, d’ailleurs, est tant religieuse que politique, philosophique ou syndicale).
A priori, il en est différemment pour les usagers et les joueurs, puisqu’eux voient la laïcité leur garantir la liberté de manifester leurs convictions. Sauf que celle-ci peut être encadrée, voire interdite.
Lorsque l’on fait du sport, on n’est pas de telle ou telle origine, croyant ou athée, de droite ou de gauche, on est là pour essayer de faire le maximum avec ce qu’on a, au-delà de là d’où on vient. Le sport, c’est le dépassement de soi. Dès lors, si cette pratique commune et non-discriminante est contestée, il faut immédiatement réagir.
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Comment ? Pour cela, il y a des règles techniques très claires et fondées objectivement (règles du jeu, tenues spécifiques, protocoles d’avant match, etc.) édictées par les fédérations sportives délégataires évoquées plus haut et qui doivent être appliquées dans la pratique.
Quant aux questions d’égalité entre les femmes et les hommes, bien que, là encore, il ne s’agisse pas juridiquement de laïcité, les réponses sont claires : il n’est pas question d’autoriser, sous aucun prétexte, qu’il soit religieux ou autre, une quelconque inégalité. Les règles communes l’emportent évidemment sur toute éventuelle prescription religieuse ou interprétation religieuse dans laquelle il ne faut pas même entrer. Par exemple, dans le football, le refus par un joueur homme de saluer une arbitre femme (cas rare mais qui existe) constitue une infraction au protocole d’avant match qui impose de serrer la main de l’arbitre. C’est une règle à laquelle tout joueur doit se conformer.
Si, par exemple, des joueurs d’une équipe d’un sport collectif demandent à utiliser un vestiaire pour prier, alors même que celui-ci est destiné à l’ensemble de l’équipe pour pouvoir se changer ou se laver, il faudra opposer un refus. Mais si un joueur veut prier, avant un match, individuellement et sans prosélytisme auprès de quiconque, cela n’a pas à être refusé.
Sur toutes ces questions, y compris les plus sensibles, il faut savoir garder la tête froide et appliquer le droit et les règles sportives, avec fermeté et discernement. L’approche laïque et les valeurs sportives partagent le refus de toute discrimination mais aussi l’intégration, au-delà des appartenances de chacun, dans un même collectif.
Il ne faut donc exclure personne qui est sincère dans sa démarche sportive. En ce sens, nul ne doit être écarté de la pratique sportive en raison de ses opinions religieuses ou politiques. Mais, dans le même temps, il s’agit de toujours rappeler les valeurs du sport que sont l’égalité, la fraternité, l’impartialité, l’apprentissage du respect de l’arbitre, de soi-même et de celui d’autrui. C’est donc à ce juste équilibre qu’il faut aboutir sur le lieu de pratique.
Le sport est formidable en ce qu’il rassemble très largement des personnes de toutes conditions sociales, de toutes origines ethniques et de toutes convictions. Il constitue, comme la laïcité quand elle est bien comprise et appliquée, un formidable moyen de lutter contre les dérives et les replis, quelle qu’en soit la nature.
© Photo : Flickr[/size]
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[size]La laïcité est un principe juridique qui découle de différents textes de valeur constitutionnelle ou législative et dont l’application a été précisée par une large jurisprudence, en particulier du Conseil d’État. Elle s’applique au sport sous certaines conditions, et il faut éviter les confusions entre la loi française sur la laïcité et les règles de la Charte olympique.
Rappelons-le, la laïcité garantit : la liberté de conscience (et celle d’exprimer ses convictions ou croyances, dans la limite du respect de l’ordre public), la séparation entre l’État et les religions (de laquelle découle la neutralité de l’administration) et l’égalité de tous les citoyens, quelles que soient leurs convictions, devant la loi et les services publics. La laïcité ne suppose donc la neutralité que de l’administration et de ceux qui la représentent, non celle des usagers comme cela est souvent cru.
Qu’en est-il du secteur sportif ? Les règles s’y appliquant peuvent sembler complexes parce que le sport est bien souvent à la jonction entre espaces administratif, public et privé, tout en rassemblant des professionnels et amateurs aux statuts différents.
VERS UN GUIDE DE LA LAÏCITÉ POUR LA FÉDÉRATION FRANÇAISE DE FOOTBALL
Qui plus est, le sport n’est pas déconnecté de la société. Au contraire, c’est une activité profondément ancrée dans tous les territoires et qui, plus que d’autres, reflète la société en y important parfois ses crispations. Celles-ci sont fortes dans le contexte que l’on connaît. Pour y répondre il est essentiel de faire œuvre de pédagogie, en apportant des réponses concrètes aux problèmes qui se posent, mais sans tout mélanger. Pour aider les acteurs de terrain, l’Observatoire de la laïcité va d’ailleurs prochainement éditer un guide pratique en partenariat avec le ministère des Sports et travaille tout particulièrement avec la fédération française de football (FFF).Cela est peu connu, mais les fédérations sportives agréées sont délégataires d’une mission de service public. À ce titre, elles sont considérées comme des organismes privés en charge d’une mission de service public. Leurs personnels (au niveau national comme au niveau de leurs déclinaisons régionales), qui exercent une mission de service public, représentent donc l’administration et ainsi doivent respecter un strict devoir de neutralité (qui, d’ailleurs, est tant religieuse que politique, philosophique ou syndicale).
A priori, il en est différemment pour les usagers et les joueurs, puisqu’eux voient la laïcité leur garantir la liberté de manifester leurs convictions. Sauf que celle-ci peut être encadrée, voire interdite.
LA CHARTE OLYMPIQUE INTERDIT LE PROSÉLYTISME RELIGIEUX DANS LE SPORT
Les lieux où s’exerce le sport ne peuvent pas être des espaces de prosélytisme, quel qu’il soit, ni religieux, ni politique. Mais ce n’est en réalité pas une question de laïcité : cette absence de tout comportement prosélyte découle en effet des valeurs du sport, [url=https://stillmed.olympic.org/media/Document Library/OlympicOrg/General/FR-Olympic-Charter.pdf]rappelées notamment dans la règle 50 de la Charte Olympique[/url]. Règle qui peut néanmoins s’entendre différemment, comme on le constate avec le désaccord entre la FIFA et la FFF à propos du port du voile par certaines joueuses (autorisé par la FIFA en raison de son caractère selon elle avant tout « culturel », et interdit par la FFF).Lorsque l’on fait du sport, on n’est pas de telle ou telle origine, croyant ou athée, de droite ou de gauche, on est là pour essayer de faire le maximum avec ce qu’on a, au-delà de là d’où on vient. Le sport, c’est le dépassement de soi. Dès lors, si cette pratique commune et non-discriminante est contestée, il faut immédiatement réagir.
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[size]Le sport constitue, comme la laïcité quand elle est bien comprise et appliquée, un formidable moyen de lutter contre les dérives et les replis.
Comment ? Pour cela, il y a des règles techniques très claires et fondées objectivement (règles du jeu, tenues spécifiques, protocoles d’avant match, etc.) édictées par les fédérations sportives délégataires évoquées plus haut et qui doivent être appliquées dans la pratique.
Quant aux questions d’égalité entre les femmes et les hommes, bien que, là encore, il ne s’agisse pas juridiquement de laïcité, les réponses sont claires : il n’est pas question d’autoriser, sous aucun prétexte, qu’il soit religieux ou autre, une quelconque inégalité. Les règles communes l’emportent évidemment sur toute éventuelle prescription religieuse ou interprétation religieuse dans laquelle il ne faut pas même entrer. Par exemple, dans le football, le refus par un joueur homme de saluer une arbitre femme (cas rare mais qui existe) constitue une infraction au protocole d’avant match qui impose de serrer la main de l’arbitre. C’est une règle à laquelle tout joueur doit se conformer.
N’EXCLURE AUCUN INDIVIDU SINCÈRE DANS SA DÉMARCHE SPORTIVE
Face à une difficulté liée aux faits religieux dans le sport, la principale question à se poser est la suivante : « est-ce que cette manifestation du fait religieux par un usager ou par un joueur perturbe ou non le bon fonctionnement de ma structure sportive, ou s’oppose aux règles du sport lui-même ? ». L’attitude à adopter dépendra bien entendu de la réponse. S’il y a perturbation objective ou opposition avec les règles de la fédération sportive, il peut y avoir interdiction, car celle-ci sera justifiée et proportionnée.Si, par exemple, des joueurs d’une équipe d’un sport collectif demandent à utiliser un vestiaire pour prier, alors même que celui-ci est destiné à l’ensemble de l’équipe pour pouvoir se changer ou se laver, il faudra opposer un refus. Mais si un joueur veut prier, avant un match, individuellement et sans prosélytisme auprès de quiconque, cela n’a pas à être refusé.
Sur toutes ces questions, y compris les plus sensibles, il faut savoir garder la tête froide et appliquer le droit et les règles sportives, avec fermeté et discernement. L’approche laïque et les valeurs sportives partagent le refus de toute discrimination mais aussi l’intégration, au-delà des appartenances de chacun, dans un même collectif.
Il ne faut donc exclure personne qui est sincère dans sa démarche sportive. En ce sens, nul ne doit être écarté de la pratique sportive en raison de ses opinions religieuses ou politiques. Mais, dans le même temps, il s’agit de toujours rappeler les valeurs du sport que sont l’égalité, la fraternité, l’impartialité, l’apprentissage du respect de l’arbitre, de soi-même et de celui d’autrui. C’est donc à ce juste équilibre qu’il faut aboutir sur le lieu de pratique.
Le sport est formidable en ce qu’il rassemble très largement des personnes de toutes conditions sociales, de toutes origines ethniques et de toutes convictions. Il constitue, comme la laïcité quand elle est bien comprise et appliquée, un formidable moyen de lutter contre les dérives et les replis, quelle qu’en soit la nature.
© Photo : Flickr[/size]