Act Up et l'Église catholique : histoire d'une confrontation
SIXTINE CHARTIER publié le 21/08/2017
L’association qui milite pour la lutte contre le sida a pris en grippe l’Église catholique, jugée complice. Explications.
En compagnie des pouvoirs publics, des hommes politiques ou des laboratoires pharmaceutiques, l’Église catholique a été aux premières loges des « zap » (actions éclairs destinées à mobiliser les médias) terriblement efficaces de l’association. Six mois après sa création en 1989, Act Up Paris accroche ainsi une banderole « Oui à la capote » sur les tours de Notre-Dame... Une initiative diversement appréciée, tout comme les autres actions chocs qui viseront par la suite des lieux de culte – au premier rang desquels Notre-Dame fera figure de théâtre privilégié en raison de sa stature emblématique –, lors de messes télévisées ou à l’occasion des différentes visites papales en France.
Principal sujet de discorde : l'usage du préservatif, que le magistère de l’Église réprouve, lui préférant la chasteté ou l’abstinence. L’Église est ainsi accusée de contribuer à la diffusion du virus du Sida. « La capote c’est la vie, le pape l’interdit », scandent les militants. « 750.000 morts, l’Église en veut encore ! », dénoncent-ils en 1991 après avoir réussi à interrompre la messe de la Toussaint à Notre-Dame. Parmi les affiches brandies, une image de Jean Paul II tachée de sang avec ce message : « Oui aux capotes, non aux sermons ».
Après Jean Paul II, Benoit XVI…
Malgré la perte de vitesse de l’association dans les années 2000 en raison de l’ouverture de l’accès aux soin en Europe, la confrontation avec l’Église perdure. Après les années Jean Paul II, Benoît XVI ne sera pas en reste. En mars 2009, alors que sa phrase sur le préservatif dans l’avion qui l’emmène en Afrique a provoqué un tollé médiatique, Act Up se rend une nouvelle fois sur le parvis de Notre-Dame pour dénoncer les propos « assassins » du chef de l’Église.
Pourtant en novembre 2010, quand dans son livre-entretien Lumière du monde avec Peter Seewald, ce même chef de l’Église admet l’utilisation du préservatif « dans certains cas, quand l’intention est de réduire le risque de contamination », comme « un premier pas pour ouvrir la voie à une sexualité plus humaine, vécue autrement », Act Up prend acte… mais ne dépose pas les armes. « On demande au Vatican et à l’Église catholique d’arrêter de se mêler de ces questions-là qui ne les regarde pas », clame une militante.
Il y a toujours une distorsion entre le discours officiel, qu’on doit garder pur, pas du tout adapté à la réalité, et une Église qui est très fortement impliquée dans la lutte contre le sida. – Bertrand Lebouché, chercheur.
Derrière « le Vatican » et ses papes jugés criminels, Act Up vise le magistère et son corpus de normes. « Ils étaient contre Rome, le magistère, Jean Paul II… », rappelle Anthony Favier, co-président de David & Jonathan (une association LGBT chrétienne fondée en 1972). « Ils visaient en fait l’institution Église, donc Rome avec son catéchisme, sa dureté, son incompréhension, très éloignée de la communauté gay. »
http://www.lavie.fr/debats/histoire/act-up-et-l-eglise-catholique-histoire-d-une-confrontation-21-08-2017-84312_685.php
SIXTINE CHARTIER publié le 21/08/2017
L’association qui milite pour la lutte contre le sida a pris en grippe l’Église catholique, jugée complice. Explications.
En compagnie des pouvoirs publics, des hommes politiques ou des laboratoires pharmaceutiques, l’Église catholique a été aux premières loges des « zap » (actions éclairs destinées à mobiliser les médias) terriblement efficaces de l’association. Six mois après sa création en 1989, Act Up Paris accroche ainsi une banderole « Oui à la capote » sur les tours de Notre-Dame... Une initiative diversement appréciée, tout comme les autres actions chocs qui viseront par la suite des lieux de culte – au premier rang desquels Notre-Dame fera figure de théâtre privilégié en raison de sa stature emblématique –, lors de messes télévisées ou à l’occasion des différentes visites papales en France.
Principal sujet de discorde : l'usage du préservatif, que le magistère de l’Église réprouve, lui préférant la chasteté ou l’abstinence. L’Église est ainsi accusée de contribuer à la diffusion du virus du Sida. « La capote c’est la vie, le pape l’interdit », scandent les militants. « 750.000 morts, l’Église en veut encore ! », dénoncent-ils en 1991 après avoir réussi à interrompre la messe de la Toussaint à Notre-Dame. Parmi les affiches brandies, une image de Jean Paul II tachée de sang avec ce message : « Oui aux capotes, non aux sermons ».
Après Jean Paul II, Benoit XVI…
Malgré la perte de vitesse de l’association dans les années 2000 en raison de l’ouverture de l’accès aux soin en Europe, la confrontation avec l’Église perdure. Après les années Jean Paul II, Benoît XVI ne sera pas en reste. En mars 2009, alors que sa phrase sur le préservatif dans l’avion qui l’emmène en Afrique a provoqué un tollé médiatique, Act Up se rend une nouvelle fois sur le parvis de Notre-Dame pour dénoncer les propos « assassins » du chef de l’Église.
Pourtant en novembre 2010, quand dans son livre-entretien Lumière du monde avec Peter Seewald, ce même chef de l’Église admet l’utilisation du préservatif « dans certains cas, quand l’intention est de réduire le risque de contamination », comme « un premier pas pour ouvrir la voie à une sexualité plus humaine, vécue autrement », Act Up prend acte… mais ne dépose pas les armes. « On demande au Vatican et à l’Église catholique d’arrêter de se mêler de ces questions-là qui ne les regarde pas », clame une militante.
Il y a toujours une distorsion entre le discours officiel, qu’on doit garder pur, pas du tout adapté à la réalité, et une Église qui est très fortement impliquée dans la lutte contre le sida. – Bertrand Lebouché, chercheur.
Derrière « le Vatican » et ses papes jugés criminels, Act Up vise le magistère et son corpus de normes. « Ils étaient contre Rome, le magistère, Jean Paul II… », rappelle Anthony Favier, co-président de David & Jonathan (une association LGBT chrétienne fondée en 1972). « Ils visaient en fait l’institution Église, donc Rome avec son catéchisme, sa dureté, son incompréhension, très éloignée de la communauté gay. »
http://www.lavie.fr/debats/histoire/act-up-et-l-eglise-catholique-histoire-d-une-confrontation-21-08-2017-84312_685.php