À Sarajevo, une Conférence judéo-musulmane pour « dépasser les préjugés »
Recueilli par Maxime Halvick, le 13/08/2017 à 19h04 Envoyer par email
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Du 6 au 13 août, une centaine de jeunes juifs, musulmans et croyants d’autres religions venus d’une trentaine de pays se sont réunis à Sarajevo (Bosnie-Herzégovine).
Rafael Tyzsblat, directeur du programme de la Conférence judéo-musulmane, organisatrice de la rencontre, explique le sens de cette démarche.
La mosquée Gazi Husrev-beg au centrer de Sarajevo
ZOOM
La mosquée Gazi Husrev-beg au centrer de Sarajevo / Truba71/stock.adobe.com
Plusieurs participants à la rencontre de Sarajevo reconnaissent n’avoir jamais rencontré de juifs ou de musulmans avant de venir à la Conférence judéo-musulmane. Les liens sont-ils rompus, aujourd’hui, entre les jeunesses juives et musulmanes ?
Rafael Tyzsblat : Soit la relation est rompue, soit elle était inexistante au départ. Le discours public et celui des médias poussent les communautés à adopter des points empreints de vue de préjugés et de soupçon. Le musulman ne pourrait pas parler avec le juif parce que celui-ci contribuerait à son oppression ; le juif ne pourrait pas parler avec le musulman parce que celui-ci serait forcément antisémite.
À la Conférence judéo-musulmane, nous essayons de dépasser les préjugés, de montrer aux gens que pour se connaître vraiment, il faut prendre le temps de se parler et, peut-être aussi, de recourir à l’aide de médiateurs. Si on prend le temps de faire cela, on se rend compte que les différences n’empêchent pas la relation.
Abordez-vous la question du conflit israélo-palestinien ?
Rafael Tyzsblat : Nous ne sommes pas une conférence entre Israéliens et Palestiniens mais entre juifs et musulmans de manière générale. Nous considérons donc, et les participants sont d’accord avec nous, que le conflit israélo-palestinien ne devrait pas définir l’ensemble des relations judéo-musulmanes. Cela dit, quand on essaye de réconcilier les gens, on n’évite pas les sujets les plus importants. Beaucoup d’organisations préfèrent écarter tout à fait ce sujet considéré comme « trop chaud », je trouve cela dommage.
Nous sommes parvenus à avoir des conversations sur le sujet, bien sûr émotionnelles, mais où les participants se retrouvent en position d’empathie par rapport à la souffrance et au vécu d’autrui. Notre ambition n’est pas de résoudre ce conflit ni d’arriver à une position commune, mais de tenir un discours qui ne déshumanise pas l’autre.
Quelles initiatives concrètes avez-vous pris ?
Rafael Tyzsblat : Il y a des choses très variées, comme porter secours aux réfugiés, aider les plus démunis ou encore créer des liens d’assistance de solidarité mutuelle pour se protéger de l’islamophobie ou de l’antisémitisme. Cela peut aussi être des projets plus légers, artistiques ou culturels, qui montrent une certaine proximité entre les deux cultures.
Plus largement, la discussion donne l’occasion d’apprendre sur l’autre religion mais aussi - et c’est ce qui est intéressant - sur sa propre religion. Au lieu de diluer le sentiment d’identité comme on le craint parfois, la rencontre avec l’autre peut alors le renforcer.
Recueilli par Maxime Halvick
(1) Fondée en 2010 à Vienne, laConférence judéo-musulmane (MJC) a déjà organisé des rencontres à Kiev, Berlin ou encore Bratislava.
Recueilli par Maxime Halvick, le 13/08/2017 à 19h04 Envoyer par email
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Du 6 au 13 août, une centaine de jeunes juifs, musulmans et croyants d’autres religions venus d’une trentaine de pays se sont réunis à Sarajevo (Bosnie-Herzégovine).
Rafael Tyzsblat, directeur du programme de la Conférence judéo-musulmane, organisatrice de la rencontre, explique le sens de cette démarche.
La mosquée Gazi Husrev-beg au centrer de Sarajevo
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La mosquée Gazi Husrev-beg au centrer de Sarajevo / Truba71/stock.adobe.com
Plusieurs participants à la rencontre de Sarajevo reconnaissent n’avoir jamais rencontré de juifs ou de musulmans avant de venir à la Conférence judéo-musulmane. Les liens sont-ils rompus, aujourd’hui, entre les jeunesses juives et musulmanes ?
Rafael Tyzsblat : Soit la relation est rompue, soit elle était inexistante au départ. Le discours public et celui des médias poussent les communautés à adopter des points empreints de vue de préjugés et de soupçon. Le musulman ne pourrait pas parler avec le juif parce que celui-ci contribuerait à son oppression ; le juif ne pourrait pas parler avec le musulman parce que celui-ci serait forcément antisémite.
À la Conférence judéo-musulmane, nous essayons de dépasser les préjugés, de montrer aux gens que pour se connaître vraiment, il faut prendre le temps de se parler et, peut-être aussi, de recourir à l’aide de médiateurs. Si on prend le temps de faire cela, on se rend compte que les différences n’empêchent pas la relation.
Abordez-vous la question du conflit israélo-palestinien ?
Rafael Tyzsblat : Nous ne sommes pas une conférence entre Israéliens et Palestiniens mais entre juifs et musulmans de manière générale. Nous considérons donc, et les participants sont d’accord avec nous, que le conflit israélo-palestinien ne devrait pas définir l’ensemble des relations judéo-musulmanes. Cela dit, quand on essaye de réconcilier les gens, on n’évite pas les sujets les plus importants. Beaucoup d’organisations préfèrent écarter tout à fait ce sujet considéré comme « trop chaud », je trouve cela dommage.
Nous sommes parvenus à avoir des conversations sur le sujet, bien sûr émotionnelles, mais où les participants se retrouvent en position d’empathie par rapport à la souffrance et au vécu d’autrui. Notre ambition n’est pas de résoudre ce conflit ni d’arriver à une position commune, mais de tenir un discours qui ne déshumanise pas l’autre.
Quelles initiatives concrètes avez-vous pris ?
Rafael Tyzsblat : Il y a des choses très variées, comme porter secours aux réfugiés, aider les plus démunis ou encore créer des liens d’assistance de solidarité mutuelle pour se protéger de l’islamophobie ou de l’antisémitisme. Cela peut aussi être des projets plus légers, artistiques ou culturels, qui montrent une certaine proximité entre les deux cultures.
Plus largement, la discussion donne l’occasion d’apprendre sur l’autre religion mais aussi - et c’est ce qui est intéressant - sur sa propre religion. Au lieu de diluer le sentiment d’identité comme on le craint parfois, la rencontre avec l’autre peut alors le renforcer.
Recueilli par Maxime Halvick
(1) Fondée en 2010 à Vienne, laConférence judéo-musulmane (MJC) a déjà organisé des rencontres à Kiev, Berlin ou encore Bratislava.