En Espagne, la messe télévisée dans la ligne de mire de Podemos
DIANE CAMBON (à Madrid), le 04/04/2017 à 7h37
Mis à jour le 04/04/2017 à 10h11 Envoyer par email
D’ordinaire plutôt discrète, la hiérarchie catholique espagnole vient de taper du poing sur la table pour s’opposer à une initiative parlementaire promue par Podemo
Le cardinal Ricardo Blasquez, récemment réélu à la tête de la Conférence épiscopale, s’en est pris aux dirigeants du parti radical de gauche Podemos.
►LIRE Podemos, à gauche toute derrière Pablo Iglesias
Cette formation, devenue le troisième mouvement parlementaire, a en effet touché à l’un des tabous de la société espagnole en proposant de soumettre à la Chambre des députés une résolution pour supprimer la retransmission de la messe à la télévision publique.
Une longue tradition menacée
De façon ininterrompue depuis 1982, TVE2, la deuxième chaîne publique, diffuse la messe du dimanche, filmé dans diverses cathédrales ou églises du pays – ainsi que, dans une moindre mesure, des cérémonies musulmanes, juives et évangéliques.
« Ils ne sont jamais allés à la messe et ne savent pas ce qu’ils disent »,a déclaré mi-mars le cardinal Blasquez au micro de la radio Cope. La veille, la porte-parole du parti, Irene Montoro, avait fustigé le programme religieux dominical : « Lorsqu’on voit la retransmission des messes catholiques le dimanche, on assiste à des prêches de curés, d’évêques ou de cardinaux, la plupart réactionnaires, qui incitent à la haine contre la communauté homosexuelle… Il faut en finir avec ces discours militants et discriminatoires, relayés par l’argent du contribuable ! »
Des propos contrastés
Plus modéré, le leader du jeune parti alternatif, a lui, revendiqué la vocation culturelle de la télévision publique : « Ce n’est pas l’endroit pour montrer des rites religieux. Sa vocation, étant donné qu’elle est financée par tous les citoyens espagnols, est avant tout de programmer des activités culturelles et de refléter la diversité idéologique, religieuse et sexuelle du pays ».
Le cardinal a pour sa part mis en garde contre « ces tentatives de rupture qui n’ont aucun sens » et lancé un appel au « respect de la liberté religieuse », concluant : « Nous ne voulons pas de ces slogans faciles qui n’aident pas à la réflexion ».
Des téléspectateurs au rendez-vous
Le courroux de l’Église est à la hauteur de la polémique. Les commentaires à l’encontre de Podemos ont incendié les réseaux sociaux. Et, dimanche 12 mars, en signe de résistance, 1,2 million de téléspectateurs (21,3 %, un record historique) ont regardé Le Jour du Seigneur version espagnole.
Le directeur du programme télévisé, le Père Juan Carlos Ramos, s’est félicité de cet engouement soudain même s’il sait parfaitement qu’il s’agit d’une hausse ponctuelle. « Cet audimat prouve juste qu’une grande partie de la population est consciente que les cérémonies religieuses à la télévision remplissent réellement une mission de service public, car nous nous adressons aux personnes âgées, aux malades et aux handicapés qui ne peuvent sortir de chez eux pour se rendre au culte ».
Une polémique qui enfle
À la paroisse de Santisimo Cristo de Victoria, en plein cœur de Madrid, les fidèles craignent que cette initiative de Podemos ne soit que les prémices d’une offensive plus ample contre l’Église. « Notre société est profondément catholique culturellement », vouloir éradiquer ces traditions au nom de la laïcité est un non-sens, fulmine Carlota, accompagnée de ses trois enfants.
Au-delà de cette polémique, la gauche traditionnelle exige une révision du statut de l’État avec l’Église. Celle-ci bénéficie de nombreux avantages, notamment fiscaux, lesquels sont aujourd’hui questionnés par les partis de gauche. Podemos a présenté un autre projet de loi visant à faire un inventaire de tous les biens de l’Église. L’objectif est que certains monuments lui appartenant, comme la Mosquée de Cordoue, reviennent au patrimoine public.
http://www.la-croix.com/Religion/Catholicisme/Monde/En-Espagne-messe-televisee-dans-ligne-mire-Podemos-2017-04-04-1200837007
DIANE CAMBON (à Madrid), le 04/04/2017 à 7h37
Mis à jour le 04/04/2017 à 10h11 Envoyer par email
D’ordinaire plutôt discrète, la hiérarchie catholique espagnole vient de taper du poing sur la table pour s’opposer à une initiative parlementaire promue par Podemo
Le cardinal Ricardo Blasquez, récemment réélu à la tête de la Conférence épiscopale, s’en est pris aux dirigeants du parti radical de gauche Podemos.
►LIRE Podemos, à gauche toute derrière Pablo Iglesias
Cette formation, devenue le troisième mouvement parlementaire, a en effet touché à l’un des tabous de la société espagnole en proposant de soumettre à la Chambre des députés une résolution pour supprimer la retransmission de la messe à la télévision publique.
Une longue tradition menacée
De façon ininterrompue depuis 1982, TVE2, la deuxième chaîne publique, diffuse la messe du dimanche, filmé dans diverses cathédrales ou églises du pays – ainsi que, dans une moindre mesure, des cérémonies musulmanes, juives et évangéliques.
« Ils ne sont jamais allés à la messe et ne savent pas ce qu’ils disent »,a déclaré mi-mars le cardinal Blasquez au micro de la radio Cope. La veille, la porte-parole du parti, Irene Montoro, avait fustigé le programme religieux dominical : « Lorsqu’on voit la retransmission des messes catholiques le dimanche, on assiste à des prêches de curés, d’évêques ou de cardinaux, la plupart réactionnaires, qui incitent à la haine contre la communauté homosexuelle… Il faut en finir avec ces discours militants et discriminatoires, relayés par l’argent du contribuable ! »
Des propos contrastés
Plus modéré, le leader du jeune parti alternatif, a lui, revendiqué la vocation culturelle de la télévision publique : « Ce n’est pas l’endroit pour montrer des rites religieux. Sa vocation, étant donné qu’elle est financée par tous les citoyens espagnols, est avant tout de programmer des activités culturelles et de refléter la diversité idéologique, religieuse et sexuelle du pays ».
Le cardinal a pour sa part mis en garde contre « ces tentatives de rupture qui n’ont aucun sens » et lancé un appel au « respect de la liberté religieuse », concluant : « Nous ne voulons pas de ces slogans faciles qui n’aident pas à la réflexion ».
Des téléspectateurs au rendez-vous
Le courroux de l’Église est à la hauteur de la polémique. Les commentaires à l’encontre de Podemos ont incendié les réseaux sociaux. Et, dimanche 12 mars, en signe de résistance, 1,2 million de téléspectateurs (21,3 %, un record historique) ont regardé Le Jour du Seigneur version espagnole.
Le directeur du programme télévisé, le Père Juan Carlos Ramos, s’est félicité de cet engouement soudain même s’il sait parfaitement qu’il s’agit d’une hausse ponctuelle. « Cet audimat prouve juste qu’une grande partie de la population est consciente que les cérémonies religieuses à la télévision remplissent réellement une mission de service public, car nous nous adressons aux personnes âgées, aux malades et aux handicapés qui ne peuvent sortir de chez eux pour se rendre au culte ».
Une polémique qui enfle
À la paroisse de Santisimo Cristo de Victoria, en plein cœur de Madrid, les fidèles craignent que cette initiative de Podemos ne soit que les prémices d’une offensive plus ample contre l’Église. « Notre société est profondément catholique culturellement », vouloir éradiquer ces traditions au nom de la laïcité est un non-sens, fulmine Carlota, accompagnée de ses trois enfants.
Au-delà de cette polémique, la gauche traditionnelle exige une révision du statut de l’État avec l’Église. Celle-ci bénéficie de nombreux avantages, notamment fiscaux, lesquels sont aujourd’hui questionnés par les partis de gauche. Podemos a présenté un autre projet de loi visant à faire un inventaire de tous les biens de l’Église. L’objectif est que certains monuments lui appartenant, comme la Mosquée de Cordoue, reviennent au patrimoine public.
http://www.la-croix.com/Religion/Catholicisme/Monde/En-Espagne-messe-televisee-dans-ligne-mire-Podemos-2017-04-04-1200837007