Le Vatican vient d’accepter la démission de Mgr Hervé Gaschignard, 57 ans, qui était évêque de Dax depuis cinq ans.
Mgr Hervé Gaschignard.
Geste fort du pape. Alors que même au sein de l’épiscopat français, on s’interroge encore sur les tenants et aboutissants de cet épineux dossier, le pape François a accepté ce jeudi 6 avril la démission de Mgr Hervé Gaschignard, 57 ans, évêque d’Aire et Dax, dans les Landes.
« Les évêques de France accueillent cette décision dans la foi et la confiance au successeur de Pierre et en mesurent la gravité. Depuis plusieurs semaines, dans le diocèse de Dax, des rumeurs persistaient sur des attitudes pastorales inappropriées de l’évêque », indique sobrement un communiqué du président de la Conférence des évêques de France, Mgr Georges Pontier.
Signalement à la Congrégation pour la doctrine de la foi
D’après les informations de la Croix, une famille des Landes a adressé un signalement à la Congrégation pour la doctrine de la foi, au Vatican. Le dicastère romain, qui traite des délits contre la foi et des « delictagraviora », notamment les abus sexuels, a demandé au nonce en France d’enquêter. C’est au cardinal Jean-Pierre Ricard, l’archevêque métropolitain de Bordeaux et membre de la CDF, qu’est revenue la tâche de recueillir le témoignage de cette famille, le 14 janvier dernier. L’archevêque n’y aurait alors pas trouvé matière à faire un signalement à la justice mais il a adressé cette déposition à Rome.
A LIRE : Pédophilie, l’Église traquée par « Cash investigation »
Toutefois, le 21 mars – le jour même où France 2 diffusait Cash investigation, hasard du calendrier –, le cardinal Ricard a reçu « deux personnes du diocèse de Dax, en contact avec des jeunes », indique un communiqué publié ce 6 avril par le diocèse de Bordeaux. « Elles lui ont fait part de leurs interrogations et même du malaise ressenti devant des attitudes et des paroles de Mgr Gaschignard vis-à-vis de jeunes qui en ont parlé à leur famille. »
C’est cette rencontre qui a conduit l’évêque de Dax, qui en avait été informé, à prendre lui-même contact avec le procureur de la République, avant que le cardinal Ricard lui aussi le fasse, quelques jours après avoir rencontré Mgr Gaschignard à Lourdes le 28 mars, indique encore le diocèse de Bordeaux, précisant que le cardinal « se tient à la disposition de la justice pour toutes les informations qu’il a pu avoir concernant ces événements ».
« Dans ces conditions, le Saint-Siège a jugé que l’exercice du ministère épiscopal de Mgr Gaschignard dans le diocèse d’Aire et Dax devenait difficile et lui a demandé de présenter sa démission », poursuit le communiqué de Bordeaux.
« Des comportements et des propos inappropriés »
À ce jour toutefois, aucune plainte n’a été déposée. Aucune des familles qui ont pu se signaler à l’Église – demandant l’anonymat et la confidentialité la plus absolus – n’a voulu porter plainte devant la justice. « Elles attendaient que des sanctions soient prises par l’Église directement », glisse un proche du dossier, qui assure qu’à ce stade, « il ne s’agit aucunement de cas d’agressions ni d’actes sexuels, mais de comportement et de propos inappropriés, quelque chose en tout cas qui blesse les jeunes adolescents ».
Un comportement qui avait déjà valu une alerte, il y a six ans, à Mgr Gaschignard, alors qu’il était évêque auxiliaire de Toulouse depuis 2007, en charge de la formation des prêtres et des laïcs, de la jeunesse et de la famille. Quatre encadrants d’un pèlerinage pour jeunes s’étaient émus par courrier auprès de l’archevêque de Toulouse, Mgr Robert Le Gall, de la proximité de l’évêque avec les jeunes. « Par prudence », ce dernier avait fait un signalement au procureur qui l’avait classé sans suite.
Une autre famille aurait aussi exprimé un malaise à l’égard d’un comportement jugé inapproprié, à Nantes, lorsque ce Breton, issu d’une famille de sept enfants, ordonné prêtre dans son diocèse d’origine, y officiait. Il y a été notamment encadrant puis directeur adjoint du séminaire (1995-2006), et conseiller spirituel des scouts d’Europe.
L’évêque de Dax s’était mis en retrait la semaine dernière, indiquant dans un communiqué avoir « besoin de repos pour quelque temps hors du diocèse », invoquant « une fatigue liée à diverses causes ».
Interrogé par la Croix, Vincent Neymon, porte-parole adjoint de la CEF, a estimé qu’« il y a peut-être des éléments qu’on n’a pas mais en tout cas à ce stade ce n’est pas si simple, pas si tranché. De là à en déduire des choses gravissimes... On trouverait inexact à ce jour de parler de pédophilie. Il ne faut pas aller trop vite et respecter la présomption d’innocence. En tout cas, le gouvernement du diocèse dans ces circonstances n’est plus possible car il y a rupture de confiance. »
Signal fort du pape François
Cette décision envoie un signal fort, alors même que le pape François a demandé aux évêques d’être irréprochables, menaçant de démettre de ses fonctions un évêque « seulement s’il a objectivement manqué, de manière très grave, à la diligence qui lui a été demandée par son office pastoral, même sans grave faute morale de sa part ». « Dans le cas où il s’agit d’abus sur des mineurs ou sur des adultes vulnérables, le manque de diligence peut être considéré comme un motif grave », poursuit le Motu proprio Comme une mère aimante.
Dans l’état actuel des choses, le pape a nommé Mgr Bernard Charrier, évêque émérite de Tulle, administrateur apostolique du diocèse de Dax.
Céline Hoyeau et Nicolas Senèze
http://www.la-croix.com/Religion/Catholicisme/France/Le-pape-accepte-la-demission-de-MgrGaschignard-eveque-de-Dax-2017-04-06-1200837631
Mgr Hervé Gaschignard.
Geste fort du pape. Alors que même au sein de l’épiscopat français, on s’interroge encore sur les tenants et aboutissants de cet épineux dossier, le pape François a accepté ce jeudi 6 avril la démission de Mgr Hervé Gaschignard, 57 ans, évêque d’Aire et Dax, dans les Landes.
« Les évêques de France accueillent cette décision dans la foi et la confiance au successeur de Pierre et en mesurent la gravité. Depuis plusieurs semaines, dans le diocèse de Dax, des rumeurs persistaient sur des attitudes pastorales inappropriées de l’évêque », indique sobrement un communiqué du président de la Conférence des évêques de France, Mgr Georges Pontier.
Signalement à la Congrégation pour la doctrine de la foi
D’après les informations de la Croix, une famille des Landes a adressé un signalement à la Congrégation pour la doctrine de la foi, au Vatican. Le dicastère romain, qui traite des délits contre la foi et des « delictagraviora », notamment les abus sexuels, a demandé au nonce en France d’enquêter. C’est au cardinal Jean-Pierre Ricard, l’archevêque métropolitain de Bordeaux et membre de la CDF, qu’est revenue la tâche de recueillir le témoignage de cette famille, le 14 janvier dernier. L’archevêque n’y aurait alors pas trouvé matière à faire un signalement à la justice mais il a adressé cette déposition à Rome.
A LIRE : Pédophilie, l’Église traquée par « Cash investigation »
Toutefois, le 21 mars – le jour même où France 2 diffusait Cash investigation, hasard du calendrier –, le cardinal Ricard a reçu « deux personnes du diocèse de Dax, en contact avec des jeunes », indique un communiqué publié ce 6 avril par le diocèse de Bordeaux. « Elles lui ont fait part de leurs interrogations et même du malaise ressenti devant des attitudes et des paroles de Mgr Gaschignard vis-à-vis de jeunes qui en ont parlé à leur famille. »
C’est cette rencontre qui a conduit l’évêque de Dax, qui en avait été informé, à prendre lui-même contact avec le procureur de la République, avant que le cardinal Ricard lui aussi le fasse, quelques jours après avoir rencontré Mgr Gaschignard à Lourdes le 28 mars, indique encore le diocèse de Bordeaux, précisant que le cardinal « se tient à la disposition de la justice pour toutes les informations qu’il a pu avoir concernant ces événements ».
« Dans ces conditions, le Saint-Siège a jugé que l’exercice du ministère épiscopal de Mgr Gaschignard dans le diocèse d’Aire et Dax devenait difficile et lui a demandé de présenter sa démission », poursuit le communiqué de Bordeaux.
« Des comportements et des propos inappropriés »
À ce jour toutefois, aucune plainte n’a été déposée. Aucune des familles qui ont pu se signaler à l’Église – demandant l’anonymat et la confidentialité la plus absolus – n’a voulu porter plainte devant la justice. « Elles attendaient que des sanctions soient prises par l’Église directement », glisse un proche du dossier, qui assure qu’à ce stade, « il ne s’agit aucunement de cas d’agressions ni d’actes sexuels, mais de comportement et de propos inappropriés, quelque chose en tout cas qui blesse les jeunes adolescents ».
Un comportement qui avait déjà valu une alerte, il y a six ans, à Mgr Gaschignard, alors qu’il était évêque auxiliaire de Toulouse depuis 2007, en charge de la formation des prêtres et des laïcs, de la jeunesse et de la famille. Quatre encadrants d’un pèlerinage pour jeunes s’étaient émus par courrier auprès de l’archevêque de Toulouse, Mgr Robert Le Gall, de la proximité de l’évêque avec les jeunes. « Par prudence », ce dernier avait fait un signalement au procureur qui l’avait classé sans suite.
Une autre famille aurait aussi exprimé un malaise à l’égard d’un comportement jugé inapproprié, à Nantes, lorsque ce Breton, issu d’une famille de sept enfants, ordonné prêtre dans son diocèse d’origine, y officiait. Il y a été notamment encadrant puis directeur adjoint du séminaire (1995-2006), et conseiller spirituel des scouts d’Europe.
L’évêque de Dax s’était mis en retrait la semaine dernière, indiquant dans un communiqué avoir « besoin de repos pour quelque temps hors du diocèse », invoquant « une fatigue liée à diverses causes ».
Interrogé par la Croix, Vincent Neymon, porte-parole adjoint de la CEF, a estimé qu’« il y a peut-être des éléments qu’on n’a pas mais en tout cas à ce stade ce n’est pas si simple, pas si tranché. De là à en déduire des choses gravissimes... On trouverait inexact à ce jour de parler de pédophilie. Il ne faut pas aller trop vite et respecter la présomption d’innocence. En tout cas, le gouvernement du diocèse dans ces circonstances n’est plus possible car il y a rupture de confiance. »
Signal fort du pape François
Cette décision envoie un signal fort, alors même que le pape François a demandé aux évêques d’être irréprochables, menaçant de démettre de ses fonctions un évêque « seulement s’il a objectivement manqué, de manière très grave, à la diligence qui lui a été demandée par son office pastoral, même sans grave faute morale de sa part ». « Dans le cas où il s’agit d’abus sur des mineurs ou sur des adultes vulnérables, le manque de diligence peut être considéré comme un motif grave », poursuit le Motu proprio Comme une mère aimante.
Dans l’état actuel des choses, le pape a nommé Mgr Bernard Charrier, évêque émérite de Tulle, administrateur apostolique du diocèse de Dax.
Céline Hoyeau et Nicolas Senèze
http://www.la-croix.com/Religion/Catholicisme/France/Le-pape-accepte-la-demission-de-MgrGaschignard-eveque-de-Dax-2017-04-06-1200837631