https://www.lemonde.fr/le-monde-des-religions/article/2024/09/22/alberto-fabio-ambrosio-theologien-aujourd-hui-la-mode-est-devenue-une-religion-secularisee_6328011_6038514.html
Alberto Fabio Ambrosio, théologien : « Aujourd’hui, la mode est devenue une religion sécularisée »
Y a-t-il une dimension sacrée dans nos vêtements ? La mode a-t-elle remplacé les religions ? Celles-ci ont-elles encore leur mot à dire en matière d’habillement ? Alors que s’ouvre lundi la Paris Fashion Week, le théologien Alberto Fabio Ambrosio jette des ponts entre ces deux univers.
Propos recueillis par Linda Caille
Publié aujourd’hui à 10h00
Une femme prépare une robe, la "Battle Dress", offerte par le créateur, Jean-Charles de Castelbajac, pour habiller la Vierge noire de la basilique de la Daurade, à Toulouse le 7 mars 2010. Huit robes, bénies, ont été créées par des grands noms de la haute couture pour remplacer les parures offertes aux XVIIIe et XIXe siècle à cette Vierge. REMY GABALDA / AFP
Les religions gagneraient à parler de mode, assure le théologien Alberto Fabio Ambrosio, codirecteur au Collège des Bernardins du séminaire « Ecologie de la mode : vers de nouvelles vertus », et auteur de Mode et Religion. Habiller le sacré, sacraliser le look (Hermann, 2024) et de Théologie de la mode. Dieu trois fois tailleur (Hermann, 2021). Alors que s’ouvre la Paris Fashion Week (23 septembre-1er octobre), ce religieux dominicain appelle, dans un entretien au Monde, les cultes à inventer une « nouvelle pudeur », non plus en contrôlant ce que couvrent ou non nos vêtements sur nos corps, mais en s’engageant contre « l’injustice esthétiquo-économique et environnementale » que suscite l’industrie de la mode.
La mode n’est-elle pas un sujet futile pour un théologien habitué à discourir sur Dieu ?
La mode est un phénomène social, économique, politique et esthétique incontournable pour comprendre les sociétés contemporaines. Il suffit de regarder les chiffres de l’industrie du textile [1 530 milliards de dollars de chiffre d’affaires dans le monde en 2022] pour comprendre à quel point la mode est un phénomène qui fait vivre la société. En tant que théologien, je travaille sur des phénomènes sociaux globalisants, totalisants, c’est-à-dire qui concernent tant l’individu que la collectivité. Or, c’est le cas de la mode comme de la religion.