[size=38]Les salariés de l’Église aussi sont au chômage partiel[/size]
Analyse
Le diocèse de Paris a également demandé à certains de ses 188 salariés – dont plus d’un tiers à temps partiel – de prendre des congés, s’ils n’avaient plus d’occupation.[size=12]JOEL SAGET/AFP[/size]
En période de confinement comme en temps normal, d’importantes différences se constatent entre les « gros » et les « petits » diocèses. Notamment dans la gestion de leurs salariés. Une gestion qui, dans le diocèse de Laval (Mayenne), se fait « au cas par cas », selon Véronique Larat-Faguer, déléguée épiscopale à l’information.
À Laval – où l’on compte 22 équivalents temps plein – comme dans bien d’autres diocèses de province, une demande d’autorisation préalable à la mise en chômage partiel a été déposée auprès de la direction compétente « aussitôt après » les annonces du gouvernement, afin d’obtenir l’indemnisation de chômage partiel pour les salariés. « Pour le mois de mars, peu d’heures n’ont pas été effectuées », poursuit-elle, en précisant que les six techniciens du sanctuaire de Pontmain ont pu « se mettre à des travaux en attente ». Mais pour avril, les comptes seront faits en tenant compte des baisses d’activités ecclésiales.
Dans le diocèse de Toulouse – qui compte 82 salariés, dont 53 à temps partiel – 43 % sont actuellement en chômage partiel. « Cela donne par endroits du partiel de partiel », résume Capucine Malleville, responsable de la communication. Relayant les propos de l’économat, celle-ci assure que cette décision a été « paisiblement acceptée et bien comprise », d’autant que l’Église locale a compensé jusqu’ici les 16 % qui ne sont pas pris en charge par l’État - qui ne verse qu’environ 84 % du salaire.
→ EXPLICATION. Coronavirus : les conséquences du chômage partiel pour les salariés
Le même dispositif a été mis en place à Montauban (Tarn-et-Garonne). « Ce ne sont pas des gros salaires, donc la compensation n’est pas excessive », y explique-t-on. L’été dernier, le diocèse, au bord du gouffre, avait annoncé le licenciement douloureux – et controversé – de neuf de ses employés. « Si nous n’avions pas pris cette décision, et si la crise du Covid-19 était alors survenue, notre diocèse n’existerait plus », soutient l’économe. « Nous avons réussi à faire des économies, nous devrions pouvoir passer la crise ».
À Clermont-Ferrand, la quasi-totalité des salariés a été placée en chômage partiel, « sauf la pastorale des jeunes, qui travaille au ralenti, et celle de la santé où nombre d’aumôniers dépendent de l’hôpital », rappelle le père Bernard Lochet, vicaire général. Quant au personnel de cuisine et aux salariés du service de communication, ils ont réduit leur temps de travail. « Malgré nos difficultés, se réjouit-il, nous essayons de leur maintenir un salaire complet ».
À Rodez (Aveyron), Sylvain Brossy, le directeur de la maison diocésaine Saint-Pierre, continue son activité en télétravail. « Nous sommes neuf à travailler ici ; quatre sont au chômage partiel, et quatre en garde d’enfants », explique-t-il, assurant par ailleurs que le diocèse reste bien « attentif » à la situation de ses employés. « Nous leur avons notamment demandé de poser des congés pour être efficace après la crise », explique Thierry Ducruet, l’économe local.
Le diocèse de Paris a également demandé à certains de ses 188 salariés – dont plus d’un tiers à temps partiel – de prendre des congés, s’ils n’avaient plus d’occupation. Mais en mars, moins de 10 % du personnel (dans les accueils et les services généraux) était inoccupé. « Le principe, c’est de maintenir tous les salaires à 100 % », assure Florence Guéry, responsable diocésaine des ressources humaines. Très satisfaite du dispositif informatique permettant le télétravail, elle constate qu’il n’y a pas eu de demande d’avance sur salaires de la part de salariés en difficulté. « Mais on est en train de recenser toutes les mesures mises en place par l’État, la région, la ville, et la CAF, pour distribuer un guide aux paroisses et aux associations. »
Dans nombre de paroisses, les sacristains et secrétaires ont aussi été placés au chômage partiel, ou en télétravail. C’est le cas de Sylvie Ellien, 52 ans, secrétaire à mi-temps à Paimpol (Côtes-d’Armor), pour 950 € mensuels. Depuis le 16 mars, elle continue de s’occuper à distance du bulletin paroissial. « Notre fonction c’est d’être là, d’essayer de faire du bien, mais à part quelques coups de téléphone, je n’ai pas grand-chose à faire », regrette-t-elle.
Ces mises en chômage partiel ont aussi parfois suscité des incompréhensions. « Il y a trois prêtres débordés dans mon secteur. Nous avions demandé à l’évêché de garder une secrétaire de paroisse en télétravail, mais celle-ci a été placée en chômage partiel. On nous prêche à longueur d’année de pas avoir peur, mais à la première grande épreuve, on estime que c’est l’État laïc qui va sauver nos économies », fustige un paroissien vendéen. S’il comprend cette volonté de protéger les emplois, il se dit « surpris qu’il n’y ait pas eu un appel aux dons, auquel les communautés auraient pu répondre »
Avec l’arrêt des célébrations, les paroisses ne perçoivent plus l’argent des quêtes ni des casuels, et certains diocèses ne cachent pas leur inquiétude financière grandissante. « Nos ressources sont en chute libre », déplore ainsi le père Nicolas Guillou, délégué épiscopal à l’information à Rennes. Ces difficultés pourraient-elles conduire à terme à des licenciements ? Beaucoup jugent la question prématurée, et restent confiants. « Nous vivons au jour le jour, avec une trésorerie mise à mal », assure Benoît Dehen, économe diocésain à Bordeaux, « mais nous n’allons pas commencer à faire des coupes sombres dans la pastorale ».
Analyse
Le confinement et la suspension d’une majeure partie des activités ecclésiales ont obligé diocèses et paroisses à mettre certains de leurs salariés au chômage partiel. Une situation qui varie beaucoup selon les diocèses.
- Claire Lesegretain et Malo Tresca,
- le 16/04/2020 à 18:03
Le diocèse de Paris a également demandé à certains de ses 188 salariés – dont plus d’un tiers à temps partiel – de prendre des congés, s’ils n’avaient plus d’occupation.[size=12]JOEL SAGET/AFP[/size]
En période de confinement comme en temps normal, d’importantes différences se constatent entre les « gros » et les « petits » diocèses. Notamment dans la gestion de leurs salariés. Une gestion qui, dans le diocèse de Laval (Mayenne), se fait « au cas par cas », selon Véronique Larat-Faguer, déléguée épiscopale à l’information.
À Laval – où l’on compte 22 équivalents temps plein – comme dans bien d’autres diocèses de province, une demande d’autorisation préalable à la mise en chômage partiel a été déposée auprès de la direction compétente « aussitôt après » les annonces du gouvernement, afin d’obtenir l’indemnisation de chômage partiel pour les salariés. « Pour le mois de mars, peu d’heures n’ont pas été effectuées », poursuit-elle, en précisant que les six techniciens du sanctuaire de Pontmain ont pu « se mettre à des travaux en attente ». Mais pour avril, les comptes seront faits en tenant compte des baisses d’activités ecclésiales.
Congés
Dans le diocèse de Toulouse – qui compte 82 salariés, dont 53 à temps partiel – 43 % sont actuellement en chômage partiel. « Cela donne par endroits du partiel de partiel », résume Capucine Malleville, responsable de la communication. Relayant les propos de l’économat, celle-ci assure que cette décision a été « paisiblement acceptée et bien comprise », d’autant que l’Église locale a compensé jusqu’ici les 16 % qui ne sont pas pris en charge par l’État - qui ne verse qu’environ 84 % du salaire.
→ EXPLICATION. Coronavirus : les conséquences du chômage partiel pour les salariés
Le même dispositif a été mis en place à Montauban (Tarn-et-Garonne). « Ce ne sont pas des gros salaires, donc la compensation n’est pas excessive », y explique-t-on. L’été dernier, le diocèse, au bord du gouffre, avait annoncé le licenciement douloureux – et controversé – de neuf de ses employés. « Si nous n’avions pas pris cette décision, et si la crise du Covid-19 était alors survenue, notre diocèse n’existerait plus », soutient l’économe. « Nous avons réussi à faire des économies, nous devrions pouvoir passer la crise ».
À Clermont-Ferrand, la quasi-totalité des salariés a été placée en chômage partiel, « sauf la pastorale des jeunes, qui travaille au ralenti, et celle de la santé où nombre d’aumôniers dépendent de l’hôpital », rappelle le père Bernard Lochet, vicaire général. Quant au personnel de cuisine et aux salariés du service de communication, ils ont réduit leur temps de travail. « Malgré nos difficultés, se réjouit-il, nous essayons de leur maintenir un salaire complet ».
À Rodez (Aveyron), Sylvain Brossy, le directeur de la maison diocésaine Saint-Pierre, continue son activité en télétravail. « Nous sommes neuf à travailler ici ; quatre sont au chômage partiel, et quatre en garde d’enfants », explique-t-il, assurant par ailleurs que le diocèse reste bien « attentif » à la situation de ses employés. « Nous leur avons notamment demandé de poser des congés pour être efficace après la crise », explique Thierry Ducruet, l’économe local.
Télétravail
Le diocèse de Paris a également demandé à certains de ses 188 salariés – dont plus d’un tiers à temps partiel – de prendre des congés, s’ils n’avaient plus d’occupation. Mais en mars, moins de 10 % du personnel (dans les accueils et les services généraux) était inoccupé. « Le principe, c’est de maintenir tous les salaires à 100 % », assure Florence Guéry, responsable diocésaine des ressources humaines. Très satisfaite du dispositif informatique permettant le télétravail, elle constate qu’il n’y a pas eu de demande d’avance sur salaires de la part de salariés en difficulté. « Mais on est en train de recenser toutes les mesures mises en place par l’État, la région, la ville, et la CAF, pour distribuer un guide aux paroisses et aux associations. »
Dans nombre de paroisses, les sacristains et secrétaires ont aussi été placés au chômage partiel, ou en télétravail. C’est le cas de Sylvie Ellien, 52 ans, secrétaire à mi-temps à Paimpol (Côtes-d’Armor), pour 950 € mensuels. Depuis le 16 mars, elle continue de s’occuper à distance du bulletin paroissial. « Notre fonction c’est d’être là, d’essayer de faire du bien, mais à part quelques coups de téléphone, je n’ai pas grand-chose à faire », regrette-t-elle.
Ressources
Ces mises en chômage partiel ont aussi parfois suscité des incompréhensions. « Il y a trois prêtres débordés dans mon secteur. Nous avions demandé à l’évêché de garder une secrétaire de paroisse en télétravail, mais celle-ci a été placée en chômage partiel. On nous prêche à longueur d’année de pas avoir peur, mais à la première grande épreuve, on estime que c’est l’État laïc qui va sauver nos économies », fustige un paroissien vendéen. S’il comprend cette volonté de protéger les emplois, il se dit « surpris qu’il n’y ait pas eu un appel aux dons, auquel les communautés auraient pu répondre »
Avec l’arrêt des célébrations, les paroisses ne perçoivent plus l’argent des quêtes ni des casuels, et certains diocèses ne cachent pas leur inquiétude financière grandissante. « Nos ressources sont en chute libre », déplore ainsi le père Nicolas Guillou, délégué épiscopal à l’information à Rennes. Ces difficultés pourraient-elles conduire à terme à des licenciements ? Beaucoup jugent la question prématurée, et restent confiants. « Nous vivons au jour le jour, avec une trésorerie mise à mal », assure Benoît Dehen, économe diocésain à Bordeaux, « mais nous n’allons pas commencer à faire des coupes sombres dans la pastorale ».