Dans un livre publié il y a quelques années, le médecin et entrepreneur Laurent Alexandre, défenseur du transhumanisme, l’affirmait sans détour: «La croissance de la techno-médecine, et donc de notre longévité, sera exponentielle.» Selon ses dires, «l’espérance de vie doublera, au minimum, au cours de ce siècle». Jusqu’à transcender nos limites biologiques actuelles, en visant ni plus ni moins à… l’immortalité! Mais un tel projet - porté par des scientifiques, des informaticiens, des milliardaires de la Silicon Valley regroupés au sein du mouvement transhumaniste - a-t-il la moindre chance d’aboutir?
Une étude, parue en 2017 dans la revue Lancet, apporte un sérieux bémol. Selon les modélisations d’une équipe d’épidémiologistes britanniques de l’Imperial College de Londres, à l’horizon 2030, l’espérance de vie à la naissance aurait plus d’une chance sur deux de frôler les 89 ans pour les petites Françaises, et dépasser les 90 ans pour les Sud-Coréennes. Par rapport aux données de 2010, ce sont des gains respectifs de «seulement» quatre et six ans.
Concernant l’espérance de vie à 65 ans, les fourchettes sont à peu près du même ordre: 26 années en moyenne en 2030 contre 23 actuellement pour les Françaises, et 27,5 années contre un peu moins de 22 ans en Corée du Sud. Pas besoin d’être un génie en maths pour comprendre que cette hausse de la longévité n’est pas exponentielle. Ce que souligne Jacques Testart, l’un des pionniers français de la fécondation in vitro, dans une critique virulente du livre de Laurent Alexandre.
L’espérance de vie a atteint un palier
«Ce qui occupe surtout les fantasmes de l’auteur, et justifie le titre de son livre, c’est l’annulation de la mort», explique-t-il. Les arguments ne tiennent pas, affirme le scientifique, que ce soit sur la modification de certains gènes, la perception de l’organisme comme un jeu de Lego, l’éradication des maladies ou encore l’espérance de vie. Jean-François Toussaint, médecin et professeur de physiologie à l’université Paris Descartes, est du même avis. Avec une équipe de l’Irmes (Institut de recherche biomédicale et d’épidémiologie du sport), il a récemment montré que, depuis une vingtaine d’années, l’espérance de vie semble buter sur un palier, ne progressant que très peu.
«Nous avons déjà connu de tels paliers, par exemple, à la suite de guerres, commente le professeur Toussaint, alors qu’ici, il se situe à la fin d’une extraordinaire période de prospérité. Il a donc une autre signification.» D’après lui, ce sont avant tout les progrès de l’hygiène et de l’alimentation qui auraient permis de nous faire gagner des années de vie, surtout grâce au formidable recul de la mortalité infantile: les effets de la médecine sur la longévité, n’en déplaise aux transhumanistes, se limiteraient à 10 % des gains. Et désormais, les perspectives d’amélioration seraient plus limitées, d’autant que les changements climatiques risquent d’entraîner des pics de surmortalité.
Quant à miser sur l’intelligence artificielle ou les nouvelles technologies, force est de reconnaître qu’elles sont loin d’avoir tenu toutes leurs promesses. D’aucuns rêvent, certes, de télécharger leur «esprit» dans un disque dur. Mais comme le fait remarquer l’informaticien et philosophe Jean-Gabriel Ganascia, «il n’existe aucun élément scientifique permettant d’aller dans ce sens». On pourrait en dire tout autant de la cryogénisation et des traitements anti-âge…
Une étude, parue en 2017 dans la revue Lancet, apporte un sérieux bémol. Selon les modélisations d’une équipe d’épidémiologistes britanniques de l’Imperial College de Londres, à l’horizon 2030, l’espérance de vie à la naissance aurait plus d’une chance sur deux de frôler les 89 ans pour les petites Françaises, et dépasser les 90 ans pour les Sud-Coréennes. Par rapport aux données de 2010, ce sont des gains respectifs de «seulement» quatre et six ans.
Concernant l’espérance de vie à 65 ans, les fourchettes sont à peu près du même ordre: 26 années en moyenne en 2030 contre 23 actuellement pour les Françaises, et 27,5 années contre un peu moins de 22 ans en Corée du Sud. Pas besoin d’être un génie en maths pour comprendre que cette hausse de la longévité n’est pas exponentielle. Ce que souligne Jacques Testart, l’un des pionniers français de la fécondation in vitro, dans une critique virulente du livre de Laurent Alexandre.
L’espérance de vie a atteint un palier
«Ce qui occupe surtout les fantasmes de l’auteur, et justifie le titre de son livre, c’est l’annulation de la mort», explique-t-il. Les arguments ne tiennent pas, affirme le scientifique, que ce soit sur la modification de certains gènes, la perception de l’organisme comme un jeu de Lego, l’éradication des maladies ou encore l’espérance de vie. Jean-François Toussaint, médecin et professeur de physiologie à l’université Paris Descartes, est du même avis. Avec une équipe de l’Irmes (Institut de recherche biomédicale et d’épidémiologie du sport), il a récemment montré que, depuis une vingtaine d’années, l’espérance de vie semble buter sur un palier, ne progressant que très peu.
«Nous avons déjà connu de tels paliers, par exemple, à la suite de guerres, commente le professeur Toussaint, alors qu’ici, il se situe à la fin d’une extraordinaire période de prospérité. Il a donc une autre signification.» D’après lui, ce sont avant tout les progrès de l’hygiène et de l’alimentation qui auraient permis de nous faire gagner des années de vie, surtout grâce au formidable recul de la mortalité infantile: les effets de la médecine sur la longévité, n’en déplaise aux transhumanistes, se limiteraient à 10 % des gains. Et désormais, les perspectives d’amélioration seraient plus limitées, d’autant que les changements climatiques risquent d’entraîner des pics de surmortalité.
Quant à miser sur l’intelligence artificielle ou les nouvelles technologies, force est de reconnaître qu’elles sont loin d’avoir tenu toutes leurs promesses. D’aucuns rêvent, certes, de télécharger leur «esprit» dans un disque dur. Mais comme le fait remarquer l’informaticien et philosophe Jean-Gabriel Ganascia, «il n’existe aucun élément scientifique permettant d’aller dans ce sens». On pourrait en dire tout autant de la cryogénisation et des traitements anti-âge…