Pourquoi l’homme continue-t-il à manger de la viande ?
Propos recueillis par Youna Rivallain - publié le 28/07/2017
Pour la philosophe Florence Burgat, l’alimentation carnée serait liée à une obsession humaine de se dissocier des animaux. Dans L’Humanité carnivore*, elle interroge les mythes et rituels liés à la consommation de viande et plaide pour une « humanité végétarienne ».
La chasse, et a fortiori l'alimentation carnée, sont-elles pour l'homme une façon de se placer comme « maître et possesseur de la Nature » et de se différencier de l'animal ?
Il faut replacer la question de l'alimentation carnée dans un contexte historique, géographique et démographique. Aujourd'hui, nous n'avons plus besoin de tuer des animaux pour vivre, nous nourrir, nous vêtir, etc. Nous avons le choix, nous ne nous sommes plus dans l'optique de la survie. C'est à partir du moment où l'homme tue des animaux pour des motifs différents de la nécessité que la question de l'alimentation carnée devient une question philosophique, voire métaphysique.
Trois champs de la pensée opèrent une coupure radicale entre humains et animaux. Il s'agit de la religion, de la philosophie et du droit. Cette division s'accompagne du droit des uns sur les autres. Or, il n'allait pas de soi que le législateur place les animaux du côté des choses ! Il serait plus conforme à la nature des animaux d’être placés du côté des personnes, puisque le droit divise le monde en deux parties : les personnes et les choses. Il s’agit donc d’une décision métaphysique, qui n'est pas fondée sur les connaissances ou l'observation du comportement animal, mais bien sur une volonté qui instaure le droit des humains à disposer des animaux comme d'une matière première. En ce sens, l'alimentation carnée serait liée à cette obsession humaine de se dissocier des animaux par leur appropriation violente, massive, radicale.
Quel est le rôle des mythes civilisationnels dans le choix de l'humanité de manger de la viande ?
Lorsqu’une pratique est quotidienne, banale, universelle, elle échappe à l’interrogation. Elle nous est trop familière pour que son éventuelle étrangeté se révèle. C’est l’une des raisons pour lesquelles j’ai voulu voir en quels termes les mythes abordaient la question de la consommation des animaux par les humains.
On trouve dans plusieurs types de traditions culturelles l'idée selon laquelle l'humanité serait passée par différents âges au fil desquels les choses se sont peu à peu gâtées. Je songe ici à l'âge d'or (chez Hésiode au VIIIe siècle avant notre ère, beaucoup plus tard Ovide et bien d’autres auteurs gréco-latins), période d'abondance durant laquelle les hommes avaient tout à portée de main et où ne régnait aucune violence. L’âge de fer qui suit fait place au règne d’hommes tourmentés et envieux. Il y a aussi bien sûr le thème de la Chute (Genèse) – et rappelons-nous que dans le Livre d’Isaïe, la restauration d’un état de paix passe par la fin de l’entre-dévoration : « Le loup paîtra avec l’agneau » (65, 25). Bref, on trouve de nombreuses traces de l’idée que l’ordre meurtrier qui régit nos rapports aux animaux est le produit d’une rupture.
On se souvient, dans l’Odyssée d’Homère (Chant XII), de la séquence des vaches du Soleil, tuées et mangées par les compagnons d’Ulysse, malgré son interdiction. Cette séquence constitue une véritable scène primitive : « Les dépouilles marchaient ; les chairs cuites et crues meuglaient autour des broches ; on aurait dit la voix des bêtes elles-mêmes. » Donner à penser, et donc à continuer de percevoir l’animal vivant dans la viande, n’est-ce pas toujours ce qu’il convient de rappeler pour comprendre ce qu’est la nourriture carnée, comme le fait Plutarque, au Ier siècle de notre ère, dans son traité S’il est loisible de manger chair ?
On trouve également l’idée que c’est par hasard que les hommes seraient devenus carnivores ; et d’autres pistes passionnantes que je présente dans mon livre.
D'après vous, assistons-nous aujourd'hui à une remise en cause de la séparation entre hommes et animaux ?
J'évoque l'alimentation carnée comme une forme de « cannibalisme élargi ». Cette expression est de l’anthropologue Claude Lévi-Strauss, mais on trouve dans la pensée grecque la notion d'allélophagie, qui signifie « se manger les uns les autres ». Ce terme désigne aussi bien le cannibalisme – sur lequel je m’arrête longuement – que l'alimentation zoocarnée, c'est-à-dire la mise à mort et consommation d'animaux. En effet, les humains mangent des animaux qui leur sont proches, qu'ils ont domestiqués, avec lesquels ils vivent.
La thèse, la prophétie même, de Claude Lévi-Strauss, est qu'un jour viendra où les chairs en lambeaux des animaux que nous exposons complaisamment dans des vitrines, écrit-il, inspireront sans doute la même répulsion que les repas cannibales en Amérique, en Océanie ou en Afrique, aux explorateurs européens du passé.
L'alimentation carnée repose sur un abaissement ontologique et éthologique des animaux. Or, aujourd'hui, dans les sociétés sécularisées où la science s'est séparée de la religion, l'éthologie [l’étude du comportement des animaux, ndlr] met en évidence des dispositions comportementales, cognitives, émotives, qui sont en continuité entre les espèces humaines et les espèces animales.
De plus, le fait que le législateur évoque les souffrances et la détresse des animaux ébranle et fragilise cette espèce de barrière meurtrière que nous avons construite entre humains et animaux. Notre obsession de nous différencier de ces derniers se manifesterait donc par une volonté de maintenir cette domination sur les animaux. Cependant, les partisans de ce commerce meurtrier se retrouvent aujourd'hui vite à court d'arguments.
Du point de vue des religions monothéistes, le concept d'âme est souvent est invoqué pour différencier l'homme de l'animal. Selon vous, ce qui différencie ces deux espèces serait-il plutôt le fait que l'une mange l'autre ?
Nous avons ici deux types d'opérations de distinction : en parlant d'âme, de conscience, de raison, d'intelligence, on cherche des critères essentiels, caractéristiques. Si la distinction part du fait que les uns mangent les autres, on n'est plus en quête d'un critère qui qualifie intrinsèquement les individus, humain ou animal, mais on cherche quel type de rapport de force, de domination est instauré.
Il m’apparaît que la recherche du « propre de l'Homme » est une sorte d'obsession creuse des philosophes. Chaque espèce, l’espèce humaine tout comme chaque espèce animale, a des singularités.
Il faut penser la diversité des formes animales, être attentif à la singularité de chacune – l’espèce humaine possède sa singularité historique –, et ne pas parler de l’Animal en général, car cette notion nie la singularité des individus et la diversité des espèces, les réduit à un concept vide. Se mettre dans cette disposition d’esprit, dans cette ouverture, permet d’appréhender la plénitude de chaque espèce. Il est vrai que nous avons été nourris à l’idée que « l’animal » est cet être auquel il manque tout pour être un homme ! Voilà l’un des méfaits de l’anthropocentrisme.
Vous évoquez un paradoxe, celui de l'augmentation de la consommation de viande et de l'abattage d'animaux, parallèlement à la plus grande place donnée à la sensibilité des animaux par le législateur. Comment l'expliquer ?
Je pense que nous sommes à un moment charnière. On entend beaucoup de discours sur la dureté de la condition animale ; et dans le même temps, la plupart des gens ne pensent pas à remettre en cause leur mode de vie parce que celui-ci est ancré dans des habitudes, et que les modifier demanderait un effort de la volonté.
Aujourd'hui, de plus en plus de travaux interrogent notre façon de penser et d'agir, mais dans un monde dont l'économie est fondée sur l'exploitation des animaux, un monde dans lequel chacun consomme des animaux sans même s'en apercevoir.
Nous sommes face à une véritable montagne à soulever pour que, un par un, les individus aient la volonté de réfléchir à ce que suppose et entraîne l'alimentation carnée. On peut reconnaître qu’une chose est mauvaise sans pour autant modifier notre comportement pour autant, tout simplement parce que tout le monde est partie prenante et que l’on a souvent tendance à s’excepter d’une règle que l’on juge bonne ! Nous assistons actuellement à une guerre entre une pensée qui remet en question la légitimité de nos activités et une inertie de nos modes de consommation. Cette réflexion se heurte également au militantisme des filières qui vivent de l’exploitation animale et ne sont pas prêtes à voir les animaux autrement que comme des biens de consommation.
Vous militez pour une « humanité végétarienne » : quelles solutions proposez-vous comme alternative à la viande ?
Il n'existe d’offre de viande que parce qu'il existe une demande. Très peu de situations se présentent où l’on a autant le pouvoir d’agir. On peut se désoler de choses abominables dans le monde sans pour autant avoir un quelconque pouvoir. Or là, il suffirait que la majorité de la population arrête d'acheter de la viande, du poisson, du fromage, tout ce qui est lié à cette industrie de la mise à mort, pour que cette économie s'effondre et que nos éleveurs se tournent vers la culture des protéines végétales. Les industries de l'alimentation rejoindraient les marques qui ont développé de façon parfois extrêmement convaincante des simili-carnés et simili-fromages, par exemple.
C'est toute une économie qui pourrait alors se convertir, d'autant plus que l'argument de la condition animale n'est pas le seul en jeu dans cette affaire. Les animaux sont les premières victimes de ce marché, mais ce ne sont pas les seules. On occulte souvent l'aspect environnemental, ainsi que l'argument de la justice sociale par exemple. On ne compte plus le nombre de tonnes de viande que l'on jette chaque année en Europe, aux États-Unis, en Chine, alors que tant d'hommes et de femmes meurent de faim.
Nous devrions progressivement nous tourner vers une autre production afin de retrouver dans notre alimentation une variété que l'humanité a toujours connue. Nous avons le pouvoir de mettre un terme à la boucherie — un mot qui se passe de commentaires.
(*) L’Humanité carnivore, Florence Burgat, Seuil, 465 p., 26 €.
Propos recueillis par Youna Rivallain - publié le 28/07/2017
Pour la philosophe Florence Burgat, l’alimentation carnée serait liée à une obsession humaine de se dissocier des animaux. Dans L’Humanité carnivore*, elle interroge les mythes et rituels liés à la consommation de viande et plaide pour une « humanité végétarienne ».
La chasse, et a fortiori l'alimentation carnée, sont-elles pour l'homme une façon de se placer comme « maître et possesseur de la Nature » et de se différencier de l'animal ?
Il faut replacer la question de l'alimentation carnée dans un contexte historique, géographique et démographique. Aujourd'hui, nous n'avons plus besoin de tuer des animaux pour vivre, nous nourrir, nous vêtir, etc. Nous avons le choix, nous ne nous sommes plus dans l'optique de la survie. C'est à partir du moment où l'homme tue des animaux pour des motifs différents de la nécessité que la question de l'alimentation carnée devient une question philosophique, voire métaphysique.
Trois champs de la pensée opèrent une coupure radicale entre humains et animaux. Il s'agit de la religion, de la philosophie et du droit. Cette division s'accompagne du droit des uns sur les autres. Or, il n'allait pas de soi que le législateur place les animaux du côté des choses ! Il serait plus conforme à la nature des animaux d’être placés du côté des personnes, puisque le droit divise le monde en deux parties : les personnes et les choses. Il s’agit donc d’une décision métaphysique, qui n'est pas fondée sur les connaissances ou l'observation du comportement animal, mais bien sur une volonté qui instaure le droit des humains à disposer des animaux comme d'une matière première. En ce sens, l'alimentation carnée serait liée à cette obsession humaine de se dissocier des animaux par leur appropriation violente, massive, radicale.
Quel est le rôle des mythes civilisationnels dans le choix de l'humanité de manger de la viande ?
Lorsqu’une pratique est quotidienne, banale, universelle, elle échappe à l’interrogation. Elle nous est trop familière pour que son éventuelle étrangeté se révèle. C’est l’une des raisons pour lesquelles j’ai voulu voir en quels termes les mythes abordaient la question de la consommation des animaux par les humains.
On trouve dans plusieurs types de traditions culturelles l'idée selon laquelle l'humanité serait passée par différents âges au fil desquels les choses se sont peu à peu gâtées. Je songe ici à l'âge d'or (chez Hésiode au VIIIe siècle avant notre ère, beaucoup plus tard Ovide et bien d’autres auteurs gréco-latins), période d'abondance durant laquelle les hommes avaient tout à portée de main et où ne régnait aucune violence. L’âge de fer qui suit fait place au règne d’hommes tourmentés et envieux. Il y a aussi bien sûr le thème de la Chute (Genèse) – et rappelons-nous que dans le Livre d’Isaïe, la restauration d’un état de paix passe par la fin de l’entre-dévoration : « Le loup paîtra avec l’agneau » (65, 25). Bref, on trouve de nombreuses traces de l’idée que l’ordre meurtrier qui régit nos rapports aux animaux est le produit d’une rupture.
On se souvient, dans l’Odyssée d’Homère (Chant XII), de la séquence des vaches du Soleil, tuées et mangées par les compagnons d’Ulysse, malgré son interdiction. Cette séquence constitue une véritable scène primitive : « Les dépouilles marchaient ; les chairs cuites et crues meuglaient autour des broches ; on aurait dit la voix des bêtes elles-mêmes. » Donner à penser, et donc à continuer de percevoir l’animal vivant dans la viande, n’est-ce pas toujours ce qu’il convient de rappeler pour comprendre ce qu’est la nourriture carnée, comme le fait Plutarque, au Ier siècle de notre ère, dans son traité S’il est loisible de manger chair ?
On trouve également l’idée que c’est par hasard que les hommes seraient devenus carnivores ; et d’autres pistes passionnantes que je présente dans mon livre.
D'après vous, assistons-nous aujourd'hui à une remise en cause de la séparation entre hommes et animaux ?
J'évoque l'alimentation carnée comme une forme de « cannibalisme élargi ». Cette expression est de l’anthropologue Claude Lévi-Strauss, mais on trouve dans la pensée grecque la notion d'allélophagie, qui signifie « se manger les uns les autres ». Ce terme désigne aussi bien le cannibalisme – sur lequel je m’arrête longuement – que l'alimentation zoocarnée, c'est-à-dire la mise à mort et consommation d'animaux. En effet, les humains mangent des animaux qui leur sont proches, qu'ils ont domestiqués, avec lesquels ils vivent.
La thèse, la prophétie même, de Claude Lévi-Strauss, est qu'un jour viendra où les chairs en lambeaux des animaux que nous exposons complaisamment dans des vitrines, écrit-il, inspireront sans doute la même répulsion que les repas cannibales en Amérique, en Océanie ou en Afrique, aux explorateurs européens du passé.
L'alimentation carnée repose sur un abaissement ontologique et éthologique des animaux. Or, aujourd'hui, dans les sociétés sécularisées où la science s'est séparée de la religion, l'éthologie [l’étude du comportement des animaux, ndlr] met en évidence des dispositions comportementales, cognitives, émotives, qui sont en continuité entre les espèces humaines et les espèces animales.
De plus, le fait que le législateur évoque les souffrances et la détresse des animaux ébranle et fragilise cette espèce de barrière meurtrière que nous avons construite entre humains et animaux. Notre obsession de nous différencier de ces derniers se manifesterait donc par une volonté de maintenir cette domination sur les animaux. Cependant, les partisans de ce commerce meurtrier se retrouvent aujourd'hui vite à court d'arguments.
Du point de vue des religions monothéistes, le concept d'âme est souvent est invoqué pour différencier l'homme de l'animal. Selon vous, ce qui différencie ces deux espèces serait-il plutôt le fait que l'une mange l'autre ?
Nous avons ici deux types d'opérations de distinction : en parlant d'âme, de conscience, de raison, d'intelligence, on cherche des critères essentiels, caractéristiques. Si la distinction part du fait que les uns mangent les autres, on n'est plus en quête d'un critère qui qualifie intrinsèquement les individus, humain ou animal, mais on cherche quel type de rapport de force, de domination est instauré.
Il m’apparaît que la recherche du « propre de l'Homme » est une sorte d'obsession creuse des philosophes. Chaque espèce, l’espèce humaine tout comme chaque espèce animale, a des singularités.
Il faut penser la diversité des formes animales, être attentif à la singularité de chacune – l’espèce humaine possède sa singularité historique –, et ne pas parler de l’Animal en général, car cette notion nie la singularité des individus et la diversité des espèces, les réduit à un concept vide. Se mettre dans cette disposition d’esprit, dans cette ouverture, permet d’appréhender la plénitude de chaque espèce. Il est vrai que nous avons été nourris à l’idée que « l’animal » est cet être auquel il manque tout pour être un homme ! Voilà l’un des méfaits de l’anthropocentrisme.
Vous évoquez un paradoxe, celui de l'augmentation de la consommation de viande et de l'abattage d'animaux, parallèlement à la plus grande place donnée à la sensibilité des animaux par le législateur. Comment l'expliquer ?
Je pense que nous sommes à un moment charnière. On entend beaucoup de discours sur la dureté de la condition animale ; et dans le même temps, la plupart des gens ne pensent pas à remettre en cause leur mode de vie parce que celui-ci est ancré dans des habitudes, et que les modifier demanderait un effort de la volonté.
Aujourd'hui, de plus en plus de travaux interrogent notre façon de penser et d'agir, mais dans un monde dont l'économie est fondée sur l'exploitation des animaux, un monde dans lequel chacun consomme des animaux sans même s'en apercevoir.
Nous sommes face à une véritable montagne à soulever pour que, un par un, les individus aient la volonté de réfléchir à ce que suppose et entraîne l'alimentation carnée. On peut reconnaître qu’une chose est mauvaise sans pour autant modifier notre comportement pour autant, tout simplement parce que tout le monde est partie prenante et que l’on a souvent tendance à s’excepter d’une règle que l’on juge bonne ! Nous assistons actuellement à une guerre entre une pensée qui remet en question la légitimité de nos activités et une inertie de nos modes de consommation. Cette réflexion se heurte également au militantisme des filières qui vivent de l’exploitation animale et ne sont pas prêtes à voir les animaux autrement que comme des biens de consommation.
Vous militez pour une « humanité végétarienne » : quelles solutions proposez-vous comme alternative à la viande ?
Il n'existe d’offre de viande que parce qu'il existe une demande. Très peu de situations se présentent où l’on a autant le pouvoir d’agir. On peut se désoler de choses abominables dans le monde sans pour autant avoir un quelconque pouvoir. Or là, il suffirait que la majorité de la population arrête d'acheter de la viande, du poisson, du fromage, tout ce qui est lié à cette industrie de la mise à mort, pour que cette économie s'effondre et que nos éleveurs se tournent vers la culture des protéines végétales. Les industries de l'alimentation rejoindraient les marques qui ont développé de façon parfois extrêmement convaincante des simili-carnés et simili-fromages, par exemple.
C'est toute une économie qui pourrait alors se convertir, d'autant plus que l'argument de la condition animale n'est pas le seul en jeu dans cette affaire. Les animaux sont les premières victimes de ce marché, mais ce ne sont pas les seules. On occulte souvent l'aspect environnemental, ainsi que l'argument de la justice sociale par exemple. On ne compte plus le nombre de tonnes de viande que l'on jette chaque année en Europe, aux États-Unis, en Chine, alors que tant d'hommes et de femmes meurent de faim.
Nous devrions progressivement nous tourner vers une autre production afin de retrouver dans notre alimentation une variété que l'humanité a toujours connue. Nous avons le pouvoir de mettre un terme à la boucherie — un mot qui se passe de commentaires.
(*) L’Humanité carnivore, Florence Burgat, Seuil, 465 p., 26 €.