Des propositions pour faire avancer l’unité chez les chrétiens
MARIE-LUCILE KUBACKI publié le 17/01/2017
Avec la rencontre entre François et le Patriarche Kirill, le voyage du pape en Suède, l’unité des chrétiens a figuré en haut des préoccupations des Églises catholiques, protestantes, orthodoxes en 2016. Une tendance qui devrait se renforcer en 2017 avec les commémorations des 500 ans de la Réforme.
Alors que les commission mixtes théologiques poursuivent leurs travaux, la priorité actuelle est à la rencontre, au travail humanitaire et caritatif en commun, comme celui, en Italie, des Églises protestantes et de la Communauté Sant’Egidio, autour des couloirs humanitaires à destination des réfugiés. À la réflexion écologique autour de la Création, dans la foulée de Laudato Si' et de la COP21. À des colocations de jeunes de différentes confessions comme à la Maison d’unité. À des échanges entre séminaires comme ceux entre le séminaire orthodoxe russe d’Épinay-sous-Sénart et celui, catholique, d’Issy-les-Moulineaux. Aux veillées de prière communes et rassemblements comme « Pentecôte 2017 », durant lequel le pape a convié tous les chrétiens à venir prier ensemble place Saint-Pierre, à l’occasion des 50 ans du Renouveau charismatique. Par ailleurs, certains pasteurs et théologiens avancent des propositions pour que le désir d’unité n’en reste pas au stade de vœu pieux. À l'occasion de la semaine de prière pour l'unité des chrétiens, qui a lieu du 18 au 25 janvier, nous en avons sélectionnées quelques unes, à différents niveaux, théologiques, ecclésiologiques et pastoraux.
Annoncer l’Évangile ensemble
Plus que sur le dialogue théologique, le pape François insiste sur trois dimensions : « cheminer ensemble, prier ensemble, travailler ensemble ». Ainsi, il mise sur la rencontre fraternelle et l’action commune et estime que l’unité viendra en chemin. « Chemin » est un mot qui revient souvent, comme l’analyse le père Hyacinthe Destivelle dans la revue Istina (2015, LX, n°1). Pour le pape, l’accord intellectuel ne suffit pas, il ne s’agit pas de trouver un « consensus » sur des points de désaccord : l’unité est une affaire de conversion. Cela implique qu’elle ne peut être obtenue avec « nos efforts humains » ni « par des diplomaties ecclésiastiques », mais qu'elle est « un don qui vient d’en-haut ». Ainsi, la proposition est dans l’approche elle-même. Car dès que l’on conçoit l’unité comme un don, quel peut être le rôle des chrétiens ? Que peuvent-ils « faire » ? « Recevoir » et « manifester » ce don, répond le pape. Dès lors, l’unité n’est plus un « objectif » mais un « chemin », une praxis, une manière de faire. Quel est ce chemin ? Autant la division nuit à l’annonce, autant l’annonce, ensemble, profite à l’unité, explique le pape : « L’unité d’amour est déjà réalité quand ceux que Dieu a choisis et appelés à former son peuple annoncent ensemble les merveilles qu’il a accomplies pour eux, surtout en offrant un témoignage d’une vie pleine de charité envers tous (...) quand nous collaborons dans l’annonce de l’Évangile et dans le service des laissés-pour-compte, nous sommes déjà unis. »
Célébrer Dieu dans d’autres Églises que la sienne
Dans la revue Unité des chrétiens (« La Joie chrétienne », janvier 2017), le pasteur de la Fédération baptiste Pierre de Mareuil livre un témoignage sur la joie de célébrer Dieu dans d’autres Églises que la sienne. « J’ai compris, écrit-il, qu’en faisant l’effort de dépasser mes préjugés, la découverte, voire l’apprentissage d’autres langages liturgiques était source de grande joie. » Il raconte notamment, comment, alors qu’il était pasteur a Compiègne, il a été invité à l’ordination du nouvel évêque de Beauvais, alors que le poste était vacant depuis quelques temps. « Tout cela était un peu formel pour moi, de la bonne diplomatie œcuménique. J’ai pourtant été d’emblée surpris par l’acclamation de l’ensemble des fidèles quand leur futur évêque est entré dans la cathédrale et en a parcouru les allées. (...) Le baptiste que je suis, attaché à l’ecclésiologie congrégationaliste, qui veut que ce soit l’ensemble des membres d’une Église locale qui choisisse et appelle son pasteur, a trouvé là une résonance et un lien pour le moins inattendu entre nos traditions et fonctionnements différents. » Mais arrivé au paroxysme de la joie fraternelle, il est rattrapé par la réalité : la souffrance de « l’impossibilité de participer au repas du Seigneur ». « Plutôt que de la laisser écraser ma joie, analyse-t-il à présent, j’ai choisi de transformer la souffrance en espérance dans l’attente du jour où nous pourrions nous retrouver autour de la même table et celle du chemin qui nous conduira vers la pleine communion retrouvée. » Le premier pas vers le désir concret de retrouver la pleine unité passe par l’expérience réelle de la souffrance de la désunité.
Considérer la division véritablement comme un péché
Considérer la division comme un péché est une proposition très largement partagée par les acteurs de l’œcuménisme. Le pape François, lui-même, insiste énormément sur ce point en répétant inlassablement qu’il s’agit d’un « scandale », au sens fort, évangélique, du terme. « La division est l’un des péchés les plus graves, car il fait d’elle le signe non de l’œuvre de Dieu, mais de l’œuvre du diable, qui est par définition celui qui sépare, qui détruit les relations, qui institue les préjugés… » déclarait-il lors d’une audience générale. Pour le pape, la division est liée à l’auto-référentialité : « Tous les problèmes qu’il y a entre nous, chrétiens – je parle au moins de notre Église catholique – apparaissent quand elle se regarde elle-même : elle devient autoréférentielle. Quand elle se regarde elle-même l’Église renonce à être une Église pour être une "ONG théologique" ». Concrètement, considérer la division comme un péché implique, pour chaque catholique, de chercher l’unité, en essayant de « voir avec les yeux de l’autre ».
http://www.lavie.fr/religion/interreligieux/des-propositions-pour-faire-avancer-l-unite-chez-les-chretiens-17-01-2017-79231_387.php
MARIE-LUCILE KUBACKI publié le 17/01/2017
Avec la rencontre entre François et le Patriarche Kirill, le voyage du pape en Suède, l’unité des chrétiens a figuré en haut des préoccupations des Églises catholiques, protestantes, orthodoxes en 2016. Une tendance qui devrait se renforcer en 2017 avec les commémorations des 500 ans de la Réforme.
Alors que les commission mixtes théologiques poursuivent leurs travaux, la priorité actuelle est à la rencontre, au travail humanitaire et caritatif en commun, comme celui, en Italie, des Églises protestantes et de la Communauté Sant’Egidio, autour des couloirs humanitaires à destination des réfugiés. À la réflexion écologique autour de la Création, dans la foulée de Laudato Si' et de la COP21. À des colocations de jeunes de différentes confessions comme à la Maison d’unité. À des échanges entre séminaires comme ceux entre le séminaire orthodoxe russe d’Épinay-sous-Sénart et celui, catholique, d’Issy-les-Moulineaux. Aux veillées de prière communes et rassemblements comme « Pentecôte 2017 », durant lequel le pape a convié tous les chrétiens à venir prier ensemble place Saint-Pierre, à l’occasion des 50 ans du Renouveau charismatique. Par ailleurs, certains pasteurs et théologiens avancent des propositions pour que le désir d’unité n’en reste pas au stade de vœu pieux. À l'occasion de la semaine de prière pour l'unité des chrétiens, qui a lieu du 18 au 25 janvier, nous en avons sélectionnées quelques unes, à différents niveaux, théologiques, ecclésiologiques et pastoraux.
Annoncer l’Évangile ensemble
Plus que sur le dialogue théologique, le pape François insiste sur trois dimensions : « cheminer ensemble, prier ensemble, travailler ensemble ». Ainsi, il mise sur la rencontre fraternelle et l’action commune et estime que l’unité viendra en chemin. « Chemin » est un mot qui revient souvent, comme l’analyse le père Hyacinthe Destivelle dans la revue Istina (2015, LX, n°1). Pour le pape, l’accord intellectuel ne suffit pas, il ne s’agit pas de trouver un « consensus » sur des points de désaccord : l’unité est une affaire de conversion. Cela implique qu’elle ne peut être obtenue avec « nos efforts humains » ni « par des diplomaties ecclésiastiques », mais qu'elle est « un don qui vient d’en-haut ». Ainsi, la proposition est dans l’approche elle-même. Car dès que l’on conçoit l’unité comme un don, quel peut être le rôle des chrétiens ? Que peuvent-ils « faire » ? « Recevoir » et « manifester » ce don, répond le pape. Dès lors, l’unité n’est plus un « objectif » mais un « chemin », une praxis, une manière de faire. Quel est ce chemin ? Autant la division nuit à l’annonce, autant l’annonce, ensemble, profite à l’unité, explique le pape : « L’unité d’amour est déjà réalité quand ceux que Dieu a choisis et appelés à former son peuple annoncent ensemble les merveilles qu’il a accomplies pour eux, surtout en offrant un témoignage d’une vie pleine de charité envers tous (...) quand nous collaborons dans l’annonce de l’Évangile et dans le service des laissés-pour-compte, nous sommes déjà unis. »
Célébrer Dieu dans d’autres Églises que la sienne
Dans la revue Unité des chrétiens (« La Joie chrétienne », janvier 2017), le pasteur de la Fédération baptiste Pierre de Mareuil livre un témoignage sur la joie de célébrer Dieu dans d’autres Églises que la sienne. « J’ai compris, écrit-il, qu’en faisant l’effort de dépasser mes préjugés, la découverte, voire l’apprentissage d’autres langages liturgiques était source de grande joie. » Il raconte notamment, comment, alors qu’il était pasteur a Compiègne, il a été invité à l’ordination du nouvel évêque de Beauvais, alors que le poste était vacant depuis quelques temps. « Tout cela était un peu formel pour moi, de la bonne diplomatie œcuménique. J’ai pourtant été d’emblée surpris par l’acclamation de l’ensemble des fidèles quand leur futur évêque est entré dans la cathédrale et en a parcouru les allées. (...) Le baptiste que je suis, attaché à l’ecclésiologie congrégationaliste, qui veut que ce soit l’ensemble des membres d’une Église locale qui choisisse et appelle son pasteur, a trouvé là une résonance et un lien pour le moins inattendu entre nos traditions et fonctionnements différents. » Mais arrivé au paroxysme de la joie fraternelle, il est rattrapé par la réalité : la souffrance de « l’impossibilité de participer au repas du Seigneur ». « Plutôt que de la laisser écraser ma joie, analyse-t-il à présent, j’ai choisi de transformer la souffrance en espérance dans l’attente du jour où nous pourrions nous retrouver autour de la même table et celle du chemin qui nous conduira vers la pleine communion retrouvée. » Le premier pas vers le désir concret de retrouver la pleine unité passe par l’expérience réelle de la souffrance de la désunité.
Considérer la division véritablement comme un péché
Considérer la division comme un péché est une proposition très largement partagée par les acteurs de l’œcuménisme. Le pape François, lui-même, insiste énormément sur ce point en répétant inlassablement qu’il s’agit d’un « scandale », au sens fort, évangélique, du terme. « La division est l’un des péchés les plus graves, car il fait d’elle le signe non de l’œuvre de Dieu, mais de l’œuvre du diable, qui est par définition celui qui sépare, qui détruit les relations, qui institue les préjugés… » déclarait-il lors d’une audience générale. Pour le pape, la division est liée à l’auto-référentialité : « Tous les problèmes qu’il y a entre nous, chrétiens – je parle au moins de notre Église catholique – apparaissent quand elle se regarde elle-même : elle devient autoréférentielle. Quand elle se regarde elle-même l’Église renonce à être une Église pour être une "ONG théologique" ». Concrètement, considérer la division comme un péché implique, pour chaque catholique, de chercher l’unité, en essayant de « voir avec les yeux de l’autre ».
http://www.lavie.fr/religion/interreligieux/des-propositions-pour-faire-avancer-l-unite-chez-les-chretiens-17-01-2017-79231_387.php