Le Point.fr - Publié le 11/10/2012 à 10:52 - Modifié le 11/10/2012 à 11:42
Leur intérêt : mieux adapter les traitements, éviter l'usage inapproprié de ces médicaments et le développement d'épidémies hospitalières
Tandis que tous les experts s'inquiètent de l'augmentation du nombre de bactéries résistantes et alors que 25 000 malades porteurs d'infections multirésistantes meurent chaque année en Europe, la découverte de l'équipe du Pr Patrice Nordmann (Inserm U914 "Résistances émergentes aux antibiotiques", hôpital du Kremlin-Bicêtre) prend toute son importance. Ces chercheurs viennent, en effet, de mettre au point deux tests de diagnostic rapide de multirésistance aux antibiotiques de spectre large (ceux actifs sur un grand nombre de bactéries). Mieux encore, ces tests permettent d'identifier rapidement certaines bactéries qui résistent aux antibiotiques les plus fréquents et les plus importants en clinique. Leurs travaux, publiés dans deux revues internationales (Emerging Infectious Diseases et The Journal of Clinical Microbiology) ont été présentés à la presse ce matin.
Les bactéries semblent toujours plus nombreuses à émerger et elles sont à l'origine d'épidémies qui dépassent les frontières. Pour les scientifiques, ce n'est pas leur nombre qui est en cause, mais bien leur résistance de plus en plus forte aux antibiotiques. La situation est particulièrement dramatique pour certaines espèces comme les entérobactéries, dont E. coli, souvent responsable d'infections urinaires et digestives. "Alors que certains antibiotiques comme les céphalosporines à large spectre et les carbapénèmes étaient réservés aux situations les plus graves, ils peuvent être désormais totalement inactifs à l'encontre de certaines souches bactériennes pour lesquelles il n'y a, par conséquent, plus d'antibiotique efficace", précise l'Inserm dans son communiqué.
Des résultats connus en 2 heures
De ce fait, les médecins se trouvent parfois confrontés à des échecs thérapeutiques lors de traitements d'infections assez banales. De plus, le développement de ces résistances aux antibiotiques risque de compromettre tout un pan de la médecine qui nécessite l'usage de médicaments efficaces (par exemple, les greffes, la chirurgie lourde, la réanimation...). Et l'importation non détectée de souches multirésistantes en provenance de pays étrangers risque d'accélérer considérablement la diffusion de ces phénomènes.
Pour tenter de limiter ce grave problème, l'équipe de Patrice Nordmann a créé un système de détection rapide des deux enzymes responsables de la résistance des bactéries aux céphalosporines de spectre large et aux carbapénèmes. En pratique, la présence de ces enzymes rend le milieu plus acide et fait donc virer l'indicateur d'acidité (pH) de la couleur rouge à jaune. À l'heure actuelle, ces tests peuvent être réalisés à partir de bactéries isolées dans les urines lors d'une infection déclarée ou à partir des bactéries présentes dans les selles. Le résultat est obtenu en moins de 2 heures, (contre de 24 à 72 heures avec les techniques actuelles). Qui plus est, ces tests - d'une extrême sensibilité et fiabilité - coûtent moins de cinq euros.
"Une évaluation est en cours pour apprécier leur sensibilité directement à partir de sites infectés comme le sang ou les urines", explique le Pr Nordmann, qui se montre optimiste. Leur commercialisation devrait intervenir dans les 12 à 16 mois, mais les techniques sont disponibles pour les laboratoires spécialisés qui souhaiteraient les développer. "On peut ainsi espérer, notamment dans de nombreux pays occidentaux n'étant pas encore en situation d'endémie pour ces multirésistances (la France notamment), réussir à préserver dans une certaine mesure l'efficacité des céphalosporines de spectre large et des carbapénèmes, antibiotiques dits de dernier recours", conclut le chercheur.
Par ANNE JEANBLANC
Leur intérêt : mieux adapter les traitements, éviter l'usage inapproprié de ces médicaments et le développement d'épidémies hospitalières
Tandis que tous les experts s'inquiètent de l'augmentation du nombre de bactéries résistantes et alors que 25 000 malades porteurs d'infections multirésistantes meurent chaque année en Europe, la découverte de l'équipe du Pr Patrice Nordmann (Inserm U914 "Résistances émergentes aux antibiotiques", hôpital du Kremlin-Bicêtre) prend toute son importance. Ces chercheurs viennent, en effet, de mettre au point deux tests de diagnostic rapide de multirésistance aux antibiotiques de spectre large (ceux actifs sur un grand nombre de bactéries). Mieux encore, ces tests permettent d'identifier rapidement certaines bactéries qui résistent aux antibiotiques les plus fréquents et les plus importants en clinique. Leurs travaux, publiés dans deux revues internationales (Emerging Infectious Diseases et The Journal of Clinical Microbiology) ont été présentés à la presse ce matin.
Les bactéries semblent toujours plus nombreuses à émerger et elles sont à l'origine d'épidémies qui dépassent les frontières. Pour les scientifiques, ce n'est pas leur nombre qui est en cause, mais bien leur résistance de plus en plus forte aux antibiotiques. La situation est particulièrement dramatique pour certaines espèces comme les entérobactéries, dont E. coli, souvent responsable d'infections urinaires et digestives. "Alors que certains antibiotiques comme les céphalosporines à large spectre et les carbapénèmes étaient réservés aux situations les plus graves, ils peuvent être désormais totalement inactifs à l'encontre de certaines souches bactériennes pour lesquelles il n'y a, par conséquent, plus d'antibiotique efficace", précise l'Inserm dans son communiqué.
Des résultats connus en 2 heures
De ce fait, les médecins se trouvent parfois confrontés à des échecs thérapeutiques lors de traitements d'infections assez banales. De plus, le développement de ces résistances aux antibiotiques risque de compromettre tout un pan de la médecine qui nécessite l'usage de médicaments efficaces (par exemple, les greffes, la chirurgie lourde, la réanimation...). Et l'importation non détectée de souches multirésistantes en provenance de pays étrangers risque d'accélérer considérablement la diffusion de ces phénomènes.
Pour tenter de limiter ce grave problème, l'équipe de Patrice Nordmann a créé un système de détection rapide des deux enzymes responsables de la résistance des bactéries aux céphalosporines de spectre large et aux carbapénèmes. En pratique, la présence de ces enzymes rend le milieu plus acide et fait donc virer l'indicateur d'acidité (pH) de la couleur rouge à jaune. À l'heure actuelle, ces tests peuvent être réalisés à partir de bactéries isolées dans les urines lors d'une infection déclarée ou à partir des bactéries présentes dans les selles. Le résultat est obtenu en moins de 2 heures, (contre de 24 à 72 heures avec les techniques actuelles). Qui plus est, ces tests - d'une extrême sensibilité et fiabilité - coûtent moins de cinq euros.
"Une évaluation est en cours pour apprécier leur sensibilité directement à partir de sites infectés comme le sang ou les urines", explique le Pr Nordmann, qui se montre optimiste. Leur commercialisation devrait intervenir dans les 12 à 16 mois, mais les techniques sont disponibles pour les laboratoires spécialisés qui souhaiteraient les développer. "On peut ainsi espérer, notamment dans de nombreux pays occidentaux n'étant pas encore en situation d'endémie pour ces multirésistances (la France notamment), réussir à préserver dans une certaine mesure l'efficacité des céphalosporines de spectre large et des carbapénèmes, antibiotiques dits de dernier recours", conclut le chercheur.
Par ANNE JEANBLANC