La consommation d’antidépresseurs en France est la plus élevée du monde. Ce triste record pousse une quinzaine de médecins français à lancer un cri d'alarme, paru dans "Psychologies magazine". Ils veulent ainsi dénoncer "la surmédication du mal-être".
Les Français sont les premiers consommateurs d'antidépresseurs au monde. Plus de 5 millions de personnes consomment des antidépresseurs et psychotropes en France, dont plus de 120 000 enfants et adolescents. La consommation de tranquillisants et d'antidépresseurs en France est trois fois plus élevée que celle des autres pays de l'Union Européenne. Et cette surconsommation augmente chaque année. Des centaines de milliers de personnes, dans des périodes de vie difficiles mais ne souffrant d'aucun trouble psychiatrique, se voient prescrire ces médicaments sur de longues durées, sans être averties de leurs effets secondaires ni bénéficier d'un suivi régulier.
Les Français consomment 8O millions de boîtes de tranquillisants consommées chaque année. On le sait depuis longtemps, on ne cesse de le dire, de le répéter, de l’écrire et de le lire partout : la France est la championne du monde toutes catégories pour la consommation des drogues psychotropes, ces fameuses petites pilules du bonheur – tranquillisants, hypnotiques, antidépresseurs et autres neuroleptiques
On l’a même tellement entendue, cette triste affirmation, que l’on finit par ne plus y prêter attention, par vivre avec, car on s’habitue à tout. Comme d’autre part la France est un pays où il fait tellement bon vivre, n’est-ce pas, il n’y a aucune raison que tellement de gens y soient déprimés. De plus, nous détenons également le ruban bleu de la consommation de vin, excellent antidépresseur naturel. Alors on finit par ne même plus croire à ces funestes statistiques, on se dit qu’il doit y avoir une erreur de calcul quelque part dans les comptes d’apothicaires, et que cette surconsommation médicamenteuse alléguées est une sorte de monstre du Loch Ness, dont on parle tout le temps et que l’on ne voit jamais.
Pourtant, début 1995, Simone Veil, alors ministre de la santé, décida d’en avoir le cœur net : elle confia à Edouard Zarifian, professeur de psychiatrie et de psychologie médicale à l’université de Caen, une mission d’étude sur cette boulimie française pour les psychotropes, sur ses causes, sur ses mécanismes, et sur les conséquences de ce qui apparaît désormais comme un véritable phénomène de société. Edouard Zarifian a remis son rapport officiel au ministère de la Santé au printemps dernier. Il vient d’en tirer un livre (1), destiné au grand public, qui devrait se trouver en librairie à partir du 11 septembre. Et qui, attirant une large attention sur le problème, contribuera peut-être à éviter que le rapport Zarifian ne s’endorme dans les tiroirs du ministère. Ainsi, certaines des solutions suggérées seront-elles éventuellement mises en œuvre, malgré les puissants intérêts qui militent pour le statu quo.
Car le doute n’est désormais plus permis. Non, il ne s’agit pas d’une rumeur infondée, mais d’une réalité : la France consomme en moyenne, et selon les catégories de produits, de deux à quatre fois plus de psychotropes que n’importe quel autre pays européen. Les chiffres ne sont pas contestables, et pour cause, explique Edouard Zarifian : « Ils proviennent de sociétés privées spécialisées qui vendent leurs informations aux laboratoires pharmaceutiques, pour permettre à ces derniers d’affiner leur marketting. » Car, il faut le savoir, les médicaments les plus sérieux, y compris ceux destinés au cerveau, sont, tels les yaourts ou les chaussures de sport, l’objet de stratégies commerciales sophistiquées. Le but n’est pas (chacun son métier) de soigner les gens, mais de leur vendre des molécules. (…)
Mais revenons aux chiffres de vente, pays par pays, région par région, et ville par ville : ils sont d’autant plus exacts que, s’ils étaient bidonnés, les laboratoires pharmaceutiques, pas fous, ne les achèteraient pas. Or, globalement, ces chiffres montrent que la France (avec de fortes disparités régionales) est largement championne pour les quatre catégories de psychotropes. Elle en consomme trois fois plus que l’Allemagne ou la Grande-Bretagne, et largement deux fois plus que l’Italie.
Parmi ces psychotropes, c’est avec la catégorie des tranquillisants que nous nous distinguons de la façon la plus radicale : deux fois plus que les Espagnols, cinq fois plus que les Allemands, huit fois plus que les Anglais ! Seuls les Belges font relativement « bonne » figure en se rapprochant de nos records. (…) Au total, avec près de 8O millions de boîtes vendues chaque année, le marché français des seuls tranquillisants représente un bon milliard de francs. Avec les hypnotiques, la situation est la suivante : deux fois plus que l’Allemagne ou l’Italie, et nettement plus que le Royaume-Uni. Du côté des neuroleptiques et des antidépresseurss, l’exception française est un peu moins marquée, mais nous restons toujours bons premiers, et de loin. Pourquoi ?
Bien sûr, on pourrait penser que les Français sont, traditionnellement, un peuple de … drogués à l’alcool. Et comme, même si nous en demeurons les champions ou peu s’en faut – cette consommation d’alcool est en nette régression, il serait logique de compenser par autre chose, en l’occurrence, les psychotropes. Mais cette explication simpliste ne colle pas du tout, car la comparaison des disparités régionales, pour l’absorption de vins et alcools d’une part, de psychotropes de l’autre, montre qu’il n’y a strictement aucun rapport. Ce n’est ni là où l’on boit le moins (ou le plus) qu’on se drogue le plus (ou le moins). Les deux cartes sont indépendantes, et toute coïncidence éventuelle, dans un sens ou dans un autre, ne saurait être que le fruit du hasard. (….) Ce ne sont pas les malades qui en auraient le plus besoin qui en consomment le plus. Au contraire, assure Edouard Zarifian, car « les patients auxquels ces produits sont destinés, et qui ont vraiment un bénéfice à en attendre, sont toujours les plus réticents. Ils ne les demandent pas, et ne se laissent généralement prescrire qu’avec une certaine méfiance ». Résultat : on peut être à la fois le pays qui absorbe le plus de pilules psychotropes et celui où la grande majorité des déprimés sont peu ou mal soignés.
Mais pourquoi diable les médecins prescrivent-ils ces produits à tour de bras à des gens qui n’en ont pas réellement besoin – lesquels ne les réclament que pour pouvoir se droguer sans quitter le cadre de la légalité, préférant donc s’adresser à un médecin plutôt qu’à un dealer ordinaire, avec l’avantage du remboursement en plus ?
Selon le Professeur Zarifian, ce véritable détournement de la médecine s’explique de plusieurs façons. D’une part, les généralistes, responsables de 8O % des prescriptions de psychotropes, sont insuffisamment formés au sujet de ces produits. D’autre part, mal rémunérés, ils sont bien forçés de « faire du chiffre » donc de multiplier les actes. Or la meilleur façon de mettre fin à une consultation, c’est de rédiger une ordonnance. « En particulier, il est plus rapide de prescrire un tranquillisant que de prendre le temps d’écouter son patient ». Enfin, il y a une mode – déplorable : c’est la « médicalisation systématique du moindre vague à l’âme ».
Ici, il faut le dire, c’est la faute aux Américains ! Car, selon Edouard Zarifian, en France comme en Europe et partout ailleurs dans le monde, avec la bénédiction de l’OMS « la médecine clinique psychiatrique est totalement inféodée au modèle nord-américain. La psychopathologie a disparu, et nous débouchons sur une sorte de psychiatrie automatique, avec son catalogue de symptômes répertoriés, informatisables, correspondant chacun à une combinaison médicamenteuse ». Plus question d’écouter le malade, considéré comme un être unique plongé dans un environnement particulier. Il doit se comporter en bon cobaye standard, avec une affection numérotée. Pour le soigner, on tape le numéro sur un ordinateur, et le remède (chimique bien sûr) s’affiche sur l’écran. (….)
Mais alors, pourquoi souffririons-nous davantage que les Américains eux-mêmes et que tous les autres pays de la planète qui y sont soumis, de ce modèle psychiatrique américain ? « C’est que, répond le Professeur, ce modèle s’applique chez nous sans le moindre contrôle, sans le moindre contre-pouvoir ». C’est le règne de la pensée unique par le jeu de la double casquette : la plupart des experts de l’Agence du Médicament, des universitaires et chercheurs influents dans les instances nationales de la santé publique, sont aussi « consultants auprès des laboratoires pharmaceutiques, ou dépendent d’eux pour le financement de leurs recherches ». D’où une fâcheuse confusion des genres : « Aux Etats-Unis, au moins, lors de la publication d’un travail scientifique, on est tenu de mentionner ses sponsors ».
Quelles qu’en soient les causes, il reste à évaluer les conséquences pour la santé publique de cette imprégnation très française de la société par un excès de psychotropes, avec des millions d’ « accros » qui font renouveler leurs ordonnances sans se savoir dépendants. Chez nous, par exemple, et contrairement à ce qui se passe dans de nombreux pays d’Europe du Nord, il n’existe aucune interdiction de conduire une automobile lorsque l’on est sous l’effet de ces substances, sources avérées de troubles de la mémoire et de la vigilance.
Les dangers ? C’est déjà un danger en terme d’économie de la santé, puisque nous payons pour des médicaments prescrits inutilement. En terme de santé publique, si l’on prescrit des antidépresseurs à des personnes qui n’en ont pas besoin, ces patients ont les effets secondaires sans avoir le bénéfice des médicaments. Tout médicament a des effets secondaires, plus ou moins graves. Les nouveaux antidépresseurs sérotoninergiques entraînent des dépendances chez 25 % des personnes traitées. Les effets secondaires sont subtils, mais néanmoins importants : modification du comportement, émoussement affectif, désintérêt pour les proches… Des passages à l’acte auto-agressifs ou hétéro-agressifs, meurtres et suicides toujours très sanglants, très spectaculaires, ont également été rapportés chez des personnes traitées par la dernière génération d’antidépresseurs. Ceci défraye la chronique aux Etats-Unis, mais c’est le black-out total en France.
Conscients de ce qui vient d'être dit, une quinzaine de médecins veulent remettre en question l'aide majeure apportée par ces molécules dans le traitement des pathologies mentales ni dans les situations de crise aigüe. Mais il nous semble nécessaire et urgent d'alerter l'opinion et les pouvoirs publics sur les dangers de cette surmédicalisation du mal être et sur l'existence d'alternatives non médicamenteuses aussi efficaces.
Les Français sont les premiers consommateurs d'antidépresseurs au monde. Plus de 5 millions de personnes consomment des antidépresseurs et psychotropes en France, dont plus de 120 000 enfants et adolescents. La consommation de tranquillisants et d'antidépresseurs en France est trois fois plus élevée que celle des autres pays de l'Union Européenne. Et cette surconsommation augmente chaque année. Des centaines de milliers de personnes, dans des périodes de vie difficiles mais ne souffrant d'aucun trouble psychiatrique, se voient prescrire ces médicaments sur de longues durées, sans être averties de leurs effets secondaires ni bénéficier d'un suivi régulier.
Les Français consomment 8O millions de boîtes de tranquillisants consommées chaque année. On le sait depuis longtemps, on ne cesse de le dire, de le répéter, de l’écrire et de le lire partout : la France est la championne du monde toutes catégories pour la consommation des drogues psychotropes, ces fameuses petites pilules du bonheur – tranquillisants, hypnotiques, antidépresseurs et autres neuroleptiques
On l’a même tellement entendue, cette triste affirmation, que l’on finit par ne plus y prêter attention, par vivre avec, car on s’habitue à tout. Comme d’autre part la France est un pays où il fait tellement bon vivre, n’est-ce pas, il n’y a aucune raison que tellement de gens y soient déprimés. De plus, nous détenons également le ruban bleu de la consommation de vin, excellent antidépresseur naturel. Alors on finit par ne même plus croire à ces funestes statistiques, on se dit qu’il doit y avoir une erreur de calcul quelque part dans les comptes d’apothicaires, et que cette surconsommation médicamenteuse alléguées est une sorte de monstre du Loch Ness, dont on parle tout le temps et que l’on ne voit jamais.
Pourtant, début 1995, Simone Veil, alors ministre de la santé, décida d’en avoir le cœur net : elle confia à Edouard Zarifian, professeur de psychiatrie et de psychologie médicale à l’université de Caen, une mission d’étude sur cette boulimie française pour les psychotropes, sur ses causes, sur ses mécanismes, et sur les conséquences de ce qui apparaît désormais comme un véritable phénomène de société. Edouard Zarifian a remis son rapport officiel au ministère de la Santé au printemps dernier. Il vient d’en tirer un livre (1), destiné au grand public, qui devrait se trouver en librairie à partir du 11 septembre. Et qui, attirant une large attention sur le problème, contribuera peut-être à éviter que le rapport Zarifian ne s’endorme dans les tiroirs du ministère. Ainsi, certaines des solutions suggérées seront-elles éventuellement mises en œuvre, malgré les puissants intérêts qui militent pour le statu quo.
Car le doute n’est désormais plus permis. Non, il ne s’agit pas d’une rumeur infondée, mais d’une réalité : la France consomme en moyenne, et selon les catégories de produits, de deux à quatre fois plus de psychotropes que n’importe quel autre pays européen. Les chiffres ne sont pas contestables, et pour cause, explique Edouard Zarifian : « Ils proviennent de sociétés privées spécialisées qui vendent leurs informations aux laboratoires pharmaceutiques, pour permettre à ces derniers d’affiner leur marketting. » Car, il faut le savoir, les médicaments les plus sérieux, y compris ceux destinés au cerveau, sont, tels les yaourts ou les chaussures de sport, l’objet de stratégies commerciales sophistiquées. Le but n’est pas (chacun son métier) de soigner les gens, mais de leur vendre des molécules. (…)
Mais revenons aux chiffres de vente, pays par pays, région par région, et ville par ville : ils sont d’autant plus exacts que, s’ils étaient bidonnés, les laboratoires pharmaceutiques, pas fous, ne les achèteraient pas. Or, globalement, ces chiffres montrent que la France (avec de fortes disparités régionales) est largement championne pour les quatre catégories de psychotropes. Elle en consomme trois fois plus que l’Allemagne ou la Grande-Bretagne, et largement deux fois plus que l’Italie.
Parmi ces psychotropes, c’est avec la catégorie des tranquillisants que nous nous distinguons de la façon la plus radicale : deux fois plus que les Espagnols, cinq fois plus que les Allemands, huit fois plus que les Anglais ! Seuls les Belges font relativement « bonne » figure en se rapprochant de nos records. (…) Au total, avec près de 8O millions de boîtes vendues chaque année, le marché français des seuls tranquillisants représente un bon milliard de francs. Avec les hypnotiques, la situation est la suivante : deux fois plus que l’Allemagne ou l’Italie, et nettement plus que le Royaume-Uni. Du côté des neuroleptiques et des antidépresseurss, l’exception française est un peu moins marquée, mais nous restons toujours bons premiers, et de loin. Pourquoi ?
Bien sûr, on pourrait penser que les Français sont, traditionnellement, un peuple de … drogués à l’alcool. Et comme, même si nous en demeurons les champions ou peu s’en faut – cette consommation d’alcool est en nette régression, il serait logique de compenser par autre chose, en l’occurrence, les psychotropes. Mais cette explication simpliste ne colle pas du tout, car la comparaison des disparités régionales, pour l’absorption de vins et alcools d’une part, de psychotropes de l’autre, montre qu’il n’y a strictement aucun rapport. Ce n’est ni là où l’on boit le moins (ou le plus) qu’on se drogue le plus (ou le moins). Les deux cartes sont indépendantes, et toute coïncidence éventuelle, dans un sens ou dans un autre, ne saurait être que le fruit du hasard. (….) Ce ne sont pas les malades qui en auraient le plus besoin qui en consomment le plus. Au contraire, assure Edouard Zarifian, car « les patients auxquels ces produits sont destinés, et qui ont vraiment un bénéfice à en attendre, sont toujours les plus réticents. Ils ne les demandent pas, et ne se laissent généralement prescrire qu’avec une certaine méfiance ». Résultat : on peut être à la fois le pays qui absorbe le plus de pilules psychotropes et celui où la grande majorité des déprimés sont peu ou mal soignés.
Mais pourquoi diable les médecins prescrivent-ils ces produits à tour de bras à des gens qui n’en ont pas réellement besoin – lesquels ne les réclament que pour pouvoir se droguer sans quitter le cadre de la légalité, préférant donc s’adresser à un médecin plutôt qu’à un dealer ordinaire, avec l’avantage du remboursement en plus ?
Selon le Professeur Zarifian, ce véritable détournement de la médecine s’explique de plusieurs façons. D’une part, les généralistes, responsables de 8O % des prescriptions de psychotropes, sont insuffisamment formés au sujet de ces produits. D’autre part, mal rémunérés, ils sont bien forçés de « faire du chiffre » donc de multiplier les actes. Or la meilleur façon de mettre fin à une consultation, c’est de rédiger une ordonnance. « En particulier, il est plus rapide de prescrire un tranquillisant que de prendre le temps d’écouter son patient ». Enfin, il y a une mode – déplorable : c’est la « médicalisation systématique du moindre vague à l’âme ».
Ici, il faut le dire, c’est la faute aux Américains ! Car, selon Edouard Zarifian, en France comme en Europe et partout ailleurs dans le monde, avec la bénédiction de l’OMS « la médecine clinique psychiatrique est totalement inféodée au modèle nord-américain. La psychopathologie a disparu, et nous débouchons sur une sorte de psychiatrie automatique, avec son catalogue de symptômes répertoriés, informatisables, correspondant chacun à une combinaison médicamenteuse ». Plus question d’écouter le malade, considéré comme un être unique plongé dans un environnement particulier. Il doit se comporter en bon cobaye standard, avec une affection numérotée. Pour le soigner, on tape le numéro sur un ordinateur, et le remède (chimique bien sûr) s’affiche sur l’écran. (….)
Mais alors, pourquoi souffririons-nous davantage que les Américains eux-mêmes et que tous les autres pays de la planète qui y sont soumis, de ce modèle psychiatrique américain ? « C’est que, répond le Professeur, ce modèle s’applique chez nous sans le moindre contrôle, sans le moindre contre-pouvoir ». C’est le règne de la pensée unique par le jeu de la double casquette : la plupart des experts de l’Agence du Médicament, des universitaires et chercheurs influents dans les instances nationales de la santé publique, sont aussi « consultants auprès des laboratoires pharmaceutiques, ou dépendent d’eux pour le financement de leurs recherches ». D’où une fâcheuse confusion des genres : « Aux Etats-Unis, au moins, lors de la publication d’un travail scientifique, on est tenu de mentionner ses sponsors ».
Quelles qu’en soient les causes, il reste à évaluer les conséquences pour la santé publique de cette imprégnation très française de la société par un excès de psychotropes, avec des millions d’ « accros » qui font renouveler leurs ordonnances sans se savoir dépendants. Chez nous, par exemple, et contrairement à ce qui se passe dans de nombreux pays d’Europe du Nord, il n’existe aucune interdiction de conduire une automobile lorsque l’on est sous l’effet de ces substances, sources avérées de troubles de la mémoire et de la vigilance.
Les dangers ? C’est déjà un danger en terme d’économie de la santé, puisque nous payons pour des médicaments prescrits inutilement. En terme de santé publique, si l’on prescrit des antidépresseurs à des personnes qui n’en ont pas besoin, ces patients ont les effets secondaires sans avoir le bénéfice des médicaments. Tout médicament a des effets secondaires, plus ou moins graves. Les nouveaux antidépresseurs sérotoninergiques entraînent des dépendances chez 25 % des personnes traitées. Les effets secondaires sont subtils, mais néanmoins importants : modification du comportement, émoussement affectif, désintérêt pour les proches… Des passages à l’acte auto-agressifs ou hétéro-agressifs, meurtres et suicides toujours très sanglants, très spectaculaires, ont également été rapportés chez des personnes traitées par la dernière génération d’antidépresseurs. Ceci défraye la chronique aux Etats-Unis, mais c’est le black-out total en France.
Conscients de ce qui vient d'être dit, une quinzaine de médecins veulent remettre en question l'aide majeure apportée par ces molécules dans le traitement des pathologies mentales ni dans les situations de crise aigüe. Mais il nous semble nécessaire et urgent d'alerter l'opinion et les pouvoirs publics sur les dangers de cette surmédicalisation du mal être et sur l'existence d'alternatives non médicamenteuses aussi efficaces.