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Le dalaï-lama très attendu par les bouddhistes de France

3 participants

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Elqana



"Admiré et même vénéré" : le dalaï-lama très attendu par les bouddhistes de France
Le dalaï-lama entame lundi en France une visite de sept jours. Reportage de Benjamin Illy aux côté des fidèles à la grande pagode du bois de Vincennes.
Cinq ans sans une visite du dalaï-lama en France. L'attente commençait à être longue pour les 600.000 bouddhistes que compte l'Hexagone. "C'est très important. C'est une sorte de leader, très admiré et même vénéré", assure un fidèle devant le centre Kagyu-Dzong, le temple tibétain du bois de Vincennes.

Le dalaï-lama débute sa visite lundi 12 septembre à Paris. Il rejoindra ensuite Strasbourg. Conférences, prises de parole... En sept jours, aucune rencontre n'est programmée avec le gouvernement français.

Le dalaï-lama ne pousse pas son peuple à faire la guerre aux Chinois

Le Vénérable Chandaratana
À la grande pagode du bois de Vincennes

"La peur de la Chine", analyse Gabriel, venu en curieux à la grande pagode du 12e arrondissement de la capitale. Si certains fidèles se refusent à parler "politique", lui, très tenté par le bouddhisme, regrette que "François Hollande n'ait pas le courage de recevoir" le dalaï-lama : "Pourtant il est œcuménique cet homme, il parle avec les autres religions. Ce n'est pas un être belliqueux".


Le Vénérable Chandaratana devant la grande pagode, dans le 12e arrondissement de Paris 
Le Vénérable Chandaratana devant la grande pagode, dans le 12e arrondissement de Paris (RADIO FRANCE / BENJAMIN ILLY)
Un message partagé par le Vénérable Chandaratana. Même s'il est d'origine srilankaise, le religieux soutient la démarche du leader de la cause tibétaine : une démarche "pour la paix", souligne-t-il, rappelant que le dalaï-lama "ne pousse pas son peuple à faire la guerre aux Chinois."
À défaut d'une entrevue avec François Hollande ou un membre du gouvernement, le dalaï-lama a prévu de rencontrer un groupe de parlementaires mardi au Sénat.
http://www.francetvinfo.fr/societe/religion/admire-et-meme-venere-le-dalai-lama-tres-attendu-par-les-bouddhistes-de-france_1820425.html#xtor=EPR-2-[newsletterquotidienne]-20160912-[lestitres-coldroite/titre5]

samuel

samuel
Administrateur

Le Dalaï Lama est en France cette semaine, à Paris puis à Strasbourg. Il est notamment attendu mercredi 14 au Collège des Bernardins pour une soirée autour du thème « Le dialogue interreligieux, au service du respect et de la tolérance ». Pourtant, sa figure ne semble plus susciter autant d'enthousiasme – ou du moins d'écho médiatique – qu'il y a quelques années... Une autre figure religieuse serait-elle passée par là ?

Âgé de 81 ans, Tenzin Gyatzo, quatorzième Dalaï Lama depuis 1950, ne semble plus jouir de l'aura internationale d'antan. En 2011, année de sa dernière visite dans l'Hexagone (à Toulouse), il a renoncé à son rôle de représentant officiel du peuple tibétain, laissant cette mission à un premier ministre élu. Le pape François, son cadet de seulement 17 mois, qui, lui, cumule toujours fonction religieuse et temporelle (même minime), peut-il être considéré comme le successeur du Tibétain au poste de leader spirituel mondial ?

samuel

samuel
Administrateur

BOUDDHISME
Le dalaï-lama se confie dans un entretien exclusif
propos recueillis par François Gautier à New Delhi (Inde) - publié le 24/10/2014

Le dalaï-lama est actuellement en France. A cette occasion, le Monde des Religions vous propose de redécouvrir l'interview exclusive qu'il nous a accordée au début de l'année dernière
Dans ce palace de la capitale indienne, tous les regards se lèvent lorsqu’un moine jaïn – entièrement nu – fait son entrée ; puis vient un rabbin coiffé de sa kippa, suivi d’un évêque drapé de rouge, à l’ancienne ; un imam, tout de blanc vêtu, apparaît ensuite, en compagnie de moines bouddhistes ; enfin, on aperçoit un prêtre zoroastrien et son étrange chapeau conique… à la porte de la salle de conférence, sa Sainteté Tenzin Gyatso, 14e dalaï-lama, Océan de Sagesse, Tout Parfait, Lotus Vénérable, debout malgré ses 79 ans, accueille chacun des délégués les mains jointes, un éternel sourire aux lèvres. Bienvenue à la conférence « d’harmonie interreligieuse pour la paix » organisée par le gouvernement tibétain en exil.

Le Monde des Religions. Votre Sainteté, vous organisez une remarquable conférence interreligieuse. Mais aujourd’hui, les hommes ne continuent-ils pas de s’entretuer au nom des religions ? Même des bouddhistes massacrent des musulmans du Myanmar !
C’est vrai. J’en suis extrêmement triste et j’ai fait remontrance aux bouddhistes du Myanmar… Je dis d’ailleurs toujours aux gens qu’au lieu de considérer qu’il n’y a qu’une seule vérité et une seule religion, il faudrait accepter qu’il existe plusieurs vérités et de nombreuses religions (silence)… En même temps, je ne veux pas que les gens se convertissent d’une religion à une autre : je suis bouddhiste et pour moi le dharma (chemin spirituel) du Bouddha reste une vérité éternelle et universelle ; vous êtes chrétien et vous devez le rester. Cela pourrait sembler une contradiction, mais les deux vérités se complètent.
Vous êtes prix Nobel de la Paix et votre sincérité est rarement mise en cause – hormis par les Chinois. Croyez-vous qu’il en soit de même pour les autres leaders spirituels ?

On constate aujourd’hui, il est vrai, qu’un fondamentalisme particulier s’est glissé dans certaines religions. Cependant, toutes ces traditions spirituelles existent depuis des milliers d’années et on ne peut pas les changer. Ça, c’est la réalité. Ainsi, pour cette communauté religieuse ou cette autre, leur Dieu est la seule vérité qui compte. Mais les temps changent et si vous observez l’Église catholique, le pape François est un homme tout à fait remarquable, qui lui-même a initié de nombreux dialogues interreligieux. L’Occident prend donc conscience qu’il existe d’autres traditions spirituelles dans le monde, autrefois considérées « païennes », ce qui est totalement nouveau… (silence)

On pourrait appeler cette nouvelle conscience interreligieuse une « éthique laïque », qui je crois peut apporter une certaine tranquillité d’esprit et même une paix et un bonheur intérieurs, car ces tensions interreligieuses ont provoqué de nombreuses guerres et sévissent encore aujourd’hui. (Le dalaï-lama fait une autre pause)
Prenez par exemple un singe mâle, physiquement très fort et puissant, qui règne sur le groupe et effraie les plus faibles. Ce singe est aussi un animal social et, même s’il a un sens limité de l’altruisme, sa survie dépend du reste de la communauté. De fait, biologiquement, les animaux ont eux aussi un instinct collectif qu’on pourrait presque appeler un certain amour de l’autre. Voilà ce que j’appelle « éthique ».

Chez les humains, ce sens collectif est intelligent ; au lieu de s’étendre seulement au groupe, il peut toucher l’humanité entière, et même inclure les animaux ou la nature. Cette éthique est donc universelle. Je le répète d’ailleurs très souvent : l’amour est une religion universelle – et pas seulement une philosophie. Cet amour et ce respect des autres religions devraient être promus dès le jardin d’enfant grâce à des méthodes logiques et scientifiques. Ainsi, la peur et la haine disparaîtraient-elles graduellement de l’humanité.

Que pensez vous de la décapitation des otages par les djihadistes de l’État islamique (EI) ?
Terrible (silence). C’est le plus grand danger auquel l’humanité fait face aujourd’hui.
Quelle est la solution ?
Tout le monde a peur, car de nombreux musulmans occidentaux rejoignent l’EI. Il faut absolument ouvrir un dialogue avec ces terroristes. Mais pour l’instant, le seul dialogue qu’ils connaissent est celui de la violence et du fusil. C’est une très ancienne habitude chez les musulmans, qui semble avoir pris une ampleur critique durant ce siècle (silence). Dans leur colère, ces gens seraient même prêts à tuer avec une bombe nucléaire… C’est donc la racine de cette violence que nous devons guérir, car elle est la source du problème et elle est conditionnée par le manque de contacts interreligieux dans l’islam. J’ai dit la même chose aux Israéliens lorsque je me suis rendu à Jérusalem : « Hitler était aussi un homme et en tant que bouddhiste, j’ai de la compassion pour lui car il a commis de nombreux crimes, qu’il devra payer dans des vies successives – c’est la loi du karma. »

Qu’ont répondu les Israéliens ?
(Le dalaï-lama sourit) Ils ont été très choqués !
Quelles sont les motivations de l’EI selon vous ?
Je crois que les djihadistes de l’EI aiment tellement l’islam que leurs émotions deviennent incontrôlées ; et du coup leurs actions sont extrêmement violentes. Notre première tâche serait de calmer ces émotions, en leur démontrant que nous sommes tous semblables et qu’il n’y a pas de différences fondamentales entre un musulman, un chrétien ou un bouddhiste. C’est la peur qui amène la violence… (Après une pause) Mais il est vrai que les deux actions doivent être menées simultanément : une réponse « musclée » au terrorisme, couplée au dialogue avec l’islam modéré.
Quel serait le message du 14e dalaï-lama à l’EI ?
Ce que je dirais à mes sœurs et frères musulmans – même à ceux de l’EI : « Vous êtes tout de même des êtres humains, vous ne pouvez pas le nier ; vous êtes sortis comme nous du ventre de votre mère qui vous a aimés et chéris ; vous avez connu l’amitié et la chaleur humaine – que vous le vouliez ou non. Pourquoi cette cruauté ? Est-ce à cause d’une grande douleur ? Il faut absolument que vous dialoguiez avec nous et que vous puissiez ouvrir les portes de votre cœur » (pause). Votre djihad* doit être intérieur… D’ailleurs, le dalaï-lama (en se montrant du doigt) fait souvent le djihad contre lui-même. (Après une autre pause) La paix peut aussi arriver par la prière, et le XXIe siècle devra donc être le siècle du dialogue.

Vous êtes donc optimiste quant au dialogue avec l’islam ?

Oui, regardez l’Inde : c’est le seul pays où différentes religions ont cohabité paisiblement depuis deux millénaires, même s’il y a eu ici et là quelques problèmes inévitables. Il y a ici des chiites, des sunnites et des ahmadis (minorité musulmane non reconnue) ; ils ne s’entretuent pas les uns les autres. L’Inde est donc un exemple à suivre pour le monde. Vous trouvez également en Inde le concept de l’ahimsa, la non-violence absolue, que nous, bouddhistes, avons repris. C’est un concept absolument nécessaire pour une paix internationale durable.

Vous avez souvent parlé du « karma noir ». Pouvez-vous expliquer à nos lecteurs ce que cela veut dire ?

Le karma est une loi tout à fait logique et compréhensible : toutes les actions, bonnes ou mauvaises, que vous commettez dans cette vie, ont une conséquence inéluctable. Toute mauvaise action, même sans conséquence immédiate, se paie dans cette vie ou dans une autre. Il n’y a donc pas d’injustice, même si parfois il nous semble que des êtres innocents souffrent terriblement et inutilement. Il en est de même pour une nation : nous, les Tibétains, sommes en train de payer un vieux karma de féodalisme et de manque d’ouverture au monde. Une fois que ce karma sera payé, nous retrouverons notre liberté et notre plénitude.

Vous avez également évoqué le karma noir des Chinois, qui ont tué près d’un million des vôtres…

Sans aucun doute, les Chinois devront payer ce karma noir. Je pense même à Mao Tsé-toung qui a affamé et tué des centaines de milliers de ses compatriotes. (Après un silence). Mais il me semble qu’il y a un changement important en Chine. Je remarque par exemple des milliers d’articles de Chinois qui critiquent leur propre gouvernement, et certains qui vont jusqu’à soutenir notre demande pour plus d’autonomie au Tibet… Même le président chinois, lors d’une visite en France, a publiquement admis que le bouddhisme a joué un rôle très important dans la culture chinoise. Peut-être une évolution est-elle en train de se produire parmi les communistes chinois. (Après une pause) Mais il faut attendre, car les Chinois sont très très prudents.

Quel est l’avenir du Tibet ?

(Long silence) Je reste inquiet… Les Chinois, même s’ils ont de vastes contacts économiques avec le reste du monde, demeurent très isolés mentalement. (Long silence) J’ai pourtant maintes fois offert au gouvernement chinois de nombreuses concessions, proposant seulement une autonomie spirituelle et régionale réduite, la Défense et les Affaires Étrangères restant entre leurs mains. Mais ils continuent à refuser – et quelquefois je perds espoir…

L’Inde et la Chine sont en conflit frontalier. Qu’en pensez-vous ? (NDLR : la Chine revendique tout l’État indien de l’Arunachal Pradesh)

Pas seulement l’Inde, mais aussi les Philippines, le Japon, le Vietnam, qui, eux, ont des conflits maritimes avec la Chine… Je crois que ces tensions sont dues à une peur inhérente que la Chine ressent vis-à-vis de ses voisins, une sorte d’énorme insécurité ancestrale. Les Chinois devraient comprendre que ni l’Inde, ni le Japon ne peuvent détruire la Chine. Si cette peur s’en va et que la Chine réalise qu’elle est en totale sûreté, alors les relations peuvent s’améliorer avec les voisins… (Silence) Malheureusement, il y a une paranoïa en Chine…

Nous souhaitons tous que vous viviez le plus longtemps possible, mais que va-t-il se passer après vous ?

Vous savez déjà sans doute que depuis 2001, je suis en semi-retraite et je laisse au gouvernement tibétain (en exil) le soin de prendre toutes les décisions importantes. Je vais sans doute être le dernier dalaï-lama réincarné. C’est-à-dire que si la lignée des dalaï-lamas doit continuer, le prochain devra être élu démocratiquement, comme je l’ai souvent indiqué…

Mais vous devez savoir que c’est grâce à vous que le monde est devenu conscient du triste sort des Tibétains. Que va-t-il se passer lorsque vous ne serez plus là ?

(Silence) Depuis l’âge de 3 ans, j’ai été enfermé dans le carcan du protocole. Et j’en suis venu à le haïr. Je vis également en Inde en tant que réfugié depuis 1959, et ça n’a pas toujours été facile. Mais plus que toute autre chose, je ne veux pas être réincarné en tant que dalaï-lama, car je me considère comme un être humain exactement comme 7 milliards d’autres. Je ne suis pas tibétain, je ne suis pas asiatique, je ne suis même pas bouddhiste – je suis exactement pareil que vous : nous avons tous des émotions, nous voulons tous vaincre la souffrance et vivre heureux avec le minimum requis. Ensuite, en tant qu’être humain, je dépends des 7 milliards d’autres êtres humains. Même le Bouddha a dû mendier sa nourriture. Vous constaterez qu’aujourd’hui, nous dépendons tous les uns des autres : l’Orient dépend de l’Occident — et de plus en plus l’Occident va dépendre de l’Orient. Cette interdépendance représente le futur de l’humanité.

Et la France, votre Sainteté ?

(Le dalaï-lama part d’un grand rire tonitruant) J’aime beaucoup les Français car ils ont le sens de l’humour… Je me sens à l’aise chez vous…

Savez-vous que près d’un million de Français s’intéressent au bouddhisme tibétain ?

Oui, je le sais, mais je ne cherche pas à convertir. La France est un pays chrétien et devrait le rester. 

Propos recueillis par François Gautier à New Delhi (Inde)
François Gautier, qui vit à Auroville (Inde), est rédacteur en chef de La Revue de l’Inde.
http://www.lemondedesreligions.fr/actualite/le-dalai-lama-se-confie-dans-un-entretien-exclusif-24-10-2014-4331_118.php

Josué

Josué
Administrateur

Philippe Cornu : « Quand le bouddhisme est attaqué… »
publié le 02/11/2016

Philippe Cornu(1) reproche à Marion Dapsance, qui vient de publier un livre sur «la face cachée du bouddhisme en France», de présenter cette religion sous le prisme d’un «scandale religieux présumé» dans un livre «digne de la presse à scandale».

Il fallait s’attendre à ce que le bouddhisme, surtout tibétain, courant majoritaire en Occident, devienne l’objet de critiques, voire d’attaques, comme celles qui touchent toutes les grandes traditions religieuses à notre époque. Une lune de miel de près de quatre décennies ne pouvait durer indéfiniment, et les bouddhistes, malgré le préjugé favorable dont ils bénéficiaient, se devaient d’y être préparés.

Familier du dialogue interreligieux, j’ai parfois souffert pour mes amis catholiques et musulmans malmenés par une presse d’opinion défavorable. Mais côté bouddhisme, je me croyais préparé à la confrontation par une réflexion approfondie sur la traduction des termes, les difficultés interculturelles et les défis d’adaptation du bouddhisme en Occident, sans parler des instrumentalisations simplificatrices de la méditation sous couvert de la Mindfulness et autres « méditations laïques ». Je m’attendais à des débats d’idées et à des questionnements de fond.

Quelle n’a pas été ma surprise quand j'ai lu le livre de Marion Dapsance(2) et les articles qu’elle a récemment publiés dans les médias, et surtout en apprenant que tout ce déballage médiatique découlait d’un travail de doctorat en anthropologie soutenu à l'École pratique de hautes études (EPHE).



Nos efforts en péril

En tant qu’universitaire spécialiste de la question, j’aurais été le premier à applaudir un travail mené sans parti pris, couvrant un terrain ethnographique plus vaste que le seul groupe Rigpa et son lama pris ici pour cibles. Un vrai débat aurait stimulé les consciences, révélé et permis de poser de bonnes questions sur l'acculturation du bouddhisme tibétain. Bref, il eut été intéressant de faire avancer la réflexion anthropologique sur ce phénomène inédit en Occident – d'ordinaire plus enclin à exporter ses valeurs qu’à en importer.

Au lieu de cela, un livre digne de la « presse à scandale » et des articles où l’accumulation d’inexactitudes et d’incompréhensions égrenées au fil des pages ruine, à mes yeux, la validité de la démonstration. Plus grave, ce réquisitoire met en péril les patients efforts réalisés pour ajuster des enseignements spirituels de haute volée à un contexte occidental pressé, sans en gommer les subtilités, travail auquel je m’attèle, comme bien d’autres, dans mes traductions et ouvrages depuis plus d’une vingtaine d'années.

L’auteure nous dépeint un célèbre maître tibétain comme un opportuniste et un affairiste. Il aurait, dans Le Livre tibétain de la vie et de la mort, « reformulé un ouvrage de 1927 intitulé Le Livre tibétain des morts, écrit par un Américain adepte de la Société théosophique […]. Ce dernier livre est donc déjà une création occidentale destinée à un public d’Occidentaux, réalisée à partir d’une sélection hasardeuse et mal comprise de prières tibétaines. Les proches de Sogyal Rinpoché […] ont eu l’idée de reprendre Le Livre tibétain des morts , pour le remettre au goût du jour. Il s’agit par conséquent, pour bonne part, d’un commentaire occidental d’un texte essentiellement occidental. »

Que d’inexactitudes ! Malgré un titre proche, les deux livres n’ont rien à voir. Le Livre des morts tibétain, en réalité le Bardo thödröl , certes malmené par Evans-Wentz, forme un cycle de textes tibétains d’une tradition datée du XIVe siècle sur la mort et les états post mortem ou bardo. Or, dans les chapitres dévolus à ce sujet, le livre de Sogyal Rinpoché ne s’y réfère aucunement, mais plutôt à l’enseignement du Longchen Nyingthik, une autre tradition tibétaine authentique bien distincte. Et même si ses deux collaborateurs ont bien mis sous forme écrite ce livre, Sogyal Rinpoché, qui avoue ne pas être « écrivain », en est bien l’inspirateur direct à l’oral et reconnaît publiquement leur travail d’éditing et de co-auteurs. Quant aux autres chapitres, ils répondent aux critères herméneutiques du bouddhisme traditionnel, même si des ponts avec l’Occident et des citations d’auteurs occidentaux l’émaillent ici et là.

Sur le terrain aussi, Madame Dapsance se trompe lourdement quand elle confond ses impressions subjectives avec une enquête anthropologique : où se trouve la rigueur scientifique quand elle prend parti à chaque page de son livre et dans ses interviews ? Tous les témoignages recueillis sur Rigpa sont ceux d’ancien(ne)s étudiant(e)s déçu(e)s ou se débattant avec leur vie spirituelle et leur relation biaisée au maître. Jamais il n’est fait appel à des témoignages positifs. L’angle choisi est celui d’un préjugé défavorable à l’encontre de la relation maître-disciple, des enseignements bouddhiques, des pratiques tantriques et, plus grave, l’idée que tous les « adeptes » sont des égarés et des naïfs manipulés par un gourou businessman sans scrupules.



Un caillou dans la chaussure

L’anthropologie use certes de la subjectivité dans l’observation participante, à condition qu’elle s’accompagne d’une prise de distance et de neutralité. Mais ici, c’est un acharnement suspect qui transparaît, doublé d’une méconnaissance de la culture, de la langue tibétaine et du bouddhisme. Le lama n’est pas l’illettré qu’elle décrit, je l’ai vu personnellement traduire oralement des textes tibétains difficiles, et même s’il donne des enseignements « spontanés », il commente des textes traditionnels en retraite.

En outre, Rigpa offre des formations sur l’aide aux mourants, invite régulièrement des lamas érudits qualifiés, publie d’excellents ouvrages et les études bouddhiques y sont proposées avec sérieux au sein d’un collège d’étude (shedra). Rien de cela n’apparaît dans les écrits de Madame Dapsance. Même ses tentatives d’explication des pratiques préliminaires tibétaines sont truffées de préjugés et de jugements de valeur.

Il ne s’agit pas de défendre Rigpa, organisation bouddhique aux inévitables défauts structurels et humains, ni même Sogyal Rinpoché dont la personnalité singulière ne fait pas l’unanimité. Je leur laisse le soin de le faire. Ce que je trouve dangereux, c’est le discrédit que Madame Dapsance jette sur l’ensemble du bouddhisme tibétain, par ailleurs en péril, par le biais d’une « étude » qui ne souffle mot des efforts d’adaptation ni de l’universalité du message bouddhique – même s’il doit s’extraire de ses habits culturels asiatiques.

Présenter le bouddhisme sous le prisme d’un scandale religieux présumé, réitérer l’idée éculée qu’il s’agirait d’un nihilisme antichrétien, c’est omettre des siècles de pensée et de spiritualité, et fausser l’opinion de ceux qui, en Occident, tentent d’y comprendre quelque chose. Ce sujet passionnant aurait mérité mieux. C’est comme se focaliser sur des cailloux dans sa chaussure alors que la montagne alentours recèle des trésors pour qui sait les voir.

http://www.lemondedesreligions.fr/une/philippe-cornu-quand-le-bouddhisme-est-attaque-02-11-2016-5921_115.php

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