Des responsables religieux opposés à une nouvelle loi sur la fin de vie
A.L.
CRÉÉ LE 09/03/2015 / MODIFIÉ LE 09/03/2015 À 17H50
« L'interdit de tuer doit être préservé » : c'est le titre de la tribune publiée par Le Monde ce lundi 9 mars, dans laquelle cinq représentants des trois grandes religions monothéistes unissent leurs voix pour dire leur opposition à l’emploi de la sédation pour donner la mort. Une première.
> A lire aussi : La tribune sur le site du Monde
« Le contexte actuel manque de lisibilité, et la période que nous traversons est difficile, secouée par des crises à répétition, politique, économique, financière et morale. Un nouveau débat sur la fin de vie risque d’y ajouter de la confusion », écrivent Mgr Philippe Barbarin (cardinal, archevêque de Lyon), François Clavairoly (président de la Fédération protestante de France), Mgr Emmanuel (métropolite de France, président de l’Assemblée des évêques orthodoxes de France), Haïm Korsia (Grand rabbin de France) et Mohammed Moussaoui (président de l’Union des mosquées de France et président d’honneur du Conseil français du culte musulman) dans cet appel commun.
Alors que la proposition de loi qui instaure un droit à une sédation « profonde et continue » jusqu’au décès pour les malades en phase terminale, ainsi que des directives anticipées contraignantes, doit être examinée à l'Assemblée nationale ces mardi 10 et mercredi 11 mars, celle-ci est « loin de faire l’unanimité », estime le quotidien.
Un appel « inquiet et pressant »
« Le droit français, qui exclut l’acharnement thérapeutique, condamne l’euthanasie, rappellent les signataires. Il en est de même du droit européen : dans une recommandation adoptée en 1999, le Conseil de l’Europe condamne l’euthanasie, qui est par ailleurs interdite dans la quasi-totalité des pays du monde. »
Ces personnalités religieuses lancent donc un appel « commun, inquiet et pressant, pour qu’une éventuelle nouvelle loi ne renonce en aucune façon à ce principe fondateur : toute vie humaine doit être respectée ». Les responsables religieux pointent « une nouvelle tentation : celle de donner la mort, sans l’avouer, en abusant de la “sédation”. S’il peut être utile ou nécessaire d’endormir un patient, à titre exceptionnel, précisent-ils, l’usage de cette technique est dénaturé dès qu’il s’agit, non plus de soulager le patient, mais de provoquer sa mort. Ce serait un acte d’euthanasie. Or, quand il est question de vie et de mort, la conscience humaine ne peut être en paix si l’on joue avec les mots. La démocratie elle-même ne peut que souffrir de la manipulation de concepts aussi sensibles. »
« Au nom de quoi envisagerait-on de légaliser un geste de mort ? »
Et de s'interroger : « Au nom de quoi envisagerait-on de légaliser un geste de mort ? Parce que la personne concernée aurait, dit-on, perdu sa dignité humaine ? Parce qu’elle aurait fait son temps ? On lui laisserait entendre qu’elle est devenue inutile, indésirable, coûteuse… L’homme se croit-il en mesure de décerner – pour lui-même ou pour autrui – des brevets d’humanité ? ».
En conclusion, les signataires estiment qu'« il s’agit d’un enjeu majeur pour notre société, pour le lien entre les générations, pour la confiance entre les soignants et les soignés et, plus profondément, pour servir la grandeur de la médecine, l’esprit de la civilisation, et notre plus grande humanité ».
Le directeur de la rédaction de La Vie, Jean-Pierre Denis, a estimé quant à lui sur Twitter que « c'est la première fois que l'ensemble des religions s'expriment avec tant de force et de cohérence ».