Niveau de vie : ce n'est pas la crise pour tout le monde
Le Point.fr - Publié le 25/04/2013 à 14:38 - Modifié le 25/04/2013 à 15:01
Le dernier bilan de l'Insee sur le niveau de vie des Français montre un pays à deux vitesses, entre des riches plus riches et des pauvres plus pauvres.
Par JASON WIELS
L'année 2008 a-t-elle provoqué une cassure entre les Français ? À l'heure où le pouvoir d'achat subit une baisse historique, l'édition 2013 par l'Insee de la publication Les revenus et le patrimoine des ménages revient sur les années qui ont suivi la crise financière devenue alors crise économique. Qu'y apprend-on ? Qu'en moyenne, sur la période 2008-2010, la moitié des ménages français ont vu leurs revenus continuer à croître, tandis que ceux de l'autre moitié ont baissé.
Quand on regarde la courbe (voir ci-dessous), le découplage est frappant. D'un côté, du premier au cinquième décile, soit 50 % des ménages, la chute est rude tant en 2009 qu'en 2010. Pour cette partie de la population, le pouvoir d'achat a commencé à décroître il y a cinq ans déjà. Les transferts sociaux ont certes amorti la chute : en 2009, la baisse du revenu des 10 % des ménages les moins aisés aurait été de 4,6 % (au lieu de 1,2 %) sans redistribution. Mais les dispositifs exceptionnels (nombreuses primes en 2009, notamment) n'ont pas été reconduits et la hausse du smic est restée faible. En haut de l'échelle sociale, le niveau de vie de l'autre moitié des Français a lui augmenté, et ce, malgré la mauvaise conjoncture.
Les super riches s'en sortent le mieux
On peut affiner ce constat en y ajoutant une autre ligne de partage, qui sépare cette fois les Français en deux catégories de tailles très différentes. Les contribuables qui tirent (très) bien leur épingle du jeu sont les super riches. Entre 2009 et 2010, les seuls ménages qui ont vu leurs revenus augmenter sont les 5 % les plus aisés, alors que la grande majorité des Français a dû se serrer la ceinture. Si l'on regarde seulement les 1 % les plus riches, ils ont regagné en un an le niveau de vie perdu à cause de la crise. L'étude note que la très grande majorité de la population (99,99 %) a des revenus annuels inférieurs à 735 500 euros par an. La fameuse "taxe à 75 %" des revenus supérieurs à un million d'euros, voulue par le candidat Hollande, retoquée par le Conseil constitutionnel et en attente d'une nouvelle mouture, ne concernerait qu'une infime minorité de foyers qui, face à la crise, s'en sortent beaucoup mieux que la moyenne.
En toute logique, les inégalités se creusent. "Tous les indicateurs en matière d'inégalités s'accroissent sur la période. Leur hausse paraît modérée, mais elle est en fait très inhabituelle", commente Jérôme Accardo, chef du département des conditions de vie des ménages à l'Insee. Le taux de pauvreté dépasse les 14 % en 2010 (964 euros pour une personne seule). Il faut remonter à 1997 pour retrouver un tel chiffre. Plus inquiétant encore, la même année, on constate une montée en flèche du nombre d'enfants pauvres : ils étaient 280 000 de plus qu'en 2009 à passer sous le seuil de pauvreté (2,66 millions au total). Alors, quand on interroge les statisticiens de l'institut national sur l'évolution des chiffres plus récents, ceux de 2011, 2012 et 2013, ils préfèrent botter en touche : "Ces indicateurs de distribution des revenus sont très longs à obtenir." Mais au vu des piètres performances économiques du pays, passées et à venir, difficile de penser que ces tendances ne vont pas se prolonger, voire s'accentuer.
Le Point.fr - Publié le 25/04/2013 à 14:38 - Modifié le 25/04/2013 à 15:01
Le dernier bilan de l'Insee sur le niveau de vie des Français montre un pays à deux vitesses, entre des riches plus riches et des pauvres plus pauvres.
Par JASON WIELS
L'année 2008 a-t-elle provoqué une cassure entre les Français ? À l'heure où le pouvoir d'achat subit une baisse historique, l'édition 2013 par l'Insee de la publication Les revenus et le patrimoine des ménages revient sur les années qui ont suivi la crise financière devenue alors crise économique. Qu'y apprend-on ? Qu'en moyenne, sur la période 2008-2010, la moitié des ménages français ont vu leurs revenus continuer à croître, tandis que ceux de l'autre moitié ont baissé.
Quand on regarde la courbe (voir ci-dessous), le découplage est frappant. D'un côté, du premier au cinquième décile, soit 50 % des ménages, la chute est rude tant en 2009 qu'en 2010. Pour cette partie de la population, le pouvoir d'achat a commencé à décroître il y a cinq ans déjà. Les transferts sociaux ont certes amorti la chute : en 2009, la baisse du revenu des 10 % des ménages les moins aisés aurait été de 4,6 % (au lieu de 1,2 %) sans redistribution. Mais les dispositifs exceptionnels (nombreuses primes en 2009, notamment) n'ont pas été reconduits et la hausse du smic est restée faible. En haut de l'échelle sociale, le niveau de vie de l'autre moitié des Français a lui augmenté, et ce, malgré la mauvaise conjoncture.
Les super riches s'en sortent le mieux
On peut affiner ce constat en y ajoutant une autre ligne de partage, qui sépare cette fois les Français en deux catégories de tailles très différentes. Les contribuables qui tirent (très) bien leur épingle du jeu sont les super riches. Entre 2009 et 2010, les seuls ménages qui ont vu leurs revenus augmenter sont les 5 % les plus aisés, alors que la grande majorité des Français a dû se serrer la ceinture. Si l'on regarde seulement les 1 % les plus riches, ils ont regagné en un an le niveau de vie perdu à cause de la crise. L'étude note que la très grande majorité de la population (99,99 %) a des revenus annuels inférieurs à 735 500 euros par an. La fameuse "taxe à 75 %" des revenus supérieurs à un million d'euros, voulue par le candidat Hollande, retoquée par le Conseil constitutionnel et en attente d'une nouvelle mouture, ne concernerait qu'une infime minorité de foyers qui, face à la crise, s'en sortent beaucoup mieux que la moyenne.
En toute logique, les inégalités se creusent. "Tous les indicateurs en matière d'inégalités s'accroissent sur la période. Leur hausse paraît modérée, mais elle est en fait très inhabituelle", commente Jérôme Accardo, chef du département des conditions de vie des ménages à l'Insee. Le taux de pauvreté dépasse les 14 % en 2010 (964 euros pour une personne seule). Il faut remonter à 1997 pour retrouver un tel chiffre. Plus inquiétant encore, la même année, on constate une montée en flèche du nombre d'enfants pauvres : ils étaient 280 000 de plus qu'en 2009 à passer sous le seuil de pauvreté (2,66 millions au total). Alors, quand on interroge les statisticiens de l'institut national sur l'évolution des chiffres plus récents, ceux de 2011, 2012 et 2013, ils préfèrent botter en touche : "Ces indicateurs de distribution des revenus sont très longs à obtenir." Mais au vu des piètres performances économiques du pays, passées et à venir, difficile de penser que ces tendances ne vont pas se prolonger, voire s'accentuer.