La “petite Église polonaise”, c’est le nom officiel donné au mouvement des Sociniens, a prospéré en Pologne pendant près d’un siècle. Au plus fort de son influence, elle regroupait 300 congrégations. Les Sociniens créèrent un centre à Raków, au nord-est de Cracovie, y installèrent une presse et fondèrent une université qui attira des professeurs et des élèves éminents venus de diverses contrées. Leur presse produisit quelque 500 pamphlets, livres et tracts en près de 20 langues. Dans toute l’Europe, des missionnaires et des étudiants diffusaient ces publications sous le manteau. On a dit que les ouvrages écrits en réaction contre ces publications au cours des deux siècles qui suivirent pourraient remplir une bibliothèque.
Toutefois, haïs par les catholiques autant que par les protestants, les Sociniens n’allaient pas connaître longtemps la tranquillité. En raison de ses croyances, Socin lui-même fut soumis à de violentes attaques, il fut pris à partie par des foules en furie, battu et presque noyé. Déjà avant sa mort, survenue en 1604, les jésuites, déterminés à rétablir la suprématie de l’Église catholique sur la Pologne, avaient commencé à gagner les bonnes grâces du roi, ce qui leur avait permis d’obtenir des postes influents.
Ensuite, la persécution dont étaient l’objet les Sociniens s’intensifia. En 1611, un riche Socinien fut dépouillé de ses biens et condamné à avoir la langue et la tête tranchées, ainsi qu’une main et un pied, et à être brûlé. Bien sûr, il lui suffisait de changer de religion pour pouvoir continuer de vivre tranquillement. Il ne voulut pas céder aux menaces et demeura fermement attaché à ses convictions jusqu’à son exécution, qui eut lieu sur la grand-place de Varsovie.
En 1658, les jésuites atteignirent enfin leur but. Sur leurs instances, le roi décréta que tous les membres de la petite Église polonaise devaient quitter le pays dans les trois ans sous peine d’être exécutés. Des centaines de Sociniens choisirent l’exil. C’est alors qu’une persécution brutale éclata. Quelques petites congrégations survécurent pendant un certain temps en Transylvanie, en Prusse et aux Pays-Bas, mais ces groupes isolés finirent eux aussi par disparaître.
L’héritage socinien
Malgré cela, les écrits sociniens continuèrent d’exercer une influence. Ainsi, en 1652, le Catéchisme de Raków, qui s’inspirait des ouvrages de Socin et qui avait été publié peu après sa mort, fut traduit en anglais par John Biddle. Le Parlement en fit saisir et brûler un certain nombre d’exemplaires, et fit emprisonner Biddle. Celui-ci fut relâché, puis de nouveau jeté en prison, où il mourut.
Toutefois, les arguments contre la Trinité n’allaient pas être oubliés si facilement dans cette Angleterre où nombre d’hommes instruits et de bon sens en perçurent la véracité à la lumière des Écritures. Isaac Newton, l’un des plus grands hommes de science de tous les temps, réfuta la Trinité dans ses écrits; il est parfois considéré comme Socinien. Joseph Priestley, chimiste célèbre (il a découvert l’oxygène), fut lui aussi classé parmi les Sociniens. John Milton, le grand poète, rejeta également la Trinité. En outre, Voltaire trouva amusant que Luther, Calvin et Zwingli, dont il tenait les écrits pour “illisibles”, aient convaincu une grande partie de l’Europe, alors que “les plus grands philosophes et les meilleurs écrivains de leur temps”, tels Newton et les autres Sociniens, n’avaient fait que quelques adeptes déjà près de disparaître.
Comme Socin, ces hommes mettaient l’accent sur l’importance de la raison dans les questions religieuses. C’est ainsi qu’il devrait en être. La Bible, en effet, ne nous encourage-t-elle pas à servir Dieu ‘avec usage de notre raison’? (Romains 12:1.) Néanmoins, le mouvement unitarien qui prit naissance en Angleterre à partir du socinianisme commença à favoriser les raisonnements humains au détriment de la Bible. D’après ce que l’on peut lire dans une histoire de leur mouvement, vers le milieu du XIXe siècle, les unitariens d’Angleterre et d’Amérique “commencèrent à ne plus considérer l’Écriture comme la première source de vérité religieuse”.
Quoi qu’il en soit, les premiers Sociniens ont donné un exemple qui, à notre époque, pourrait profiter à de nombreuses religions. Un ministre presbytérien a loué leur position contre la guerre et l’a opposée à l’“impotence [des Églises modernes] face à la guerre mondiale”. Il espérait que toutes les Églises de la chrétienté allaient bientôt prendre position contre la guerre. Il écrivit ces paroles en 1932. Quelques années après éclata la Seconde Guerre mondiale, dont les Églises soutinrent une fois de plus les effusions de sang. Aujourd’hui, la majeure partie du globe est ravagée par la guerre; et, dans ce contexte, la religion est plus souvent une cause de conflits qu’une force d’apaisement.
Toutefois, haïs par les catholiques autant que par les protestants, les Sociniens n’allaient pas connaître longtemps la tranquillité. En raison de ses croyances, Socin lui-même fut soumis à de violentes attaques, il fut pris à partie par des foules en furie, battu et presque noyé. Déjà avant sa mort, survenue en 1604, les jésuites, déterminés à rétablir la suprématie de l’Église catholique sur la Pologne, avaient commencé à gagner les bonnes grâces du roi, ce qui leur avait permis d’obtenir des postes influents.
Ensuite, la persécution dont étaient l’objet les Sociniens s’intensifia. En 1611, un riche Socinien fut dépouillé de ses biens et condamné à avoir la langue et la tête tranchées, ainsi qu’une main et un pied, et à être brûlé. Bien sûr, il lui suffisait de changer de religion pour pouvoir continuer de vivre tranquillement. Il ne voulut pas céder aux menaces et demeura fermement attaché à ses convictions jusqu’à son exécution, qui eut lieu sur la grand-place de Varsovie.
En 1658, les jésuites atteignirent enfin leur but. Sur leurs instances, le roi décréta que tous les membres de la petite Église polonaise devaient quitter le pays dans les trois ans sous peine d’être exécutés. Des centaines de Sociniens choisirent l’exil. C’est alors qu’une persécution brutale éclata. Quelques petites congrégations survécurent pendant un certain temps en Transylvanie, en Prusse et aux Pays-Bas, mais ces groupes isolés finirent eux aussi par disparaître.
L’héritage socinien
Malgré cela, les écrits sociniens continuèrent d’exercer une influence. Ainsi, en 1652, le Catéchisme de Raków, qui s’inspirait des ouvrages de Socin et qui avait été publié peu après sa mort, fut traduit en anglais par John Biddle. Le Parlement en fit saisir et brûler un certain nombre d’exemplaires, et fit emprisonner Biddle. Celui-ci fut relâché, puis de nouveau jeté en prison, où il mourut.
Toutefois, les arguments contre la Trinité n’allaient pas être oubliés si facilement dans cette Angleterre où nombre d’hommes instruits et de bon sens en perçurent la véracité à la lumière des Écritures. Isaac Newton, l’un des plus grands hommes de science de tous les temps, réfuta la Trinité dans ses écrits; il est parfois considéré comme Socinien. Joseph Priestley, chimiste célèbre (il a découvert l’oxygène), fut lui aussi classé parmi les Sociniens. John Milton, le grand poète, rejeta également la Trinité. En outre, Voltaire trouva amusant que Luther, Calvin et Zwingli, dont il tenait les écrits pour “illisibles”, aient convaincu une grande partie de l’Europe, alors que “les plus grands philosophes et les meilleurs écrivains de leur temps”, tels Newton et les autres Sociniens, n’avaient fait que quelques adeptes déjà près de disparaître.
Comme Socin, ces hommes mettaient l’accent sur l’importance de la raison dans les questions religieuses. C’est ainsi qu’il devrait en être. La Bible, en effet, ne nous encourage-t-elle pas à servir Dieu ‘avec usage de notre raison’? (Romains 12:1.) Néanmoins, le mouvement unitarien qui prit naissance en Angleterre à partir du socinianisme commença à favoriser les raisonnements humains au détriment de la Bible. D’après ce que l’on peut lire dans une histoire de leur mouvement, vers le milieu du XIXe siècle, les unitariens d’Angleterre et d’Amérique “commencèrent à ne plus considérer l’Écriture comme la première source de vérité religieuse”.
Quoi qu’il en soit, les premiers Sociniens ont donné un exemple qui, à notre époque, pourrait profiter à de nombreuses religions. Un ministre presbytérien a loué leur position contre la guerre et l’a opposée à l’“impotence [des Églises modernes] face à la guerre mondiale”. Il espérait que toutes les Églises de la chrétienté allaient bientôt prendre position contre la guerre. Il écrivit ces paroles en 1932. Quelques années après éclata la Seconde Guerre mondiale, dont les Églises soutinrent une fois de plus les effusions de sang. Aujourd’hui, la majeure partie du globe est ravagée par la guerre; et, dans ce contexte, la religion est plus souvent une cause de conflits qu’une force d’apaisement.