Oecuménisme : l'Eglise catholique fait-elle machine arrière ?
Marie-Lucile Kubacki - publié le 24/01/2013
Pourquoi les luthériens sont-ils en colère contre le Vatican? Qui est ce jésuite qui inquiète Bercy? L'interreligieux n'est-il pas une question d'intérêt général? Devient-il risqué pour les prêtres orthodoxes de défendre les Pussy Riot? Comment les chrétiens peuvent-ils s'engager en Israël-Palestine? Benoît XVI est-il le pape 2.0 ? Un chanteur de pop chrétienne numéro un des ventes aux Etats-Unis... Tels sont les sujets de votre rubrique "Chrétiens en débats" cette semaine.
Nous avons pensé cette rubrique "Chrétiens en débats" comme un espace de liberté et de dialogue. Dialogue au sein de la famille chrétienne, et aussi entre les chrétiens et la société, dans l'esprit des Etats généraux du christianisme organisés par La Vie qui ont eu lieu à Strasbourg, les 12, 13 et 14 octobre dernier. N'hésitez pas à débattre des sujets qui vous tiennent à coeur, à l'aide du module de réactions en fin d'article.
LE DEBAT
L'Eglise catholique fait-elle machine arrière en matière d’œcuménisme ?
Dans les rangs luthériens, plusieurs voix s’élèvent pour protester contre ce qui leur apparaît au mieux comme une suggestion un peu précipitée, au pire comme une tentative d’OPA de Rome sur l’Eglise luthérienne. Tout a commencé avec cette annonce du cardinal Kurt Koch, président du Conseil pontifical pour l'unité des chrétiens, qui a déclaré que le Vatican pourrait (notez le conditionnel) créer un ordinariat spécifique pour accueillir les luthériens qui ne se sentiraient plus en phase avec leur Eglise.
Aussitôt, les réactions fusent un peu partout dans le monde. Le révérend Martin Junge, secrétaire de la Fédération luthérienne mondiale, déclare dans un communiqué que l’idée a "provoqué une grande inquiétude et enverrait de mauvais signaux aux Eglises luthériennes de par le monde". Eglises qui se préparent à célébrer le 500e anniversaire de la réforme en 2017 « dans un esprit de compréhension et de collaboration œcuméniques ». En Allemagne, l'évêque luthérien Friedrich Weber, chargé des relations avec l'Eglise catholique, parle quant à lui "d'incitation anti-oecuménique à changer de camp".
Sur les réseaux sociaux aussi, les réactions ne se font pas fait attendre. Il est question d’un pape qui s'éloignerait de Vatican II. « Intégrer l'Eglise catholique par un ordinariat luthérien, c'est accepter le système papal, la curie romaine, refuser le sacerdoce des femmes, le mariage des pasteurs, etc... et ça pour une protestante luthérienne, c'est impensable, inacceptable; et je ne parle pas de nos différences dogmatiques » écrit une utilisatrice. La suggestion réveille de vieux démons.
Le symbole passe d’autant plus mal qu’il est réactivé en pleine semaine de l’unité des chrétiens. Sur son blog, Jean Mercier, journaliste à La Vie se montre lui aussi critique envers la création de cet ordinariat. Il reconnaît qu'"on peut comprendre l'émoi des luthériens. Sortie de son contexte, l'annonce d'un ordinariat peut ressembler à un appel à la croisade pour convertir les protestants... Comme si Rome les appelait à se renier, à rejeter leurs fondamentaux pour rejoindre le pape. Comme si Rome voulait leur faire renier leurs femmes pasteurs, leur clergé marié, leur Sola Fide, et les forcer à faire l'adoration eucharistique." Mais pour lui, "il est évident que les propos de nos deux prélats du Vatican concernent les luthériens qui sont déjà "crypto-catholiques", déjà romains dans leur for intérieur mais qui n'osent pas faire le pas... Et non pas aux luthériens qui sont bien dans leur peau, lesquels ne sont pas concernés."
Mais les réactions sont nuancées. André Birmelé, professeur de dogmatique à la Faculté de théologie protestante de Strasbourg, membre du Groupe des Dombes, estime que la suggestion ne devrait pas troubler le dialogue œcuménique entre catholiques et luthériens. Rappelons aussi que catholiques et luthériens s'apprêtent à publier un document conjoint pour le 500e anniversaire de la Réforme protestante (1517), intitulé "Du conflit à la communion".
Marie-Lucile Kubacki - publié le 24/01/2013
Pourquoi les luthériens sont-ils en colère contre le Vatican? Qui est ce jésuite qui inquiète Bercy? L'interreligieux n'est-il pas une question d'intérêt général? Devient-il risqué pour les prêtres orthodoxes de défendre les Pussy Riot? Comment les chrétiens peuvent-ils s'engager en Israël-Palestine? Benoît XVI est-il le pape 2.0 ? Un chanteur de pop chrétienne numéro un des ventes aux Etats-Unis... Tels sont les sujets de votre rubrique "Chrétiens en débats" cette semaine.
Nous avons pensé cette rubrique "Chrétiens en débats" comme un espace de liberté et de dialogue. Dialogue au sein de la famille chrétienne, et aussi entre les chrétiens et la société, dans l'esprit des Etats généraux du christianisme organisés par La Vie qui ont eu lieu à Strasbourg, les 12, 13 et 14 octobre dernier. N'hésitez pas à débattre des sujets qui vous tiennent à coeur, à l'aide du module de réactions en fin d'article.
LE DEBAT
L'Eglise catholique fait-elle machine arrière en matière d’œcuménisme ?
Dans les rangs luthériens, plusieurs voix s’élèvent pour protester contre ce qui leur apparaît au mieux comme une suggestion un peu précipitée, au pire comme une tentative d’OPA de Rome sur l’Eglise luthérienne. Tout a commencé avec cette annonce du cardinal Kurt Koch, président du Conseil pontifical pour l'unité des chrétiens, qui a déclaré que le Vatican pourrait (notez le conditionnel) créer un ordinariat spécifique pour accueillir les luthériens qui ne se sentiraient plus en phase avec leur Eglise.
Aussitôt, les réactions fusent un peu partout dans le monde. Le révérend Martin Junge, secrétaire de la Fédération luthérienne mondiale, déclare dans un communiqué que l’idée a "provoqué une grande inquiétude et enverrait de mauvais signaux aux Eglises luthériennes de par le monde". Eglises qui se préparent à célébrer le 500e anniversaire de la réforme en 2017 « dans un esprit de compréhension et de collaboration œcuméniques ». En Allemagne, l'évêque luthérien Friedrich Weber, chargé des relations avec l'Eglise catholique, parle quant à lui "d'incitation anti-oecuménique à changer de camp".
Sur les réseaux sociaux aussi, les réactions ne se font pas fait attendre. Il est question d’un pape qui s'éloignerait de Vatican II. « Intégrer l'Eglise catholique par un ordinariat luthérien, c'est accepter le système papal, la curie romaine, refuser le sacerdoce des femmes, le mariage des pasteurs, etc... et ça pour une protestante luthérienne, c'est impensable, inacceptable; et je ne parle pas de nos différences dogmatiques » écrit une utilisatrice. La suggestion réveille de vieux démons.
Le symbole passe d’autant plus mal qu’il est réactivé en pleine semaine de l’unité des chrétiens. Sur son blog, Jean Mercier, journaliste à La Vie se montre lui aussi critique envers la création de cet ordinariat. Il reconnaît qu'"on peut comprendre l'émoi des luthériens. Sortie de son contexte, l'annonce d'un ordinariat peut ressembler à un appel à la croisade pour convertir les protestants... Comme si Rome les appelait à se renier, à rejeter leurs fondamentaux pour rejoindre le pape. Comme si Rome voulait leur faire renier leurs femmes pasteurs, leur clergé marié, leur Sola Fide, et les forcer à faire l'adoration eucharistique." Mais pour lui, "il est évident que les propos de nos deux prélats du Vatican concernent les luthériens qui sont déjà "crypto-catholiques", déjà romains dans leur for intérieur mais qui n'osent pas faire le pas... Et non pas aux luthériens qui sont bien dans leur peau, lesquels ne sont pas concernés."
Mais les réactions sont nuancées. André Birmelé, professeur de dogmatique à la Faculté de théologie protestante de Strasbourg, membre du Groupe des Dombes, estime que la suggestion ne devrait pas troubler le dialogue œcuménique entre catholiques et luthériens. Rappelons aussi que catholiques et luthériens s'apprêtent à publier un document conjoint pour le 500e anniversaire de la Réforme protestante (1517), intitulé "Du conflit à la communion".