Abus sexuels : pourquoi le pape a refusé la démission de l'archevêque de Munich
Reinhard Marx avait adressé une missive au pape François pour être déchargé de ses fonctions, soulignant "l'échec" de l'Eglise catholique allemande face à "la catastrophe des abus sexuels".
[size=10][size=10]Le pape François a refusé la démission de l'archevêque de Munich, Reinhard Marx.
afp.com/ANDREAS SOLARO[size=13]Par LEXPRESS.fr avec AFPpublié le 11/06/2021 à 12:23[/size]
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Il dénonçait avec force l'échec de l'Eglise allemande face aux abus sexuels. L'archevêque de Munich, Reinhard Marx, avait adressé une missive au pape François le mois dernier pour être déchargé de ses fonctions. Mais la demande de cet influent réformateur a été rejetée par le souverain pontife jeudi. "Continue comme tu le proposes, mais comme archevêque de Munich", a écrit le pape dans une lettre très affectueuse au cardinal, qui fait aussi partie de sa garde rapprochée.
Dans sa lettre, Reinhard Marx avait fustigé un "échec institutionnel ou systémique" dans le vaste scandale qui éclabousse aussi l'Eglise catholique allemande, critiquant des prélats allemands s'opposant "à tout dialogue de réforme et de renouvellement". Le prélat de 67 ans, loin de l'âge classique de la retraite à 75 ans, jugeait aussi que l'Église catholique est arrivée à "un point mort".
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"Cher frère, merci pour ton courage. C'est un courage chrétien (...) qui n'a pas peur d'être humilié face à la terrible réalité du péché", lui a répondu le pape dans sa lettre écrite en espagnol et publiée en allemand. "Assumer la crise, personnellement et communautairement, est la seule voie fructueuse", y estime François, pour qui "la politique de l'autruche ne mène nulle part".
"La triste histoire des abus sexuels" est une "catastrophe" pour l'Eglise, a poursuivi François, qui a exhorté tous les évêques du monde à se demander : "Que dois-je faire face à cette catastrophe ?". Il a ainsi appelé à une "réforme" qui "ne repose pas sur des mots mais des attitudes", afin "d'assumer la réalité quelle qu'en soit la conséquence". "Les silences, les omissions, accorder trop d'importance au prestige des institutions ne conduisent qu'à l'échec personnel et historique et nous mènent à vivre avec 'des squelettes dans le placard'", a encore asséné le souverain pontife.
L'archevêque de Munich a dit accepter la décision du pape François "par obéissance" tout en se disant "surpris" du choix de François. "Je ne m'attendais pas à ce qu'il réagisse aussi rapidement, ni à ce qu'il décide que je poursuive" mes fonctions, a-t-il expliqué dans un communiqué, soulignant que cette décision constituait "un grand défi".
"Un message sur la marche à suivre sur les abus sexuels"
Pour Roland Juchem, un spécialiste écrivant pour l'agence de presse catholique allemande KNA, "le pape souhaite, par cette lettre publiée dans le bulletin officiel du Vatican, envoyer un message à l'ensemble de l'Eglise sur la marche à suivre sur les abus sexuels en prenant exemple sur le cardinal Marx". Archevêque de Munich et de Freising depuis quatorze ans, Reinhard Marx avait récemment refusé une importante distinction allemande, la Croix fédérale du Mérite, que voulait lui remettre le président allemand Frank-Walter Steinmeier. Il fait partie d'un conseil restreint de cardinaux conseillant le pape sur les réformes de la Curie romaine. Il coordonne aussi au Vatican le Conseil pour l'économie chargé de veiller à la bonne gestion financière du Saint-Siège. En 2019, lors d'un sommet inédit au Vatican de présidents de conférences épiscopales consacré aux scandales d'abus sexuels sur mineurs, Reinhard Marx fut une personnalité en pointe pour réclamer davantage de transparence sur la question. L'année précédente, il avait présenté les excuses de l'Eglise allemande après un rapport révélant des abus sexuels sur plus de 3600 mineurs pendant des décennies. LIRE AUSSI >> En Irak, le pape François attendu en rock star pour un voyage à haut risqueCette demande de démission de Reinhard Marx intervenait alors que le pape François a ordonné fin mai une enquête du Vatican sur le traitement de cas d'agressions sexuelles de mineurs au diocèse de Cologne, le plus grand d'Allemagne, secoué par une grave crise depuis des mois. Le pape a ainsi nommé deux envoyés pontificaux extraordinaires, chargés "d'éventuelles fautes" du cardinal Rainer-Maria Woelki et d'autres prélats du diocèse. Le cardinal Woelki, un conservateur dans les rangs de l'Eglise, est accusé notamment d'avoir longtemps couvert deux prêtres de la communauté religieuse de Düsseldorf soupçonnés de violences sexuelles.