Prêtres au bord de la crise de nerf
Publié le 23/10/2018 à 16h57 - Modifié le 24/10/2018 à 14h53Bénédicte Lutaud avec Sophie Lebrun et Sixtine Chartier
Corinne SIMON/CIRIC
« C’est un choc terrible, même si nous savions qu’il connaissait un moment difficile. » La mine grave, face à des journalistes réunis pour une conférence de presse ce lundi 22 octobre, Jacques Blaquart, évêque d’Orléans, évoque les circonstances qui ont conduit, deux jours plus tôt, un prêtre de son diocèse, Pierre-Yves Fumery, 38 ans, à se donner la mort. En cause, un « comportement inapproprié » avec des adolescentes, qui a conduit l’évêque à demander au prêtre de prendre du recul et de consulter un psychologue. Procédure classique dans ce diocèse régulièrement présenté comme en pointe dans la lutte contre les abus sexuels, quand bien même ces faits ne devaient pas conduire à des poursuites judiciaires. Alors, que s’est-il passé pour que l’homme d’Église se suicide ?
À Orléans, le "choc" après le suicide d'un prêtre
Ce drame fait écho à un autre, qui a lui aussi frappé de stupeur les fidèles, il y a seulement un mois. Le 18 septembre, c’est quasiment dans les mêmes termes que l’archevêque de Rouen annonçait le suicide du père Jean-Baptiste Sèbe, 38 ans lui aussi. « Nous sommes dans l’incompréhension d’un tel geste, même si je savais qu’il connaissait un moment difficile », déclarait alors Dominique Lebrun. Une enquête menée par le parquet a révélé qu’une femme du diocèse l’avait accusé de comportements indécents et d’agression sexuelle sur sa fille, majeure. Dominique Lebrun a confirmé avoir rencontré le père Sèbe à ce sujet la veille du drame, mais aussi évoqué un possible burn-out.
Si beaucoup d’inconnues demeurent sur les raisons de ces drames, ils rappellent un autre suicide, celui du dominicain Philippe Dockwiller, 43 ans, en août 2016. Ce prêtre, enseignant à la Catho de Lyon, s’était donné la mort après avoir été accusé d’agression sexuelle par un adolescent – avant que celui-ci ne se rétracte. La même année, le curé de Morlaix (Finistère), âgé de 36 ans, avait tenté de mettre fin à ses jours en se jetant d’un viaduc. La surcharge de travail et l’isolement avaient alors été avancés pour expliquer son geste. Solitude, burn-out, crise spirituelle, vocationnelle : les motifs de découragement ne manquent pas pour les prêtres. Au contexte de déchristianisation et de pénurie de vocations s’ajoutent désormais les scandales d’abus sexuels et la crise de confiance des fidèles. Face à ce tableau morose, des prêtres sont tentés de craquer ou de fuir et de s’isoler, à l’image du héros du roman de Jean Mercier, Monsieur le curé fait sa crise (Quasar, 2016), succès d’édition, que beaucoup de prêtres et d’évêques citent spontanément en exemple lorsqu’on aborde le sujet avec eux.
Publié le 23/10/2018 à 16h57 - Modifié le 24/10/2018 à 14h53Bénédicte Lutaud avec Sophie Lebrun et Sixtine Chartier
Corinne SIMON/CIRIC
Deux suicides de prêtres depuis la rentrée résonnent comme un nouveau signal d’alarme dans une institution par ailleurs embarrassée par sa gestion des affaires de pédophilie et d’abus sexuels.
« C’est un choc terrible, même si nous savions qu’il connaissait un moment difficile. » La mine grave, face à des journalistes réunis pour une conférence de presse ce lundi 22 octobre, Jacques Blaquart, évêque d’Orléans, évoque les circonstances qui ont conduit, deux jours plus tôt, un prêtre de son diocèse, Pierre-Yves Fumery, 38 ans, à se donner la mort. En cause, un « comportement inapproprié » avec des adolescentes, qui a conduit l’évêque à demander au prêtre de prendre du recul et de consulter un psychologue. Procédure classique dans ce diocèse régulièrement présenté comme en pointe dans la lutte contre les abus sexuels, quand bien même ces faits ne devaient pas conduire à des poursuites judiciaires. Alors, que s’est-il passé pour que l’homme d’Église se suicide ?
À Orléans, le "choc" après le suicide d'un prêtre
Ce drame fait écho à un autre, qui a lui aussi frappé de stupeur les fidèles, il y a seulement un mois. Le 18 septembre, c’est quasiment dans les mêmes termes que l’archevêque de Rouen annonçait le suicide du père Jean-Baptiste Sèbe, 38 ans lui aussi. « Nous sommes dans l’incompréhension d’un tel geste, même si je savais qu’il connaissait un moment difficile », déclarait alors Dominique Lebrun. Une enquête menée par le parquet a révélé qu’une femme du diocèse l’avait accusé de comportements indécents et d’agression sexuelle sur sa fille, majeure. Dominique Lebrun a confirmé avoir rencontré le père Sèbe à ce sujet la veille du drame, mais aussi évoqué un possible burn-out.
Burn-out et désert spirituel
Si beaucoup d’inconnues demeurent sur les raisons de ces drames, ils rappellent un autre suicide, celui du dominicain Philippe Dockwiller, 43 ans, en août 2016. Ce prêtre, enseignant à la Catho de Lyon, s’était donné la mort après avoir été accusé d’agression sexuelle par un adolescent – avant que celui-ci ne se rétracte. La même année, le curé de Morlaix (Finistère), âgé de 36 ans, avait tenté de mettre fin à ses jours en se jetant d’un viaduc. La surcharge de travail et l’isolement avaient alors été avancés pour expliquer son geste. Solitude, burn-out, crise spirituelle, vocationnelle : les motifs de découragement ne manquent pas pour les prêtres. Au contexte de déchristianisation et de pénurie de vocations s’ajoutent désormais les scandales d’abus sexuels et la crise de confiance des fidèles. Face à ce tableau morose, des prêtres sont tentés de craquer ou de fuir et de s’isoler, à l’image du héros du roman de Jean Mercier, Monsieur le curé fait sa crise (Quasar, 2016), succès d’édition, que beaucoup de prêtres et d’évêques citent spontanément en exemple lorsqu’on aborde le sujet avec eux.