Sermons marathon
5 000 Témoins de Jéhovah sont attendus ce week-end pour un congrès régional.
[img]
[/img]
Pendant trois jours, des orateurs se relaieront au pupitre pour prêcher la bonne parole à des milliers de fidèles venus de tout le Sud-Ouest. PHOTO TADEUSZ KLUBA
La voix amplifiée résonne dans tout l'Espace Carat. Dans l'entrée, des hommes en costume-cravate, dont le badge indique qu'ils sont de l'organisation, et quelques femmes en jupe longue qui bercent un enfant. Le reste, tout aussi endimanché, est assis dans la grande salle, où la seule source de lumière émane de la tribune. Un orateur indique une référence de livre et de verset. Chacun tourne les pages de sa Bible et suit consciencieusement.
Ce week-end, pas question d'aller sonner aux portes. Depuis hier et pour trois jours, l'Espace Carat, à l'Isle-d'Espagnac, s'est mué en une gigantesque salle du royaume des Témoins de Jéhovah. 5 000 fidèles sont attendus dimanche, mais ils étaient déjà nombreux à l'ouverture vendredi matin. Ils viennent de tout le Sud-Ouest pour un congrès régional annuel.
Rigueur des principes
Le thème de l'année ? « Que notre royaume vienne ». Il est inscrit sur le badge de Gilbert Izoulet, membre du comité organisateur et originaire de Limoges, une ville qui revendique 700 fidèles. Le royaume, c'est celui de Dieu, dont les Témoins de Jéhovah attendent le retour. Dans leur croyance, il viendrait après l'Apocalypse, et seuls les convertis y auraient accès.
Les orateurs, des laïcs appelés « Anciens » - les Témoins n'ont ni clergé ni pasteurs - égrènent et interprètent des passages bibliques sélectionnés. Les fidèles écoutent. La journée durant ? « Il y a aussi des pauses cantique, assure Gilbert Izoulet. Et le pique-nique ! »
Jean-Marie Delannoy est l'un de ces « Anciens », un fidèle qui a obtenu la responsabilité du prêche « par sa connaissance et la mise en application stricte des Écritures ». Cette rigueur, l'ensemble des fidèles n'en sont pas exemptés. Tabac et alcool sont proscrits, de même que Noël, une fête considérée comme païenne, l'homosexualité ou encore les transfusions sanguines, car plusieurs versets bibliques condamnent l'absorption de sang.
« Pas une secte »
Ce sont ces préceptes, de même qu'une tendance au repli communautaire, qui ont amené la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) à pointer du doigt les « dérives » de l'organisation.
Quand on lui parle de secte, Gilbert Izoulet hausse les épaules. « Qu'est-ce qu'une secte ? Il n'y a pas de définition… Nous sommes très ouverts, la preuve, nous allons vers les autres ! » Ce déçu du catholicisme, converti à 40 ans parce qu'il ne comprenait pas « la position de son Église vis-à-vis de la guerre » (les Témoins de Jéhovah se veulent pacifistes), ne voit pas de contradictions entre les Écritures et la société moderne. « Un enseignement comme "aimer son prochain comme soi-même" est toujours d'actualité. »
Alors oui, il reconnaît que « comme partout, certains sont "comme ça" (il mime des œillères) et n'acceptent pas les mariages mixtes, mais ce n'est pas le cas de tous. » Et de prendre pour exemple des amis, des voisins qui…, etc. « D'ailleurs, ce congrès est ouvert à tous, ajoute-t-il. Nous invitons tous les curieux à entrer. »
Pourtant, envers le visiteur, une certaine méfiance règne. Des photos ? Seulement de dos. Et interdiction formelle de s'approcher de la tribune. Quant à l'allure de la journaliste, dont le pantalon jure au milieu des jupes, elle est très vite remarquée.
Charente · Angoulême