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Une discussion sur la religion et les conflits

2 participants

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Josué

Josué
Administrateur

Une discussion sur la religion et les conflits
La religion et les conflits au quotidien en Allemagne : quatre personnes pour lesquelles la religion joue un grand rôle, deux heures pour discuter et, à la fin, une constatation prudente
Quatre personnes, quatre approches de la religion
Quatre personnes, quatre approches de la religion
Gene Glover
Quiconque veut pratiquer sa religion en Allemagne a le soutien de la Loi fondamentale qui déclare que la liberté de croyance est inviolable et que la pratique sereine de sa religion est garantie. Mais qu’est-ce que cela signifie au quotidien ? Il y a régulièrement des conflits déclenchés par la religion – qui n’en est pas nécessairement la cause. Il y va tantôt de l’interdiction de danser le Vendredi Saint, du port du voile, d’un jeune juif harcelé dans sa classe. À chaque fois, la grande question est de savoir comment des gens de différentes religions peuvent vivre ensemble pacifiquement et amicalement. On n’a pas encore trouvé la grande réponse. Mais on peut essayer de trouver de nombreuses petites réponses. C’est sur ce thème que quatre personnes, pour lesquelles la religion joue un grand rôle, se sont retrouvées à la fin de l’été à Berlin : un ancien salafiste, une musulmane, une collaboratrice du Forum juif pour la démocratie et contre l’antisémitisme, et un scientifique qui étudie les opportunités et les limites du dialogue interreligieux.
Une grande table, du café et deux heures pour parler : ce n’est pas beaucoup pour un sujet sur lequel les gens se querellent depuis des siècles. Mais c’est suffisant pour échanger. Les quatre interlocuteurs se rencontrent pour la première fois, ils s’observent avec un brin de curiosité et de timidité.
Il faut d’abord clarifier à quoi l’on reconnaît les conflits religieux. Car lorsqu’un chrétien et un musulman ou un juif et un bouddhiste se disputent sur des sujets anodins, la religion ne joue souvent aucun rôle. Il en est autrement lorsque les gens ont des difficultés en raison de leur religion. On a connu ces derniers mois de sérieux incidents en Allemagne. Ainsi, des musulmans ont attaqué des chrétiens dans des centres de réfugiés parce qu’ils sont chrétiens. Des têtes de porc ont été déposées sur les lieux où il est prévu de construire des mosquées et des touristes israéliens ont été insultés à Berlin.
La seule personne autour de la table dont on reconnaît d’emblée la religion est la musulmane Hawa Öruc. Issue d’une famille kurde, âgée de 26 ans, elle a décidé il y a quatre ans de porter le voile. A-t-elle l’impression que les gens réagissent à ce vêtement ? Mme Öruc répond : « Oui, je ressens massivement la marginalisation, surtout depuis la montée du mouvement Pegida et l’entrée de l’AfD dans 13 Parlements de Land ». Les partisans du mouvement islamophobe Pegida organisent depuis 2014 des démonstrations à Dresde, l’AfD est un parti populiste de droite qui a été fondé en 2013.
Un différend sur le voile
Récemment, Öruc a pris le train et a été violemment poussée par un homme lorsqu’elle en descendit. Öruc pense qu’il ressentait son voile comme une provocation. Cela ne lui était jamais arrivé lorsqu’elle ne le portait pas encore. Mais elle ressent aussi une marginalisation dans la manière dont on parle du port du voile dans la société. « On le décrit immédiatement comme un uniforme, comme quelque chose qui définit mon appartenance. » Mais de manière désobligeante. « N’importe quel fan d’un club de foot peut en porter les couleurs et brailler, affirmant qu’il soutient telle équipe et en porte l’uniforme parce que ça lui plait. On ne ressent pas alors cette connotation négative. »
Dominic Schmitz intervient : « C’est logique, personne ne se fait exploser pour Schalke. » Schmitz
est un ancien salafiste, un mouvement qui compte quelque 10 000 personnes en Allemagne. Le FC Schalke 04 est un club de foot de sa région jouant en Bundesliga. En 2009, le club a dû aborder un débat à connotation religieuse sur un chant du club : « Mohammed était un prophète qui n’a pas le foot en tête ». Un islamologue estima que ces vers ne sont pas islamophobes et recommanda de faire preuve « d’un peu plus de calme et d’humour ». Dominic Schmitz a connu des conflits religieux sous bien des perspectives et met expressément en garde contre l’islamisme. Pendant plusieurs années, il se méfiait des autres à tout moment – et vice-versa – en raison de la manière dont lui et les autres pratiquaient leur religion. Aujourd’hui, il se décrit simplement comme « Dominic – un peu chrétien, un peu musulman, de la philosophie et des doutes ».
Les insultes à l’école
Une discussion se développe entre Schmitz et Öruc qui porte sur le prêcheur islamiste Sven Lau, sur l’art et la musique dans l’islam et sur la manière dont certains musulmans jugent la liberté d’expression, par exemple dans les caricatures. Les caricatures de Mohammed provoquent sans cesse des conflits entre les musulmans et ceux qui ont une confession différente. On comprend que Schmitz discerne des dangers dans l’islam là où Öruc n’en voit pas. Tous deux discutent très poliment mais on sent qu’ils sont émus. On voit déjà, à cette table, que les conflits religieux sont aussi difficiles à régler parce qu’ils touchent au cœur de ce à quoi l’on croit. Ils ne portent pas sur quelque chose, ils portent sur un tout, Lorsque Schmitz récite une phrase qu’il considère comme un vers problématique du Coran mais qu’Öruc ne connaît pas, la discussion s’enlise.
Tabea Adler, du Forum juif pour la démocratie et contre l’antisémitisme, a jusque-là écouté sans rien dire. Elle aussi pourrait parler de nombreux conflits religieux. Elle estime que nombre de conflits n’ont que prétendument à voir avec la religion. « Quand quelqu’un interpelle un homme portant une kippa, cela est souvent dû à des facteurs très différents. Il ne veut pas savoir quelque chose sur la religion mais a un schéma culturel en tête. » Et : « Les juifs sont souvent rendus responsables de la politique d’Israël. » Pour elle, c’est totalement irrationnel.
Et il y a encore plus cru. Le mot « juif » est aujourd’hui employé de plus souvent comme une insulte parmi les élèves. Il ne s’agit pas de traiter un juif comme tel mais seulement d’insulter quelqu’un. Une enquête réalisée par des enseignants à Berlin à la demande de l’American Jewish Committee a révélé que cette désignation est aujourd’hui « courante » dans les cours d’école. Cette évolution, qui ne se limite pas aux cours d’école, intimide nombre de juifs en Allemagne. « Je connais des gens qui aimeraient porter une kippa mais ne le font pas pour éviter les hostilités », raconte Hawa Öruc.
Le scientifique Kim David Amon sait mieux que personne quels conflits religieux pré­occupent les jeunes. Il étudie comment on en parle en cours de religion. À Hambourg, où il travaille, il existe un cours de religion auquel assistent des élèves de religions différentes. Il explique que, dans les classes à majorité musulmane, il y a souvent quelques élèves qui « expriment des opinions fortes, s’arrogeant un droit d’interprétation religieuse ». La diversité des points de vue « est souvent absente », même si elle existe comme le montrent des interviews.
Des exposés et des ateliers
L’homosexualité est un sujet sur lequel se disputent les jeunes de religions différentes. Dominic Schmitz raconte que les élèves musulmans pensent que
l’homosexualité est quelque chose de mal et de méprisable. Ils lui ont dit qu’ils rejetteraient leur fils
s’il était gay. Tabea Adler, du Forum juif, connaît aussi ce point de vue. Elle dirige des ateliers dans
des centres de réfugiés, son groupe-cible sont les adolescents et les jeunes adultes de 14 à 18 ans. Ils sont nombreux à dire que l’homosexualité n’existe pas chez eux. « On commence alors à discuter. Nous leur disons qu’ils ne l’ont encore jamais vue parce qu’elle est interdite dans leur pays. Cela ne veut pas dire que cela n’existe pas. J’espère que nous leur donnons ainsi matière à réflexion. »
Les quatre interlocuteurs en viennent maintenant à la manière de résoudre les conflits. Schmitz veut lui aussi inciter les élèves à réfléchir. Il leur dit : « ta foi, c’est ton affaire. Mais ton fils homosexuel ne l’est pas pour te provoquer ou pour provoquer Allah. Ils disent alors : c’est une épreuve, Allah les met à l’épreuve. Je leur réponds : ce n’est pas juste. Qu’est-ce que c’est que ce Dieu qui regarde ce spectacle et se dit : super, il fait ça pour moi, c’est un super croyant. » Schmitz espère que les élèves se mettront à réfléchir. Il ne croit pas qu’il puisse immédiatement les convaincre.
Intéressés par les échanges
Le scientifique Amon pense que les élèves sont en principe intéressés par les échanges. Adler sait d’expérience que les jeunes avec lesquels elle parle ne sont pas fermés à la discussion. A-t-elle par exemple des problèmes quand elle vient rencontrer des jeunes musulmans en tant que collaboratrice du Forum juif ? « Nous n’avons jamais rencontré d’attitude totalement négative dans les établissements. Ce sont surtout les responsables qui émettent des réserves. Certains craignent que cela ne provoque trop les résidents. Mais les jeunes ne demandent pas explicitement si je suis juive. Ceux qui le font sont rares. » La question ne la gênerait pas. « Je pense qu’elle est légitime. Ce qui me dérange, c’est lorsque les gens sont timorés et ont peur de le demander, comme si c’était mal. »
Amon souligne que ce ne sont pas seulement les élèves musulmans qui accordent de l’importance aux échanges sur la religion. Mais « nombre de jeunes qui se considèreraient comme appartenant à une autre religion n’ont pas les mots pour parler de religion ou de ce qui les préoccupe intérieurement ». Il y a un blocage empêchant d’échanger sur le sujet, parler de religion est aussi une question d’entraînement. Quiconque ne le fait pas souvent s’abstient car il ne veut blesser personne ou à peur d’être mal vu. Adler, Schmitz, Öruc et Amon en ont l’habitude, ils ne se coupent pas la parole, écoutent attentivement et expliquent en profondeur.
Le temps imparti à la discussion est écoulé, le photographe fait ses photos. Quand il en a fini, les quatre participants restent assis et poursuivent leur discussion. Certains pendant deux heures. Il semblerait qu’il y a au moins une chose sur laquelle règne l’unanimité : parler est profitable.
Kim David Amon
Kim David Amon
Gene Glover
Ce chercheur de 32 ans travaille à l’Académie des religions du monde à l’université de Hambourg. Pour le projet de recherche « Religion et dialogue dans les sociétés modernes » du ministère fédéral de l’Éducation et de la Recherche (BMBF), il étudie comment les gens de religions différentes entrent en contact. Son axe de recherche sont les échanges entre élèves et professeurs dans les classes.
awr.uni-hamburg.de

Josué

Josué
Administrateur

Désormais banalisé, le fait religieux cesse en 2017 de progresser dans les entreprises
L’Institut Randstad et l’Observatoire du Fait Religieux en Entreprise[1] (OFRE) présentent les résultats de leur cinquième étude commune sur le fait religieux en entreprise. Alors que depuis 2013 les précédentes enquêtes avaient révélé la progression puis la banalisation du fait religieux au travail, l’étude 2017 livre un enseignement de taille. Pour la première fois, l’observation « quantitative » du fait religieux ne progresse pas. La part des salariés interrogés qui, en 2017, déclarent observer de façon régulière ou occasionnelle des faits religieux dans leur situation de travail est identique à ce qu’elle était un an plus tôt : 65 %. L’enquête 2017 confirme donc la banalisation du fait religieux en entreprise. Elle donne aussi à voir son « plafond ». Car si l’édition 2016 avait révélé une progression de 10 points en un an du phénomène, la stabilité constatée en 2017 n’est vraisemblablement pas un hasard. Elle témoigne du poids des entreprises qui, par leur secteur d’activité et/ou leur implantation géographique, présentent une porosité au fait religieux. Aussi peut-on considérer que le fait religieux touche, d’une façon ou d’une autre, environ deux-tiers des managers en France. Un résultat davantage structurel que conjoncturel. Les cas conflictuels restent pour leur part toujours minoritaires, passant de 6,7 % de l’ensemble des faits religieux observés en 2016 à 7,5 % cette année. L’étude a été réalisée entre avril et juin 2017 sur la base d’un questionnaire en ligne conduit auprès de 1 093 salariés exerçant pour la plupart (63 %) des fonctions d’encadrement.

« Un an après avoir enregistré une progression significative, le fait religieux en entreprise marque le pas en 2017, selon l’enquête de l’Institut Randstad et de l’OFRE. Cette absence d’évolution ne signifie cependant pas que les comportements des salariés se suivent et se ressemblent. Cette année, près des trois-quarts (72 %) des salariés interrogés estiment ainsi que l’entreprise ne doit pas s’adapter aux pratiques religieuses des salariés alors qu’ils n’étaient que 60 % à le penser en 2016. Dans le même temps, ils sont 73 % à estimer qu’il est tout à fait admissible de prier pendant ses pauses. Les salariés dessinent donc ici un équilibre subtil entre ce qui relève de la sphère privée, où l’expression de sa foi a toute sa place, et ce qui relève de la sphère professionnelle, au sein de laquelle les règles collectives de l’entreprise doivent s’imposer », déclare Laurent Morestain, secrétaire général du groupe Randstad France et président de l’Institut Randstad pour l’égalité des chances et le développement durable.

« Il n’y a rien de surprenant à ce que travail et pratique religieuse se rencontrent. Simone Weil, dans son analyse de la condition ouvrière, l’a si bien mis en évidence. Le travail est, ou devrait être, un outil de transcendance, notre moyen de contribuer à des projets qui participent au progrès du monde. Derrière les chiffres de cette nouvelle étude, la cinquième, il faut repérer ce que cette irruption de la problématique religieuse dans les ateliers et les bureaux interroge. Avant d’être réalisé par des ingénieurs, des contrôleurs de gestion, des soudeurs ou des infirmières, le travail est une affaire de personne. C’est dans le travail que se joue, en reprenant les mots d’Hannah Arendt, la condition humaine. C’est cela que le fait religieux interroge : le sens du travail aujourd’hui et sa capacité à permettre aux personnes de s’élever en prenant part au projet d’une entreprise », déclare Lionel Honoré, professeur des Universités et directeur de l’OFRE.
http://grouperandstad.fr/desormais-banalise-le-fait-religieux-cesse-en-2017-de-progresser-dans-les-entreprises-2/

papy

papy

[size=33]Denis Maillard : "Il faut neutraliser les religions dans l'entreprise !"[/size]


Auteur de "Quand la religion s'invite dans l'entreprise", ce spécialiste des questions sociales alerte contre une hausse des conflits religieux au travail.


PROPOS RECUEILLIS PAR THOMAS MAHLER
Publié le 11/11/2017 à 13:39 | Le Point.fr


Une discussion sur la religion et les conflits 11231051lpw-11238314-article-jpg_4754022_660x281
Le droit dans l’entreprise provient uniquement du Code du travail. Il explique que vous avez le droit de croire et de manifester cette croyance, mais qu’il y a des limites, fondées sur des raisons objectives : l’hygiène, la sécurité, l’organisation d’un service et, depuis la loi El Khomri, l’image de neutralité d’une entreprise vis-à-vis de ses clients.© Martin Bertrant
Un chauffeur manutentionnaire qui refuse de transporter de l'alcool, une employée se mettant à porter le voile alors que son recruteur lui avait précisé que les signes confessionnels posaient un problème pour l'image de l'entreprise, des salariés qui réclament le droit à des jours fériés de nature religieuse... Alors que l'immense majorité des Français demande à ce que les convictions personnelles soient mises en sourdine au bureau, les croyances s'invitent de plus en plus dans le monde du travail, à tel point que le ministère du Travail a été contraint de publier il y a un an un guide du fait religieux dans l'entreprise privée. Dans le subtil Quand la religion s'invite dans l'entreprise (Fayard), Denis Maillard analyse ce phénomène, fait le point sur la jurisprudence et donne des conseils aux managers. Rédacteur en chef de la Revue politique et parlementaire et spécialiste des questions sociales, l'auteur sait bien que la laïcité ne s'appliquera jamais stricto sensu dans le monde du travail – sauf dans le service public. Entretien avec un expert ni angélique ni laïcard.
Le Point : Y a-t-il un problème religieux grandissant dans le monde du travail ?
Denis Maillard : Il y a, hélas, peu de données et d'enquêtes sur le fait religieux en entreprise, mais le sondage annuel de l'Observatoire du fait religieux en entreprise montre qu'en 2016 65 % des managers se disaient confrontés à la manifestation de la croyance religieuse, alors qu'ils n'étaient que 50 % en 2015. Le fait religieux est massivement présent dans l'entreprise, mais, dans la plupart des cas, cela ne pose pas de problème. Les cas conflictuels sont minoritaires, mais ils augmentent : alors que les problèmes religieux ne représentaient que 3 % de l'ensemble des problèmes répertoriés en 2014, ils sont passés à 9 % en 2016, soit presque un cas sur dix. Pourtant, selon l'enquête de l'observatoire Sociovision de 2014, les Français demandent très majoritairement (à plus de 80 %) à ce que la religion soit quelque chose de discret dans le travail. Il faut ainsi comprendre pourquoi certains salariés ne sont pas discrets sur ces questions, voire se montrent revendicatifs.
Comment les croyances se manifestent-elles dans l'entreprise ?
Il y a d'abord les questions d'organisation du travail, avec les aménagements d'horaires, les demandes d'absence pour des fêtes religieuses. Ensuite, il y a les revendications qui concernent la vie collective comme les menus spéciaux à la cantine. Enfin, et c'est là où c'est le plus problématique pour l'entreprise, il y a les manifestations identitaires, que ce soit dans les comportements des salariés entre eux, et notamment entre les sexes – « Je ne travaille pas avec un homme », « Je refuse de serrer la main à une femme » – , ou alors dans le refus d'effectuer certaines tâches, comme être en contact avec certains produits jugés impurs ou interdits, qu'il s'agisse de transporter de l'alcool ou d'acheter une tranche de jambon à la vieille dame pour laquelle on fait des courses.
[size=33] Il y a d’abord la laïcité des textes, celle de la loi de 1905. Et puis il y a une laïcité dans les têtes. Elle nous dit que la civilité nous impose d’en rabattre un peu sur nos identités. 

Comment expliquer la hausse des cas conflictuels liés à la religion ?
II ne faut pas se voiler la face : les exemples que j'ai recensés concernent très majoritairement la religion musulmane. Cela peut s'expliquer tout d'abord par les difficultés d'intégration liées à l'immigration maghrébine puis subsaharienne, mais aussi par un tournant identitaire dans la société française : croire, c'est désormais montrer sa croyance. Mais il y a aussi eu un phénomène propre au monde du travail : l'individualisation dans l'entreprise. Depuis une quarantaine d'années, on a dit aux salariés de s'investir subjectivement dans le travail, d'apporter toute leur personnalité et leur identité, de s'épanouir à travers leur job. Nous sommes tous touchés par cette interpénétration entre vie professionnelle et privée, d'autant que les outils numériques ne font que cela. Toutes ces raisons donnent aujourd'hui un cocktail assez explosif dans l'entreprise. Il y a forcément une contradiction entre le processus d'individualisation qui fait que les gens ont envie de s'affirmer comme ils sont dans le monde du travail et, de l'autre côté, l'obligation de mesurer ses propos et ses revendications lorsqu'on doit travailler avec les autres. Car, s'il y a un fait évident, c'est qu'on ne travaille jamais seul ; il faut donc composer avec les autres.
Avant, la religion s'exprimait dans l'entreprise à travers un patron paternaliste imposant sa foi ou alors via des syndicats chrétiens. Aujourd'hui, les revendications viennent des salariés...
C'est le grand paradoxe ! Il y a un siècle, on se battait pour enlever les crucifix dans les ateliers d'usine, et parce que, quand on travaillait chez Michelin à Clermont-Ferrand et qu'on n'allait pas à la messe, c'était mal vu. Aujourd'hui, il reste un patronat chrétien, mais le patron ne peut plus faire de sa foi une forme d'identification à l'entreprise. Désormais, ce sont les salariés qui, en tant qu'individus cherchant à être reconnus dans leur identité, ont des revendications religieuses. La question pour les DRH et les managers est de savoir s'il est possible de négocier avec ces salariés ou s'ils ont affaire à ce que les sociologues nomment une « fixité identitaire », c'est-à-dire des identités qui ne sont absolument pas négociables : « Je ne veux pas faire telle tâche », « Je n'enlève pas mon voile »...
La laïcité ne s'applique pas dans le monde de l'entreprise, sauf pour le service public. Que prévoit le Code du travail ?
Il y a une grande confusion sur ce qu'est la laïcité ! Il y a d'abord la « laïcité des textes », celle de la loi de 1905, qui autorise la liberté de culte et de conscience, mais prévoit une neutralité de l'État : les fonctionnaires ne doivent pas montrer leur croyance. Et puis il y a une « laïcité dans les têtes », c'est-à-dire cette culture française nourrie par le conflit entre la religion catholique et l'État, qu'on peut faire remonter à l'édit de Nantes. Elle nous dit que la religion relève de l'ordre du privé et que, dans les espaces où on est obligé de vivre avec les autres – la rue, l'entreprise, le métro... –, la civilité nous impose d'en rabattre un peu sur nos identités. Mais ça, c'est une culture, qui n'est régie par aucun texte ! Le droit dans l'entreprise provient uniquement du Code du travail. Il explique que vous avez le droit de croire et de manifester cette croyance, mais qu'il y a des limites, non pas de nature laïque ou parce que votre patron serait un athée militant, mais fondées sur des raisons objectives : l'hygiène, la sécurité, l'organisation d'un service et, depuis la loi El Khomri de 2016, l'image de neutralité d'une entreprise vis-à-vis de ces clients. C'est-à-dire que l'expression des choix des employés ne doit pas pervertir la relation de service entre l'entreprise et ses clients.
[size=33] La Cour de justice confirme que l’entreprise peut se donner une image de neutralité vis-à-vis des clients et donne des armes aux entreprises pour ne pas se faire accuser de discrimination. [/size]
La Cour de justice de l'Union européenne a rendu deux arrêts le 14 mars 2017, l'un concernant le licenciement d'une employée qui portait le voile depuis son embauche alors que son recruteur l'avait informée que le port d'un signe religieux pouvait poser problème avec la clientèle, l'autre celui d'une réceptionniste qui, trois ans après son recrutement, a exprimé son désir de porter le voile en dépit d'un règlement intérieur. En quoi ces deux arrêts sont-ils d'une grande importance ?
Pour deux raisons. La première, c'est qu'ils viennent conforter la loi El Khomri qui permet aux entreprises de rédiger un règlement intérieur limitant l'expression de la religion. Cette limitation ne se fonde pas sur les orientations philosophiques du chef d'entreprise, mais sur des raisons objectives. La Cour de justice confirme donc que l'entreprise peut se donner une image de neutralité vis-à-vis des clients, et donne des armes aux entreprises pour se dégager de ces histoires religieuses et ne pas se faire accuser de discrimination. Le deuxième aspect essentiel, c'est que ces arrêts précisent que ce n'est pas au client de demander à ce qu'il n'y ait pas de signes religieux dans le rapport commercial. Vous ne pouvez pas dire « je ne veux pas être servi une femme voilée ». Mais il faut bien comprendre que cela marche dans les deux sens. Le client n'a pas non plus le droit de demander à n'avoir affaire qu'à des personnes d'une confession précise. Avec la mondialisation, vous ne pouvez ainsi pas avoir de ressortissants de puissances étrangères qui feraient des investissements en France et exigeraient de ne traiter qu'avec des employées voilées. Le client n'est pas roi sur ces questions religieuses.
En France, il y a aujourd'hui des entreprises, comme Ikea ou H&M, qui sont ouvertement multiculturelles, laissant leurs vendeuses porter le voile. De l'autre côté, il y a le spécialiste du recyclage Paprec, dirigé par Jean-Luc Petithuguenin, qui a fait signer une charte de la laïcité à ses employés...
La charte de la laïcité de Paprec ne se fait pas sous le régime de la loi El Khomri. C'est un patron « éclairé », athée, qui pense que les religions n'ont rien à faire dans l'entreprise. On peut être philosophiquement de l'avis de Jean-Luc Petithuguenin, mais, juridiquement, cela ne tient pas la route, car la laïcité ne relève pas du Code du travail. Personnellement, je plaide pour qu'on remette la question du commun, à savoir le travail, au centre de l'entreprise. C'est la seule voie pour neutraliser ces questions religieuses ! Je cite l'exemple d'une PME de la région parisienne dans laquelle des femmes ont demandé des horaires aménagés au moment du ramadan. La chef de service a fait une réunion pour en débattre avec tous les salariés en déplaçant la discussion des questions religieuses vers l'organisation du travail. Ceux qui ne faisaient pas le ramadan ont expliqué que cela leur donnerait un surcroît de travail et les femmes ont spontanément renoncé à leur revendication en comprenant que ce qui pour elle était une liberté individuelle apparaissait pour les autres comme une charge supplémentaire. L'année suivante, elles ont même pris quelques jours de congé au moment du ramadan.
[size=33] La seule question qui doit intéresser un manager ou un patron, c’est à quelles conditions est-il possible de travailler ensemble ? [/size]
Pourquoi recommandez-vous aux entreprises de ne pas s'aventurer dans des questions d'ordre théologique ?
Je dis toujours aux managers de ne surtout pas faire de théologie ! Vous n'avez pas besoin de savoir si votre employé a une bonne ou une mauvaise pratique de sa religion. Cela le regarde, et ce n'est pas à vous, chef d'entreprise ou RH, de trancher ces questions. Croyant bien faire, un employeur dans la banlieue de Rouen a ainsi fait appel à un imam pour ramener à la raison un salarié qui ne voulait pas transporter de boissons alcoolisées. Mais c'est un engrenage, car on trouvera toujours un religieux plus radical qui vous dira que son interprétation est la bonne. D'autant plus, en ce qui concerne l'islam, que les croyants sont souvent dans une angoisse de savoir ce qui est hallal ou non. Plutôt que de s'aventurer sur ce terrain glissant, la seule question qui doit intéresser un manager ou un patron, c'est « à quelles conditions est-il possible de travailler ensemble ? ».
Vous ironisez sur deux types de démagogie, l'une à gauche, l'autre à droite. D'un côté, Terra Nova a proposé qu'on instaure deux jours fériés aux religions juive et musulmane. De l'autre, Marine Le Pen ou Jean-François Copé ont déclaré vouloir interdire tous les signes religieux...
En voulant caresser dans le sens du poil des groupes confessionnels supposés discriminés, Terra Nova s'appuie sur une méconnaissance de ce qu'est l'histoire religieuse dans notre pays. Aujourd'hui, les jours fériés ne sont plus « catholiques » pour une grande majorité de Français, et le dimanche non travaillé est une conquête du monde ouvrier, et non de la religion chrétienne. De l'autre côté, Le Pen fait elle aussi de la démagogie en voulant répondre à des questions d'affirmation identitaire par une autre affirmation identitaire plus forte et supposée dominante. Or il faut tout faire pour éviter que la guerre identitaire, qui hante la société comme la politique, entre dans l'entreprise ! Et, pour cela, on a des moyens juridiques et des méthodes faisant porter la réflexion sur notre capacité à travailler en commun.
On parle beaucoup de l'islam, mais vous avertissez aussi sur le néo-protestantisme évangélique, une croyance très démonstrative et prosélyte...
L'islam est aujourd'hui visible, car c'est une religion qui organise la vie quotidienne du croyant. Et elle est liée à l'immigration et aux ratés de l'intégration. Mais les musulmans sont des salariés comme les autres, et l'affirmation du fait religieux – quand on n'est pas dans la radicalisation ou la propagande politique – est classique de ce que sont les individus contemporains. Je pense ainsi que ce fait religieux va perdurer dans l'entreprise, mais qu'on va arriver à le réguler. Mais il va aussi falloir traiter avec le néo-protestantisme – très dynamique en Afrique ou en Amérique latine – parce qu'il est particulièrement prosélyte. « Les Français n'imaginent pas la bombe démographique néo-protestante qui leur arrive. Il y aura un énorme travail pour préparer les chemins d'une acculturation réussie », avertissait cet été Olivier Abel, professeur de philosophie et d'éthique à la faculté de théologie protestante de Montpellier. Cela se manifestera par des tentatives de conversion et des invitations à des moments de prière, ce qui est interdit dans l'entreprise. L'exemple américain est d'ailleurs intéressant, avec le cas désormais célèbre d'Hobby Lobby qui, en raison des convictions religieuses de ses dirigeants opposés à la contraception, a obtenu en 2014 de déroger à l'assurance maladie Obamacare. Il faut faire attention, en France, à ce que ne fleurissent pas des entreprises dites de conviction, qui se donnent pour mission de défendre une certaine vision de la religion, des mœurs et de la société. Aujourd'hui, c'est déjà le cas avec le commerce alimentaire hallal ou des écoles privées. Demain, ce commerce identitaire et communautaire s'étendra-t-il ?

Quand la religion s'invite dans l'entreprise, de Denis Maillard (Fayard, 230 p., 18 euros).[/size]

Josué

Josué
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Quand il y a un règlement intérieur quoi de plus normal pour employés de le respecter.

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