Voici quelques extraits de l'ouvrage
Nous n'avons pas trop peu de temps, mais nous en perdons beaucoup. La vie est assez longue ; elle suffirait, et au delà, à l'accomplissement des plus grandes entreprises, si tous les moments en étaient bien employés. Mais quand elle s'est écoulée dans les plaisirs et dans l'indolence, sans que rien d'utile en ait marqué l'emploi, le dernier, l'inévitable moment vient enfin nous presser : et cette vie que nous n'avions pas vue marcher, nous sentons qu'elle, est passée.
Voilà la vérité : nous n'avons point reçu une vie courte, c'est nous qui l'avons rendue telle : nous ne sommes pas indigents, mais prodigues.
Pourquoi ces plaintes contre la nature ? elle s'est montrée si bienveillante ! pour qui sait l'employer, la vie est assez longue. Mais l'un est dominé par une insatiable avarice ; l'autre s'applique laborieusement à des travaux frivoles ; un autre se plonge dans le vin ; un autre s'endort dans l'inertie ; un autre nourrit une ambition toujours soumise aux jugements d'autrui ; un autre témérairement passionné pour le négoce est poussé par l'espoir du gain sur toutes les terres, par toutes les mers ; quelques−uns, tourmentés de l'ardeur des combats, ne sont jamais sans être occupés ou du soin de mettre les autres en péril ou de la crainte d'y tomber eux−mêmes. On en voit qui, dévoués à d'illustres ingrats, se consument dans une servitude volontaire.
Aussi cette sentence sortie comme un oracle de la bouche d'un grand poète me parait−elle incontestable : Nous ne vivons que la moindre partie du temps de notre vie ; car tout le reste de sa durée n'est point de la vie, mais du temps.
Rappelle−toi combien de fois tu as persisté dans un projet ; combien de jours ont eu l'emploi que tu leur destinais ; quels avantages tu as retirés de toi−même ; quand ton visage a été calme et ton coeur intrépide ; quels travaux utiles ont rempli une si longue suite d'années ; combien d'hommes ont mis ta vie au pillage, sans que tu sentisses le prix de ce que tu perdais ; combien de temps t'ont dérobé des chagrins sans objet, des joies insensées, l' âpre convoitise, les charmes de la conversation : vois alors combien peu il t'est resté de ce temps qui t'appartenait, et tu reconnaîtras que ta mort est prématurée."
La suite ici
Nous n'avons pas trop peu de temps, mais nous en perdons beaucoup. La vie est assez longue ; elle suffirait, et au delà, à l'accomplissement des plus grandes entreprises, si tous les moments en étaient bien employés. Mais quand elle s'est écoulée dans les plaisirs et dans l'indolence, sans que rien d'utile en ait marqué l'emploi, le dernier, l'inévitable moment vient enfin nous presser : et cette vie que nous n'avions pas vue marcher, nous sentons qu'elle, est passée.
Voilà la vérité : nous n'avons point reçu une vie courte, c'est nous qui l'avons rendue telle : nous ne sommes pas indigents, mais prodigues.
Pourquoi ces plaintes contre la nature ? elle s'est montrée si bienveillante ! pour qui sait l'employer, la vie est assez longue. Mais l'un est dominé par une insatiable avarice ; l'autre s'applique laborieusement à des travaux frivoles ; un autre se plonge dans le vin ; un autre s'endort dans l'inertie ; un autre nourrit une ambition toujours soumise aux jugements d'autrui ; un autre témérairement passionné pour le négoce est poussé par l'espoir du gain sur toutes les terres, par toutes les mers ; quelques−uns, tourmentés de l'ardeur des combats, ne sont jamais sans être occupés ou du soin de mettre les autres en péril ou de la crainte d'y tomber eux−mêmes. On en voit qui, dévoués à d'illustres ingrats, se consument dans une servitude volontaire.
Aussi cette sentence sortie comme un oracle de la bouche d'un grand poète me parait−elle incontestable : Nous ne vivons que la moindre partie du temps de notre vie ; car tout le reste de sa durée n'est point de la vie, mais du temps.
Rappelle−toi combien de fois tu as persisté dans un projet ; combien de jours ont eu l'emploi que tu leur destinais ; quels avantages tu as retirés de toi−même ; quand ton visage a été calme et ton coeur intrépide ; quels travaux utiles ont rempli une si longue suite d'années ; combien d'hommes ont mis ta vie au pillage, sans que tu sentisses le prix de ce que tu perdais ; combien de temps t'ont dérobé des chagrins sans objet, des joies insensées, l' âpre convoitise, les charmes de la conversation : vois alors combien peu il t'est resté de ce temps qui t'appartenait, et tu reconnaîtras que ta mort est prématurée."
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