Les couvents de la Madeleine sont issus du « Rescue Movement » qui prit naissance en Grande-Bretagne et en Irlande au cours du xixe siècle, qui avait pour but formel la réhabilitation de femmes dites « perdues ». Ce terme désignait celles qui avaient eu des relations sexuelles hors mariage, quelle qu'en fut la cause : prostitution, abus sexuels, ou encore sexualité jugée trop précoce. Selon l'ouvrage de Frances Finnegan, Do Penance or Perish, seule une minorité de femmes admises dans les couvents étaient des prostituées professionnelles. La plupart étaient en fait des filles-mères. Dans leur livre Women Surviving, Cliona Murphy et Maria Luddy défendent la même thèse.
En Irlande, ces institutions prirent le nom de Marie-Madeleine, personnage de la Bible qui, selon la tradition catholique (confondant deux personnages des Evangiles en fait distincts) était une prostituée, s'étant repentie de ses péchés et devenant l'une des personnes les plus fidèles à Jésus. En Irlande, l'Église s'appropria rapidement le mouvement de Madeleine et les foyers, qui étaient prévus à l'origine pour de courts séjours, devinrent de plus en plus des institutions à long terme. Les pénitentes furent mises au travail, généralement dans des laveries. De même que Marie-Madeleine avait lavé les pieds du Christ en signe de pénitence, les pensionnaires devaient accomplir des travaux de blanchisserie, afin de laver symboliquement leurs péchés. Cette activité représentait en outre des rentrées d'argent nécessaires à la bonne marche et à l'entretien des couvents.
Au fur et à mesure que le mouvement prenait ses distances avec les idées qui furent à son origine, à savoir sortir des prostituées de la rue et les héberger car leur passé les empêchait de trouver un emploi, les foyers prirent un aspect de plus en plus carcéral. Les sœurs chargées de la surveillance des pensionnaires avaient pour instruction de les dissuader par n'importe quel moyen de tenter de quitter l'institution[réf. nécessaire] pour, au contraire, les encourager à entrer dans les ordres.
Les registres des foyers montrent que, au cours des premières années, de nombreuses femmes intégraient et quittaient l'institution de leur propre chef, parfois à plusieurs reprises. Dans son ouvrage Reform, Respite, Ritual: An Archaeology of Institutions; The Magdalen Society of Philadelphia, 1800-1850, Lu Ann De Cunzo indique que les pensionnaires cherchaient alors « un refuge à la maladie, la prison, une situation familiale désastreuse, les abus et de mauvaises circonstances économiques ».
À cause de leur passé de prostituées, les pensionnaires étaient considérées comme ayant besoin de faire pénitence :
« La femme qui n'a jamais connu la pollution d'une seule pensée malsaine, la femme dont l'âme vierge n'a jamais été traversée par l'ombre de la pensée d'un péché, la femme qui respire la pureté, l'innocence et la grâce, reçoit la femme qui respire l'odeur pestilentielle de l'enfer ! »1.
Jusque dans les années 1970, les pensionnaires étaient appelées « filles » et devaient s'adresser à toutes les sœurs en tant que « mère », indépendamment de leur âge, qu'il s'agisse de la mère supérieure ou d'une jeune novice qui n'avait pas encore prononcé ses vœux. Ce système permettait de maintenir les pensionnaires dans un état d'infériorité constant.
Pour maintenir l'ordre et une atmosphère monacale, les pensionnaires devaient observer un silence strict tout au long de la journée. « La règle du silence était un point fondamental de la vie de ces femmes et fut maintenue longtemps durant la seconde moitié du xxe siècle »2.
Les châtiments corporels étaient monnaie courante et les comportement de type auto-mutilation tout simplement ignorés :
« À un tempérament rebelle, souvent manifesté par le refus de s'alimenter, on répondra au mieux par le silence. Lorsqu'une fille réalise que personne ne prend garde ni ne s'émeut (tout du moins en apparence) de son jeûne forcé, le martyre qu'elle s'impose à elle même lui devient rapidement insupportable »3.
À mesure que le phénomène se répandit, il sortit du champ de la prostitution pour toucher également les mères célibataires, les jeunes filles dont le développement était retardé et les filles victimes d'abus. Certaines se sont retrouvées internées pour le simple fait qu'elles étaient considérées comme trop proches des garçons.[réf. nécessaire] Ceci se produisit à la même période où, en Grande-Bretagne et en Irlande, de nombreuses personnes considérées comme « handicapés sociaux » furent également internés dans des asiles et des foyers.
Les pensionnaires étaient souvent internées à la requête de membres de leur famille ou de prêtres. Celles qui n'avaient personne à l'extérieur susceptibles de venir les chercher y passèrent le reste de leur vie. Parmi elles, beaucoup ont fini par prononcer leurs vœux.
Dans une Irlande à la morale sexuelle conservatrice, les couvents de la Madeleine étaient une institution largement acceptée socialement jusqu'au cœur de la seconde moitié du xxe siècle siècle. En témoignent des expressions courantes, telles que le proverbe « bad girls do good sheets » (« les mauvaises filles font les bons draps »), ou le fait que l'on menaçait les enfants turbulents de les envoyer au couvent.
Ils disparurent avec le changement de mœurs sexuelles, mais aussi avec l'apparition de la machine à laver qui concurrençait leur activité de blanchisserie. Pour Frances Finnegan, « il est probable que l'avènement de la machine à laver y fut pour autant dans la fermeture des laveries que le changement de mentalité ».
On parla très peu de l'existence des foyers jusqu'à ce que, en 1993, un ordre de sœurs à Dublin vendit une partie de son couvent à un promoteur immobilier. Les restes de 155 pensionnaires, qui avaient été inhumées dans des tombes anonymes dans la propriété, furent exhumés et, à l'exception d'un corps, incinérés puis réinhumés dans une fosse commune. Ceci provoqua un scandale public à l'échelle régionale et nationale. Mary Norris, Josephine McCarthy et Mary-Jo McDonagh, toutes pensionnaires au foyer, témoignèrent sur leur sort. Le documentaire Sex in a Cold Climate, diffusé sur Channel 4 en 1998, interrogea d'anciennes pensionnaires des couvents de la Madeleine qui confirmèrent les incessants abus sexuels, psychologiques et physiques alors qu'elles étaient isolées du monde extérieur pour une durée indéterminée. Les conditions qui régnaient dans les couvents et les traitements subis par les pensionnaires ont été également traités dans le film The Magdalene Sisters (2002) de Peter Mullan, largement salué par la critique.
En mai 2009, la commission d'enquête sur la maltraitance des enfants en Irlande a publié un rapport de 2000 pages4 détaillant des dizaines de milliers de cas d'horribles sévices commis dans de nombreuses écoles, y compris dans les Couvents de la Madeleine.
Malgré la constitution d'une commission gouvernementale, toutes les demandes d'indemnisation des victimes sont restées lettre morte.
En Irlande, ces institutions prirent le nom de Marie-Madeleine, personnage de la Bible qui, selon la tradition catholique (confondant deux personnages des Evangiles en fait distincts) était une prostituée, s'étant repentie de ses péchés et devenant l'une des personnes les plus fidèles à Jésus. En Irlande, l'Église s'appropria rapidement le mouvement de Madeleine et les foyers, qui étaient prévus à l'origine pour de courts séjours, devinrent de plus en plus des institutions à long terme. Les pénitentes furent mises au travail, généralement dans des laveries. De même que Marie-Madeleine avait lavé les pieds du Christ en signe de pénitence, les pensionnaires devaient accomplir des travaux de blanchisserie, afin de laver symboliquement leurs péchés. Cette activité représentait en outre des rentrées d'argent nécessaires à la bonne marche et à l'entretien des couvents.
Au fur et à mesure que le mouvement prenait ses distances avec les idées qui furent à son origine, à savoir sortir des prostituées de la rue et les héberger car leur passé les empêchait de trouver un emploi, les foyers prirent un aspect de plus en plus carcéral. Les sœurs chargées de la surveillance des pensionnaires avaient pour instruction de les dissuader par n'importe quel moyen de tenter de quitter l'institution[réf. nécessaire] pour, au contraire, les encourager à entrer dans les ordres.
Les registres des foyers montrent que, au cours des premières années, de nombreuses femmes intégraient et quittaient l'institution de leur propre chef, parfois à plusieurs reprises. Dans son ouvrage Reform, Respite, Ritual: An Archaeology of Institutions; The Magdalen Society of Philadelphia, 1800-1850, Lu Ann De Cunzo indique que les pensionnaires cherchaient alors « un refuge à la maladie, la prison, une situation familiale désastreuse, les abus et de mauvaises circonstances économiques ».
À cause de leur passé de prostituées, les pensionnaires étaient considérées comme ayant besoin de faire pénitence :
« La femme qui n'a jamais connu la pollution d'une seule pensée malsaine, la femme dont l'âme vierge n'a jamais été traversée par l'ombre de la pensée d'un péché, la femme qui respire la pureté, l'innocence et la grâce, reçoit la femme qui respire l'odeur pestilentielle de l'enfer ! »1.
Jusque dans les années 1970, les pensionnaires étaient appelées « filles » et devaient s'adresser à toutes les sœurs en tant que « mère », indépendamment de leur âge, qu'il s'agisse de la mère supérieure ou d'une jeune novice qui n'avait pas encore prononcé ses vœux. Ce système permettait de maintenir les pensionnaires dans un état d'infériorité constant.
Pour maintenir l'ordre et une atmosphère monacale, les pensionnaires devaient observer un silence strict tout au long de la journée. « La règle du silence était un point fondamental de la vie de ces femmes et fut maintenue longtemps durant la seconde moitié du xxe siècle »2.
Les châtiments corporels étaient monnaie courante et les comportement de type auto-mutilation tout simplement ignorés :
« À un tempérament rebelle, souvent manifesté par le refus de s'alimenter, on répondra au mieux par le silence. Lorsqu'une fille réalise que personne ne prend garde ni ne s'émeut (tout du moins en apparence) de son jeûne forcé, le martyre qu'elle s'impose à elle même lui devient rapidement insupportable »3.
À mesure que le phénomène se répandit, il sortit du champ de la prostitution pour toucher également les mères célibataires, les jeunes filles dont le développement était retardé et les filles victimes d'abus. Certaines se sont retrouvées internées pour le simple fait qu'elles étaient considérées comme trop proches des garçons.[réf. nécessaire] Ceci se produisit à la même période où, en Grande-Bretagne et en Irlande, de nombreuses personnes considérées comme « handicapés sociaux » furent également internés dans des asiles et des foyers.
Les pensionnaires étaient souvent internées à la requête de membres de leur famille ou de prêtres. Celles qui n'avaient personne à l'extérieur susceptibles de venir les chercher y passèrent le reste de leur vie. Parmi elles, beaucoup ont fini par prononcer leurs vœux.
Dans une Irlande à la morale sexuelle conservatrice, les couvents de la Madeleine étaient une institution largement acceptée socialement jusqu'au cœur de la seconde moitié du xxe siècle siècle. En témoignent des expressions courantes, telles que le proverbe « bad girls do good sheets » (« les mauvaises filles font les bons draps »), ou le fait que l'on menaçait les enfants turbulents de les envoyer au couvent.
Ils disparurent avec le changement de mœurs sexuelles, mais aussi avec l'apparition de la machine à laver qui concurrençait leur activité de blanchisserie. Pour Frances Finnegan, « il est probable que l'avènement de la machine à laver y fut pour autant dans la fermeture des laveries que le changement de mentalité ».
On parla très peu de l'existence des foyers jusqu'à ce que, en 1993, un ordre de sœurs à Dublin vendit une partie de son couvent à un promoteur immobilier. Les restes de 155 pensionnaires, qui avaient été inhumées dans des tombes anonymes dans la propriété, furent exhumés et, à l'exception d'un corps, incinérés puis réinhumés dans une fosse commune. Ceci provoqua un scandale public à l'échelle régionale et nationale. Mary Norris, Josephine McCarthy et Mary-Jo McDonagh, toutes pensionnaires au foyer, témoignèrent sur leur sort. Le documentaire Sex in a Cold Climate, diffusé sur Channel 4 en 1998, interrogea d'anciennes pensionnaires des couvents de la Madeleine qui confirmèrent les incessants abus sexuels, psychologiques et physiques alors qu'elles étaient isolées du monde extérieur pour une durée indéterminée. Les conditions qui régnaient dans les couvents et les traitements subis par les pensionnaires ont été également traités dans le film The Magdalene Sisters (2002) de Peter Mullan, largement salué par la critique.
En mai 2009, la commission d'enquête sur la maltraitance des enfants en Irlande a publié un rapport de 2000 pages4 détaillant des dizaines de milliers de cas d'horribles sévices commis dans de nombreuses écoles, y compris dans les Couvents de la Madeleine.
Malgré la constitution d'une commission gouvernementale, toutes les demandes d'indemnisation des victimes sont restées lettre morte.