Olivier2 a écrit:A une époque où les fils étaient préférés aux filles, tous reconnaissent les qualités de Ruth, à tel point que les femmes du voisinage disent à Naomi que sa belle-fille vaut mieux pour elle que 7 fils. Ruth est une richesse pour la vie de Naomi. Étonnamment, ce sont les voisines qui donnent le nom à l’enfant : Obed.
Obed, le fils de Ruth n’est autre que le grand-père de David, ancêtre de Jésus. (Ruth 4: 15-17)
Olivier
[size=35]Ruth
Dictionnaire encyclopédique de la Bible de Augustin Calmet Bost[/size]
Femme moabite qui, ayant épousé Chélion, fils d’Elimélech et de Noémi, qui s’étaient retirés dans la terre de Moab, demeura quelque temps avec lui sans en avoir d’enfants. Noémi ayant perdu son mari et ses deux fils, et voulant s’en retourner à Bethléem, sa patrie, ses deux brus, qui étaient veuves, voulurent aussi la suivre dans son pays ; mais leur ayant remontré l’impuissance où elle se trouvait de les établir toutes deux, Orpha demeura dans la terre de Moab, et Ruth suivit Noémi à Bethléem (Ruth 1). Cela arriva sur la fin du temps des juges et sous le gouvernement d’Héli, si l’on en croit Josèphe. Les rabbins veulent que Booz, qui épousa Ruth, soit le même qu’Abesan, juge d’Israël, qui gouverna pendant sept ans, vers l’an du monde 2823, entre Jephté et Ahialon. La grande Chronique des Hébreux place cette histoire au temps d’Aod et de la servitude des Israélites sous Eglon, roi de Moab. D’autres la mettent sous Barach et Débora, d’autres sous Gédéon, d’autres sous Abimélech. Ussérius, que nous suivons, la place sous Samgar, environ six vingts ans après Josué. [Voyez Booz].
Noémi étant arrivée à Bethléem, se trouva réduite à une grande pauvreté, et Ruth alla glaner, afin d’amasser quelque chose pour vivre. Elle se rencontra par hasard dans le champ d’un riche bourgeois de Bethléem, nommé Booz, qui était parent d’Elimélech, son beau-père. Booz, étant venu pour voir ses moissonneurs, aperçut Ruth, loua son attachement à Noémi, sa belle-mère, lui dit qu’elle pouvait aller boire et manger avec ses gens, et ordonna à ceux-ci de laisser exprès quelque chose après eux, afin qu’elle trouvât une plus abondante glanure. Ruth s’en retourna le soir, et ayant raconté à Noémi ce qui lui était arrivé et les bonnes manières de Booz, qui l’avait même invitée de ne pas aller glaner ailleurs que dans son champ, Noémi bénit Dieu, qui avait mis ces sentiments dans le cœur de Booz, et lui apprit que cet homme était son parent.
Sur la fin de la moisson, Noémi dit à Ruth : J’ai dessein de vous établir et de vous procurer un repos solide. Allez cette nuit vous coucher aux pieds de Booz, qui doit aller ce soir pour vanner ses grains, et vous ferez ce qu’il vous dira. Ruth obéit, et ayant remarqué le lieu où Booz était allé se coucher, apparemment sous quelque arbre dans son champ, Ruth y alla aussi pendant la nuit et se mit à ses pieds. Booz s’étant éveillé et voyant quelque chose près de lui, eut peur ; et Ruth lui dit simplement : Je suis Ruth votre servante ; étendez votre manteau sur moi, parce que vous êtes mon proche parent. Booz lui dit qu’à la vérité il était son proche parent, mais qu’il y en avait un autre plus proche ; et que si celui-ci refusait de l’épouser, il la prendrait pour femme ; et s’étant levé de très-grand matin, avant qu’il fût jour, il remplit de froment le manteau de Ruth, et la renvoya vers Noémi.
Lorsqu’il fut jour, Booz alla à la porte de Bethléem, et ayant assemblé les anciens de la ville, il somma celui qui était le plus proche parent d’Elimélech d’épouser Ruth, veuve de Chélion, son fils. Cet homme ayant dit qu’il ne le pouvait, Booz lui répliqua : Renoncez donc à votre droit. Il le fit ; et Booz déclara qu’il l’épouserait volontiers. Ainsi Ruth devint femme de Booz, dont elle eut un fils nommé Obed, qui fut père d’Isaï et aïeul du roi David [Lisez le livre de Ruth, qui est si court et si beau. Voici les réflexions qu’a faites un écrivain protestant sur l’histoire de Booz et de Ruth.
« Les indigents, dit-il, les étrangers, les veuves et les orphelins avaient droit (Lévitique 9.9 ; 23.22 ; Deutéronome 24.19) de glaner pendant les moissons, de grappiller pendant les vendanges, et après les récoltes, celle surtout des olives, de cueillir les fruits oubliés parmi les feuilles. La législation de Moïse est sans nul doute la première qui ait pris quelque soin des pauvres ; cette gloire appartient à l’Écriture ; il fallait que le système précurseur de l’Évangile recommandât la charité. Que l’on compare sous ce rapport les législateurs païens à Moïse, et qu’on nous dise de quel côté est la supériorité. Il a fait pour les pauvres comme pour les esclaves tout ce que son siècle lui permettait de faire.
« Ces lois nous intéressent plus que celles qui donnaient à Booz le droit d’acquérir le domaine de Mahlon, et d’épouser sa veuve. Il paraît qu’il faut rapporter cette acquisition à la loi du rachat (Lévitique 25.25) qui ordonnait au plus proche parent de racheter un bien que l’indigence faisait vendre, et ce mariage, à celle du lévirat, dont l’institution remontait aux patriarches, et qui donnait pour époux à une veuve sans enfant son beau-frère (Deutéronome 25.5). Cependant l’application de ces lois à l’histoire de Booz n’est pas sans de grandes difficultés. D’abord il est certain que les femmes n’héritaient point de leurs maris (Nombres 27.8) ; d’où venait donc à Nahomi et à Ruth le bien qu’elles avaient vendu (Ruth 4.3) ou se proposaient de faire vendre ? Ensuite il semble que l’obligation d’épouser une veuve ne s’étendait qu’aux frères et non aux parents du défunt. De plus on ne voit pas que l’obligation de racheter le champ aliéné pour cause d’indigence entraînât celle d’épouser la veuve du possesseur (Deut 25.7). Enfin les formalités par lesquelles on constatait le refus d’un beau-frère de se conformer à la loi du lévirat ne sont point observées. Nous ne rapporterons pas les recherches auxquelles ces difficultés ont donné lieu. On suppose qu’Elimélec et Mahlon, mourant en terre étrangère, avaient fait donation de leurs biens à leurs femmes ; que l’usage avait étendu aux plus proches parents la loi du lévirat, qui, dans l’origine, n’était applicable qu’aux beaux-frères ; que par cette extension le même parent devait racheter le bien et épouser la veuve ; que cependant on était moins sévère sur les formalités à remplir envers un parent qu’envers le propre frère du défunt, et qu’ainsi le parent d’Elimélec, qui refuse la main de Ruth, n’a pas subi le traitement ignominieux que la loi prononçait. L’histoire de Ruth appartient au temps des juges ; cette période est celle où lsrael forme son état social ; le gouvernement et le culte n’étaient réguliers, et il est peu surprenant que la législation ait été quelquefois altérée.
« La formalité (Ruth 4.7) que remplit le parent d’Elimélec, de se déchausser, en cédant son droit à Booz, confirme la réflexion qui précède. Cet usage n’a aucun rapport avec celui que prescrivait la loi (Deut 25.9). L’origine en est inconnue, mais l’emblème est facile à saisir ; celui qui renonçait au privilége de racheter le bien détache son soulier et le remet à son subrogé, en signe qu’il se défait du droit de marcher dans ce champ, de fouler cette terre.
« On a examiné aussi pourquoi le parent d’Elimélec, après avoir annoncé tension de racheter le champ, se rétracte dès qu’il entend parler d’épouser Ruth, et l’on est réduit ici à deviner ; cet homme pouvait être époux et père, et peu riche, Ruth était pauvre ; il fallait soutenir Nahomi avec elle, et le moindre inconvénient de la polygamie était d’être dispendieuse.
« Un seul détail de la scène nocturne appartient à Booz (Ruth 3.14) ; il renvoie Ruth avant l’aube, avant qu’on puisse se reconnaître, afin, dit-il ; qu’on ne sache pas qu’une femme est entrée dans l’aire : On comprend quel parti l’incrédulité tire de cette circonstance ; la conduite de Ruth n’est-elle pas blâmable, puisque Booz prend soin de la tenir secrète ? La réponse selon nous est facile ; tout annonce dans Booz un strict observateur des lois de sa patrie ; il n’était pas le plus proche allié de Ruth ; il n’avait que le second droit ; il a voulu laisser son parent entièrement libre d’user des siens ; ce dernier l’aurait-il été, s’il avait su que Ruth s’était adressée à Booz plutôt qu’à lui ?
« Le caractère de ce vieillard est l’un des plus beaux de l’Écriture ; on y reconnalt sagesse, la circonspection d’un homme sur le retour de l’âge, et la noble sensibilité d’un cœur que les années n’ont point refroidi ; il estime, il aime, comme il fait le bien, avec réflexion, avec prudence. Sa piété est simple et habituelle ; c’est au nom de Dieu qu’il salue ses moissonneurs. Son exemple montre que l’homme vertueux est sensible à la vertu d’autrui ; touché du généreux dévouement de Ruth, sa bienfaisance lui sert à prouver son admiration ; il appartenait à l’une des principales familles de Juda, et n’a pas eu honte d’épouser en présence de son peuple la jeune étrangère qui avait glané dans ses champs. Il n’est personne à qui l’on puisse mieux appliquer cette image, que sa simplicité et sa justesse ont rendue célèbre, que la vieillesse du juste est le soir d’un beau jour. »
Dans l’histoire de Ruth, « tout est conforme aux mœurs d’un peuple qui commence, dit encore l’auteur que nous citons, aux habitudes d’un temps où le luxe et la grandeur sont encore dans les champs. Ce dernier point importe beaucoup à la justification de Ruth, car on s’attend d’ordinaire à l’entendre justifier, et avant d’admirer sa générosité, on demande à ses panégyristes de défendre sa pudeur et sa retenue ; mais cette prévention qui a cours contre elle et dont nous ne voulons pas chercher la source dans les plaisanteries d’une incrédulité honteuse, qui aimerait à voir l’exégèse devenir impudique, cette prévention ne viendrait-elle point de ce que notre imagination abusée se représente, presque malgré nous, l’entrevue de Ruth et de Booz sous des plafonds et des lambris ? C’est en plein air, c’est en présence de la nature, c’est sous le ciel resplendissant de l’Asie, c’est au milieu d’une troupe de moissonneurs dormant sur les javelles, qu’il faut suivre ta veuve de Mahlon, et là cette scène, telle que l’Écriture la raconte, n’a rien que tous les yeux ne puissent voir. L’action de Ruth est symbolique, comme son langage est figuré ; se coucher aux pieds du vieillard, c’était exprimer par un signe la même demande qu’elle lui adresse en ces termes, dont la touchante métaphore est aussi noble que simple : Etends le pan de ta robe sur ta servante. Les idées de relation intime, mais aussi de protection d’une part, et de soumission, d’humilité de l’autre, sont rendues également par ses actions et ses discours. Il s’agissait d’une alliance, et non d’une intrigue ; on ne recherche pas un hymen par une impudicité, et il y a aussi loin de Ruth à Thamar que de Booz à Juda. L’intérêt de Nahomi n’était pas de commencer par déshonorer sa belle-fille dans l’esprit d’un homme respectable, qui lui avait témoigné la plus haute estime. Si l’on s’obstine à s’étonner que Nahomi préfère cette voie, en apparence détournée, à une demande ouverte c’est que dans les mœurs du temps cette démarche n’avait rien d’inconvenant, rien d’étrange ; que par conséquent cette manière de s’y prendre était aussi bonne que toute autre ; que Ruth témoignait ainsi au vieillard une juste et noble confiance ; qu’il est des circonstances où une femme aime mieux qu’on la devine que d’avoir à s’expliquer ; enfin que dans un état social tel qu’alors celui des Hébreux, il était plus modeste et plus humble de venir ainsi se coucher en suppliante aux pieds de Booz, que d’aller en plein jour lui citer la loi et lui demander sa main. La pudeur a commencé sur la terre avec notre race ; elle est la même toujours ; mais ses formes ont changé et dépendent, non de ce que nous voyons, mais de ce que nous pensons ; de là vient qu’une imagination impure met de l’impudeur où il n’y en a pas, tandis que l’innocence rend tout innocent.
« Le dévouement de Ruth envers Nahomi est d’autant plus admirable que, selon les mœurs de l’époque, elle avait le droit de retourner au sein de sa propre famille, comme le prouve le renvoi de Thamar par Juda (Genèse 38.11).
« Nous ne reviendrons pas sur les questions de droit, qui concernent Booz plus encore que son épouse. L’extraction de Ruth est inconnue, et les fables débitées à ce sujet n’ont ni importance ni fondement ; il est possible toutefois qu’elle sortit de sang israélite, issue de Jokim ou de Saharajim. La date de ces faits, qui remontent au temps des juges, est incertaine ; on ne sait quel est l’auteur de ce livre, et nous n’entrerons point ici dans l’examen de la généalogie incomplète qui le termine. Remarquons seulement qu’il ne, manque aucune beauté à l’antiquité sacrée ; la vie nomade remplit la Genèse ; l’établissement d’une religion et d’une législation, le reste du Pentateuque ; une conquête, le livre de Josué ; les commencements de l’état social, celui des juges ; et voici, dans le livre de Ruth, la vie pastorale dans toute sa beauté. Aucun peuple ne possède un ensemble de monuments pareils, et l’histoire d’une jeune fille de Moab sert de complément à celle des patriarches, des prophètes et des rois.
« La formule de serment ou d’imprécation dont Ruth se sert dans ses promesses à Nahomi est une des plus anciennes ; l’Écriture offre un grand nombre d’exemples analogues (2 Samuel 3.9-35) ; (1 Rois 11.23 ; 2 Rois 6.31).
« Le caractère de Ruth est un admirable mélange de candeur et de constance, de générosité et de modestie ; elle se résigne à partager la pauvreté d’une vieille parente, comme si elle faisait l’action la plus simple, et pour comble elle est soumise à. Nahomi, quoique celle-ci lui doive tout. Il est utile de remarquer qu’elle n’avait aucune idée de l’avenir brillant qui l’attendait, lorsqu’elle sortit de sa patrie pour s’attacher à sa belle-mère. Un dévouement pareil, qui consent à toutes les privations, et qui recommence en quelque sorte chaque jour, vaut bien mieux que ce qu’on nomme une belle action ; ce n’est pas un trait de vertu, c’est la vertu même, et l’antiquité profane, plus riche peut-être en piété filiale qu’en tout autre héroïsme, n’a rien qui soit comparable à celle de la jeune Moabite. »]
Le livre de Ruth, qui contient l’histoire dont nous venons de donner le précis, est placé dans les Bibles entre le livre des Juges et le premier livre des Rois, comme étant une suite du premier et une introduction au second. Saint Jérôme nous apprend que les Juifs le joignaient au livre des Juges, parce que l’histoire qu’il renferme arriva au temps d’un des juges d’Israël (Judith 1.1) ; et plusieurs anciens Pères ne font aussi qu’un livre des Juges et de Ruth. Mais les nouveaux Juifs, dans leurs Bibles, placent ordinairement après le Pentateuque les cinq Megilloth, qui sont : 1° le Cantique des Cantiques ; 2° Ruth ; 3° les Lamentations de Jérémie ; 4° l’Ecclésiaste ; et 5° Esther. Quelquefois Ruth est mis le premier des cinq, quelquefois le second et quelquefois le cinquième.
Le but de l’auteur de ce livre est de nous faire connaître la généalogie de David ; et il y a toute apparence que c’est le même auteur qui a composé le premier livre des Rois, lequel, ne pouvant pas commodément placer celle généalogie de David sans trop déranger son récit, a mieux aimé la donner à part. L’écrivain remarque à la tête de cet ouvrage que l’histoire qu’il va raconter arriva au temps que les juges gouvernaient. Ils ne gouvernaient donc plus de son temps. De plus, il parle de David à la fin de son livre ; il l’a donc écrit au plus tôt sous le règne de David.
La canonicité de cet ouvrage n’est pas contestée. Nous avons marqué ci-devant qu’on n’était pas d’accord sur l’époque de l’histoire que l’on y raconte. Ruth, Moabite, se rencontre dans la généalogie de notre Sauveur. (Matthieu 1.5).